Master 2 de Recherche en Santé Publique –Option Epidémiologie Université Paris

Master 2 de Recherche en Santé Publique –Option Epidémiologie Université Paris Sud/Paris-Saclay Avoir été témoin de violences inter-parentales pendant son enfance : état de santé global et santé mentale à l’âge adulte. - Données du Baromètre Santé 2017- Noémie ROLAND Année Universitaire 2018-2019 Sous la direction de Virginie Ringa INSERM U 1018 - Equipe 7 - Sexualité et Soins Hôpital Paul Brousse, 94807 Villejuif Conseil et relecture Dr Marie-Josèphe Saurel-Cubizolles Equipe INSERM UMR1153 - EPOPé Convention avec M. Christophe Léon et M. Enguerrand du Roscoät, Unité Santé Mentale à Santé Publique France, Hôpitaux de Saint-Maurice. 2 REMERCIEMENTS Je remercie chaleureusement Virginie Ringa pour son soutien, sa rigueur et sa disponibilité tout au long de ce travail de mémoire. Sa bienveillance et ses conseils ont grandement contribué à me donner l’envie de poursuivre plus loin mes études en épidémiologie. Je remercie également Marie-Josèphe Saurel pour sa relecture attentive de mes écrits. Avoir bénéficié de son expertise et de ses réflexions a été un privilège. Je lui renouvelle ici toute mon admiration pour son travail. Un grand merci à Santé Publique France de m’avoir autorisée à utiliser leur base de données. Je remercie particulièrement Christophe Léon, Enguerrand du Roscoät et Audrey Sitbon pour leur disponibilité et leurs encouragements. Merci à toute l’équipe INSERM U1018 pour leur aide et leur accueil inestimables : Henri, Guillemette, Lorraine, Fatoumata, Sabine, Dina, Kevin, Mireille. Je remercie Laurence Meyer pour sa bienveillance et son écoute quant aux difficultés rencontrées cette année, ainsi que l’ensemble des enseignants du M2 pour la qualité de leur enseignement. Merci à Amin et Myriam. Si vous n’aviez pas été là pour m’empêcher d’abandonner au cœur de la tempête, ce travail n’aurait pas vu le jour. Longue et belle vie à vous. Enfin, un merci particulier à mon premier fan, qui est devenu spécialiste des violences intrafamiliales à force de me relire et de me faire répéter depuis des années. Sans ton soutien logistique et affectif sans faille, cette année n’aurait pas été possible. 3 ABREVIATIONS ATCD : Antécédents EDC : Épisode Dépressif Caractérisé HAS : Haute Autorité de Santé IMC : Indice de Masse Corporelle INED : Institut National d’Études Démographiques INSEE : Institut National de la Statistique et des Études Économiques MESG : Mauvais État de Santé Global OMS : Organisation Mondiale de la Santé ONED : Office Nationale de l’Enfance en Danger PS : Pensées Suicidaires RRa : Risque relatif Ajusté RR : Risque Relatif VIP : Violences Inter-Parentales 4 RÉSUMÉ Avoir été témoin de violences inter-parentales pendant son enfance : état de santé global et santé mentale à l’âge adulte. Données du Baromètre Santé 2017. Noémie ROLAND Introduction : Chaque année, en France, on estime à 143 000 le nombre d’enfants vivant dans un foyer où sévissent des violences entre leurs parents. L’exposition à ces violences est une maltraitance à part entière, avec un impact potentiellement négatif sur la santé des adultes qui en ont souffert enfants. Les objectifs de ce travail sont d’étudier le lien entre le fait d’avoir été témoin de violences inter-parentales (VIP) et l’état de santé global, la présence d’un épisode dépressif caractérisé (EDC) et la présence de pensées suicidaires dans les douze derniers mois. Population et Méthodes : Les données sont issues de l’enquête téléphonique du Baromètre Santé 2017 sur un échantillon représentatif de 12 876 personnes (49,5 % d’hommes, 50,5 % de femmes) âgées de 18 à 49 ans. L’association entre l’antécédent d’exposition aux VIP dans l’enfance et un mauvais état de santé global (MESG), la présence d’un EDC et la présence de pensées suicidaires dans les douze derniers mois a été estimée par des risques relatifs en utilisant un modèle de Poisson avec variance robuste, et en stratifiant sur le sexe. Deux analyses de sensibilité ont été réalisées en excluant les moins de 25 ans, et en excluant les personnes déclarant un antécédent de violence sexuelle dans la vie entière. Résultats : Sur les 12 876 personnes interrogées, 417 (3,8 %) ont déclaré un mauvais état de santé général, 1429 (11,5 %) ont eu un EDC, 590 (4,9 %) ont eu des pensées suicidaires dans les 12 derniers mois, 3003 (24,5 %) ont déclaré avoir été exposées à des VIP dans l’enfance. Après ajustement, il existait un lien significatif entre avoir été exposé à des VIP et : déclarer un MESG pour les hommes (RR = 1,59 [1,04-2,41], p=0,030), avoir présenté un EDC dans l’année pour les 2 sexes (RR hommes = 1,62 [1,28-2,06], p<0,001, RR femmes = 1,80[1,54-2,11], p<0,001), avoir eu des pensées suicidaires dans l’année pour les 2 sexes (RR hommes = 1,78 [1,26-2,51], p<0,001, RR femmes = 2,40 [1,81-3,18], p<0,001). Les analyses de sensibilité n’ont pas montré de modification de ces associations. Conclusion : L’existence de liens entre l’exposition aux VIP et ces trois indicateurs de santé à l’âge adulte viennent renforcer l’importance de la prise de conscience politique actuelle autour des enfants co-victimes de violences conjugales et la nécessité d’études longitudinales pour évaluer leur état de santé physique et mentale à l’âge adulte. 