Choc septique JP Carpentier G Pouliquen R Pétrognani Résumé. – Le choc septique

Choc septique JP Carpentier G Pouliquen R Pétrognani Résumé. – Le choc septique reste à l’origine d’une mortalité importante en dépit des progrès de la réanimation et de l’antibiothérapie, puisqu’elle peut atteindre 70 à 90 % lorsqu’il est associé à une défaillance multiviscérale. Les bacilles à Gram négatif sont encore le plus souvent en cause, avec une mortalité d’environ 40 % au cours de états infectieux graves. L’augmentation de la fréquence des infections nosocomiales et le rôle croissant des cocci à Gram positif sont des facteurs qui permettent d’expliquer un certain nombre des échecs thérapeutiques. Ces dernières années ont été marquées par une évolution des connaissances sur la physiopathologie des états infectieux graves et du choc septique. Ainsi, si le sepsis représente la réponse systémique normale à une infection, celle-ci peut évoluer vers des désordres hémodynamiques et viscéraux qui sont la conséquence de la libération de toxines microbiennes et de la réponse de l’organisme à cette agression. Actuellement, des efforts doivent être faits dans le domaine de la prévention (type de matériel, technique d’implantation et d’entretien des cathéters, antibioprophylaxie et asepsie des gestes chirurgicaux). La biologie moléculaire et cellulaire permet depuis plusieurs années une nouvelle approche thérapeutique du choc septique et devrait permettre d’ouvrir d’autres voies thérapeutiques. Les premiers essais ont été décevants, mais des espoirs existent, par exemple, dans le domaine des molécules antiadhésion (anticorps anti-E-sélectine et anti-CD11/CD18), des radicaux libres, des prostaglandines, des protéases, du système coagulation-fibrinolyse et des médiateurs lipidiques. © 2001 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés. Mots-clés : choc septique, catécholamines, corticoïdes, hémofiltration, anti-endotoxines, antimédiateurs. Introduction Ces dernières années ont été marquées par une évolution des connaissances des mécanismes physiopathologiques des états infectieux graves (EIG) et du choc septique. Si le sepsis représente la réponse systémique normale à une infection, celle-ci peut évoluer vers des désordres hémodynamiques et viscéraux qui sont la conséquence de la libération de toxines microbiennes et de la réponse de l’organisme à cette agression. En dépit des progrès de la réanimation et de l’antibiothérapie, le choc septique, en particulier à bactéries à Gram négatif, représente encore une source importante de morbidité et de mortalité. DÉFINITIONS Depuis 1992, grâce aux travaux d’un groupe d’experts de l’American College of Chest Physicians et de la Society of Critical Care Medicine, il existe un consensus sur la définition des états septiques graves [15]. Face à de nombreuses agressions (pancréatite, polytraumatisme, choc hémorragique, hypoxémie sévère…), l’organisme répond par une réaction inflammatoire systémique. Ce syndrome inflammatoire systémique (SIS) ou systemic inflammatory response syndrome (SIRS), se définit par l’existence de deux ou plus des signes suivants : Jean-Pierre Carpentier : Professeur agrégé, chef de département. Gilbert Pouliquen : Spécialiste des hôpitaux des Armées. Roland Pétrognani : Spécialiste des hôpitaux des Armées. Département d’anesthésie-réanimation-urgences, hôpital d’instruction des Armées Laveran, 13998 Marseille-Armées, France. – température supérieure à 38 °C ou inférieure à 36 °C ; – fréquence cardiaque (FC) supérieure à 90 battements·min-1 ; – fréquence respiratoire (FR) supérieure à 20 cycles·min-1 ou une pression partielle en gaz carbonique (PaCO2) inférieure à 32 mmHg ; – nombre de leucocytes soit supérieur à 12 000·mm-3, soit inférieur à 4 000·mm-3, soit plus de 10 % de formes immatures. Ces modifications doivent être apparues récemment, en l’absence d’autres causes, en particulier de chimiothérapie aplasiante. Le terme de sepsis correspond à un SIRS secondaire à une infection bactériologiquement confirmée. Plusieurs états cliniques reflétant le degré de sévérité du sepsis ont été définis. Le sepsis grave ou severe sepsis, est un sepsis associé à au moins une dysfonction d’organe correspondant à une anomalie de perfusion telle que pression artérielle systolique (PAS) inférieure à 90 mmHg ou diminuée de 40 mmHg par rapport aux chiffres habituels, augmentation des lactates, diurèse inférieure à 0,5 mL·kg-1 pendant au moins 1 heure, altération de la conscience, hypoxémie inexpliquée, coagulopathie. Le choc septique est un sepsis grave associé à une hypotension résistant à une expansion volémique apparemment bien conduite et/ou nécessitant l’emploi d’agents cardio- et/ou vasoactifs. Conséquence de l’efficacité des techniques utilisées en soins intensifs, l’évolution défavorable d’un processus infectieux et/ou inflammatoire se traduit de plus en plus souvent par une dysfonction progressive des différents organes, réalisant un syndrome de défaillance multiviscérale (SDMV) ou multiple organ dysfonction syndrome, dont la définition retenue est la présence Encyclopédie Médico-Chirurgicale 8-003-R-10 8-003-R-10 Toute référence à cet article doit porter la mention : Carpentier JP, Pouliquen G et Pétrognani R. Choc septique. Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), Maladies infectieuses, 8-003-R-10, 2001, 13 p. d’altération de la fonction de divers organes chez un patient dont l’homéostasie ne peut être maintenue sans intervention. ÉPIDÉMIOLOGIE En Europe occidentale, on estime que sur les 400 à 500 000 cas d’EIG diagnostiqués annuellement, 40 à 70 % évoluent vers un choc septique. Les germes à Gram négatif entraînent une mortalité d’environ 40 % des EIG, ce qui représente 80 000 cas/an aux État- Unis [83]. La mortalité peut atteindre 70 à 90 % lorsque un état de choc s’associe à une défaillance multiviscérale [27, 31, 53, 69, 107, 132, 133]. Physiopathologie MÉCANISMES DE DÉFENSE À partir de la pénétration dans l’organisme d’un bacille à Gram négatif ou d’un de ses dérivés membranaires lipopolysaccharidiques (LPS) (endotoxines), d’un coque à Gram positif ou de son exotoxine (toxic shock syndrome du Staphylococcus aureus), d’une levure ou même d’un parasite (Plasmodium falciparum), il y a activation des systèmes de défense de l’organisme dont les actions sont complexes et intriquées. Les mécanismes qui conduisent de l’état septique simple vers un état de choc et une défaillance multiviscérale sont encore mal expliqués. Certains sujets vont développer une réponse inflammatoire adaptée et vont être capables de contrôler l’infection et de guérir [96]. D’autres vont avoir une réponse inadaptée, soit que l’agression est trop importante pour les possibilités de défense, soit que les systèmes de défenses sont insuffisants face à une agression. Ces sujets vont être incapables de contrôler l’infection et l’évolution spontanée vers un état de choc et une défaillance multiviscérale est inéluctable. Dans d’autres situations, la réponse inflammatoire peut dépasser le niveau nécessaire pour contrôler l’infection, et c’est cette réaction excessive qui est à l’origine d’effets délétères pour l’organisme. Les systèmes de défense font intervenir des cellules et des médiateurs humoraux et cellulaires pro-inflammatoires. Un rôle important est attribué aux cytokines. Le tumour necrosis factor (TNF), synthétisé par les monocytes, mais aussi par les lymphocytes, les cellules endothéliales, les cellules musculaires lisses vasculaires, les cellules de Kupffer, est libéré 45 à 60 minutes après le début du choc septique avec un pic de sécrétion à la 90e minute. Une de ses cibles est le polynucléaire, même s’il est capable d’agir en l’absence de polynucléaire, comme chez les patients leucopéniques. Le TNF favorise l’adhésion des polynucléaires par l’intermédiaire de son action sur les cellules endothéliales qui synthétisent un facteur chémotactique. Il favorise également leur propriété de phagocytose et la libération de radicaux libres et d’enzymes lysosomiales. Le TNF stimule la production d’interleukine (IL) 1, d’IL6, de platelet activating factor (PAF), de la prostaglandine E2, et entraîne la libération d’adrenocorticotrophic hormone (ACTH), de cortisol, de thyroid stimulating hormone (TSH), de growth hormone (GH) et de glucagon. Le TNF favorise la vasodilatation, l’œdème intracellulaire par abaissement du potentiel transmembranaire, l’augmentation de la perméabilité capillaire, l’ischémie du tube digestif, des surrénales et des tubules rénaux. Enfin, il active le facteur XII, favorise la fibrinolyse, la prolifération des fibroblastes, diminue la réponse artérielle à la noradrénaline et augmente le turnover des acides gras libres. La sécrétion de TNF n’est pas continue, ce qui en pratique permet d’expliquer la réapparition des signes cliniques au cours de l’évolution et les difficultés de le mettre en évidence dans des états septiques vus tardivement. L’IL1, sécrétée après le TNF, a un rôle majeur dans la stimulation des lymphocytes T et la production d’IL2, IL4, IL5, IL6 et IL8. Elle augmente la production de TNF et, en synergie avec le TNF, favorise l’adhésion des polynucléaires. De plus, elle augmente la production médullaire des polynucléaires, favorise leur migration et stimule la libération du contenu des polynucléaires (dérivés oxygénés et enzymes protéolytiques). L’IL1 a une action cytotoxique sur les cellules endothéliales, ainsi qu’une puissante action procoagulante par inhibition de l’activateur du plasminogène (t-PA). Elle augmente la perméabilité capillaire, stimule la prolifération des cellules musculaires lisses et entraîne une vasodilatation avec diminution de la réponse de la paroi artérielle à la noradrénaline. Enfin, elle augmente la température, la production de l’ACTH, du cortisol, la synthèse des protéines inflammatoires, et active la phospholipase A2. L’interféron (IFN) est produit par les lymphocytes T4, T8 et les cellules natural killer (NK), en présence d’IL1 et d’IL2, et en réponse à des antigènes d’origine virale ou bactérienne. Il potentialise les effets et la production de TNF et favorise l’expression des antigènes du complexe majeur d’histocompatibilité de classes I et II. L’IL6, sécrétée par les monocytes, soit directement par action d’une endotoxine bactérienne, soit par l’intermédiaire du TNF ou de l’IL1, est responsable d’une hyperthermie. De plus, elle stimule les lymphocytes uploads/Sante/ choc-septique.pdf

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  • Publié le Fev 27, 2022
  • Catégorie Health / Santé
  • Langue French
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