JOUIR DU SENS : LE SYMPTÔME À LA LETTRE Paul-Laurent Assoun ERES | « Figures de
JOUIR DU SENS : LE SYMPTÔME À LA LETTRE Paul-Laurent Assoun ERES | « Figures de la psychanalyse » 2010/1 n° 19 | pages 19 à 25 ISSN 1623-3883 ISBN 9782749212388 Article disponible en ligne à l'adresse : -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- https://www.cairn.info/revue-figures-de-la-psy-2010-1-page-19.htm -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Distribution électronique Cairn.info pour ERES. © ERES. Tous droits réservés pour tous pays. La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites des conditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votre établissement. 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Sur le lien entre symptôme et écriture littéraire, nous renvoyons à notre Littérature et psychanalyse. Freud et la création littéraire, Editions Ellipses/Marketing, 1995. Sur les autres points métapsychologiques évoqués, cf. nos Leçons psychanalytiques sur L’angoisse, Le fantasme et Le transfert (Editions Economica/ Anthropos). On y trouvera commentés les textes de Freud et Lacan mentionnés ici. Jouir du sens : le symptôme à la lettre 1 • Paul-Laurent Assoun • Écrire le symptôme, qu’est-ce à dire en psychanalyse ? Le symptôme se présente en médecine comme ce signe clinique d’une dysfonction, corrélative d’une lésion, en sorte que l’on cherche à en induire un diagnostic. On sait l’acte d’audace de Freud qui, ne renonçant pas au mot, le transfère résolument sur un tout autre terrain, celui de la vérité inconsciente du désir. Le terme dit, en sa lettre étymologique, ce qui « tombe mal ». Idée d’un faux pas qui s’avère dire vrai. Le névrosé est celui qui est réduit au faux pas (chronique, on le sait, chez l’hystérique) pour signifier ce qui ne marche pas. Que le symptôme soit pris dans la conflictualité inconsciente, voilà à quoi nous sommes si accoutumés que nous en méconnaissons la portée : le symptôme en sa dimension inconsciente cesse de dire la dysfonction pour qualifier cette espèce de positivité radicale sur fond de négativité. Autrement dit, la production de symptôme dit vrai, pour porter à l’expression la division du sujet. Comme formation de substitut, il porte à l’expression ce malentendu du sujet avec son désir, qui est de structure. Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 188.44.65.67 - 11/06/2020 15:05 - © ERES Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 188.44.65.67 - 11/06/2020 15:05 - © ERES 20 • FIGURES DE LA PSYCHANALYSE 19 • L’écriture freudienne du symptôme C’est, chez Freud, la sorcière métapsychologique qui est chargée de l’écriture du symptôme. Il s’écrit au reste au singulier, pour notifier qu’au-delà du tas de symptômes, il y a bien dans l’ordre inconscient une instance du symptôme. « Symptôme de souffrance » (Leiden-symptom), il réalise, comme « formation réactionnelle », « formation de compromis » et « formation de substitut » par rapport à la pulsion, un certain gain de plaisir. Le symptôme est autant une afflic- tion qu’une trouvaille. Il y a bien un « bénéfice du symptôme », « primaire », celui qui consiste à éviter l’affrontement direct du conflit et, « secondaire », dans la mesure où, une fois installé, le symptôme peut représenter une précieuse « rente d’invalidité », ce pourquoi le sujet le « défend bec et ongles », selon l’image freu- dienne. D’un côté, le symptôme traduit un « rejet » de certaines pulsions éprouvées comme « mauvaises » – cela suppose l’identification du pulsionnel à un kakon ; d’un autre côté, il s’agit de maintenir, au moyen du symptôme, un rapport à la pulsion refoulée – ce qui implique la fonction du symptôme de réaliser une vie de plaisir inconsciente au sein même de la production morbide. Le symptôme traduit donc à la fois le rejet de pulsions et le « cabrement » contre l’interdit. Il s’inscrit entre deux « indésirables ». Le Moi, après avoir exécuté l’opération de refoulement, se charge d’un « symbole mnésique » qui vient représenter le refoulé : c’est celui-ci qui fait symptôme. La formule de la genèse inconsciente du symptôme est « conflit, refoulement, remplacement par une formation de compromis ». Ce modèle se