5 INTRODUCTION 1. CONTEXTE L’expression « enfant témoin » désigne les enfants qui vivent dans un foyer où sévissent des violences conjugales, que ces violences soient psychologiques, physiques, sexuelles et/ou économiques. Souvent également appelés « enfants exposés à la violence conjugale » notamment dans la littérature internationale, ils ont été renommés depuis 3 ans en France comme « enfants co-victimes de la violence conjugale »1. Ces trois dénominations renvoient au fait qu’un enfant qui vit dans un foyer où sévissent des violences conjugales peut être un témoin direct auditif et/ou visuel des violences, un témoin indirect (en constatant les conséquences psychologiques et physiques des violences sur le parent victime par exemple, ou en entendant des conversations a posteriori), et/ou un objet de manipulation par le parent agresseur (qui peut s’en servir comme levier de menace, et ce bien au-delà d’une séparation éventuelle entre les parents). L’arrivée ou la présence d’un enfant dans un foyer n’est pas en effet un facteur protecteur pour le conjoint violenté, bien au contraire : de nombreuses études anglo-saxonnes montrent que les violences conjugales sont plus fréquentes et plus sévères pendant la grossesse2. Avoir un enfant, surtout en bas âge, est d’ailleurs reconnu comme un facteur de risque de violence conjugale pour les femmes3. Par ailleurs, l’enfant exposé aux violences inter- parentales (VIP) peut également être victime directe de maltraitances (psychologiques, physiques, sexuelles ou encore de négligences) par le parent violent dans 10 %4 à 40 %5 des cas selon les études. Enfin, l’enfant qui vit dans un foyer violent est en danger de mort : en 2017 en France, 25 enfants mineurs ont été tués par le parent violent, de façon concomitante ou non au meurtre du parent victime6. Dans le monde, le nombre d’enfants témoins de VIP est estimé entre 133 et 275 millions chaque année7. En France, selon l’enquête Cadre de Vie et Sécurité 2010-20158, environ 1 % des enfants de moins de 18 ans vivent dans un foyer où une femme a déclaré des violences conjugales physiques et/ou sexuelles dans l’année précédente, soit une estimation de 143 000 enfants français exposés chaque année, dont 42 % ont moins de 6 ans. Les travaux scientifiques sur les enfants témoins de VIP, dont les premiers articles datent de 19759,10 ont été surtout consacrés pendant 30 ans à l’étude de la reproduction de la violence à l’âge adulte et/ou de la répétition des situations de victimation. Ce n’est que récemment, depuis 2001 en France notamment grâce au rapport Henrion⁴ et à l’Enquête Nationale sur les Violences Envers les Femmes en France (ENVEFF)³, que les conséquences de l’exposition aux VIP sur la santé 6 physique et mentale des enfants et des adolescents ont été étudiées. Ces conséquences sont majeures, avec des symptômes et des pathologies comparables à ceux présentés par les enfants victimes de maltraitances directes et de négligence : « La violence dont l’enfant est témoin a les mêmes effets sur lui que s’il en était victime »⁴. La Haute Autorité de Santé considère depuis 2014 que l’exposition aux VIP, même en l’absence de violences dites « directes » sur l’enfant, est une maltraitance à part entière11 qui doit faire donc l’objet d’un signalement obligatoire auprès de la Cellule de Recueil des Informations Préoccupantes (CRIP) par le médecin12. Les politiques ont également pris conscience de la gravité du sujet des enfants témoins, à l’international (Conseil de l’Europe13, US National Center on Child Abuse14) et en France (rapport de l’ONED15). Il est maintenant reconnu que conjugalité et parentalité sont indissociables : « Toute violence faite aux femmes est une violence faite aux enfants »16. Un premier plan triennal interministériel de lutte contre les violences faites aux enfants a été lancé en 2017, il mentionne explicitement le risque d’exposition aux VIP : « Les violences au sein du couple ont des conséquences graves, parfois fatales, sur les enfants qui y sont exposés et en deviennent ainsi pleinement victimes »17. Malgré cette prise de conscience médicale et politique, peu de travaux en France uploads/Sante/ avoir-ete-temoin-de-violences-inter-parentales-pendant-son-enfance-etat-de-sante-global-et-sante-mentale-a-l-x27-age-adulte 2 .pdf

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  • Publié le Sep 01, 2022
  • Catégorie Health / Santé
  • Langue French
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