LES JONGLEURS EN FRANCE AU MOYEN AGE DONATION ALPHONSE PEYRAT Ce volume a été p

LES JONGLEURS EN FRANCE AU MOYEN AGE DONATION ALPHONSE PEYRAT Ce volume a été publié avec l'aide du fonds spécial mis à la disposition de l'École pratique des Hautes Etudes par Madame la Marquise Arconati-Visconti en mémoire de son père Alphonse Peyrat. MAÇON, pnoTAT Fnrnns. imprimeurs. BIBLIOTHEQUE DE L'ÉCOLE DBS HAUTES ÉTUDES .JHJBUÉE SOUS LES AUSPICES DU MINISTÈRE DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE SCIENCES HISTORIQUES ET PHILOLOGIQUES CENT QUATRE-VINGT-SEPTIEME FASCICULE LES JONGLEURS EN FRANCE AU MOYEN AGE Par Edmond FARAL PARIS LIBRAIRIE HONORÉ CHAMPION, ÉDITEUR 5, QUAI MALAQUAIS 1910 Tous droits réservés LES JONGLEURS EN FF ^ ^^CE AU MOYEN AGE PAR Edmond FARAL A>CIE> ÉLÈVE DE l'ÉCOI.E NORMALE ET DE l'ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES DOCTEUR ES LETTRES PROFESSEUR AGRÉGÉ DE LUMVPRSITÉ PARIS LIBRAIRIE HONORÉ CHAMPION. ÉDITEUR 5, QUAI MALAQLAIS 1910 Tous droits réservés. Cet ouvrage forme le 187* fascicule de la Bibliothèque des Hantes Études P5 A M. JOSEPH BEDIER PROFESSEUR AU COLLEGE DE FRANCE Hommage de respect et d'affectueuse gratitude. . AVANT-PROPOS J'ai essayé, dans ce livre, de déterminer quelle part revient aux jongleurs dans la production littéraire de leur temps et quelle était leur condition. Sur le premier point, je ne l'ig-nore pas, les conclusions auxquelles jai atteint sont^assez indécises, pour deux causes principales : il métait impossible de pousser très avant l'étude intérieure des œuvres, d'où il y a pourtant beaucoup à attendre, mais qui eût dépassé singulièrement les limites de mon sujet ; et en outre, je me suis trouvé souvent fort empêché pour décider si tel auteur serait compté comme jon- gleur, comme ménestrel, ou comme clerc. Je pense, malgré tout, être arrivé à quelques approximations, qui peuvent offrir un certain intérêt. Sur le second point, qui est la condition des jongleurs, la tâche était relativement plus aisée, et peut-être m'en suis-je moins mal acquitté. Si j'étais arrivé, en cette double recherche, à des résultats satisfaisants, on conçoit qu'on aurait eu là un moyen de saisir d'une façon positive l'esprit de la littérature du moxen âge. En effet, une dépendance étroite lie les auteurs à la société où ils vivent. Et ce n'est pas à dire seulement que, si l'écrivain agit, il subit ; que la lumière qu'il rend, il l'emprunte ; qu'il réforme son milieu, aussi bien qu'il en est le produit. Il n est pas question que de goûts, de sentiments, de principes, de traditions, de pré- jugés qu'il accepte ou qu'il repousse. Mais, avant tout cela, il faut tenir compte qu'il appartient à un certain état social, à une classe, sur laquelle il ne saurait modifier à son gré le jugement du monde. On ne doit pas l'oublier quand, à distance, on prétend déterminer la signitîcation et la portée d une œuvre. Si la réputa- tion des auteurs s'échafaude sur leurs œuvres, il est aussi vrai X AVANT-PROPOS de dire que l'œuvre doit une bonne part de son prestige à celui de l'auteur ; et lui-même, le prestige de l'auteur tient autant à l'idée que le public se fait de son rôle qu'à la puissance intrin- sèque de sa pensée. Cette idée est extrêmement variable. Le poète a été, pour les Grecs, par exemple, un personnage presque surnaturel, favori des dieux qui l'inspiraient; il a été, en France, au xviii'^ siècle, un ingénieux ajusteur de mots et de rimes ; il a été, au XIX'' siècle, selon l'enthousiaste prétention des roman- tiques, le penseur qui éclaire l'humanité, le rêveur qui 1 enchante. Quelle a donc été, au moyen âge, l'attitude de l'opinion publique devant l'écrivain? quel accueil a-t-il reçu? quelle place lui a-t-on faite? Il n'est pas indifférent de le savoir, puisque le sachant, on sera à même de dire, avec plus de précision et d'exactitude, quels sont les éléments qui entrent à cette époque dans la notion de littérature. C'est une grande ambition de vouloir apporter la lumière en une question si complexe : le reproche de témérité qu'encourent ceux qui s'y risquent suffirait à les rendre sages, s'ils ne croyaient pas que cette témérité porte en elle-même son excuse. C'est mon devoir (pour finir par le principal), de faire ici mes remerciements à M. Antoine Thomas, auquel j'ai plus d'une rai- son d'être reconnaissant, et à M. Mario Roques, qui a bien voulu relire après moi les épreuves et m'aider de ses conseils. Je sais aussi ce que je dois à l'amitié de M. Lucien Herr, biblio- thécaire de l'Ecole normale. NOTE BIBLIOGRAPHIQUE Les travaux qui intéressent le plus directement l'histoire des jongleurs de France sont les suivants : lT3s MuRATORi, Antiquitales italicae inedii aevi, sive Dissertationes, etc., Milan, t. II, col. 831 ss. De spectaculis et ladis publicis medii aevi (intéresse surtout lltalie, mais aussi la France). 