REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE DU CONGO Août, 2015 LOI FIXANT LE STATUT DES CHEFS COUT

REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE DU CONGO Août, 2015 LOI FIXANT LE STATUT DES CHEFS COUTUMIERS 1 EXPOSE DES MOTIFS La crise des valeurs traditionnelles compte parmi les principaux maux qui, non seulement, minent l’unité et la cohésion nationales, mais aussi hypothèquent le développement intégral, harmonieux et durable de la République Démocratique du Congo. Face à cette situation, la Constitution du 18 février 2006 reconnaît, en son article 207, l’autorité coutumière comme socle des valeurs traditionnelles. La présente Loi est donc la mise en œuvre de cette exigence constitutionnelle. Elle vient s’ajouter à l’arsenal juridique sur l’organisation territoriale, administrative et politique en République Démocratique du Congo qui confère au chef coutumier, en plus des responsabilités coutumières, des charges administratives. Elle prend en effet en compte les valeurs traditionnelles immuables et saines dans une société fondée sur le droit écrit, la démocratie, la bonne gouvernance et le respect des droits de l’homme. Elle vise notamment à : - affirmer le rôle protecteur du chef coutumier en ce qui concerne l’identité culturelle ainsi que les valeurs traditionnelles morales ; - réaffirmer le caractère apolitique du chef coutumier ; - réaffirmer l’implication du chef coutumier dans la sauvegarde de l’unité et de la cohésion nationales ; - réserver aux seules structures reconnues par la coutume le droit et le pouvoir de désigner le chef coutumier ; - confirmer le droit des pouvoirs publics de reconnaitre ou de prendre acte de la désignation du chef coutumier ; - reconnaitre à l’autorité coutumière le droit d’être consulté par les pouvoirs publics ; 2 - ouvrir la possibilité de mise en place de commissions consultatives locales, provinciales et nationales pour le règlement des conflits coutumiers ; - définir les voies de recours pour le chef coutumier lésé par les décisions et actes des autorités administratives hiérarchiques. Par ailleurs, elle détermine les obligations du chef coutumier. Dans cette perspective, un régime disciplinaire lui est appliqué. La présente loi s’articule autour de six chapitres ci-après : CHAPITRE Ier : Des dispositions générales CHAPITRE II : De l’exercice de l’autorité coutumière CHAPITRE III : Des droits, des obligations, du statut judiciaire et des incompatibilités CHAPITRE IV : Du régime disciplinaire et des voies de recours CHAPITRE V : Des conflits de pouvoir coutumier CHAPITRE VI : Des dispositions finales Telle est l’économie générale de la présente loi. 3 LOI N° 15/015 DU 25 AOUT 2015 FIXANT LE STATUT DES CHEFS COUTUMIERS L’Assemblée nationale et le Sénat ont adopté ; Le Président de la République promulgue la Loi dont la teneur suit : CHAPITRE IER : DES DISPOSITIONS GENERALES Section 1ère : De l’objet et du champ d’application Article 1er La présente Loi fixe le statut des chefs coutumiers. Elle s’applique au : 1. chef de chefferie ; 2. chef de groupement ; 3. chef de village, désigné conformément à la coutume locale. Est chef coutumier, toute personne désignée conformément à la coutume locale, reconnue par les pouvoirs publics et chargée de diriger une entité coutumière. 4 Section 2 : Des définitions Article 2 Au sens de la présente Loi, il faut entendre par : 1. autorité coutumière : pouvoir reconnu au chef coutumier et fonctionnant conformément à la coutume locale ou la personne revêtue de ce pouvoir ; 2. coutume locale : ensemble des usages, des pratiques et des valeurs qui, par l’effet de la répétition et revêtus d’une publicité, s’imposent, à un moment donné, dans une communauté, comme règles obligatoires ; 3. empêchement définit : toute situation qui, de manière définitive, rend impossible la poursuite de l’exercice des fonctions de chef coutumier ; 4. intronisation : ensemble de cérémonies et rites coutumiers exécutés conformément à la coutume locale après la désignation du nouveau chef en vue de son installation ; 5. pouvoir coutumier ; ensemble des mécanismes d’administration d’une communauté fondés sur les us et coutumes ; 6. terre des communautés locales : les terres occupées par les communautés locales qui y habitent, cultivent ou exploitent d’une manière quelconque, individuellement ou collectivement, conformément aux coutumes ou aux usages locaux. CHAPITRE II : DE L’EXERCICE DE L’AUTORITE COUTUMIERE Section 1ere : De la juridiction de l’autorité coutumière Article 3 L’autorité coutumière s’exerce au sein des entités territoriales suivantes : 1. la chefferie ; 2. le groupement ; 3. le village, organisé sur base de la coutume locale. 