1 CHRONIQUE DES ARTS PLASTIQUES DE LA FÉDÉRATION WALLONIE-BRUXELLES 1er QUADRIM

1 CHRONIQUE DES ARTS PLASTIQUES DE LA FÉDÉRATION WALLONIE-BRUXELLES 1er QUADRIMESTRE 2021 83 1 2 2 3 M 82 DOSSIER La Fédération Wallonie- Bruxelles/Administration générale de la Culture, a pour vocation de soutenir la littérature, la musique, le théâtre, le cinéma, le patrimoine culturel et les arts plastiques, la danse, l’éducation permanente des jeunes et des adultes. Elle favo­ rise toutes formes d’activités de création, d’expression et de diffusion de la culture à Bruxelles et en Wallonie. La Fédération Wallonie-Bruxelles est le premier partenaire de tous les artistes et de tous les publics. Elle affirme l’identité culturelle des Belges francophones. ONT COLLABORÉ Michel Baudson Julie Bawin Véronique Bergen Sylvia Botella Koen Brams Sandra Caltagirone Florence Cheval Hadrien Courcelles Laurent Courtens Julie Crenn Clémentine Davin Joris D’hooghe Benoit Dusart Jeanpascal Février Philippe Franck Pauline Hatzigeorgiou Antoinette Jattiot Bernard Marcelis Magali Nachtergael Mathilde Roman Septembre Tiberghien Dork Zabunyan 83 EDITO À l’entame de l’année 2020, l’art même livrait un premier regard rétrospectif, nécessairement partiel, sur la scène artistique bruxelloise et internationale d’obédience concep­ tuelle. La présente livraison poursuit cette étude au travers de la relation d’événements phares et de témoignages de quelques acteurs de ces années 70, au moment même où son principal protagoniste, le collectionneur Herman J. Daled, dont l’indéfectible soutien aux artistes se manifeste encore en ces colonnes, nous quittait en novembre dernier. Ce “collecteur”, tel qu’il se définissait, aimant filer la méta­ phore de la collecte avec ce qu’elle sous-tend de hasards, de déplacements et de contacts nombreux et rapprochés avec les artistes, a littéralement cueilli, entre 1966 et 1978 pour ce qui nous concerne, l’art au plus près de son pro­ cessus d’émergence. Ainsi, le parcours de terrain de ce collectionneur hors norme qui fut aussi éditeur et soutien actif auprès de lieux d’exposition, privés et institutionnels, est-il exemplaire de par son engagement en temps réel envers les artistes et leurs créations sans qu’il ait fallu attendre que le temps fasse œuvre de reconnaissance. Exemplaire aussi est la reconsidération dont il a su faire preuve avec beaucoup de discernement et d’acuité des rapports à l’acquéreur, au regardeur et, partant, au statut de l’œuvre, autant de révisions encore d’actualité. À l’instar du premier volet dédié à cette scène désor­ mais historique, cette seconde entrée en matière se déploie de façon organique. Gageons toutefois qu’elle parvienne à restituer un tant soit peu l’esprit d’une époque qui, pour ne pas être si lointaine, ne nous apparaît pas moins déjà sin­ gulière. Un temps où les protagonistes étaient identifiables sur l’échiquier international de l’art, un temps où s’exprimait encore la notion d’avant-garde, un temps où les débats et les prises de position étaient de règle. Christine Jamart Rédactrice en chef ÉDITEUR RESPONSABLE Pol Mareschal DIRECTEUR Service Général de la Création Artistique RÉDACTRICE EN CHEF Christine Jamart SECRÉTAIRE DE RÉDACTION Ivo Ghizzardi SUPPORT ADMINISTRATIF ET DIFFUSION Delphine Bronckers GRAPHISME Pam&Jenny & Deborah Robbiano Pour nous informer de vos activités : ivo.ghizzardi@cfwb.be christine.jamart@cfwb.be Agendas & abonnements : delphine.bronckers@cfwb.be > l’art même n’est pas responsable des manuscrits et documents non sollicités. Les textes publiés n’engagent que la responsabilité de leur·s auteur·e·s. Toute reproduction des textes et mises en page est interdite sans accord écrit de la rédaction. 1 Gilles Ribero, Clairière, photogrammétrie, boucle vidéo full HD, projection vidéo stéréo, 1’30, 2020 L'oeil et son envers. L'image comme volume. Pièce d'accompagnement au roman Clairières. © Gilles Ribero 2 Capture écran de Splendid's, création sur Zoom en live dans le cadre du Festival Fantôme au Théâtre National de Bretagne le 19 novembre 2020 par Sylvia Botella © Splendid's de Arthur Nauzyciel BRUXELLES ANNÉES 70 CONVERGENCES INTER- NATIONALES, UNE SUITE Jacques Charlier, panneau extrait de Salto/Arte, Je/Nous, 1975, ensemble de 12 panneaux de 50 x 60 cm, comprenant 102 photogra­ phies n/b de Nicole Forsbach. Collection du Musée d'Ixelles De gauche à droite et de haut en bas : 1-7 : performance pyrotechnique de Pierre-Alain Hubert. 8-9 : performance de Joseph Beuys sous la bannière de Ben. 4 5 M 83 DOSSIER M 83 DOSSIER MTL CAPITA SELECTA / SUJETS CHOISIS La galerie MTL, que Fernand Spillemaeckers a fondée à Bruxelles en 1970, a présenté plus d’une centaine d’expositions auxquelles ont surtout participé les protagonistes de l’art dit conceptuel, dont John Baldessari, Marcel Broodthaers, Jacques Charlier, Daniel Buren et André Cadere. Bien qu’une multitude de collectionneurs réputés aient suivi la galerie dès le tout début et malgré le statut quasi mythique dont MTL a continué à bénéfi­ cier après sa fermeture, la vie et l’œuvre de Spillemaeckers n’ont cependant pas, ou à peine, fait l’objet de recherches à ce jour. Qui donc était Fernand Spillemaeckers ? Quels étaient les enjeux de MTL1 ? 