Sociétés n° 95 — 2007/1 Activités sociologiques Revue européenne des sciences s

Sociétés n° 95 — 2007/1 Activités sociologiques Revue européenne des sciences sociales – Cahiers Vilfredo Pareto Tome XLIV – 2006 – n° 135 Citoyenneté et démocratie providentielle Mélanges en l’honneur de Dominique Schnapper Volume dirigé par Serge Paugam avec la collaboration de Myriam Hachimi Alaoui Paris-Genève, Librairie Droz Les textes qui composent ces « mélanges » présentent les apports théoriques et mé- thodologiques des travaux de Dominique Schnapper et prolongent ses réflexions dans trois domaines de recherche : négociation des identités et statuts sociaux, mi- gration et intégration, citoyenneté et modernité. Ces thèmes sont abordés dans une perspective compréhensive, qui privilégie la transdisciplinarité, et met l’accent sur la réflexivité de l’acteur sans négliger le poids des structures et de l’histoire, en s’appuyant sur une conceptualisation idéal- typique. Jacques Coenen-Huther, insiste sur le caractère heuristique de cette ap- proche qui permet d’ancrer l’explication dans des « séquences comportementales plausibles », d’intégrer les expériences des sujets dans des formes sociales et politi- ques qui leur donnent sens. L’entretien avec D. Schnapper, réalisé par Giovanni Busino, offre au lecteur la possibilité d’appréhender les concepts fondamentaux dé- veloppés par la chercheuse à l’intérieur de son parcours intellectuel et universitaire. À partir de la typologie des expériences vécues du chômage, élaborée par Dominique Schnapper, et de ses propres travaux menés en Europe, Serge Paugam étudie l’impact du chômage sur l’ensemble des liens qui relient l’individu à la société (liens de filiation, de participation élective, de participation organique ou de citoyenneté). Il s’oppose à l’idée d’une relation simple entre chômage, pauvreté et rupture cumulative des liens sociaux, et insiste sur le rôle joué par les systèmes de régulation sociale du chômage (il distingue trois modèles en fonction de la place occupée par l’État et par la famille : « modèle public individualiste », « modèle public familialiste » et « modèle public de responsabilité partagée »). L’article de Corinne Rostaing propose une approche compréhensive de l’uni- vers carcéral, attentive aux interactions et à la réflexivité des acteurs. Elle élabore une typologie rendant compte de la pluralité des expériences carcérales, et insiste sur la nécessité de les saisir dans leurs contextes (trajectoires de vie, interaction entre la prison et la société...) François Xavier Schweyer examine la manière dont l’hôpital public – initiale- ment chargé de la protection sociale des indigents – va être intégré à partir des 142 Activités sociologiques Sociétés n° 95 — 2007/1 années 1940 au dispositif de l’« État providence » ou « État d’intervention », dans un projet politique d’accès de la majorité au progrès médical. L’auteur étudie la constitution de l’administration hospitalière, en relation avec les modèles et valeurs de l’administration d’État, sous l’angle de l’expérience vécue par les directeurs d’hôpitaux. Les contributions de Jacqueline Costa-Lascoux, Selim Abou et Beate Collet reviennent sur des « concepts clefs », tels que ceux d’assimilation, de laïcité ou de contrat social, dont l’utilisation sociale et politique a souvent obscurci le sens. Elles permettent ainsi une approche renouvelée des thématiques de l’immigration et de l’intégration, appréhendées en tant que processus complexes à partir du sens pro- duit par les acteurs. Jacqueline Costa-Lascoux retrace l’évolution de la prise en charge de l’immi- gration, d’une doctrine de l’assimilation à une philosophie de l’intégration. L’auteu- re rappelle que l’intégration n’est pas la simple « absorption » des immigrés par le corps social mais une dynamique qui engage la société dans son ensemble et ins- taure une relation, une interaction entre l’immigrant et la communauté des citoyens (le terme d’intégration renvoie étymologiquement à l’idée de « rendre entier »). Selim Abou étudie à partir de deux enquêtes (recueil et analyse de récits de vie d’enfants de Libanais vivant en Argentine et observation de l’expérience d’accul- turation de deux tribus guaranies au Canada) le processus d’intégration et les métamorphoses de l’identité qu’il génère, tels qu’ils sont vécus par les immigrants. Il met en évidence un rapport différencié à la société d’accueil chez les immigrés et leurs enfants : l’adulte tend à réinterpréter les traits culturels de la société d’accueil en fonction de sa société d’origine, tandis que l’enfant construit une identité com- posite en intégrant à la culture nationale des éléments issus de la culture de son pays d’origine. Beate Collet propose une théorisation de l’intégration, fondée sur la dimension politique et citoyenne, conçue comme un « aller-retour » entre l’individuel et le structurel. À partir des travaux de D. Schnapper et d’une enquête menée auprès de conjoints étrangers de couples