LES COMPOSITES A RENFORTS NATURELS : UN NOUVEAU CHALLENGE POUR L’ETUDE DE L’INT

LES COMPOSITES A RENFORTS NATURELS : UN NOUVEAU CHALLENGE POUR L’ETUDE DE L’INTERFACE FIBRE/MATRICE A. Bergeret et N. Le Moigne, Ecole des Mines d’Alès, Centre des Matériaux des Mines d’Alès (C2MA), 6 avenue de Clavières, 30319 Alès Cedex. Téléphone : 04 66 78 53 44, Télécopie : 04 66 78 53 65, Anne.Bergeret@mines-ales.fr, Nicolas.Le-Moigne@mines-ales.fr Mots clés : renfort naturel, interface/interphase fibre/matrice, fonctionnalisation de surface, caractérisations de l’interphase 1. INTRODUCTION : LE CAS DES COMPOSITES A RENFORTS DE VERRE Il est largement connu que les propriétés mécaniques des matériaux composites renforcés de fibres sont étroitement liées aux propriétés de l’interface/interphase fibre/matrice qui permet un transfert efficace des contraintes mécaniques dans le composite lors d’une sollicitation externe. Cette zone est créée lors de l’étape de mise en œuvre des composites, ce qui rend plus complexe la compréhension des mécanismes réels mis en jeu. Aussi, de nombreux développements ont porté ces dernières décennies sur la mise en place de moyens de caractérisation de cet interface/interphase, en particulier dans le cas des composites renforcés de fibres de verre. Il est possible de classifier ces méthodes en quatre familles : les analyses microscopiques, micromécaniques, macromécaniques et physicochimiques. Les outils microscopiques permettent aussi bien de visualiser la rugosité induite par le greffage de molécules en surface d’une fibre (MEB, AFM) que d’identifier les modes de rupture à partir de fractographies effectuées sur les composites (MEB). La zone de contact entre la fibre et la matrice, et en particulier la zone transcristalline susceptible de se développer à partir des fibres, peuvent être observées en mode TEM ou même en microscopie optique. Les couplages des méthodes d’observation avec les essais macro- et micromécaniques semblent être des outils d’avenir. Par ailleurs, parmi les développements expérimentaux importants réalisés, il est reconnu que les essais micromécaniques sur composites modèles monofilamentaires permettent d’accéder localement au comportement de la liaison fibre/matrice en mesurant la résistance interfaciale, essentiellement en cisaillement, plus rarement en traction. Ces essais sont basés sur différentes méthodes de mesure, dont les plus connues sont les méthodes de pull-out, de fragmentation ou d’indentation. Toutefois, des études comparatives et des tentatives de corrélation ont mis en évidence des divergences pour un même système pouvant aller de 10% à plus de 160%, et dont l’origine peut être liée au choix des algorithmes de dépouillement de données ou aux conditions expérimentales délicates de réalisation des composites modèles [Kim et May, 1998 ; Pitkethly et al., 1993]. Des améliorations récentes ont été apportées avec, entre autres, l’utilisation d’un critère énergétique [Zinck et al., 2001], le développement de la technique de nano-indentation permettant d’évaluer également l’épaisseur de l’interphase [Hodzic et al., 2000] ou les nombreuses corrélations établies avec d’autres techniques telles que la chromatographie en phase gazeuse inverse (IGC) [Pisanova et al., 2001a], la technique AFM [Li et al., 2013] ou la spectroscopie Raman [Pisanova et al., 2001b]. Contrairement aux essais micromécaniques, les analyses macromécaniques peuvent être menées directement sur les composites industriels et sont très utilisées pour analyser l’évolution des lois de comportement et ainsi caractériser indirectement la qualité interfaciale. Les pratiques les plus courantes consistent à réaliser des essais mécaniques sous sollicitations uniaxiales en traction, flexion, compression, cisaillement. Si l’ensemble des propriétés mécaniques est, dans une certaine mesure, influencé par l’interface fibre/matrice, il est important de souligner que les propriétés non gouvernées par le facteur « fibre » en l’occurrence les propriétés transversales le sont davantage. Les essais macromécaniques ont été associés de longue date à des techniques fines d’endommagement telle que l’émission acoustique. L’influence de l’interface/interphase fibre/matrice sur les propriétés viscoélastiques a été à ce jour étudiée par diverses techniques telles que la spectrométrie mécanique dynamique (DMA) ou la spectrométrie par fluage thermostimulé (FTS) en analysant la mobilité moléculaire des chaînes macromoléculaires dans la zone de transition vitreuse. Les méthodes d’analyse physicochimique sont nombreuses et variées. Des techniques d’analyse de surface des plus poussées ont été largement exploitées comme les techniques XPS, SIMS, Tof-SIMS ou AES dont la haute sensibilité peut engendrer une complexité des spectres en particulier dans le cas de systèmes industriels de traitements de surface des fibres de verre [Thomason et Dwight, 2000]. L’analyse thermique parfois en mode couplé (DSC, TGA couplé FTIR, pyrolyse couplé GC- MS, micro-TA) constitue un outil de caractérisation de l’interphase intéressant [Thomason, 2013]. L’énergie de surface des fibres est quant à elle un paramètre déterminant pour évaluer la qualité du mouillage des fibres par la résine polymère au moment de la mise en œuvre et donc pour quantifier l’adhésion