Chap itre 9 67 Réanimation © 2020, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Ch

Chap itre 9 67 Réanimation © 2020, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Chap itre 9 PL AN DU C H A P IT R E Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 67 Le sevrage de la ventilation mécanique : du ressenti à une démarche étayée . . . . . . . . . . . . . . . . . . 67 Stratégies du sevrage de la ventilation mécanique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 70 Introduction La ventilation mécanique invasive (VM) est utilisée quoti- diennement en réanimation. Ses indications recouvrent des situations cliniques diverses allant de la gestion postopératoire d'une chirurgie lourde à la détresse respiratoire aiguë hypoxé- mique. Cette suppléance d'organe, souvent indispensable, reste pourvoyeuse de complications, au premier rang desquelles se placent les pneumopathies acquises sous VM [1, 2]. Dès l'intubation, la prise en charge du clinicien doit tenir compte de l'existence de deux écueils potentiels : prolonger indûment la ventilation invasive ou, au contraire, extuber le patient trop précocement, avant que celui-ci ne soit prêt à respirer sans assistance ou à protéger et drainer ses voies aériennes. Dans ces deux cas, le patient serait alors exposé à des risques évolu- tifs propres [1, 3, 4]. En pratique, le sevrage de la VM se définit comme le processus aboutissant à l'arrêt de l'assistance venti- latoire (« déventilation ») et l'ablation de la prothèse endotra- chéale (extubation le plus souvent, parfois décanulation) ayant permis celle-ci. Dans ces conditions, la totalité du travail et de la commande respiratoires doit donc pouvoir être transférée du ventilateur au patient, et celui-ci doit être apte à gérer la protection et, si nécessaire, le drainage de ses voies aériennes. Il a été rapporté que la période du sevrage peut représen- ter une part importante de la durée totale de VM, allant de 40 % à plus de 50 % de celle-ci selon les populations consi- dérées [5–8]. De ce fait, cette période peut contribuer forte- ment aux complications liées à tout séjour en réanimation, ainsi qu'au coût élevé des soins de réanimation [5, 9]. Pour toutes ces raisons, le sevrage de la VM est une phase cruciale du séjour en réanimation, et doit constituer une préoccupa- tion quotidienne pour le clinicien. Le sevrage de la ventilation mécanique : du ressenti à une démarche étayée La thématique du sevrage de la VM a fait l'objet d'une abon- dante recherche scientifique depuis plus de vingt ans. Ainsi, la question posée dans un éditorial du milieu des années quatre-vingt : « Is weaning an art or a science ? » [10], a pu trouver en partie sa réponse à partir des nombreux travaux publiés depuis. Il est désormais considéré que les progrès réalisés dans ce domaine ont fait évoluer le sevrage de l'application d'un art à celle d'une science [11]. La Société de réanimation de langue française (SRLF) a contribué à cette évolution en participant pleinement à une recomman- dation formalisée d'experts (RFE) francophone publiée en 2017 [12] et à deux conférences de consensus [5, 13]. Pour autant, une récente enquête prospective européenne montre l'existence d'une importante variabilité dans notre conduite réelle du sevrage de la ventilation mécanique [14]. De quoi s'agit-il ? Quand commence-t-il ? Le sevrage de la VM est défini par l'ensemble des mesures conduisant à ce que le patient respire de nouveau sans assistance mécanique. L'initiation du sevrage ne peut se concevoir qu'après une amélioration suffisante de la rai- son ayant conduit à devoir intuber et ventiler le patient. Sevrage de la ventilation mécanique : définitions et stratégies G. Béduneau, D. Carpentier, C. Girault, D. Boyer, T. Pham (Chapitre 81 du traité complet) 68 Partie 3. Pathologie respiratoire Cependant, cette initiation peut être optimisée par diverses stratégies appliquées à différents temps de la prise en charge du patient, y compris avant même que sa stabilisation cli- nique ne soit obtenue. Le clinicien doit ainsi rechercher à parfaire les conditions de sédation-analgésie dès l'admission du patient, avec pour principe d'utiliser la dose minimale efficace selon les objectifs visés et d'évaluer au quotidien la nécessité ou non de son maintien. Il n'est plus envisageable d'aborder le sevrage de la VM sans prendre en compte la stratégie de sédation-désédation appliquée [15]. Il doit aussi chercher à favoriser, dès que la balance bénéfice-risque semble en faveur, les modes de ventilation assistés de façon à préserver une activité ventilatoire spontanée [16]. Ceci a pour but de limiter les lésions diaphragmatiques induites par la ventilation mécanique [17], notamment l'atrophie induite par le ventilateur dès 48 heures de VM, en particulier avec les modes totalement contrôlés [18, 19]. Au-delà du simple choix du mode ventilatoire