Dossier pédagogique Du 22 septembre 2012 au 6 janvier 2013 Musée des Arts Ancie

Dossier pédagogique Du 22 septembre 2012 au 6 janvier 2013 Musée des Arts Anciens du namurois p .2 Musée Félicien Rops p . 12 Maison de la culture p . 22 province de namur 2 3 Pulsion[s]. Images de la folie du Moyen Âge au siècle des Lumières. « Étymologiquement, le terme folie renvoie en français à la notion de vide : le cerveau du fou est creux, rempli d’air à l’image d’un soufflet de forge (follis en latin). La notion de folie est floue et protéiforme. Elle désigne de manière générale la perte de raison. Le terme garde cependant une connotation morale (en s’opposant à la sagesse) et évoque aussi la transgression des normes »1. On connaît certains personnages médiévaux célèbres pour leur folie. Dans la littérature médiévale par exemple, des chevaliers éperdus d’amour, tel Tristan qui feint la folie pour rejoindre Yseult sa bien-aimée, ou encore Yvain, Lancelot… Le Roi Charles VI (1380-1422) dit « le roi fou », est quant à lui connu pour ses accès de fureur et ses épisodes de grande folie. Jusqu’au 11e siècle, la notion de folie n’évolue guère par rapport à sa prise en charge philosophique et médicale connue dans l’Antiquité… Il faut attendre plus ou moins 1100 et la traduction en Occident des grands traités, tels ceux d’Hippocrate ou de Galien, pour parler à nouveau de la folie. Le « fou » médiéval relève tantôt de l’hôpital, tantôt de l’Église ou encore, de la prison. Il peut aussi, s’il n’est pas jugé trop dangereux ou violent, être gardé dans sa famille2. En effet, on constate plusieurs types de fou ; s’il s’agit : • d’un fou paisible, d’un idiot, il est alors toléré ; • d’un insensé, fauteur de troubles ou fou furieux, agressif, il est dans ce cas ligoté avec les bêtes dans l’étable à la campagne ou enfermé dans la tour aux fous, si c’est un citadin ; • d’un malade, il est soigné ; • d’un possédé, il est exorcisé ; • d’un amoureux déchu, il est consolé. Pierre Bruegel l’Ancien (d’après), Excision de la pierre de folie (détail) Huile sur bois. Seconde moitié du 16e siècle. H. x l. : 77 x 107 cm. Saint-Omer, Musée de l’Hôtel Sandelin, inv. 0147 CM. Folie de Lancelot Dans Lancelot du lac, Poitiers, 1480 (?). Paris, Bibliothèque nationale de France, ms. Fr. 111, fol. 120. 4 D’un point de vue médical La conception médiévale héritée de l’Antiquité veut que notre corps soit principalement composé de quatre humeurs, chacune associée à un des quatre éléments. Le dérèglement de ces humeurs entraîne diverses conséquences : • Le sang, considéré comme chaud et humide, associé à l’air : son déséquilibre est rare. • La bile jaune, considérée comme chaude et sèche, associée au feu : son déséquilibre amène à la folie furieuse ou à la frénésie accompagnée d’excitation et de fièvre. Elle serait responsable de la manie. Dans l’Antiquité grecque la manie est le terme le plus général pour désigner toute espèce de comportements « fous ». (…) La manie est aussi une maladie, aliénation de l’esprit sans fièvre, mal chronique à évolution lente. Le mot est repris au 19e siècle par les psychiatres pour désigner un état d’excitation pathologique3. • La bile noire, froide et sèche, associée à l’élément terre : son déséquilibre amène à la mélancolie, sans fièvre mais avec abattement. Du grec melankholia, « bile noire » ou « humeur noire », le terme mélancolie désigne dans l’Antiquité puis dans la médecine médiévale, une maladie de l’esprit caractérisée par la tristesse immense, causée par un dérèglement de l’humeur noire. La psychiatrie naissante la redéfinit au 19e siècle comme une monomanie4. • Le flegme, froid et humide, associé à l’eau : son dérèglement entraîne la léthargie, l’abattement, la prostration accompagnés de fièvre. Dans ces cas, la folie est considérée comme un mal physique uniquement, un déséquilibre dans le corps et les remèdes sont donc médicaux. Pots à pharmacie ayant contenu des plantes médicinales, modèles botaniques, ouvrages de botanique, mortiers et poids de pharmacie 5 Quels remèdes ? Il s’agit, entre autres, de régimes de santé qui se devront de ramener le patient à l’équilibre de ses différentes humeurs par une prise en charge de son cadre de vie (chaud, froid, humide…), de sa nourriture, de son exercice physique, de sa sexualité… La médecine médiévale se penchera aussi sur la pharmacopée ou encore la chirurgie par le biais d’une « aération » du cerveau via la trépanation de maniaques et de mélancoliques. Il n’y a donc aucune approche relationnelle comme c’est le cas