T exte 1 : L’art est illusion L’art est présenté ici comme une puissance trompe
T exte 1 : L’art est illusion L’art est présenté ici comme une puissance trompeuse, puisqu’il nous fait prendre l’image du lit pour un lit concret, qui lui-même n’est qu’un exemplaire possible de la définition du lit ; seule l’idée du lit est parfaite et indestructible. – [Socrate] Donc peintre, fabricant de lits, dieu, ces trois-là président à trois espèces de lits. – [Glaucon] Oui, ces trois-là. – Le dieu, lui, soit qu’il ne l’ait pas voulu, soit que quelque nécessité se soit imposée à lui de ne pas fabriquer plus d’un lit dans la nature, le dieu ainsi n’a fait que ce seul lit qui soit réellement lita, Mais le dieu n’a pas donné naissance à deux lits de cet ordre, ou à plus, et il est impossible qu’ils viennent à naître. – Comment cela ? dit-il. – C’est que, dis-je, s’il en créait ne fût-ce que deux, en apparaîtrait à nouveau un unique dont ces deux-là, à leur tour, auraient la forme, et ce serait celui-là qui serait ce qui est réellement un lit, et non pas les deux autres. – C’est exact, dit-il. – Sachant donc cela, je crois, le dieu, qui voulait être réellement le créateur d’un lit qui fût réellement, et non pas d’un lit parmi d’autres ni un créateur de lit parmi d’autres, a fait naître celui-là, qui est unique par nature. – Oui, c’est sans doute cela. – Eh bien veux-tu que nous lui donnions le nom d’auteur naturel de cet objet, ou quelque autre nom de ce genre ? – Oui, ce serait juste, dit-il, puisque c’est bien par nature qu’il l’a créé, aussi bien que toutes les autres choses. – Et quel nom donner au menuisier ? N’est-ce pas celui d’artisan du lit ? – Si. – Et le peintre, sera-t-il lui aussi l’artisan, et le créateur d’un tel objet ? – Non, d’aucune façon. – Que déclareras-tu alors qu’il est, par rapport au lit ? – Voici, dit-il, à mon avis le nom le plus approprié dont on pourrait le nommer : imitateur de ce dont eux sont les artisansb. – Soit, dis-je. Donc tu nommes imitateur l’homme du troisième degré d’engendrement à partir de la nature ? – Oui, exactement, dit-il. [...] – Mais dis-moi, à propos du peintre : te semble-t-il entreprendre d’imiter, pour chaque chose, cela même qu’elle est par nature, ou bien les ouvrages des artisans ? – Les ouvrages des artisans, dit-il. – T els qu’ils sont, ou tels qu’ils apparaissent ? T u dois en effet faire encore cette distinction. – En quel sens l’entends-tu ? dit-il. – En ce sens-ci : un lit, que tu le regardes de côté, de face, ou sous n’importe quel angle, diffère-t-il de lui-même en quoi que ce soit, ou bien n’en diffère-t-il en rien, mais apparaît-il seulement différent ? Et de même pour les autres objets ? – C’est la seconde réponse, dit-il : il apparaît différent, mais ne diffère en rien. – Alors examine ce point précisément : dans quel but a été créé l’art de peindre, pour chaque chose : en vue d’imiter ce qui est, tel qu’il est, ou bien ce qui apparaît, tel qu’il apparaît ? est-il une imitation de la semblance, ou de la vérité ? – De la semblance, dit-il. – Par conséquent l’art de l’imitation est assurément loin du vraic et, apparemment, s’il s’exerce sur toutes choses, c’est parce qu’il ne touche qu’à une petite partie de chacune, et qui n’est qu’un fantôme. Ainsi le peintre, affirmons-nous, nous peindra un cordonnier, un menuisier, les autres artisans, alors qu’il ne connaît rien à leurs arts. Cependant, pour peu qu’il soit bon peintre, s’il peignait un menuisier et le leur montrait de loin, il pourrait tromper au moins les enfants et les fous, en leur faisant croire que c’est véritablement un menuisier. – Oui, forcément. Platon, La République, IVe s. av. J.-C., trad. E. Chambry, Les Belles Lettres, 1932. Aide à la lecture a. L’expression « réellement lit » renvoie à l’essence même du lit, sa forme originelle, ce que Platon appelle l’Idée ou la forme d’un être. b. La peinture est doublement illusoire puisqu’elle est l’apparence d’une apparence. Le lit de l’artisan a une réalité concrète et l’homme peut y dormir, mais il n’est que la copie de l’Idée du lit. c. Croire que l’œuvre d’art nous livre la réalité, c’est être ignorant et dupe. C’est donc une faillite intellectuelle et morale à la fois. L’art est dangereux. Questions 1. Quel est le thème de cet extrait de texte ? 2. Quelle est la thèse de l'auteur ? 