n. 24 c e n a Le Clown dans l’Enseignement de Jacques Lecoq Résumé Palavras-cha

n. 24 c e n a Le Clown dans l’Enseignement de Jacques Lecoq Résumé Palavras-chave Mots clés Resumo Le présent article nous montre que la pra- tique du style clown développé à l`École In- ternationale de Mime,Théâtre et Mouvement Jacques Lecoq appartient à la tradition de l`École du Vieux Colombier créé par Jacques Copeau dont le fondement est l`esprit enfantin et le jeu. Clown. Jacques Lecoq. Jacques Copeau. Clown. Jacques Lecoq. Jacques Copeau. O presente artigo nos mostra que a prática do estilo clown tal como é desenvolvida na Es- cola Internacional de Mimo, Teatro e Movimen- to de Jacques Lecoq pertence à tradição da Escola do Vieux Colombier criada por Jacques Copeau, que tem como base o espírito infantil e o jogo. Professeur de l’Histoire etd’esthétique des Arts de la Scèneà l’Université Franche-Comté, Besançon, France. Comédien, metteur en scène et pédagogue de théâtre formé à l’École Jacques Lecoq. guy.freixe@gmail.com Guy Freixe Freixe // Le Clown dans l’Enseignement de Jacques Lecoq Rev. Cena, Porto Alegre, n. 24, p. 46-54, jan./abr. 2018 Disponível em: http://seer.ufrgs.br/cena n. 24 c e n a 47 Le renouveau du clown de théâtre doit beau- coup à l’enseignement de Jacques Lecoq. En 1962, six ans après la création de son école à Paris, Lecoq commence un travail sur le jeu clownesque qui s’avèrera déterminant pour le renouveau du clown; un clown qui quittera la piste du cirque où il se meurt pour gagner la rue, les cabarets, les scènes de théâtre. Lecoq a œuvré à cette mutation du clown de cirque vers le clown de théâtre, ouvert à des situa- tions dramatiques renouvelées. Territoire dra- matique qu’il nommera dans son enseigne- ment, à partir des années 80, les « variétés comiques », incluant le burlesque, l’absurde, les excentriques… Mais avant de s’intéresser à cet enseigne- ment, faisons un petit détour pour mieux com- prendre l’héritage reçu par Lecoq, et éclairer ainsi sa filiation avec Jacques Copeau1. Le « vrai acteur » : le clown Copeau a été un semeur de graines. Un initiateur et un éveilleur. Il a toujours pensé - avant même de fonder, il y a de cela tout juste cent ans, le Théâtre du Vieux-Colombier - que la rénovation urgente du théâtre devait passer en premier par l’acteur. Et qu’il fallait débarras- ser la scène et le jeu des tricheries et faussetés accumulées depuis des lustres. C’est du côté de l’enfance, de l’instinct de jeu de l’enfant, que Copeau va chercher les fondements de sa pédagogie. Avait-il en tête l’aphorisme de Bau- delaire : « Le génie, c’est l’enfance retrouvée à volonté » ? Le fait est que Copeau attachait la plus grande importance au jeu des enfants 1 Cf. Freixe G., La Filiation Copeau – Lecoq – Mnouchkine, une lignée du jeu de l’acteur, Montpellier, L’Entretemps, coll. « Les voies de l’acteur », 2014. et avait jugé bon de ne pas envoyer les siens à l’école, comme nous l’apprend sa fille Ma- rie-Hélène Dasté, afin qu’ils tirent de leurs jeux seuls toute leur instruction : « Nous étions habités par une espèce d’invention perpétuelle, encouragée par mon père, et qui d’ailleurs pour lui était comme la loi, le secret de l’édu- cation d’un acteur : lui faire garder son esprit d’enfance, lui faire retrouver tou- jours cette faculté d’émerveillement et d’étonnement qui est celle des en- fants2. » Copeau voulait préserver chez l’acteur cette faculté de poésie et de créativité, cet état de jeu fait de disponibilité, d’invention, d’attention et d’imagination, et c’est avec de jeunes en- fants de dix à quatorze ans qu’il va commen- cer, pendant la guerre, à mener ses premiers exercices pédagogiques pour se préparer à l’ouverture de son École du Vieux-Colombier. En proposant un travail autour des fables de La Fontaine, il se montre dès le début vigilant à ce que les enfants entrent dans les personnages par le corps : non pas seulement en « signifiant » l’animal pour qu’il soit reconnaissable, mais en le « mimant intérieurement », en recherchant par exemple « la démarche silencieuse et dé- liée du chat pour qu’apparaisse son caractère »3… Copeau veut que ce soit par le corps et une imagination toute physique que l’enfant se lance en premier dans le jeu dramatique. Il se méfie des mots et de l’analyse psycholo- gique des personnages de la fable, comme si 2 Rencontre avec Marie-Hélène Dasté, Catherine Dasté, Christophe Allwright : une famille d’acteurs , rencontre orga- nisée le 19 mars 1993 dans le cade des Ateliers de