précisera avec la seconde topique et la seconde théorie de l’angoisse, consignée dans Inhibition, symptôme et angoisse. Le symptôme est comparé in fine, dans l’essai sur L’analyse finie et l’analyse sans fin, de façon éloquente à une « luxa- tion du Moi » – soit ce qui, sous l’effet d’une pression pulsionnelle et/ou d’un traumatisme, fait sortir le Moi de son articulation. Le Moi finit pourtant par « s’adapter » au symptôme pour en faire une « appartenance » qui soutient la réalité. Savoir et écriture du symptôme : la défaite du sens Le symptôme dit donc un paradoxe : d’une part, le sujet le produit à son insu et depuis son insu ; d’autre part, il le sait assez, cet in-su, pour porter à l’expres- sion le refoulé avec une rigueur surprenante, voire admirable lorsqu’on en Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 188.44.65.67 - 11/06/2020 15:05 - © ERES Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 188.44.65.67 - 11/06/2020 15:05 - © ERES 21 JOUIR DU SENS : LE SYMPTÔME À LA LETTRE démonte les rouages. « Retour » – aussi bien – « de la vérité dans les failles du savoir ». Or, c’est au moment de l’écrire, cette « histoire de malade » (Kranken- geschichte), que l’écrivain Freud s’en avise le mieux : quelle pitié, dit-il à Jung en rédigeant le cas de l’Homme aux rats, de transformer en « bousillage » (Pfusche- rei) cette « œuvre d’art de la nature psychique » qu’est la névrose ! Œuvre d’écri- ture, faut-il préciser, qui met ce que l’on appelle « écriture de cas » en état de dérision (malgré les prodiges de l’écriture freudienne des Cinq psychanalyses) – ce qui trouve dans la « vignette clinique » son état le plus misérable (ce qui ne justifie pas forcément qu’on y renonce). Le symptôme, mis en écho avec le rêve, affirme donc sa puissance incons- ciente. Mais toute croyance herméneutique, au nom du « Sens », fait faux bond à la lettre. Ainsi s’entend le « Gardez-vous de comprendre » qui, chez Lacan, est plus encore un constat qu’un avertissement. Il faut d’abord savoir lire le symp- tôme, en sa fonction métaphoro-métonymique et ensuite se confronter au non sense qui en assure la reproduction et la narration baroque. Ainsi, s’il y a bien un « sens des symptômes », comme le formule cette « Doctrine générale du symptôme » contenue dans les Leçons d’introduction à la psychanalyse (en 1917, seulement), le symptôme consomme la défaite du sens. Non parce qu’il y a un indicible ou un ineffable, mais un roc sur lequel se heurte l’écriture. Le féminin et la lettre : le hiéroglyphe Freud a eu plus que l’intuition de l’écriture du symptôme. À preuve, sa métaphore du hiéroglyphe appliqué au symptôme hystérique, selon le mode de l’écriture d’image (Bilderschrift) (expression employée symétri- quement à propos du rêve). À preuve aussi, sa métaphore fondatrice qui, dans Sur la sexualité féminine, assimile la phase préoedipienne à l’écriture dite mycénienne, comme s’il sentait qu’il y avait là bien plus qu’archaïsme. Tension d’écritures entre ce grec archaïque et le grec classique. Ces occurrences laissent entrevoir le « féminin de la lettre » qui sera mis en exergue par Lacan et qui renchérit sur l’idée initiale que le symptôme est « soutenu par une structure de langage », soit des « signifiants et des lettres », éléments matériels. Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 188.44.65.67 - 11/06/2020 15:05 - © ERES Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 188.44.65.67 - 11/06/2020 15:05 - © ERES 22 • FIGURES DE LA PSYCHANALYSE 19 • Le bénéfice du symptôme Le point de butée de l’écriture du symptôme est donc qu’elle se déploie à partir justement de ce qui résiste radicalement à son écriture. Résistance qui, à bien y regarder, la fonde. Le symptôme, s’il se présente comme un texte des plus consistants, à la recons- titution, n’est donc pas réductible à un simple texte. Le déchiffrement de ce « cartouche » – ce lieu d’inscription du nom propre qui est aussi bien celui du sujet qui se fait un nom d’emprunt de uploads/Sante/ jouir-du-sens-le-sympto-me-a-la-lettre.pdf
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- Publié le Sep 06, 2021
- Catégorie Health / Santé
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