Quelques interrogations à propos du « tableau de signes » Dominique Gaud pour l
Quelques interrogations à propos du « tableau de signes » Dominique Gaud pour l’équipe de l’IREM de Poitiers On lit dans le programme de Seconde en vigueur à la rentrée 2000 : Utiliser un tableau de signes pour résoudre une inéquation ou déterminer le signe d’une fonction. C’est la première fois que l’expression « tableau de signes » apparaît dans le libellé d’un programme. Les difficultés des élèves, mises en évidence notamment par EVAPM, nous ont conduits à nous interroger sur le statut de cet objet « tableau de signes » et sur les mécanismes qui ont motivé son introduction dans l’enseignement secondaire. Ce travail(1), mené dans la cadre d’une recherche INRP-ADIREM(2), nous a amenés à une réflexion sur les écueils de la transposition didactique. Étude de quelques présentations actuelles Déclic, Hachette 2000, cours page 140. Exemple On veut étudier le signe de P(x) = −x (x + 1)(3 −x), expression factorisée. On résout −x (x + 1)(3 −x) = 0. −x = 0 ou x + 1 = 0 ou 3 −x = 0. x = 0 ou x = −1 ou x = 3. On place ces valeurs dans l’ord re croissant sur la première ligne. On étudie le signe de chaque facteur dans un tableau de signes. On applique la règle des signes du produit pour obtenir la dernière ligne. Inéquations Pour résoudre une inéquation à une inconnue, on peut toujours se ramener à une comparaison à zéro. Ainsi résoudre une inéquation revient à étudier le signe d’une expression. Résoudre A(x) ≥B(x) équivaut à résoudre A(x) −B(x) ≥0, c’est-à-dire trouver pour quelles valeurs de x l’expression A(x) −B(x) est positive ou nulle. Exemple On veut résoudre l’inéquation −x2 (3 −x) ≥3x −x2 d’inconnue x. On se ramène à une comparaison à zéro : Dans nos classes 23 (1) coordonné par Maryse Cheymol, Dominique Gaud (dom.gaud@wanadoo.fr), Jean-Paul Guichard, Loïc Jussiaume, Claude Robin. Louis-Marie Bonneval a également contribué au présent article. (2) Faire des maths en classe ? INRP-ADIREM, 2003. Il a aussi été le thème d’un atelier aux Journées de Clermont 2006. x −1 0 3 −x + + 0 − − x + 1 − 0 + + + 3 −x + + + 0 − P(x) − 0 + 0 − 0 + APMEP no 474 24 Dans nos classes APMEP no 474 −x2 (3 −x) −(3x −x2) ≥0. On cherche une forme factorisée : −x2 (3 −x) −x (3 −x) ≥0. Ici, on met −x (3 −x) en facteur : −x (3 −x)(x + 1) ≥0. On retrouve le polynôme P(x) précédent. Or d’après le tableau de signes précédent, on a : P(x) ≥0 lorsque x ∈[−1 ; 0] ou x ∈[3 ; +∞[. D’où l’ensemble solution : S = [−1 ; 0] ∪[3 ; +∞[. Commentaires Au préalable, le signe du binôme a été étudié à partir de la représentation graphique des fonctions affines. Le tableau de signes est introduit a priori comme technique pour déterminer le signe d’un produit. Ensuite il est utilisé en situation pour résoudre une inéquation. La courbe suggère un éclairage graphique qui n’est pas expliqué, ce qui est d’autant plus regrettable que l’énoncé initial évoque plutôt la comparaison de deux fonctions Pyramide, Hachette 2000, cours page 126. 3. Inéquations ax + b ≥0, ax + b ≤0, … (a ≠0) En appliquant les transformations d’écritures décrites à la page précédente, l’inéquation ax + b ≥0 équivaut à : ax ≥−b et enfin à : (si a > 0) ou (si a < 0). Avec l’inéquation ax + b ≤0, nous trouverions : (si a > 0) ou (si a < 0). Pratiquement, on ne retient pas ces résultats, mais seulement la conséquence suivante : À RETENIR (SIGNE DE ax + b) a et b fixés, a ≠0. Lorsque x varie sur R, l’expression ax + b change de signe au point où elle s’annule : . Dégageons alors une méthode pratique pour étudier le signe de ax + b (doc. 10) : 1. On cherche le point où ax + b s’annule. 2. On regarde le signe de ax + b pour une valeur particulière de x (autre que ). 3. On consigne les résultats dans un tableau de signes. −b a −b a x b a ≥− x b a ≤− x b a ≤− x b a ≥− y = −x(x +1)(3−x) x = 3 y = 0 1 x 1 y Étudier le signe de 3x −2. 1) 3x −2 = 0 lorsque x = . 2) On détermine le signe de 3x −2 pour une valeur quelconque de x (autre que ) ; pour x = 0, 3x −2 vaut −2 (donc 3x −2 < 0). 