MISE AU POINT 18 | La Lettre du Cardiologue • n° 435 - mai 2010 Nouveautés thér

MISE AU POINT 18 | La Lettre du Cardiologue • n° 435 - mai 2010 Nouveautés thérapeutiques dans l’hypertension artérielle pulmonaire New therapies in pulmonary arterial hypertension L. Savale*, D. Natali*, X. Jaïs*, D. Montani*, O. Sitbon* * Faculté de médecine, université Paris-Sud, Le Kremlin-Bicêtre ; Centre national de référence de l’hypertension pulmonaire sévère, service de pneumologie et réanima­ tion respiratoire, hôpital Antoine- Béclère, Clamart, et Inserm U999, hypertension artérielle pulmonaire : physio­ pathologie et innovation théra­ peutique, centre chirurgical Marie- Lannelongue, Le Plessis-Robinson. L’ hypertension artérielle pulmonaire (HTAP) est une maladie rare dont le mauvais pronostic a longtemps été considéré comme inéluctable. Elle est caractérisée par l’augmentation progressive des résistances vasculaires pulmonaires (RVP), abou­ tissant à une insuffisance cardiaque droite et au décès. Au cours des dix dernières années, les progrès réalisés dans la compréhension des mécanismes physiopa­ thologiques de l’HTAP ont permis la mise au point de plusieurs molécules innovantes et d’une nouvelle approche thérapeutique de la maladie (1). Ainsi, la dysfonction endothéliale, avec pour corollaires un déséquilibre de la balance vasoconstriction/vasodila­ tation et une prolifération musculaire lisse exagérée, représente à l’heure actuelle la cible prioritaire du traitement de l’HTAP. Cette meilleure compréhen­ sion de la physiopathologie de l’HTAP a permis au fil du temps d’en modifier ­ l’approche thérapeutique en passant progressivement de traitements à visée essentiellement vasodilatatrice (inhibiteurs calciques) à des médicaments inhibant la prolifération des cellules vasculaires pulmonaires dans le but de faire régresser les lésions d’hypertrophie et de remodelage vasculaire pulmonaire. Il est en effet clairement établi que le développement de l’hypertension pulmonaire résulte du dérèglement de l’expression et de l’activité de différents médiateurs vasoactifs aboutissant à une dysfonction vasculaire endothéliale. Ainsi, un déficit de production et d’expression de vasodila­ tateurs endogènes, comme la prostacycline ou le monoxyde d’azote, est impliqué dans la physiopa­ thologie de l’HTAP. À l’inverse, l’augmentation de l’endothéline circulante et pulmonaire, puissant agent vasoconstricteur et inducteur de la prolifération des cellules musculaires lisses, s’est avérée être une cible thérapeutique intéressante. Ces observations ont abouti au développement de trois différentes classes de traitements spécifiques de l’HTAP : les analogues de la prostacycline, les antagonistes des récepteurs de l’endothéline et les inhibiteurs de la phosphodiesté­ rase de type 5 (PDE-5). Ces différents traitements ont montré, dans de larges essais cliniques prospectifs, une amélioration à court terme d’un certain nombre de données cliniques ou fonctionnelles pertinentes, comme les symptômes, les capacités à l’exercice, la qualité de vie, les données hémodynamiques et la durée d’évolution de la maladie sans complications. Si ces stratégies thérapeutiques actuelles ont permis une amélioration substantielle de l’espérance et de la qualité de vie des malades, elles demeurent insuf­ fisantes pour envisager aujourd’hui un traitement curatif de la maladie. À l’exception de données pour les patients recevant de l’époprosténol (2, 3) et plus récemment du bosentan (4-6), l’efficacité à long terme des nouveaux traitements reste mal connue. Il apparaît donc nécessaire d’évaluer le bénéfice à long terme de ces traitements en termes d’efficacité clinique et hémodynamique et de qualité de vie des malades, mais aussi en termes de survie, d’effets secondaires et de coût. L’objectif majeur pour les années futures est de passer d’une maladie invalidante et mortelle à une maladie chronique sans handicap majeur. Afin d’amé­ liorer le pronostic de l’HTAP, plusieurs pistes sont envisagées ou sont déjà en cours d’évaluation. Les nouveautés actuelles ou futures dans la prise en charge de l’HTAP résident dans un traitement plus précoce de la maladie, l’utilisation combinée des différents traitements disponibles et l’évaluation de nouvelles cibles thérapeutiques. La Lettre du Cardiologue • n° 435 - mai 2010 | 19 Points forts » » Les innovations thérapeutiques de ces 10 dernières années (antagonistes des récepteurs de l’endothéline, dérivés de la prostacycline, inhibiteurs de la phosphodiestérase de type 5) découlent d’une meilleure compré­ hension des anomalies physiopathologiques de l’hypertension artérielle pulmonaire (HTAP). La mise au point de ces nouvelles thérapeutiques a permis une amélioration substantielle de la maladie sans pouvoir la guérir. » » Un traitement plus précoce de la maladie (classe fonctionnelle II) semble être bénéfique. Des progrès devront donc être réalisés dans le futur pour un diagnostic plus précoce de la maladie, notamment au sein des populations à risque. » » Les résultats cliniques concernant les combinaisons de traitements sont encourageants. » » De nouvelles thérapeutiques ciblant directement la prolifération anormale des cellules vasculaires pulmonaires sont en cours d’évaluation. Mots-clés Hypertension artérielle pulmonaire Prostacycline Endothéline NO Phosphodiestérase Highlights » The therapeutic innovations that have been developed over the last decade (endo­ thelin