L'APPROCHE TRANSCULTURELLE EN DIDACTIQUE DES LANGUES- CULTURES : UNE DÉMARCHE D
L'APPROCHE TRANSCULTURELLE EN DIDACTIQUE DES LANGUES- CULTURES : UNE DÉMARCHE DISCUTABLE OU QUI MÉRITE D'ÊTRE DISCUTÉE ? Chantal Forestal Klincksieck | « Éla. Études de linguistique appliquée » 2008/4 n° 152 | pages 393 à 410 ISSN 0071-190X ISBN 9782252036525 Article disponible en ligne à l'adresse : -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- https://www.cairn.info/revue-ela-2008-4-page-393.htm -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Distribution électronique Cairn.info pour Klincksieck. © Klincksieck. Tous droits réservés pour tous pays. La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites des conditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votre établissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie, sous quelque forme et de quelque manière que ce soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur en France. Il est précisé que son stockage dans une base de données est également interdit. Powered by TCPDF (www.tcpdf.org) © Klincksieck | Téléchargé le 18/05/2021 sur www.cairn.info (IP: 178.83.16.109) © Klincksieck | Téléchargé le 18/05/2021 sur www.cairn.info (IP: 178.83.16.109) L’APPROCHE TRANSCULTURELLE EN DIDACTIQUE DES LANGUES-CULTURES : UNE DÉMARCHE DISCUTABLE OU QUI MÉRITE D’ÊTRE DISCUTÉE ? 1 Résumé : cet article est une prise de position contre une des tendances actuelles de la société, « la tentation relativiste », que l’on retrouve en didactique des langues, et qui s’appuie le plus souvent sur un principe de neutralité : neutra- lité bienveillante ou tolérance indifférente ? Dans cette perspective, la « compo- sante transculturelle », qui concerne la problématique des valeurs universelles est-elle « discutable » peu fiable et à écarter de la discussion, ou bien mérite- t-elle d’être plus que jamais discutée, notamment dans ses rapports avec les autres composantes méta-culturelle, interculturelle, multiculturelle ou co-cultu- relle, plus particulièrement dans ses références au politique et à l’éthique ? 1. ÉLÉMENTS DE RÉFLEXION À PARTIR DE L’ÉTYMOLOGIE DU PRÉFIXE « TRANS » 1. 1. Préfixe emprunté au latin « trans » Il peut signifi er « à travers » (« transeuropéen », qui traverse l’Europe) ou « par delà » (« transalpin », par delà une frontière). Il évoque le pas- sage, l’échange, considéré soit positivement soit négativement ou alterna- tivement l’un et l’autre. Ainsi la transfusion sanguine au XVIIe suggère un échange possible de qualités entre les vivants. En France, à la Libération, les banques de sang sont vues comme des dépôts de redistribution d’un bien social commun ; la transfusion encore plus positive, devient un élément de solidarité. À l’opposé elle peut être considérée comme franchement négative dans la transmission de maladies (cf. le scandale du sang contaminé). On connaît également les questions médicales et bioéthiques que pose le « trans- sexualisme ». Celui-ci peut être la certitude négative de ne pas être à l’aise 1. Nous reprenons ici la grande partie de notre intervention au colloque international « Problématiques culturelles dans l’enseignement-apprentissage des langues-cultures », Tallinn 8- 10 mai 2008. © Klincksieck | Téléchargé le 18/05/2021 sur www.cairn.info (IP: 178.83.16.109) © Klincksieck | Téléchargé le 18/05/2021 sur www.cairn.info (IP: 178.83.16.109) 394 dans son corps et davantage lorsqu’on est l’objet en tant que communauté de transphobie (comme c’est souvent le cas en France par exemple). Mais il peut être aussi la certitude positive d’être libre de changer son idéal du moi. 1. 2. Dans le domaine culturel Le « transculturel » peut signifi er la traversée d’une culture à l’autre, que ce soit dans l’espace ou dans le temps : de la culture rurale à la culture urbaine, de la culture ouvrière à la culture bourgeoise, de la culture du Sud à celle du Nord, de la culture antique (latine ou grecque) à la culture moderne. En ethnologie, la « transculturation » concerne le processus de transition d’une culture à l’autre qui participe d’une transformation de la culture tra- ditionnelle et s’accomplit dans le développement de la culture nouvelle. En didactique des langues, ce peut être reconnaître la multiplicité interculturelle des possibilités de relations, d’échanges, de compréhension entre cultures- langues différentes. C’est alors la possibilité d’être à l’aise dans la mondia- lisation (devenir multilingue, cosmopolite, homme planétaire). Toutefois les phénomènes d’acculturation (adaptation d’un individu au milieu sociocultu- rel dans lequel il vit) peuvent entraîner des traumatismes d’acculturation des immigrés, tantôt considérés comme « bien acculturés », tantôt comme « mal acculturés » selon leur degré de maîtrise de la langue française. On se sou- vient de ce qu’on pourrait qualifi er d’ingérence totalitaire, le rapport Bénisti, qui tenait à la fois de l’ineptie et de la violence institutionnelle