3) Conclusion x −∞ +∞ signe de −0 + 3x −2 2 3 2 3 2 3 Doc 10. Un exemple de mise en œuvre 4. Signe d’un produit, d’un quotient. EXEMPLE : Étudier le signe de (x −3)(1 −5x). On détermine séparément les signes de (x −3) et de (1 −5x), puis on applique la règle des signes pour un produit. D’où le tableau : Commentaires La résolution de l’inéquation du premier degré dans le cas général est donnée a priori. Cette résolution débouche sur une méthode pratique qui donne le signe du binôme en perdant de vue tout élément de justification (« on ne retient pas ces résultats »). Ensuite ce signe est résumé dans un tableau dont l’existence n’est pas motivée. Le tableau de signes pour étudier le signe d’un produit est aussi donné a priori. À ce moment de l’étude, aucun lien n’est fait entre l’algébrique, le fonctionnel et le graphique. Delagrave 2000, page 153. Application : signe d’un produit de facteurs du premier degré. Soit à résoudre l’inéquation : (3x −6)(−2x + 1) > 0. Utilisons un tableau de signes. On notera que la connaissance du sens de variation de la fonction x a mx + p et de la valeur de x qui annule mx + p permet d’en connaître le signe sans résoudre l’inéquation. L’ensemble des solutions est l’intervalle . Commentaires Le signe du binôme est introduit par l’étude des variations de la fonction affine. L’étude du signe d’un produit apparaît comme application. Les aspects fonctionnel et algébrique sont imbriqués, mais le cadre graphique n’apparaît pas à ce niveau. Ces mises en œuvre sont-elles en adéquation avec le programme ? On constate que ces approches sont différentes. Certains semblent renoncer à justifier, à ce niveau, l’introduction des tableaux de signes, alors que les programmes demandent « de ne pas perdre de vue les justifications des techniques employées ». Certains manuels restent dans l’algébrique, certains passent dans le fonctionnel sans aller jusqu’à la vision graphique. Certains placent le tableau de signes dans les savoirs officiels (cours), d’autres dans les « savoirs qui en sont sans en être » : T.P., méthodes, activités, exercices résolus, … Dans ce deuxième cas, il 1 2 2 ; À propos du « tableau de signes » 25 APMEP no 474 x −∞ 3 +∞ signe de (x −3) − −0 + signe de (1 −5x) + 0 − − signe de (x −3)(1 −5x) −0 + 0 − 1 5 x −∞ 2 +∞ 3x −6 − − 0 + −2x + 1 + 0 − − (3x −6)(−2x + 1) − 0 + 0 − 1 2 risque d’apparaître comme marginal aux yeux des élèves alors que c’est l’outil principal dans les exercices. Pour organiser entre les cadres fonctionnel, gra- phique et algébrique le va-et-vient recommandé par les programmes, l’IREM de Poitiers propose l’ac- tivité suivante : Une calculatrice graphique affiche les courbes ci- contre pour représenter les fonctions f et g définies sur R par : f (x) = (2x + 3)(3x + 1) et g(x) = (2x + 3)(4x −1). Comparer f (x) et g(x). Commentaire Le problème est formulé dans le cadre fonctionnel. La donnée du graphique invite à établir le lien entre comparaison de f (x) et g(x) (relevant du cadre algébrique) et position relative des courbes de f et g (relevant du cadre graphique). De plus le choix de la fenêtre ne permet pas de conclure quant à la position des courbes, ce qui incite à une exploration à l’aide d’une calculatrice graphique pour émettre des conjectures. Les coefficients choisis pour les binômes ne permettant pas de conjecturer les valeurs exactes des solutions de f (x) = g(x), on est amené à une résolution algébrique. L’expression factorisée ne comportant que deux facteurs, la résolution algébrique ne débouche pas obligatoirement sur la mise en place du tableau de signes mais peut inciter à un travail sur les connecteurs logiques « et » et « ou ». Le tableau de signes apparaît alors comme un moyen pratique (voire un changement de registres) pour résumer la résolution d’inéquations. On peut proposer ensuite d’autres situations où l’expression comportant au moins trois facteurs nécessite la mise en place du tableau de signes. Origines du problème La diversité des approches et uploads/s3/ bull-474-gaud.pdf
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- Publié le Oct 10, 2022
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