3. Quels sont l'objectif et l'intérêt du texte de Platon ? 4. Pourriez-vous donner quelques exemples pour illustrer la thèse de l'auteur ? 5. Quelles distinctions conceptuelles importantes aborde le texte ? 6. Qu’est-ce qui est réel : ce que l’homme conçoit (idée), ce qu’il fabrique (chose), ou ce qu’il représente (art) ? T exte 2 : le beau est une création de l'esprit Le beau de la nature et celle de l'art ne sont pas défnies de la même manière. L'esthétique a pour objet le vaste empire du beau... et pour employer l'expression qui convient le mieux à cette science, c'est la philosophie de l'art ou, plus précisément, la philosophie des beaux-arts. Mais cette définition, qui exclut de la science du beau le beau dans la nature, pour ne considérer que le beau dans l'art, ne peut-elle paraître arbitraire ? [...] Dans la vie courante, on a coutume, il est vrai, de parler de belles couleurs, d'un beau ciel, d'un beau torrent, et encore de belles fleurs, de beaux animaux et même de beaux hommes. Nous ne voulons pas ici nous embarquer dans la question de savoir dans quelle mesure la qualité de beauté peut être attribuée légitimement à de tels objets et si, en général, le beau naturel peut être mis en parallèle avec le beau artistique. Mais il est permis de soutenir dès maintenant que le beau artistique est plus élevé que le beau dans la nature. Car la beauté artistique est la beauté née et comme deux fois née de l'esprit. Or, autant l'esprit et ses créations sont plus élevés que la nature et ses manifestations, autant le beau artistique est lui aussi plus élevé que la beauté de la nature. G. W. HEGEL, 1835, Esthétique Questions 1. Quel est le thème de cet extrait de texte ? 2. Quelle est la thèse de l'auteur ? 3. Quels sont l'objectif et l'intérêt du texte de Hegel ? 4. Pourriez-vous donner quelques exemples pour illustrer la thèse de l'auteur ? 5. Quelles distinctions conceptuelles importantes aborde le texte ? 6. Quelle différence entre le beau de la nature, donné, et le beau dans l’art, créé ? T exte 3: La peinture doit imiter la nature La Renaissance, dont Léonard de Vinci est un artiste emblématique, retrouve largement les valeurs et les exigences de l’Antiquité. Il s’agit de montrer la réalité telle qu’on la voit par l’usage de la perspective et par le souci d’imiter la nature, notamment dans les paysages. La peinture la plus digne d’éloges est celle qui a le plus de ressemblance avec ce qu’elle imite. Je dis cela contre les peintres qui prétendent corriger les oeuvres de la nature, ceux par exemple, qui représentent un enfant d’un an, dont la tête devrait entrer cinq fois dans sa hauteur, et qui la font entrer huit fois ; et alors que la largeur de ses épaules est égale à celle de sa tête, ils font la tête moitié moins large que les épaulesa ; et de la sorte ils donnent à un petit enfant d’un an les proportions d’un homme de trente. Et ils ont si souvent pratiqué et vu pratiquer cette erreur, et l’usage a si bien pénétré et s’est tellement fixé dans leur jugement corrompu, qu’ils se convainquent eux-mêmes que la nature et ceux qui imitent la nature errent grandement à ne pas faire comme eux. […] Un Peintre ne doit jamais s’attacher servilement à la manière d’un autre Peintre, parce qu’il ne doit pas représenter les ouvrages des hommes, mais ceux de la nature ; laquelle est d’ailleurs si abondante et si féconde en ses productions, qu’on doit plutôt recourir à elle-même qu’aux Peintres qui ne sont que ses disciples, et qui donnent toujours des idées de la nature moins belles, moins vives, et moins variées que celles qu’elle en donne elle-même, quand elle se présente à nos yeux. Léonard de Vinci, Traité de la peinture, 1651 (posthume), trad. A. Chastel. Aide à la lecture a. Léonard de Vinci est aussi connu pour ses planches anatomiques. Il souhaite représenter, en art, ce que l’observation scientifique lui a permis de comprendre : la juste proportion du corps. Ce vœu aboutira à son dessin L’homme de Vitruve. Questions 1. Quel est le thème de cet extrait de texte ? 2. Quelle est la thèse de l'auteur ? 3. Quels sont l'objectif et l'intérêt du texte de Platon ? uploads/s3/ textes-art-platon-hegel-leonard-de-vinci.pdf
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- Publié le Dec 03, 2021
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