COMMUNICATIONS DES EXPERTS Index prédictifs de succès et d’échec de l’extubatio

COMMUNICATIONS DES EXPERTS Index prédictifs de succès et d’échec de l’extubation J. Mancebo*, I. Vallverdú Service de médecine intensive, hôpital de Sant-Pau, Barcelone, Espagne extubation / fonction respiratoire / index / ré-intubation / sevrage extubation / respiratory function / index / reintubation / weaning INTRODUCTION Environ deux tiers des patients peuvent être séparés avec succès de la ventilation mécanique (VM) après un simple essai de ventilation spontanée (VS) à travers une pièce en T ou avec un faible niveau d’aide inspiratoire (habituellement pour une durée de 30 à 120 minutes), alors que la cause initiale de l’insuffisance respiratoire (IRA) a été corrigée [1, 2, 3, 4]. Il reste donc environ 30 % des patients qui nécessitent une VM prolongée du fait de la non tolérance d’un essai initial de sevrage. Une séparation précoce de la VM et l’ablation de la prothèse endo-trachéale sont d’importants objectifs et le clinicien doit alors quotidiennement essayer de com- prendre les mécanismes à l’origine de l’échec de sevrage, traiter les causes réversibles et ainsi réduire le nombre de jours où le patient reste ventilé [5]. En effet une prolon- gation non nécessaire de la VM augmente le risque de complications en particulier infectieuses ou de baro- traumatisme, de dysfonction cardio-vasculaire ou d’atteinte laryngée ou trachéale, et de faiblesse muscu- laire. À l’opposé un arrêt trop précoce de la VM condui- sant à une ré-intubation peut aussi augmenter la morbidité [6], la mortalité [6, 7], la durée de séjour en réanimation ou la nécessité d’une ventilation de longue durée [8]. Le clinicien doit donc accélérer le processus de sevrage dans la mesure du possible pour optimiser le pronostic des patients. Le succès de la séparation de la ventilation artificielle et le succès de l’extubation sont deux processus diffé- rents. La première étape concerne ce qui est appelé « le sevrage de la ventilation » et indique que le patient ne nécessite plus de support ventilatoire. Lorsque cette étape est franchie la question du clinicien devient : « Est-ce que le patient peut respirer spontanément sans sa sonde d’intubation ? » C’est le processus de l’extuba- tion. De nombreuses études ont mélangé les deux as- pects, et ce n’est que récemment que les deux processus ont été séparés, montrant que des mécanismes physio- pathologiques différents pouvaient expliquer l’échec du sevrage et l’échec de l’extubation. Les échecs de l’extu- bation varient entre 5 à 20 % des patients extubés. Les échecs de l’extubation sont associés à une surmortalité hospitalière et une augmentation de la durée de séjour en réanimation et à l’hôpital ainsi qu’une augmentation des besoins en trachéotomie. Ce chapitre se concentre sur les mécanismes physiologiques expliquant l’échec de l’extubation et essaye de décrire quels index prédic- tifs peuvent être utilisés. ÉCHEC DE L’EXTUBATION Définition, étiologie et importance clinique Le taux d’échec de l’extubation peut être défini comme le nombre de patients qui une fois extubés nécessitent la réinstitution d’une assistance ventilatoire dans les 24 à 48 h d’une extubation programmée : on divise donc le nombre de patients nécessitant la ré-institution de la VM (via une intubation endo-trachéale ou de manière non invasive) par le nombre total de patients extubés. L’extubation n’est réalisée qu’après deux étapes. La première consiste à décider de réaliser une épreuve de VS (par exemple en débranchant le patient du ventila *Correspondance et tirés à part. Adresse e-mail : jmancebo@hsp.santpau.es ; jordi.mancebo@blues.uab.es (J. Mancebo). Réanimation 2001 ; 10 : 728-32 © 2001 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés S1624069301001864/FLA teur), et la deuxième est l’évaluation de la tolérance d’une épreuve de VS sur pièce en T, en VS PEP ou avec un faible niveau d’AI. La durée de cette épreuve de VS varie entre 30 et 120 minutes. Les critères utilisés pour décider d’une épreuve de VS peuvent être les suivants : – la cause de la détresse respiratoire initiale s’est amé- liorée, – la SaO2 est ≥90 % avec une FiO2 ≤0,4 et une PEP ≤5 cmH2O, – absence de fièvre (température ≤38 °C), – Hb ≥8 g/dL, – état cardiovasculaire correct, – pas de désordre hydroélectrolytique, – pas de sédation intraveineuse dans les dernières 24-48 h, – état neurologique correct (score de Glasgow . 