1 LA POLICE SANITAIRE DANS L’ORDRE PUBLIC CAMEROUNAIS ABOMO EFOUA Christiane Do

1 LA POLICE SANITAIRE DANS L’ORDRE PUBLIC CAMEROUNAIS ABOMO EFOUA Christiane Doctorante en Droit public à l’Université de Douala Email : laraby9@gmail.com Tel : (+237) 697.97.98.68 Résumé 2 PLAN I- LES MESURES PRINCIPALES DE PROTECTION A- Les mesures restrictives de libertés 1- Les restrictions territoriales 2- Les restrictions extraterritoriales B- Les mesures limitatives d’activités 1- Les limitations relevant du secteur économique 2- Les limitations relevant du secteur social II- LES MESURES AUXILIAIRES DE PROTECTION A- Les mesures de compensation 1- La prise en charge publique 2- Les exonérations fiscales et financières B- Les mesures de sanction 1- Les moyens administratifs de sanction 2- Le rapport du citoyen face à l’administration 3 INTRODUCTION Le terme police désigne de manière générale, l’activité consistant à assurer la sécurité des personnes, des biens et de maintenir l’ordre public en faisant appliquer la loi. La mise en œuvre de celle-ci nécessite l’intervention des forces de police constituées d’agents et d’autorités habilitées à l’exercer. Spécifiquement prise dans le cadre de la santé publique, le législateur camerounais entend par police sanitaire, « l’ensemble des mesures hygiéniques et médicales légales, susceptibles d’éviter l’apparition et la diffusion des maladies réputées légalement contagieuses »1. A cet égard, il existe un ensemble de maladies légales notamment dans la santé publique animalière2. En ce qui concerne les citoyens, il est difficile de déterminer à l’avance certaines maladies à risques3. C’est à partir de leurs répercussions sociales que celles-ci se constituent en pandémies4, endémies5 ou épidémies6. La police sanitaire devient dès lors incontournable dans le cadre des catastrophes de type médico-sanitaire. Définir l’ordre public peut par ailleurs s’avérer complexe. L’on conviendrait avec J.M. Vincent qu’« il est peu d’expression qui apparaissent aussi souvent dans les textes (…) et dans les décisions juridictionnelles que celles d’ordre public. Et pourtant, en dépit d’études remarquables, la notion conserve son mystère ; celui qui l’aborde éprouve rapidement une impression de découragement. Elle ne se laisse en effet ni définir, ni circonscrire, et l’on s’essouffle à la suivre dans sa diversité, dans l’apparente fantaisie de ses évolutions »7. L’ordre public varie ainsi dans le temps et dans l’espace. R. Chapus mentionne à cet effet que « assurer l’ordre, c’est décider les mesures et entreprendre, les actions propres à prévenir les risques d’accidents, de dommages aux personnes et aux biens et cela, par exemple en assurant par les règlements et contrôles appropriés la sécurité de la circulation sur les routes ; les risques de désordre »8. 1 Art.2 de la loi n°2001-6 du 16 avril 2001 portant nomenclature et règlement zoo sanitaire des maladies du bétail réputées contagieuses et à déclaration obligatoire. 2 Art. 3, op. cit. 3 Bien que l’ OMS ait dresse des maladies selon trois catégories à savoir, les maladies transmissibles, les maladies non transmissibles, et les maladies tropicales négligées. V. Rapport annuel de l’OMS Cameroun, 2017, 52p. 4 La pandémie est une épidémie qui atteint un grand nombre de personnes, dans une zone géographique très étendue. 5 Présence habituelle d’une maladie dans une région déterminée. 6 Apparition et propagation d’une maladie infectieuse contagieuse qui frappe en même temps et en un même endroit un grand nombre de personnes, d’animaux ou de plantes. 7 J.M. VINCENT, « La procédure civile et l’ordre public », in Mélanges Roubier, 1961, p.303 cité par A. Makougoum… 8 R. CHAPUS, Droit administratif général, 15ème Ed., Paris, Montchrestien, 2001, p.702. 4 Rapprocher les notions de police sanitaire et d’ordre public tend à relever un rapport d’inclusion. Au regard des composantes classiques de l’ordre public que sont la sécurité publique, la tranquillité publique9, la dignité de la personne humaine10, la moralité publique, l’hygiène publique et la salubrité publique11, il apparait que la police sanitaire se présente comme un moyen d’ordre public. Face à un danger sanitaire, cette police spécifique peut prendre des formes très diverses pour poursuivre des objectifs précis. Il s’agirait de connaitre la situation sur le territoire concerné, limiter l’extension du danger, l’éradiquer et surtout, protéger la population, protection et sécurité étant par principe des marques indispensables de l’ordre public. Au Cameroun, la crise sanitaire liée à la Covid-19 a révélé le lien incontestable entre l’ordre public et la santé des citoyens. A travers des moyens spécifiques, l’administration a le devoir d’assurer la sécurité sanitaire des personnes. C’est dans ce cadre que la police sanitaire s’établit en point focal de l’intervention étatique. il est ainsi judicieux de s’interroger sur la praticabilité de cette remarque. Ainsi, quelles sont les mesures relatives à l’ordre public dans la police sanitaire