Dossier scientifique Marqueurs biochimiques et maladies neurodégénératives 17 ◗

Dossier scientifique Marqueurs biochimiques et maladies neurodégénératives 17 ◗ Place des marqueurs biologiques dans le diagnostic des pathologies Saïd Kamel .......................................... p. 17 ◗ Marqueurs biologiques et maladie d’Alzheimer Isabelle Quadrio, Anne Hay-Lombardie, Armand Perret-Liaudet, Edith Bigot-Corbel .................................. p. 18 ◗ Biomarqueurs du liquide cérébrospinal dans la maladie à corps de Lewy Olivier Bousiges .............................................................................p. 28 ◗ Les marqueurs biologiques des démences fronto-temporales Jean Escal, Anthony Fourier ..................................... p. 38 ◗ Place de la biologie dans les maladies de Creutzfeldt- Jakob et apparentées Flora Kaczorowski, Armand Perret- Liaudet, Mathieu Verdurand, Isabelle Quadrio ............ p. 47 ◗ Marqueurs biochimiques de la dépression : actualité et perspectives Sophie Guillotin, Antoine Yrondi, Nicolas Delcourt ..................................................................... p. 59 ◗ Marqueurs biologiques utilisés dans le diagnostic de la sclérose en plaques Pierre-Olivier Bertho, Maxime Carpentier, Édouard Le Carpentier, Anne Hay-Lombardie, Edith Bigot-Corbel ............................................................... p. 66 ◗ QCM ................................................................................... p. 74 Sommaire REVUE FRANCOPHONE DES LABORATOIRES • N° 534 • JUILLET-AOÛT 2021 Place des marqueurs biologiques dans le diagnostic des pathologies Coordination du dossier Saïd Kamel said.kamel@u-picardie.fr Les maladies neurodégénératives sont des maladies chroniques d’évolution progressive qui touchent le système nerveux central et se manifestent par une très grande hétérogénéité clinique comme dans la maladie d’Alzheimer, la maladie à corps de Lewy, la dégéné- rescence lobaire fronto-temporale, la maladie à prions ou encore la sclérose en plaques. On estime qu’il y a aujourd’hui en France plus d’un million de personnes touchées par la maladie d’Alzheimer, et ce nombre devrait continuer de croître dans les années à venir, principalement à cause du vieillissement de la population. C’est dire l’importance du problème en matière de santé publique. Le diagnostic est souvent difficile, réalisé grâce à la convergence de tests cliniques évaluant la mémoire et les fonctions cognitives, de la neuro-imagerie (IRM ou PET -scan) et de mesures biologiques. Ce diagnostic est malheureusement souvent tardif, à un moment où les patients sont déjà très affectés. Un des enjeux majeur est donc de disposer d’outils permettant un diagnostic précoce pour une meilleure prise en charge. Dans ce contexte, la recherche de marqueurs biologiques capables de refléter précocement les lésions cérébrales et d’évaluer le pronostic de la maladie est fondamentale. Sur le plan physiopathologique, les maladies neurodégénératives sont très souvent caractérisées par la formation d’agrégats de protéines mal conformées qui se déposent dans le cerveau, on parle alors de protéinopathies. C’est le cas des peptides beta amyloïdes et des pro- téines TAU (Tubulin associated unit) dans la maladie d’Alzheimer, de la protéine TDP43 dans la dégénérescence lobaire fronto-temporale, de la protéine PrPsc dans la maladie à prions ou encore de l’alpha- synucléine dans la maladie à corps de Lewy. La mesure de certaines de ces protéines, principalement dans le liquide cérébrospinal, est déjà effective dans les critères diagnostiques. L’interprétation des résultats reste cependant difficile, rendant le dialogue clinico-bio- logique indispensable et des efforts de standardisation dans ces dosages devront être réalisés. Dans ce dossier scientifique, vous verrez que plusieurs autres molécules, mesurables non seulement au niveau du liquide cérébrospinal mais aussi au niveau sanguin, sont en cours de développement, ce qui devrait améliorer le diagnostic et la prise en charge des maladies neurodégénératives. QQ Saïd Kamel Université de Picardie, Jules Verne UFR Pharmacie (Biochimie) - 1, rue des Louvels 80037 Amiens cedex 1, France Dossier scientifique © 2021 – Elsevier Masson SAS Tous droits réservés. Marqueurs biologiques et maladie d’Alzheimer RÉSUMÉ La maladie d’Alzheimer est la plus fréquente des maladies neurodégénératives. On estime qu’environ 1 million de personnes sont atteintes de cette pathologie en France. Son évolution est progressive, des premiers stades où l’atteinte cognitive et comportementale est légère aux stades modérés puis tardifs correspondant à une perte totale d’autonomie. Elle est caractérisée sur le plan physiopathologique par un dysfonctionnement synaptique, une perte neuronale et des agrégats de protéines mal conformées : on parle alors de « protéino-pathie ». Son diagnostic est multifactoriel et repose sur un faisceau d’arguments cliniques, radiologiques, neuropsychologiques et biologiques. Ces marqueurs sont les peptides amyloïdes Aβ 1-40 et Aβ 1-42 et les protéines TAU totale et hyperphosphorylées, en général en position 181. Ils sont mesurés dans le liquide cérébrospinal et reflètent la présence des lésions cérébrales, très précocement dans l’évolution de la maladie. La phase pré-analytique est délicate, nécessitant l’utilisation d’un tube spécifique. Malgré le développement de méthodes automatisées, ces dosages manquent de standardisation : les seuils sont donc dépendants des techniques et des laboratoires. Il n’est pas recommandé de réa- liser le dosage de ces