de nos jours. Tout un programme ! À la fin du Moyen Âge et à la Renaissance, on trouve diverses illustrations d’extraction de la pierre de folie. Ces épisodes montrent le plus souvent un acte « chirurgical » au cours duquel un médecin ouvre le front d’un patient afin d’en extraire un petit caillou appelé « pierre de folie » responsable de l’état du pauvre insensé ! À ce sujet, deux versions s’opposent : • Selon Claude Quétel5, on peut penser, au vu du réalisme de certaines scènes dans la peinture flamande, que de telles opérations avaient sans doute lieu lors de foires ou de kermesses. • Selon Jean-Marie Fritz6 il faut voir, dans la peinture de Bosch et de ses successeurs, une fiction allégorique, la folie de la science qui prétend extirper la folie de l’homme7. D’un point de vue religieux Pour l’Église, la conception de la folie rejoint les extrêmes : soit elle est associée au démon et l’aliéné est alors une personne dépossédée de son autonomie et habitée par le diable, soit, elle est mystique ou encore bienheureuse et innocente ! Anonyme, Excision de la pierre de folie Huile sur panneau. Deuxième tiers du xvie siècle. Diam. : 30,2 cm (hors cadre). Bailleul, Musée Benoît-De-Puydt, inv. 992.21.34. Maître de l’atelier de Blanche de Castille, Un fou entre deux démons Dans Psautier de saint Louis et de Blanche de Castille. 1230 (?). Paris, Bibliothèque nationale de France, Bibliothèque de l’Arsenal, ms. 1186, fol. 77v. 6 La folie par le démon : C’est autour de 1200 que l’insensé, celui qui refuse volontairement de croire en Dieu fait son apparition dans l’initiale « D » du psaume 52. On le retrouve aussi dans les porches des cathédrales comme à Paris, Amiens, Chartres… l’insipiens, celui qui ne sait pas, fait alors face, dans un jeu d’opposition entre les vices et les vertus, à la sapientia (la sagesse) fréquemment représentée sous les traits du roi David. La folie est ici perçue, non plus comme un mal physique, mais comme une « maladie » de l’âme par dépossession de celle-ci. Suivant l’Ancien Testament, la folie est une arme utilisée volontairement par Dieu pour punir l’Homme, alors que dans le Nouveau Testament, il s’agit plutôt de démons ou mauvais esprits qui viennent « habiter » l’âme humaine. Quels remèdes ? Les pèlerinages : nombre de sanctuaires sont spécialisés dans le soin de la maladie mentale, comme Geel en Campine où les malades vivent chez l’habitant, Saint-Dizier (France, Champagne- Ardennes) ou encore Saint-Macaire (France, Gironde). L’exorcisme : seule rédemption possible pour les fous possédés, habités par le démon. Nous sommes au Moyen Âge, les rôles du prêtre et des reliques des saints restent primordiaux ! Willem Vrelant (attribué à), David et le fou Dans Bréviaire [dit de Philippe le Bon] à l’usage de Paris, pars aestivalis. France et Pays-Bas méridionaux. Vers 1460 (après 1453). Bruxelles, Bibliothèque royale de Belgique, ms. 9026, fol. 143v. Guérison du possédé de Gadara Dans la Bible de Manerius. Vers 1185-1195. Paris, Bibliothèque Sainte-Geneviève, ms. 10, fol. 127v. 7 Les fous de Dieu : Il en existe deux catégories : • Ceux qui, tel saint Jérôme, vivent en ermites, isolés du monde, dépouillés de tout dans une dévotion totale ; • Ceux qui prêchent une pseudo-parole du Christ, les faux prophètes déambulant de ville en ville. Ceux-là, comme dit Claude Quétel, ont fait un fameux raccourci suite aux lectures de saints tel Bernard de Clairvaux qui nous dit : « la seule mesure d’aimer, c’est d’aimer sans mesure » ou François d’Assise : « Le Seigneur m’a dit qu’il voulait faire de moi un nouveau fou dans le monde et Dieu ne veut pas me conduire par une autre science que celle-là »8. Enfin, la religion reconnaît une dernière forme de folie, celle de l’innocent, celui-là est bienheureux. D’un point de vue littéraire : C’est dans la seconde moitié du 12e siècle que le fou apparaît en littérature. La folie est une épreuve de chevalier : Lancelot, Yvain, Tristan... Vécue ou simulée, la folie est souvent liée à un amour perdu, impossible ou pensé comme tel. Elle entraîne alors le noble chevalier dans les bois où il brise son épée, se défait de son armure et erre telle une âme en peine, toute raison perdue. NB : Cette image d’homme errant devenu sauvage donnera plus tard naissance au mythe du loup- garou. Quel remède ? Un et un seul… la uploads/Sante/ dossier-peda-puls-i-on 1 .pdf

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  • Publié le Apv 05, 2022
  • Catégorie Health / Santé
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