interfaciale [Feuillade et al., 2006]. Cette énergie peut être déterminée à partir de l’angle de contact (méthode de la goutte), de la vitesse de montée capillaire (méthode de Washburn) ou de la force de mouillage (méthode de Wilhelmy). Différentes techniques spectroscopiques (NIR, MIR, PAS-IR, DRIFT) et chromatographiques (SEC) peuvent apporter des informations sur la qualité et la nature du greffage à la surface des fibres [Bergeret et al., 2002]. Actuellement, l'intérêt croissant pour les composites à base de fibres naturelles, en substitution totale ou partielle des fibres de verre, remet en cause, d’une part la pertinence de la chimie de surface initialement développée dans le cas des fibres de verre en raison du caractère organique et vivant des fibres naturelles, et d’autre part, celle des méthodologies associées pour caractériser l’interphase. Dans une première partie, cet article abordera la chimie de surface des fibres naturelles (en particulier celle de la fibre de lin) versus celle des fibres de verre et les traitements de surface les plus pertinents actuellement en développement. Dans une seconde partie, les méthodes de caractérisation de la surface des fibres naturelles et de l’interface/interphase fibre naturelle/matrice sont présentées. 2. LA CHIMIE DE SURFACE DES FIBRES NATURELLES 2.1 Les fibres naturelles et leur spécificités Parmi toutes les fibres naturelles utilisées pour des applications matériaux composites, les fibres de lin se présentent actuellement comme étant les plus disponibles en France et en Europe [Meirhaeghe, 2011]. Elles sont utilisées soit sous forme de fibres courtes (de 3 à 6 mm) dans des matrices thermoplastiques pour des applications en moulage par injection, soit sous forme de tissus techniques imprégnés de résine thermodurcissable pour des applications en infusion ou en moulage en compression. Leurs propriétés mécaniques figurent parmi les plus élevées avec un module d’Young et une contrainte en traction de 12 à 85 GPa et de 600 à 2000 MPa respectivement. Les fibres de lin sont composées de macromolécules de cellulose (environ 65%) arrangées en microfibrilles et noyées dans une matrice d’hémicellulose (xylane, glucomannane et xyloglucane à hauteur d’environ 15%), de lignine (environ 2%), de pectines (rhamnogalacturoname et autres acides uroniques) et de protéines riches en glycine (environ 2%) [Morvan et al., 2003]. Leur microstructure est extrêmement complexe avec la présence de plusieurs parois cellulaires arrangées en cylindres concentriques autour d’un cœur appelé lumen [Baley et al., 2002 ; Faruk et al., 2012]. 2.2 Les traitements de surface des fibres naturelles Des traitements de surface des fibres naturelles sont généralement nécessaires, d’une part pour améliorer le mouillage de celles-ci par la matrice/résine d’incorporation lors de la phase de mise en œuvre ainsi que la résistance au cisaillement interfaciale, et d’autre part pour diminuer le caractère hydrophile des fibres naturelles lié à la présence de groupes hydroxyles en surface. Ces traitements peuvent se classer en trois catégories : les traitements physiques, physicochimiques et chimiques. Les traitements physiques incluent généralement une séparation mécanique des faisceaux de fibres en filaments (opérations de rouissage, broyage, teillage, peignage) et une modification de composition chimique par extraction au solvant, à la vapeur d’eau ou par traitement thermique. Les traitements physicochimiques induisent un changement des propriétés structurelles et surfaciques de la fibre cellulosique. C’est le cas des traitements corona, UV, plasma, à l’ozone. Les traitements chimiques quant à eux, modifient la composition de surface des fibres. Ils sont effectués, soit par enrobage par des composés introduits dans la matrice en phase d’extrusion (cas du PP greffé anhydride maléique pour des composites PP/fibres naturelles), soit par trempage ou pulvérisation des fibres avant leur incorporation dans la matrice (cas des isocyanates, des organosilanes, de l’acéthylation et du traitement à la soude). En ce qui concerne l’incorporation des fibres de lin dans une matrice biosourcée et biodégradable telle que l’acide polylactique (PLA), plusieurs études récentes ont montré que l'interface PLA/lin est intrinsèquement de bonne qualité. Le Duigou et al . (2010a, 2010b) ont en effet constaté que la résistance interfaciale du PLA/lin est plus élevée que celle du composite PLA/verre, en raison d’une surface plus rugueuse et de contraintes résiduelles plus faibles pour la fibre de lin par rapport à la fibre de verre. Raj et al. (2011) a également montré l’existence d’interactions de Van der Waals et de liaisons hydrogène entre les groupes hydroxyles en surface de la fibre de lin et les extrémités carboxyliques de la matrice PLA favorisant l'adhésion interfaciale. Toutefois, de nombreuses recherches concernent actuellement l’amélioration des propriétés de surface des fibres via des traitements de surface, en vue de performances encore meilleures des biocomposites. Parmi ces traitements, les organosilanes utilisés depuis des décennies uploads/Sante/ pdf-parti-3-pdf.pdf

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  • Publié le Dec 08, 2022
  • Catégorie Health / Santé
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