formation permanente du Théâtre du Campagnol, éd. Théâtre du Cam- pagnol - Centre Dramatique National de Corbeil-Essonnes, VHS. 3 Copeau J., Registres VI : L’École du Vieux-Colombier, textes établis, présentés et annotés par Sicard Cl., Paris, Gallimard NRF, coll. « Pratiques du théâtre », 2000, p. 99. Freixe // Le Clown dans l’Enseignement de Jacques Lecoq Rev. Cena, Porto Alegre, n. 24, p. 46-54, jan./abr. 2018 Disponível em: http://seer.ufrgs.br/cena n. 24 c e n a 48 la rationalité du langage éloignait l’enfant du mimétisme premier et de la spontanéité créa- trice. Copeau se dit enchanté par ces premiers exercices sur l’improvisation à partir des ani- maux et il est conscient qu’ils vont orienter sa recherche future : « Cette mine d’observation, écrit-il dans son Cahier, et l’expérience de ces exercices seront d’un grand secours à l’artiste pour la représentation plus ou moins forcée et caricaturée des personnages de la comédie4.» Copeau cherche à déclencher chez l’enfant un jeu libre, inventif, personnel, qui le “transporte“ dans l’imaginaire. Il attachera à ce mouvement libératoire la plus grande importance par la suite. Mais pour cela, il faut que l’enfant entre totalement dans son jeu, qu’il joue vraiment, c’est-à-dire qu’il quitte la réalité pour vivre dans l’imaginaire. C’est la raison pour laquelle il refuse toute inféodation à l’écrit : « Se défier surtout de ce qui nous rapproche de la litté- rature. Fuir aux antipodes. Pas de rapport ni de communication. Il ne s’agit pas d’improvi- ser d’après, mais d’improviser tout court. Pas d’intermédiaire. L’improvisateur vaut ce qu’il vaut. Et tant vaut l’improvisation…5. » Copeau se rend compte alors qu’il y a deux écoles possibles, qui s’opposent quant à la nature du jeu recherché : l’école de l’improvisation et l’école de l’interprétation. Dans l’improvisation, l’acteur est confronté avant tout au présent et à l’instant partagé avec le partenaire et le public. Dans l’interprétation, qui part du texte dramatique, il doit médiatiser avec l’épaisseur sémantique du langage. Copeau opte pour l’improvisation. Il s’en ouvre rapidement à ses deux complices, Charles Dullin et Louis Jou- vet, qui sont au front. Leur correspondance, 4 Idem, p. 101. 5 Note de Copeau sur la lettre de Jouvet du 10 janvier 1916, in Registres VI : L’École du Vieux-Colombier, op. cit., p. 110. de décembre 1915 à avril 1916, tourne autour de cette formidable révolution qu’est la dé- couverte du jeu improvisé et des perspectives nouvelles qu’elle ouvre. En janvier 1916, Copeau franchit une nou- velle étape. Il découvre avec enthousiasme les improvisations clownesques des trois frères Fratellini. Il écrit à sa femme : « Je crois que je n’aime plus réellement que la farce au théâtre. J’ai été cinq fois au Cirque revoir les mêmes clowns6. » Il admire leurs lazzi, et leur jeu sans cesse renouvelé avec le public : « Un soir, un de ses lazzi déclenche le rire sonore et prolon- gé d’une dame de la galerie. [Le clown] s’arrê- ta net et, campé de profil, dévisagea la rieuse, sans bouger, les sourcils hauts. Et comme la femme riait de plus en plus, il ne cessait de la regarder. Puis il reprit son exercice, et il ne fit rien, ce soir-là, qui ne fût en fonction de cette complicité qu’il avait dans la salle. La saveur de son jeu en était décuplée7. » Il admire « la grâce alerte de leurs corps entraînés8 », qui leur permet de trouver une transposition des senti- ments par une écriture poétique du geste, et leur capacité à inventer au présent, dans une interaction constante avec la salle. Il est frappé par la justesse de la définition d’un des prin- cipes de leur art : « Le mouvement, le rythme et la précision9. » Copeau rapporte dans son carnet ce qu’il écrit, en juin de la même année, à son ami Jaques Dalcroze : « (…) Et puis voir se replacer, en serviteur de livrée, au cirque, celui (l’Individualité précise) que l’on vient de 6 Copeau J., Cahier « La Comédie improvisée », Registres III : Les Registres du Vieux Colombier I, textes recueillis et établis par Dasté M. H. et Maistre Saint-Denis S., Paris, Gallimard NRF, coll. « Pratique du théâtre », 1979, p. 319. 7 Idem., p. 320. 8 Ibid. 9 Ibid. Freixe // Le Clown dans l’Enseignement de Jacques Lecoq Rev. Cena, Porto Alegre, n. 24, p. 46-54, jan./abr. 2018 Disponível em: http://seer.ufrgs.br/cena n. 24 c e n a 49 voir faire des miracles… - j’allais au cirque pour cela ! L’un se détache du groupe – puis uploads/s3/ 1-pb 3 .pdf

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