au Cameroun ? s’interroger sur les décisions entreprises par l’Etat en vue de protéger la santé des citoyens revient à s’intéresser à leur nécessité, à leur proportionnalité et aussi, à leurs conséquences sur la société. C’est dans ce sens que la réponse proposée à la question centrale consiste à dire à dire que ce sont mesures juxtaposées en actions principales et en actions auxiliaire I- LES MESURES PRINCIPALES DE PROTECTION La protection est définie par G. Cornu comme « la précaution, répondant au besoin de celui ou de celle qu’elle couvre et correspond en général à un devoir pour celui qui l’assure, consiste à prémunir une personne ou un bien contre un risque, à garantir sa sécurité, son intégrité, etc, par des moyens juridiques ou matériels… »12. L’action de protéger entraîne de ce fait des restrictions dans le but de préserver l’ordre public, et d’assurer la sécurité de tous. La sécurité 9 V. loi n°75/17 du 8 décembre 1975 fixant la procédure devant la cour suprême (statuant en matière administrative). 10 CE, 13 octobre 1995, Commune de Morsang-sur-Orge /Ville d’Aixe en Provence. 11 V. ordonnance de référé n°37/OR/CAB/PCA/CS/2003-2004, Affaire Nguessie Joseph C/Etat du Cameroun (CUY). 12 G. CORNU, (dir.), Vocabulaire juridique, 10ème Ed., PUF, Janvier 2014, p.821. 5 sanitaire est ainsi préconisée par la prescription des mesures restrictives de libertés (A) et des mesures limitatives d’activités (B) relevant de l’ordre public. A- Les mesures restrictives de libertés Il existe un sempiternel problème d’équilibre entre ordre public et libertés publiques. En temps normal, les libertés publiques demeurent une quête sociale permanente en ce que celles- ci peuvent être limitées par des mesures administratives. Au Cameroun, le texte constitutionnel de 1996 vient asseoir les libertés consacrées par les textes de 199013. A cet effet, les libertés publiques constituent des droits fondamentaux pour le citoyen au sein de la société. Cependant, les exigences relatives à la responsabilité sociale de l’Etat14 tendent à poser des restrictions à leur jouissance, tant sur le territoire national (1) qu’en dehors de celui-ci (2). 1- Les restrictions internes L’histoire médicale du Cameroun fait état de nombreuses épidémies15. La nécessité d’en éviter la propagation initie des mesures de police sanitaire propres à chaque cas, dans le but de préserver l’ordre public. La dernière crise sanitaire en date, relative au Covid-19, a donné un élan particulier à l’extension du pouvoir réglementaire en matière de police sanitaire. En effet, dans la gestion des crises sanitaires, il existe un protocole recommandé par l’OMS, aux Etats en vue de protéger les populations16. Le contrôle efficace des maladies est fondé sur la surveillance de ces maladies par les institutions habilitées. Pour pouvoir agir contre les épidémies, il est essentiel de disposer d’un système national de surveillance des maladies transmissibles qui fonctionne efficacement. C’est à partir de celui-ci que la prise de décision en matière de santé publique trouvera une finalité protectrice. Ce processus met dès lors en action un ensemble d’acteurs de corporations médicales, administratives et sécuritaires, dont la coordination établit le cadre des libertés à restreindre. 13 Il s’agit notamment des Loi N° 90/046 du 19 décembre 1990 abrogeant l’ordonnance n° 62/OF/18 du 12 mars 1962 consacrant du même coup la liberté d’expression, d’opinion et de circulation. • Loi N° 90/52 du 19 décembre 1990 portant sur la liberté de communication sociale ; de la loi n° 90/53 du 19 décembre 1990 portant sur la liberté d’association consacrant un régime juridique approprié pour les associations ordinaires, syndicales et religieuses. • Loi N° 90/055 du 19 décembre 1990 portant régime des réunions et des manifestations publiques. • Loi N° 90/056 du 19 décembre 1990 portant sur les partis politiques • Loi sur les organisations non-gouvernementales du 22 décembre 1999. 14 C. ABOMO EFOUA, « La responsabilité sociale de l’Etat en Droit public au Cameroun », Thèse de doctorat, Université de Douala, inédit, 450p. 15 V. rapport sur l’état de la protection civile au Cameroun, 200-2004, p. 35. 16 V. normes de surveillance OMS, WHO/CDS/CSR/ISR/99.2, 2ème éd., juin 2000, 191 p. 6 Pour rappel, la maladie est une cause de désordre public17.Dans l’aire territorial, protéger la population des maladies consiste premièrement à identifier des cas et déclarer les zones épidémiques. La prophylaxie18 envisagée conduit ainsi à des actions de police sanitaire. L’article 4 de la DDHC dispose que la liberté « consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui, ainsi l’exercice des droits naturels de chaque homme n’a de bornes que celles qui assurent aux autres membres de la société, la jouissance de ces uploads/Sante/ la-police-sanitaire-l-x27-original-1-104346.pdf

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  • Publié le Fev 04, 2022
  • Catégorie Health / Santé
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