marqueurs de façon systématique mais de les réserver aux formes les moins typiques ou touchant les adultes jeunes. Le dialogue clinico- biologique est alors fondamental pour la bonne interprétation des résultats. MOTS CLÉS ◗ maladie d’Alzheimer ◗ peptide amyloïde A` 1-42 ◗ peptide amyloïde A` 1-40 ◗ protéine TAU (Tubulin associated unit) ◗ protéine TAU hyperphosphorylée KEYWORDS ◗ Alzheimer disease ◗ amyloïd peptide A`1-42 ◗ amyloïd peptide A` 1-40 ◗ TAU protein (Tubulin associated unit) ◗ hyperphosphorylated TAU protein Isabelle Quadrioa,b, Anne Hay-Lombardiec, Armand Perret-Liaudeta,b, Edith Bigot-Corbelc,* a Unité des pathologies neurodégénératives, service de biochimie et biologie moléculaire, LBMMS, Hospices civils de Lyon, 69677 Bron cedex, France b Centre de recherche en neurosciences de Lyon, équipe Bioran (CNRS UMR 5292, Inserm U1028, université de Lyon), 95 boulevard Pinel, 69500 Bron, France c Laboratoire de biochimie, Centre hospitalier universitaire de Nantes, hôpital Guillaume-et-René-Laënnec, boulevard Jacques-Monod, 44035 Nantes cedex 1, France *Auteur correspondant. Adresse e-mail : edith.bigot@chu-nantes.fr (E. Bigot-Corbel). © peterschreiber.media/stock.adobe;com 18 REVUE FRANCOPHONE DES LABORATOIRES • N° 534 • JUILLET-AOÛT 2021 ABSTRACT Alzheimer’s disease and biological markers Alzheimer’s disease is the most frequent neurocognitive disorder, affecting around 1 million people in France. The clinical course is progressive, from mild cognitive impairment to dementia state characterize by a loss of autonomy. Pathophysiology of the disease associates synaptic dysfunction, neuronal loss and deposition of misfolded protein in aggregates in brain. Clinical diagnostic relies on the association of imaging, neuropsychological evaluation and cerebrospinal fluid biomarkers underlying the pathophysiology. CSF biomarkers are a combina- tion of total TAU protein, hyperphosphrylated isoforms of TAU in threonine 181 and amyloid-β peptides (Aβ 1-40 and Aβ 1-42). Preanalytical phase remains cri- tical. Nowadays measurement are available on automated platforms but without standardization: laboratories have to define their specific cut-off. CSF biomar- kers can be detected early during the disease course, are not recommended in classical forms of AD but mainly when facing atypical phenotypes or in younger patients. Thus, correct interpretation for difficult cases needs discussion between clinics and biologist in multi-disciplinary consultations. Demandez vos articles médicaux gratuitement sur : Fb.com/groups/Articlmeddz REVUE FRANCOPHONE DES LABORATOIRES • N° 534 • JUILLET-AOÛT 2021 Introduction La maladie d’Alzheimer (MA) est la première cause de troubles neurocognitifs (TNC) dégénératifs et la qua- trième cause de décès en France. L’augmentation mon- diale du nombre de cas est en partie liée à l’augmenta- tion de l’espérance de vie et touche de ce fait plus de femmes que d’hommes. Les mécanismes physiopathologiques responsables des TNC sont définis sous le terme de « protéino- pathies » et correspondent à l’accumulation dans le tissu cérébral de protéines mal conformées. Dans le cas de la MA, ce sont les peptides amyloïdes et la pro- téine TAU qui subissent des modifications entraînant leur accumulation et leur agrégation. Chez la per- sonne âgée avec plainte mnésique, le diagnostic ne nécessite pas obligatoirement le recours à des examens biologiques. Cependant, en cas de sujets plus jeunes ou lorsque la plainte mnésique n’est pas au premier plan, des recomman- dations sur la mise en évidence d’arguments cliniques, radiolo- giques, neuropsychologiques et biologiques ont été émises. Parmi ces recommandations figurent les dosages dans le liquide céré- brospinal (LCS) des peptides amyloïdes Aβ 1-42 ± Aβ 1-40, la protéine TAU et les protéines TAU hyperphosphorylées (p-TAU). Initialement réalisés uniquement dans les laboratoires de biologie hospitaliers rattachés aux centres mémoire, les dosages de ces biomarqueurs peuvent maintenant être réalisés dans de nombreux laboratoires de biologie médicale, du fait de leur auto- matisation récente. Cependant, la criticité de la phase pré-analytique est à connaître et les valeurs usuelles et les seuils pathologiques dépendent de la technique utilisée. De ce fait, l’interprétation peut être délicate nécessitant alors le recours à des rapports entre les marqueurs dosés. Le dialogue clinicien-biologiste prend dans ce cas toute son importance. Les évolu- tions techniques laissent entrevoir la possibilité de doser dans un futur plus ou moins proche certains biomarqueurs dans le sang et non plus dans le LCS. Épidémiologie Les troubles neurocognitifs peuvent être d’origine dégé- nérative ou non dégénérative et regroupent des mala- dies cliniquement très diverses mais partagent comme caractéristiques communes une altération acquise et progressive des fonctions cognitives. Ces TNC évoluent d’un stage léger ou modéré jusqu’au stade majeur, le plus tardif, correspondant à une perte d’autonomie. Les TNC constituent une préoccupation de santé publique mondiale du fait de leur fréquence mais aussi de leur augmentation liée au vieillissement de la popu- lation. Parmi les TNC dégénératifs, la maladie d’Alzhei- mer est la maladie la plus fréquente. On trouve égale- ment parmi ces TNC dégénératifs : la démence uploads/Sante/ marqueurs-biochimiques-et-maladies-neurodegeneratives.pdf

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  • Publié le Aoû 06, 2022
  • Catégorie Health / Santé
  • Langue French
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