11). Lorsque les patients remplissent les critères suivants, ils peuvent être débranchés du ventilateur et une série de tests simples peut être réalisée : – mesure de la fréquence respiratoire (FR), – mesure du volume courant (VT), – mesure de la pression inspiratoire maximale (PIM). Si deux des critères au moins sont présents (FR ≤35 cycles/min,VT ≥5 mL/kg,PIM ≤–20 cmH2O), alors les patients peuvent être testés par une épreuve de VS. Les patients sont ensuite extubés si au cours de la période de 30 à 120 minutes de ventilation spontanée la bonne tolérance clinique est attestée par l’absence des signes ou symptômes ci-dessous : – augmentation de la FR de plus de 50 % ou FR ≥35 cycles/min de manière prolongée, – apparition d’arythmie cardiaque, – augmentation de la FC de plus de 20 % ou FC ≥140 battements/minute de manière prolongée, – instabilité hémodynamique (PAS < 80 mmHg ou > 160 mmHg), – agitation, sueurs ou altération du niveau de cons- cience. Cette approche permet à environ 75 % des patients évalués d’être extubés. Parmi ceux-ci, 5 à 20 % vont nécessiter une ré-intubation (ou une VNI dans les 48 h suivantes). Le type d’épreuve de ventilation spontanée (pièce en T ou AI) ne semble pas influencer l’issue du sevrage et de l’extubation. Le travail d’Esteban indique qu’une bonne tolérance clinique d’une épreuve de deux heures avec 7 cmH2O d’aide inspiratoire est autant couronnée de succès que l’épreuve standard sur pièce en T [3] : avec cette stratégie le taux de ré-intubation était 18,8 % avec la pièce en T et 18,5 % avec l’aide inspi- ratoire. Concernant la durée de cette épreuve, une étude récente [4] montrait qu’une épreuve de pièce en T de 30 minutes était aussi efficace pour identifier les patients qui pouvaient être extubés avec succès que lors d’une durée de 120 minutes. Dans cette étude incluant 526 patients, le taux de ré-intubation à 48 heures était identique 13,5 % (environ dans les deux groupes). Cependant d’autres données suggèrent qu’un nom- bre relativement important de patients puisse échouer une épreuve de VS au-delà de 30 minutes [4, 9]. De plus utilisant les critères mentionnés ci-dessus, le taux de ré-intubation peut varier considérablement en fonc- tion de l’étiologie de l’IRA. Vallverdú [9] montre que dans une population en IRA, le taux global de ré-intubation était 15,5 %. Ce taux variait de 35,7 % chez les patients ayant une atteinte neurologique cen- trale, à 0 % chez les patients ayant une BPCO ; pour les autres étiologies ce taux était de 8,6 %. Bien que l’échec de sevrage puisse être expliqué par les problèmes d’hypoxémie ou d’encéphalopathie, le mécanisme prin- cipal semble être une inadéquation entre la charge imposée aux muscles respiratoires et leur capacité [10, 11]. De plus la mise en VS, où les pressions intrathora- ciques sont négatives peut s’associer à une défaillance cardiaque du fait de l’augmentation de la postcharge ventriculaire gauche [12, 13]. Ainsi, si les patients sont sevrés en pression positive, les modifications de pression intrathoracique ne peuvent survenir qu’après l’extuba- tion. Ceci peut expliquer pourquoi jusqu’à un tiers des patients peuvent échouer après l’extubation du fait d’une défaillance cardiaque [2, 8, 14]. Enfin l’intuba- tion peut être responsable de lésions laryngées ou tra- chéales, semblant plus fréquentes avec des durées de ventilation prolongées et chez les femmes [15] ; ce facteur peut également expliquer des échecs de l’extu- bation. Des séries récentes indiquent que l’échec de l’extubation est associé avec une augmentation de la mortalité hospitalière [3, 4, 7, 9, 16]. De plus cela augmente la durée de la VM, la durée de séjour en réanimation et à l’hôpital et l’utilisation de la trachéo- tomie [3, 4, 8]. L’étiologie de l’échec de l’extubation semble influencer le pronostic avec une mortalité faible pour les problèmes liés aux voies aériennes supérieures (œdème laryngé, etc.), et plus élevé lorsque la ré-intubation est liée à d’autres facteurs [3, 4, 8, 17]. En effet les patients nécessitant une ré-intubation pour cause d’IRA, ont une mortalité de l’ordre de 30 % alors que celle-ci n’est que de 7 % si la cause de la détresse respiratoire post-extubation est une atteinte des voies aériennes supérieures [3, 8]. Ces données suggèrent que la pathologie entraînant la ré-intubation semble plus importante que la ré-intubation par elle-même pour expliquer ce mauvais pronostic. L’échec de l’extubation semble donc un facteur pré- dictif indépendant de mortalité [3, 7]. Dans une étude chez 74 patients médicaux ré-intubés dans les 72h de l’extubation, la mortalité était plus faible pour ceux ré-intubésdanslesdouze heures,etaugmentaitàmesure que la ré-intubation était plus tardive [8]. De manière Succès et échec de l’extubation 729 indépendante, les comorbidités, les défaillances d’orga- nes, la cause de ré-intubation, et le temps auquel est pratiquée cette ré-intubation semblait être des facteurs indépendants de mauvais pronostic. PRÉDICTION DE L’ÉCHEC DE uploads/Sante/ reanimation-echec-d-x27-extubation.pdf

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  • Publié le Jui 16, 2022
  • Catégorie Health / Santé
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