se développe le concept de ventilation protectrice pour le diaphragme, afin de réduire les conséquences potentiellement néfastes des réglages du ventilateur, regroupées sous la notion de « diaphragmatic myotrauma » [20]. Dans ces conditions optimisées, le processus de sevrage pourra donc être d'autant plus rapidement initié. Néanmoins, l'introduction de plus en plus précoce et systématique des modes assistés de ventilation rend plus complexe et discu- table le repérage de l'initiation du sevrage. La problématique principale à ce stade est donc de repérer le patient potentiel- lement prêt à être sevré. Nous pouvons schématiquement considérer que le début réel de la période de sevrage de la VM est marqué par l'épreuve de ventilation spontanée (VS), réalisée selon des modalités bien précises (cf. infra), lorsque des critères de sevrabilité sont remplis [5] (fig. 81.1). Il peut néanmoins exister des « situations particulières de sevrage » que nous développerons plus loin. De la déventilation à l'extubation D'une façon générale, le sevrage de la VM est associé à l'abla- tion de la prothèse endotrachéale qui avait permis l'accès aux voies aériennes supérieures (VAS) et l'application de la ventilation artificielle. Il s'agit dans une très grande majorité des cas d'une sonde d'intubation, d'où l'utilisation préféren- tielle du vocable « extubation ». Parfois cette prothèse endo- trachéale est une canule de trachéotomie. La « déventilation » et l'extubation représentent des étapes, certes très complé- mentaires, mais qui doivent être clairement distinguées, et probablement d'autant plus que le patient est ventilé via une canule de trachéotomie. En effet, des mécanismes d'échec potentiellement spécifiques à chacune de ces étapes existent. Strictement, un patient s'avère « déventilable » dès qu'il est en mesure d'assumer seul, sans aucune assistance, sa demande et ses besoins ventilatoires. Il peut pour autant ne pas être « extubable » (ou le cas échéant « décanulable »), notamment s'il n'est pas en mesure de protéger suffisamment ses voies aériennes ou de drainer correctement ses sécrétions tra- chéobronchiques [21]. Ces situations peuvent se rencontrer en fonction du niveau de conscience du patient (sédation, atteinte neurologique centrale…), en cas de troubles de la déglutition [22] ou bien dans un contexte de toux insuf- fisamment efficace [23]. De telles situations doivent donc être appréhendées avant même l'extubation. Malgré une meilleure connaissance des mécanismes d'échec du sevrage/ extubation, il existe encore des circonstances où la capacité à respirer sans prothèse endotrachéale peut s'avérer diffici- lement évaluable avant l'extubation. L'obstruction des VAS post-extubation, se révélant le plus souvent par une dyspnée laryngée (dont la prévalence varie de 38 % à 65 % des cas selon les études), représente ainsi une cause possible d'échec d'extubation [24, 25]. Dans une étude monocentrique com- portant un examen endoscopique systématique en post- extubation, Tadié et al. [26] apportent d'importantes données concernant la fréquence des lésions anatomiques observées. Néanmoins, l'obstruction des VAS post-extubation peut être utilement dépistée par la réalisation d'un test de fuites, sans en méconnaître ses limites [27], et à condition de l'intégrer dans une stratégie thérapeutique visant à proposer une cor- ticothérapie préventive dans des populations à risque identi- fiées [28]. Ainsi, dans ce contexte d'une littérature contrastée, tout en rappelant la faible valeur prédictive positive du test de Admission Sortie Correction des défaillances Recherche des critères de sevrabilité Éléments du prérequis réunis Épreuve(s) de ventilation spontanée Extubation Évolution postextubation Fig. 81.1 Parcours schématisé du processus de sevrage d'un patient sous VM. D'après [5]. Chapitre 9. Sevrage de la ventilation mécanique : définitions et stratégies 69 1 https://www.esicm.org/research/trials/trials-group-2/wean-safe/ fuite, les auteurs de la RFE francophone sur l'extubation [12] proposent la réalisation d'un test de fuites avant extubation lorsqu'un patient présente des facteurs de risque de dyspnée laryngée (sont retenus dans cette RFE le sexe féminin, l'intu- bation par voie nasale, la sonde d'intubation de gros calibre par rapport à la taille du patient, la notion d'intubation diffi- cile, traumatique ou prolongée). Dans cette même RFE, si le test de fuites est en faveur d'un risque d'obstruction laryn- gée, une corticothérapie systémique est préconisée à la dose de 1 mg/kg d'équivalent prednisolone à débuter au moins 6 heures avant l'extubation. Finalement, il existe toujours un risque d'échec de uploads/Sante/ ch-81.pdf

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  • Publié le Jan 10, 2022
  • Catégorie Health / Santé
  • Langue French
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