Bulletin de la Société d'histoire de la pharmacie Les grands pharmaciens : IV.

Bulletin de la Société d'histoire de la pharmacie Les grands pharmaciens : IV. Bayen (1725-1798) A. Balland Citer ce document / Cite this document : Balland A. Les grands pharmaciens : IV. Bayen (1725-1798). In: Bulletin de la Société d'histoire de la pharmacie, 5ᵉ année, n°17, 1917. pp. 281-286. doi : 10.3406/pharm.1917.1294 http://www.persee.fr/doc/pharm_0995-838x_1917_num_5_17_1294 Document généré le 29/09/2015 N° 17 JUILLET 1917 «fc DE « LA » SIÈGE SOCIAL: ^«foircdcU^ Ruedc Jouy.7.PARIS M. H. GAUTIER, 4, avenue de l'Observatoire, Paris, reçoit le» Jons d'objets d'art. . M. GUITARD, 7, rue de Jouy, Paris, reçoit les ouvrages et la correspondance relative aux séances et au Bulletin. M. TOR AUDE, 23, Grande-Rue Asnière» ' (Seine), reçoit les envois en espèces. Lès Grands Pharmaciens IV. BAYEN Ancien apothicairè-major des camps et armées,; membre de l'Institut et du Conseil de santé des armées. (Né à Châlons-sur-Marne en 1 725 ; décédé à Paris en 1 798). Quand on relit, encore aujourd'hui, les écrits de Bayen tels qu'ils ont paru à l'origine et, en particulier, ses travaux sur les eaux de Luchôn, insérés par ordre du ministre de la guerre dans le Recueil des hôpitaux militaires de 1766; ses mémoires sur les précipités de mercure parus dans le Journal de physique de 1774 et ses recherches sur l'étain publiées par ordre du gouvernement en 1781 , on est vraiment étonné de l'oubli relatif dans lequel est resté ce grand chimiste, « cette renommée scientifique », comme l'a écrit Berthelot après l'avoir un instant méconnu (1). Paris à bien donné le nom de Bayen à l'une de ses rues, (1) Voir : Bayen, Laooisier et la découverte de l'oxygène (Revue scientifique, 28 juin 1890): Lettre de M. Berthelot à M. Ch. Richet Jlhidem, 25 octobre). 282 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ mais la Sorbonne ne l'a pas cité parmi les savants illustres dont les noms sont inscrits dans ses amphithéâtres. Même abstention à l'Ecole de Pharmacie, gardienne cependant des traditions de l'ancien Collège de pharmacie. On ne trouve Bayen, ni à l'antique Salle des Actes, ni dans les peintures ou les vitraux artistiques qui décorent l'Ecole. Il n'est représenté, au dehors, que par un modeste médaillon que personne ne peut voir. Il existe en revanche de précieux documents sur Bayen, pieusement rassemblés et conservés à la Bibliothèque par M. Dorveaux. Pierre Duhem, dans son dernier ouvrage sur les précurseurs de la chimie (1), n'a rien dit de Bayen. Cet oubli de la part d'un homme si consciencieux, si imprégné de vieux textes, m'avait décidé à lui faire part de mon étonnement. Il m'exprima ses regrets de n'avoir pas rendu justice à Bayen, dont il n'avait pu se procurer les mémoires. Il convient de reproduire sa lettre, une des dernières de 1' eminent professeur, qui s'est éteint brusquement peu de temps après1. On me pardonnera de la faire précéder de celle que je lui écrivis. ' Lettre à M- le Professeur Duhem, de l'Institut, rue de la Teste, 18, à Bordeaux. Paris, 28 juillet 1916. Monsieur et cher Professeur^ J'ai une grande affection pour Bayen, le créateur de la pharmacie militaire à laquelle j'appartiens depuis, cinquante ans. C'est donc avec un réel sentiment de tristesse que je n'ai pas trouvé le nom de ce grand chimiste dans l'ouvrage si documenté que vous venez de consacrer aux précurseurs de la chimie moderne. Il est certain que les travaux de Bayen ont été grandement mis à profit par Lavoisier. Les 'Contemporains l'affirment (La Méthe- rie, Lassus, Parmentier, Fourcroy, Cuvier...) et les faits l'établissent lorsqu'on compare avec Longchamp (Bibliothèque du chimiste), les mémoires de Bayen et de Lavoisier au moment de leur publication. (I) La chimie est-elTe une science française ? par M. Pierre DUHEM, 1916. d'histoire de la pharmacie '' 283 Wûrtz ignorait Bayen. Dumas n'en a point parlé : jaloux de la gloire de Lavoisier, comme si une telle gloire pouvait être amoindrie, il a refusé l'insertion aux Comptes rendus d'une note de Cap, revendiquant les droits de Bayen à la découverte de l'oxygène. J'a,i cherché, à différentes époques, à attirer l'attention de nos contemporains sur Bayen, beaucoup trop méconnu (Revue Scientifique, 1882, 1887, 1890, 1898, 1910). J'ai songé à éditer les mémoires de Bayen; mais la guerre, m' ayant rappelé au laboratoire des expertises, où j'ai vécu les dernières années de ma vie militaire, me laisse peu d'instants, et le temps passe... Réponse de M. Duhem. Cabrespine (Aude), 31 juillet 1916. Monsieur et cher Confrère, Je vous remercie vivement de votre aimable lettre et du livre si intéressant qui l'accompagnait (1); l'une et l'autre me Jont