5 Article 4 Le chef coutumier réside, selon le cas, au chef-lieu de la chefferie, du groupement ou dans son village. Section 2 : Des conditions d’exercice des fonctions de Chef Coutumier Article 5 Nul ne peut exercer les fonctions de chef coutumier s’il ne remplit les conditions suivantes : 1. être de nationalité congolaise ; 2. être âgé d’au moins 18 ans ; 3. être ayant droit à la succession ; 4. être de bonne moralité ; 5. n’avoir pas fait l’objet d’une condamnation irrévocable à une peine privative de liberté pour infraction intentionnelle ; 6. avoir un niveau minimum de formation scolaire. Article 6 L’exercice des attributions de chef coutumier est subordonné à : 1. l’existence d’une entité territoriale reconnue ; 2. la présence d’une population ; 3. l’intronisation conformément à la coutume locale ; 4. l’investiture et la reconnaissance par les autorités publiques compétentes. Article 7 Le pouvoir du chef coutumier prend fin dans les cas ci-après : 1. décès ; 2. abdication ; 3. empêchement définitif ; 4. déchéance conformément à la coutume locale. 6 Dans ce cas, l’intérim et le remplacement du chef sont organisés conformément aux dispositions pertinentes de la section 5 du présent chapitre. Section 3 : De l’organisation de l’autorité coutumière Article 8 L’autorité coutumière est exercée par le chef coutumier. Celui-ci est assisté, le cas échéant, par des structures de consultation ou de concertation selon la coutume locale. Les chefs coutumiers peuvent créer des organisations civiles les regroupant dans le respect de la législation en vigueur. Article 9 Les chefs coutumiers peuvent être consultés, à tout moment, par les autorités publiques sur toute question relative à l’exercice du pouvoir coutumier. Section 4 : De la mission du chef coutumier Article 10 Sans préjudice des prérogatives définies dans la Loi organique n° 08/016 du 07 octobre 2008 portant composition, organisation et fonctionnement des entités territoriales décentralisées et leurs rapports avec l’Etat et les provinces et de la Loi organique n° 10/011 du 18 mai 2010 portant fixation des subdivisions territoriales à l’intérieur des provinces, le chef coutumier assure la pérennité des coutumes et la bonne marche de sa juridiction. A ce titre, il exerce les attributions spécifiques suivantes : 1. veiller à la cohésion, à la solidarité et à la justice sociale dans sa juridiction ; 2. sauvegarder et faire respecter les valeurs traditionnelles morales, le patrimoine culturel, les vestiges ancestraux dont les sites et lieux coutumiers sacrés ; 7 3. veiller, conformément à la Loi, à la protection des espaces fonciers qui relèvent des terres des communautés locales ; 4. promouvoir les relations de bon voisinage avec les entités voisines. Section 5 : De l’intérim et de la succession du Chef Coutumier Article 11 Outre les cas prévus à l’article 7 de la présente Loi, l’intérim du chef coutumier intervient dans l’une des circonstances ci-après : 1. l’absence prolongée de son entité ; 2. la suspension de ses fonctions conformément au régime disciplinaire ; 3. l’exercice d’une fonction incompatible. Article 12 Sans préjudice des dispositions des Lois mentionnées à l’article 10 de la présente Loi, en cas de vacance, l’intérim est assuré, s’il échet, conformément à la coutume locale. L’intérim prend fin à la cessation de la circonstance qui l’a justifié. Article 13 En cas de vacance de pouvoir dans une entité coutumière, l’agent administratif le plus gradé de l’entité avise, par écrit, selon le cas : 1. le gouverneur de province ou son délégué pour la chefferie ; 2. le chef de chefferie ou de secteur pour le groupement ; 3. Ll chef de groupement pour le village. Article 14 En cas de vacance, le gouverneur de province ou son délégué pour la chefferie, le chef de chefferie ou de secteur pour le groupement, le chef de groupement pour le village, le bourgmestre pour le groupement incorporé, selon le cas, se rend sur le lieu et dresse le procès-verbal de constat de vacance de pouvoir coutumier. 8 Article 15 Si le successeur est connu, l’autorité visée à l’article précédent autorise l’installation. Article 16 Dans le cas où le successeur n’est pas connu, l’autorité visée à l’article 14 de la présente Loi organise l’intérim et ouvre la voie à la succession. L’intérim du chef défunt est assuré, en tant qu’autorité coutumière, conformément à la coutume locale et tant qu’autorité administrative, conformément à la législation particulière en la matière. Article 17 Pour pourvoir à la vacance, l’autorité visée à l’article 14 de la présente Loi se rend sur le lieu et dresse les procès-verbaux ci-après : 1. d’authenticité de l’arbre généalogique ; 2. d’audition des membres de la lignée du prétendant ayant droit à la succession ; 3. de témoignage, selon le cas, des chefs de groupement, uploads/s1/chef-coutumier-loi 1 .pdf

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  • Publié le Jul 21, 2022
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