en portant atteinte aux droits humains puisqu’il interdisait aux parents de parler une autre langue que le français à la maison. Comme le souligne le sociolinguiste Louis-Jean Calvet au sujet de l’exclusion des minorités, pour sécuriser les enfants immigrés dans le système scolaire français, il faudrait les conforter dans la langue de leurs parents. En effet, si on est fi er de sa culture d’ori- gine, il est plus facile d’« intégrer » la culture du pays d’accueil ou mieux de s’y associer (mot emprunté au vocabulaire français de 1789-93). Le tra- vailleur social ou le pédagogue se doivent de considérer cette mise en ten- sion permanente des deux cultures, tension qui n’est pas sans conséquence sur le plan psychique, mais qui, délibérément travaillée par les sujets, peut créer chez eux une troisième culture. La question du cosmopolitisme et du multilinguisme est aujourd’hui d’actualité. La presse anglo-saxonne a ainsi avancé l’idée que la culture française serait en net recul parce qu’elle serait trop repliée sur elle-même. S’agit-il seulement d’un « manque de porosité » de la langue-culture française, d’un manque d’ouverture, d’adaptation à la communication transnationale et transculturelle, ou plutôt d’un problème de diffusion dû aux limites actuelles de la traduction du français dans les autres langues ? N’y a-t-il pas dès lors un problème d’un autre ordre, à savoir la domination économique anglo-saxonne ? Il ne faudrait pas oublier que les enjeux économiques et technologiques sont désormais au cœur de la culture, et semblent gouverner par conséquent une certaine conception de la transcul- turalité. Ainsi le Louvre est-il devenu une véritable multinationale qui doit désormais savoir se vendre pour s’exporter. À quel prix ? Celui de l’autocen- sure concernant certaines œuvres jugées plus ou moins scandaleuses ? On peut en ce domaine anticiper sur des confl its futurs. © Klincksieck | Téléchargé le 18/05/2021 sur www.cairn.info (IP: 178.83.16.109) © Klincksieck | Téléchargé le 18/05/2021 sur www.cairn.info (IP: 178.83.16.109) 395 Aujourd’hui le transculturel semble être représenté principalement par un média, le média télévisuel. Celui-ci est très souvent déconsidéré car rendu responsable de l’émiettement, l’éparpillement de la culture. Pourtant une forme d’art pourrait reposer sur l’unité plurielle de la Culture qui sans uni- formiser, rassemblerait et donnerait sens et forme à des éléments composites provenant des cultures « cultivées » « populaires » ou même « commercia- les » (cf. l’émission de France-culture « Le mauvais genre ») ? Or pendant longtemps – et dans le domaine éducatif entre autres – la culture a été liée à son approfondissement, au temps nécessaire à son acquisition mais aussi à la stabilité, à la norme, à la hiérarchie des valeurs et des œuvres : un poème de distribution des prix ne vaut pas un texte de Baudelaire, ni un slogan publi- citaire une maxime de Chamfort (cf. Alain Finkielkraut). Mais la culture n’est-elle pas liée aussi à une pensée critique en acte, à l’autoréfl exion, au doute, à ce qui en Europe depuis la Renaissance sait remettre en cause les traditions et les autorités ? Un transculturel, qui favorise le retour critique sur les manières de faire et de penser, sur les institutions et les œuvres, doit s’affranchir à la fois de l’adoration confi te des grandes Œuvres mais tout autant du relativisme esthétique qui a envahi les médias la didactique du FLE incluse, notamment lorsque celle-ci privilégie les documents authenti- ques. Une autre DLC devrait promouvoir une culture cultivée transculturelle renouvelée, celle des créations réfl exives et recherchées, celle des êtres et des œuvres qui traversent et transforment les nations, les ethnies, les classes sociales et les sujets humains. La DLC se doit de revisiter les cultures raf- fi nées qu’elles viennent d’en haut – la culture créative élitiste des grands romans, de la grande musique, du cinéma d’auteur – ou d’en bas – la culture créative populaire des chansons, des blagues, des proverbes ou celle du quo- tidien, du divertissement festif ou commercial – et cela afi n de les faire dia- loguer (coopérer et s’affronter) entre elles. Autre média, le web, « média des medias », semble être considéré actuel- lement comme le média le plus libre et le plus réactif et par conséquent le plus transculturel. Il favorise le libre accès à la connaissance, à travers les fron- tières des pays, des disciplines et des cultures. Mais ici encore la progression de la connaissance quantitative augmente au détriment de la connaissance qualitative. Il est en effet diffi cile de vérifi er ou de hiérarchiser uploads/Societe et culture/ l-x27-approche-transculturelle-en-didactique-des-langues-cultures.pdf
Documents similaires










-
43
-
0
-
0
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise- Détails
- Publié le Aoû 20, 2021
- Catégorie Society and Cultur...
- Langue French
- Taille du fichier 0.4585MB