mixtes en France et en Allemagne, elle élabore une typologie de modèles d’intégration (conçus comme des articulations spécifi- ques entre Demos et Ethnos, participation citoyenne et références culturelles ou ethniques) permettant de rendre compte de la pluralité des manières de s’intégrer à une société. Faisant écho au dernier ouvrage de D. Schnapper, La démocratie providen- tielle, les textes rassemblés dans la troisième partie abordent, à partir du fait reli- gieux, de l’exemple de la population suisse ou de l’identité juive, les dynamiques de l’être ensemble et de la citoyenneté. Constatant avec D. Schnapper l’érosion de toutes les formes de transcendance collective dans les sociétés démocratiques contemporaines, Danièle Hervieu-Léger met en lumière la persistance de structures symboliques du religieux qui continuent de modeler l’« armature du vivre ensemble » (ce qui lui permet de relativiser le modèle de « laïcité à la française »). Par conséquent, elle insiste sur la fécondité Activités sociologiques 143 Sociétés n° 95 — 2007/1 d’un déplacement du regard, de l’analyse des institutions religieuses en elles- mêmes vers celle des sociabilités qui naissent sur le terrain de leur décomposition. Pierre Centlivres explore les thèmes de l’identité et de la cohésion de la popu- lation suisse, à partir de leur mise en scène dans les expositions nationales. Vitrines de la production économique et culturelle du pays, celles-ci ont surtout pour objec- tif de rassembler une population hétérogène autour d’une représentation archéty- pale de la patrie. Shmuel N. Eisenstadt s’interroge sur les transformations de l’expérience juive dans le monde contemporain. Il les rattache à l’évolution du modèle de l’État na- tion, à la création de l’État d’Israël (qui devient le symbole de l’héritage et de la solidarité des communautés juives, le « centre géographique » de l’identité juive) ainsi qu’à l’accroissement de la tolérance dans les sociétés occidentales envers l’hé- térogénéité culturelle et sociale. Ces transformations concernent non seulement l’organisation des communautés mais également leur relation aux sociétés et aux civilisations dans lesquelles elles s’insèrent. La restructuration de l’identité juive passe par l’investissement de l’espace public, du politique. Enfin, Chantal Bordes-Benayoun et Freddy Raphaël considèrent ce processus dans le contexte de la société française. Ils constatent, depuis une vingtaine d’années, un effritement de l’identification des juifs à la France et un repli croissant sur la communauté et la tradition. Paul BARASCUT Étudiant en « Master 2 Recherche » Sociologie, Université Paul Valery Stéphanie LEMOINE et Julien TERRAL In Situ. Un panorama de l’art urbain de 1975 à nos jours Paris, Éditions Alternatives, 2005, 159 p. « Paris est tatoué ! », titre dans les années 1980 un journal en référence aux graffitis qui « souillent trois kilomètres des quais de Seine ». Ces manifestations visuelles offertes au regard de l’habitant parisien, considérées comme des salissures par les médias à l’époque, sont revisitées depuis leur origine à partir d’un point de vue artistique et historique dans le livre In Situ. Un panorama de l’art urbain de 1975 à nos jours, paru en 2005 aux Éditions Alternatives. L’ouvrage, signé Stéphanie Lemoine et Julien Terral, n’a pas de parti pris et traite de la subjectivation visuelle de l’espace du vécu urbain sous toutes ses for- mes. Il retrace le parcours de la peinture murale jusqu’au tag, en passant par des pochoirs, des mosaïques et des fresques. Un rapport historique précis donne la parole aux acteurs de ces pratiques. Des interviews retranscrivent leurs expérien- ces, découpées et entremêlées selon un ordre chronologique. 144 Activités sociologiques Sociétés n° 95 — 2007/1 In Situ donne à voir les interventions visuelles qui peuplent la ville de Paris. Le début du phénomène est marqué par des bonshommes ronds au regard fantasma- gorique, les Éphémères de Gérard Zlotykamien. Ils instaurent, vers 1963, cet art en recyclage permanent qui prolifère sur les longues palissades de Paris alors que les Halles sont en pleine construction et qu’on restaure le Louvre et la Comédie Française. « En 1991-1992, il était déjà difficile de se faire un nom, parce que tu étais noyé dans la masse », dit le tagueur/grapheur O’Clock, se remémorant l’époque où il a commencé à taguer jusqu’à devenir, à la fin des années 1990, une référence en France et au niveau international. Tout comme lui, d’autres artistes témoignent de la consolidation de l’art urbain, du street art, sur le territoire français. In Situ réu- nit les intégrants de tribus urbaines qui se frôlent : la pochoiriste Miss Tic côtoie sur la même page le grapheur Zevs et l’artiste urbain Honet. Ensemble, ils expriment leurs avis et racontent leurs expériences. Dans cette partie du livre, est abordé aussi le uploads/Societe et culture/ citoyennete-et-democratie-providentielle.pdf

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