receptor antagonists, prostanoids, phosphodies­ terase type 5 inhibitors) are the result of an improved understanding of the patho­ physiological processes that characterise PAH. Although the development of these targeted therapies frequently confers substantial clinical improve­ ment, a cure for the disease nonetheless remains elusive. » Treatment of patients with early stage disease (i.e. those with NYHA functional class II symptoms) appears to be beneficial. Efforts to detect the disease at an earlier stage, particularly among at-risk populations, remain a clinical priority. » Encouraging results from clini­ cal studies evaluating combination therapeutic approaches are beginning to emerge. » Several novel therapeutic agents that directly target the aberrant proliferation of pulmonary vascular cells typical of PAH are currently being evaluated. Keywords Pulmonary arterial hypertension Prostacyclin Endothelin NO Phosphodiesterase Les recommandations actuelles En l’absence de données comparant les différents traitements, le choix du traitement initial dépend donc autant de l’expérience des équipes et des réglementations locales que de l’état clinique du patient et de ses préférences. La plupart des experts recommandent pour les HTAP sévères (classe fonc­ tionnelle IV) un traitement de première intention par prostacycline (époprosténol) en injection intravei­ neuse continue. Les possibilités de traitement pour les malades en classe fonctionnelle III comprennent un antagoniste des récepteurs de l’endothéline ou un inhibiteur de la PDE-5 administrés par voie orale, un analogue stable de la prostacycline par voie inhalée (iloprost) ou sous-cutanée (tréprostinil), mais égale­ ment l’époprosténol par voie intraveineuse, débutés sous surveillance dans un centre spécialisé dans la prise en charge des maladies vasculaires pulmonaires. Pour les formes moins sévères d’HTAP, des données sont maintenant disponibles, ce qui permet d’éta­ blir des recommandations thérapeutiques pour ces patients. Aussi, les dernières recommandations préco­ nisent l’utilisation d’un antagoniste des récepteurs de l’endothéline ou un inhibiteur de la PDE-5 pour les patients en classe fonctionnelle II de la NYHA. À partir des données actuelles, les récentes recom­ mandations conjointes de l’European Society of Cardiology (ESC) et de l’European Respiratory Society (ERS) ont permis l’élaboration d’un nouvel algorithme résumant la prise en charge de l’HTAP (figure) [7, 8]. Les nouveautés clairement exposées dans cet algorithme résident dans la possibilité de traiter les patients à un stade plus précoce de la maladie et d’utiliser les traitements combinés pour les patients les plus sévères ou ayant une réponse insuffisante à une monothérapie administrée en première intention. Les nouveautés thérapeutiques Un diagnostic plus précoce L’objectif d’un diagnostic précoce est la possibilité d’un traitement pour une forme moins sévère de la maladie. Compte tenu de la rareté de la maladie, un diagnostic plus précoce ne peut s’envisager que pour des groupes à risque, c’est-à-dire dans lesquels la prévalence de l’HTAP est importante (formes fami­ liales, sclérodermies, infection par le VIH, hyperten­ sion portale). Deux études portant sur le dépistage de l’HTAP au cours de la sclérodermie et au cours de l’infection par le VIH ont clairement montré que le dépistage échocardiographique de l’HTAP dans ces populations à risque permettait de diagnosti­ quer des formes moins graves de la maladie (9, 10). Par ailleurs, l’étude EARLY évaluant l’efficacité du bosentan chez des patients en classe II de la NYHA a montré un allongement du temps avant détério­ ration clinique dans le groupe traité par bosentan par rapport à celui recevant le placebo (11). Les combinaisons de traitements L’effet des différents traitements spécifiques de l’HTAP sur les symptômes et les capacités à l’effort est certes significatif et contribue à améliorer la qualité de vie des patients, mais il n’en demeure pas moins que les limites ressenties dans la réalisation des activités quotidiennes restent une réalité pour la plupart des patients. Toutes les classes thérapeu­ tiques améliorent significativement le test de marche en comparaison du placebo, mais la normalisation des capacités à l’effort est très rarement rapportée. Une nouvelle approche thérapeutique pour tenter de progresser dans la prise en charge de ces patients est d’évaluer l’effet des traitements combinés. L’associa­ tion de médicaments de mécanismes d’action diffé­ rents a été envisagée dans le but de potentialiser leurs effets et ainsi d’augmenter leur bénéfice clinique, si possible sans majoration des effets indésirables. Selon les recommandations actuelles, la majorité des patients est actuellement traitée en première inten­ tion par une monothérapie. En pratique courante, de plus en plus de malades reçoivent des associations de traitements, soit d’emblée, soit le plus souvent après échec d’un traitement de première ligne. L’instau­ ration d’une association thérapeutique de première intention et l’adjonction d’un nouveau traitement en cas d’échec du traitement précédent (combinaison thérapeutique séquentielle) sont deux approches différentes du uploads/Sante/ htap-nouveautes-therp-2010.pdf

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  • Publié le Apv 18, 2021
  • Catégorie Health / Santé
  • Langue French
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