1. Le Fondateur Ferdinand Clementina — Fernand — Spillemaeckers est né le 23 juillet 1938 à Malines. Son père est chef comptable du syndicat socialiste FGTB ; sa mère exploite quelques merceries. Après ses humanités, Fernand choisit de suivre une formation artistique à l’Académie des Beaux-Arts de Bruxelles où il rencontre sa future épouse, Lili Dujourie, avec laquelle il aura deux enfants, Sophie et Bart. Après ses études, Spillemaeckers devient l’assistant de son professeur, le peintre Léon Devos. Jeune artiste, Spillemaeckers expose à Celbeton à Termonde (1964 et 1966) et au Studio Callebert à Roulers (1965), à la salle Bührmann à Anvers (1965), à la galerie Egmont à Willebroek (1966) et au Musée des Beaux-Arts d’Ostende (1966). Son œuvre attire l’attention d’importants auteurs et critiques d’art, tels qu’Adolf Merckx, Jan Walravens et Piet Van Aken. Parallèlement, il se profile comme critique d’art et publie des contributions dans l’hebdomadaire syndical De Werker (à partir de 1957) et dans le journal De Volksgazet (à partir de 1969). Après avoir été actif en tant qu’artiste pendant plusieurs années, Fernand Spillemaeckers décide d’entre­ prendre des études universitaires en philologie romane à l’ULB. C’est cet artiste plasticien et critique d’art, romaniste diplômé et professeur au Collège Charles Buls à Bruxelles, qui, dans le courant de l’année 1969, entreprend d’ouvrir une galerie d’art contemporain dans la capitale : MTL. 2. Concepts — Celbeton, Termonde, 1970 La carrière de commissaire d’expositions de Fernand Spillemaeckers débute toutefois ailleurs, non pas à Bruxelles, mais à Termonde, dans un café le long d’une route, Het Zaaltje, où l’association Celbeton organise des activités culturelles depuis le 21 juillet 1957. Au début de l’année 1970, il présente dans cette ville provinciale de Flandre orientale des “dessins de travail” de Guy Mees, une contribution d’Yves De Smet, un “travail en série” de Lili Dujourie, une copie du pamphlet Mise en garde (1969) de Daniel Buren et l’illustration d’une œuvre de cet artiste français, à savoir la page centrale du catalogue de Prospect 69. Le jour de l’ouverture, on peut en outre entendre une bande sonore, Referentie voor een marxistisch forma­ lisme [référence pour un formalisme marxiste], réalisée par Spillemaeckers, qui a demandé à deux jeunes femmes de lire à haute voix d’innombrables passages de textes — en français et en néerlandais — écrits par, entre autres, Georg Lukacs, Roland Barthes et Louis Althusser. Ainsi, Fernand Spillemaeckers joue cartes sur table et se révèle un intel­ lectuel critique au programme radicalement marxiste et avant-gardiste. L’ensemble — l’exposition et l’œuvre sonore — est présenté sous la forme de Concepts. Aussi est-ce d’emblée la première fois qu’on utilise ce terme pour titrer une exposition en Belgique ! Adolf Merckx, le secrétaire de Celbeton, se souvient du projet comme suit : “Ce fut une première tentative de rompre avec le caractère statique de la plupart des expo­ sitions et de la relation artiste-art-public. […] Qui a pu prê­ ter attention aux thèses mentionnées a dû se défaire de toute une série de liens, de réflexes intérieurs, de pistes de réflexion sans issue, pour progressivement s’orienter vers un règlement de compte continu. Le passage de la pensée statique de la vie à l’interprétation dynamique du monde ne signifie ni plus ni moins qu’une révolution sans fracas d’armes ni violence, mais pas moins radicale pour autant2”.  3. 1970-1971 — MTL — 48, rue Armand Campenhout, 1050 Bruxelles Le 8 janvier 1970, deux jours avant l’inauguration de l’exposition à Celbeton, Spillemaeckers écrit une lettre à Michel Claura, le demi-frère de Daniel Buren, alors actif comme critique d’art à la revue marquée à gauche, Les Lettres françaises. En marge d’un exposé sur un nombre de questions théoriques pertinentes, Spillemaeckers lui demande de bien vouloir lui transmettre les adresses de plusieurs artistes : “Pour une galerie qui s’ouvre vers la fin de ce mois-ci, on me demande d’entrer en contact avec Buren, Toroni et éventuellement Carl Andre. Si vous pouviez me procurer leurs adresses, nous serions déjà beaucoup avan­ cés3”. La démarche n’est pas tout à fait honnête, car c’est Spillemaeckers lui-même qui compte ouvrir une galerie. À noter qu’au moment où Fernand Spillemaeckers envoie le courrier à Michel Claura, deux mois avant la première exposition à MTL, il sait déjà qui il veut présenter, mais ne dispose pas encore d’un programme établi. Seule la pre­ mière exposition est fixée et elle n’est pas des moindres uploads/s3/ am83.pdf

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