1834 De la Rue abbéj, Essai historique sur les bardes, les Jongleurs et les trouvères normands et anglo-normands. Caen, 3 vol. 1856 Le Clerc V.j, dans l'Histoire littéraire de la France, t. XXIII, p. 88 ss. 1875 ToBLER A. , Spielmannsleben im alten Frankreich, dans «/m neuen Reich », p. 321 ss. 1883 Lavoix (H.), fils, La musique au temps de saint Louis, 2' vol. du Recueil de motets français, p. p. G. Rayn.\ud, p. 353 ss. et 448 ss. 1883 Freymond E. , Jongleurs und ménestrels, diss. de Halle. 1886 Nyrop (]. . Storia delV epopea francese, trad. da Gorra. Florence, p. 275 36. • 1889 ScHCLTz A.), Das hôfische Leben zur Zeit der Minnesânger, 2* éd., Leipzig, t. I, p. 565 ss. (intéresse l'Allemagne et la France). 1891 WiTTHOEFT (F.), << Sirventes Joglaresc ». Ein Rlick auf das altfranzô- sische Spielmannsleben (Stengels Ausg- und Abhand., fasc. 88) (intéresse surtout la Provence, mais aussi la France). 1892 Gautier (L.), Les épopées françaises, 2* éd., Paris, t. Il, p. 3 ss. 1892 Mever (F. . Die Stânde, ihr Leben und Treiben, nach den altfranz. Artus- und abenteuerromanen (Stengel, Ausg. und Abhànd., fasc. 89], p. 89 ss. 1895 Bédier 'J.), Les fabliaux, p. 347 ss. 1900 Hertz \V. . Sinelmannsbuch, 2* éd., Stuttgai-t, p. 1 ss. 1903 Chambers E.-K.), The mediaeval Stage, Oxford, t. I, p. 23 ss. 1907 Bonifacio G.i, Giullari e uomini dicorte nel 200, Naples (intéresse surtout l'Italie, mais aussi la France). 1909 AuBRv P.\. Trouvères et troubadours (Collection des Maîtres de la musique, publiée sous la direction de J. Chantavoine), p. 157 ss. On trouvera citées en notes, par chapitres, les études particulières qui ne concernent qu'un point du sujet. PREMIERE PARTIE CHAPITRE I ORIGINE DES JONGLEURS Qu'est-ce qu'un jongleur ? C est la première question qui se pose au début d'un livre qui prétend être une histoire des jongleurs, et elle ne laisse pas d'être embarrassante. Supposons, en etïet, que nous répondions : uUn jongleur est un être multiple : c'est un musicien, un poète, un acteur, un saltimbanque ; c'est une sorte d'intendant des plaisirs attaché à la cour des rois et des princes ; c'est un vagabond qui erre sur les routes et donne des représentations dans les vil- lages ; c'est le vielleur qui, à l'étape, chante de « geste » aux pèlerins ; c'est le charlatan qui amuse la foule aux carrefours ; c'est l'auteur et l'acteur des « jeux » qui se jouent aux jours de fête, à la sortie de l'église ; c'est le maître de danse qui fait u caroler » et ballerles jeunes gens ; c'est le « taboureur », c'est le sonneur de trompe et de « buisine » qui règle la marche des processions ; c'est le conteur, le chanteur qui égaie les festins, les noces, les veillées ; c'est l'écuver qui voltige sur les chevaux ; l'acrobate qui danse sur les mains, qui jongle avec des couteaux, qui traverse des cerceaux à la course, qui mange du feu, qui se renverse et se désarticule ; le bateleur qui parade et qui mime ; le bouffon qui niaise et dit des balourdises ; le jongleur, c'est tout cela, et autre chose encore » ; — quand nous aurons fourni cette longue définition, nous n'aurons pas tout dit. On pourra encore se demander : « Un jongleur, était-ce donc tout cela à la Fahal. — Les jongleurs au moyen âge. 1 l CHAPITRE PREMIER fois ? ou bien une appellation unique ne recouvrait-elle pas des industries différentes, et un jongleur n'était-il pas ou poète, ou saltimbanque, ou musicien ? » Et encore : « Pour quelle époque la définition vaut-elle ? Convient-elle à tout le moyen âge ? ou bien faut-il la réserver à un instant particulier de l'histoire ? » Ces deux questions nous avertissent qu'on doit introduire dans la définition des distinctions d'individus et d'âges : convient-elle bien, en effet, telle quelle, à tous ceux que nous nommons jon- gleurs ? convient-elle même à un seul ? ne se pourrait-il pas que nous eussions créé une entité, construit une sorte de chimère au moyen d'éléments rapportés et disparates ? Nous nous garderons donc bien de donner dès le début une définition du jongleur ; ou plutôt nous en adopterons une, mais seulement à titre provisoire : elle sera uploads/s1/ faral-edmond-les-jongleurs-en-france-au-moyen-age-honore-champion-paris-1910-pdf.pdf

  • 44
  • 0
  • 0
Afficher les détails des licences
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise
Partager
  • Détails
  • Publié le Nov 27, 2021
  • Catégorie Administration
  • Langue French
  • Taille du fichier 19.5496MB