vivement regretter de n;avoir pas rendu justice à Bayen. Les divers ouvrages que j'ai lus sur l'histoire de la chimie ne citaient pas le nom de Bayen ou n'en parlaient pas assez pour qu'enfui je puisse soupçonner un émule de Lavoisier. Je n'ai pas recherché ses mémoires, que je ne savais où trouver- Si jamais ce dont je douté mon petit livre a une seconde édition, votre avertissement me permettra d'être plus juste pour Bayen. Mais j'espère bien que vous m'aurez facilité la tâche en publiant les mémoires de cet auteur. Croyez, Monsieur et cher confrère, à mes sentiments très dévoués. Duhem. Voici quelques citations qui montrent le rôle prépondérant de Bayen dans l'évolution de la chimie. (( Cet air (l'oxygène) avait été aperçu par M. Bayen; ce chimiste, en traitant les chaux de mercure, vit qu'elles se revivifiaient seules, sans addition, et qu'il s'en dégageait un air qui est celui dont nous parlons. Mais il ne poussa pas plus loin ses expériences. M. Priestley ayant obtenu cet air par les mê- (1) Les Pharmaciens militaires français où se trouvent des références sur Bayen. 284 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ mes procédés, le soumit à différentes expériences... M. Lavoisier a eu le même succès en répétant ces expériences. » (De La MÉTHERIE, Essai analytique sur l'air pur, p. 53; Paris, 1 785). (( Lorsque Bayen vint offrir à l'Académie ses recherches sur les précipités, Lavoisier, qui était présent, s'occupait aussi des oxydes métalliques; éclairé par le trait de lumière qui se répandait sur la science, il rentre aussitôt dans son laboratoire, répète les expériences de Bayen, les trouve exactes et déchire le voile que Bayen n'avait fait que soulever. ».(LàSSUS, Notice sur la vie et les ouvrages de Bayen in Mémoires de l'Institut, t. II). « .Bayen avait atteint sa quarantième année saAs avoir encore rien publié : un silence aussi long devait nécessairement surprendre; mais trop supérieur à cette impatience des savants qui précipitent leurs productions incomplètes, il. prit tout le temps nécessaire pour donner aux siennes ce caractère de maturité et de perfection qui leur fera braver la durée des temps, quelles que soient les révolutions que la chimie éprouve... Il communiquait sans peine ses découvertes et ses vues, au hasard de se les voir enlever... Accessible à ceux qui courraient sa carrière, Bayen leur prodigua des idées qui, recueillies avec intelligence, ont jeté le plus grand éclat sur ceux qui les ont adroitement employées. » (PaRMENTIER, Eloge de Pierre Bayen). (( Bayen est le premier qui a jeté des doutes sur le phlogis- tique et qui a sapé les fondements de la théorie établie sur ce principe imaginaire. La gloire de l'avoir combattu et d'en avoir provoqué la chute lui appartient toute entière, puisqu'il a devancé Lavoisier, sinon dans une attaque aussi vive, au moins par des doutes et des questions qui ont excité toute l'attention des chimistes. Son beau travail sur les précipités de mercure et leur réduction spontanée a ouvert la carrière au Chef illustre de la doctrine pneumatique. Bayen est donc, avec Schèele, Bergmann, Black, Cavendish, Lavoisier et Berthollet, un des créateurs de la grande révolution chimique moderne et son nom passera, avec ces noms fameux, à la postérité reconnaissante. » (FOURCROY : Art. Chimie- de V Encyclopédie méthodique et Journ. de la Société des Ph. de Paris, 1 798). D'HISTOIRE DE LA PHARMACIE 285 << Lavoisier déduisit ses premières notions précises sur la nature de la combustion d'un mémoire de Bayen sur les oxydes de mercure, dont il entendit la lecture à l'Académie en 1 774. » (Système de. chimie de Thomson, traduction Rifïault, t. II, p. 273. Paris, 1809). « En 1 775, Lavoisier saisit, presque subitement, de quelques expériences de Bayen et de Priestley le point précis que depuis longtemps il cherchait etque ces laborieux opérateurs n'apercevaient pas eux-mêmes, et il prononça contre le phlogistique de Stahl un arrêt qui a été irrévocable. » (CuVIER : Eloge de Ber- thollet). (( Les hommes qui ont vécu dans l'intimité de Bayen disent qu'il avait renoncé à la doctrine du phlogistique longtemps avant la publication de ses mémoires sur les précipités de mercure (Eloge par Parmentier); mais en nous en tenant seulement à des textes que l'on retrouve, l'un, dans le Journal de Physique, année 1774, page 278, l'autre, "dans les Mémoires de Y Académie des Sciences, année 1777, page 592, il est incontestable que le premier chimiste qui, en Europe, a renoncé au pJllogistique c'est Bayen, uploads/Sante/ les-grands-pharmaciens.pdf

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  • Publié le Mai 11, 2022
  • Catégorie Health / Santé
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