fiche de visite Baudelaire critique d’art • Présentation • Mode d’emploi de la

fiche de visite Baudelaire critique d’art • Présentation • Mode d’emploi de la visite • Objectifs • La visite : les œuvres • Bibliographie Présentation 1. Charles Baudelaire (1821-1867), poète des Fleurs du Mal, mais aussi traducteur d’Edgar Poe, est l’un des plus grands critiques d’art français de son siècle. Il tient de son père une véritable passion pour la peinture, et publie en 1845 un premier compte-rendu du Salon. Le Salon de 1846, celui de 1859 et Le Peintre de la vie moderne (1863) sont ses œuvres critiques les plus importantes. Publiées dans de petites revues, elles sont peu lues de son vivant ; mais Baudelaire y construit une esthétique qui nourrit son œuvre poétique. 2. Des années 40 aux années 60, l’art voit s’affronter des courants très divers. La peinture néo-classique et académique, celle des héritiers d’ Ingres, tient une grande place dans le goût du public. Mais l’histoire de l’art a surtout retenu trois noms : Delacroix, le romantique, que Baudelaire tient pour le plus grand peintre vivant ; Courbet, le réaliste qui ne se reconnait guère mieux sous cette étiquette que Delacroix sous la sienne ; Manet enfin, considéré comme le père de l’impressionnisme, et qui se veut d’abord l’incarnation du peintre de la vie moderne. C’est dans ce paysage qu’il faut se placer pour comprendre la critique baudelairienne. Objectifs On peut assigner à cette visite des objectifs assez divers, et éventuellement les combiner. 1. Qu’est-ce que la critique d’art ? • En partant d’articles de journaux contemporains rendant compte d’une exposition, définir la critique : son statut, ses fonctions, son public, ses pouvoirs. • L’art et son public : comparer les formes présentes du rapport social (musées, expositions, galeries) à celles du milieu du XIXe siècle (rôle prégnant de l’officialité, depuis les Prix de Rome jusqu’aux Salons). Voir les Goncourt (Manette Salomon) et Zola (L’Œuvre). • La critique d’art littéraire : spécifiquement française. De Diderot à Baudelaire, Gautier, Zola, Huysmans, de Proust à Breton, Malraux ou Bonnefoy, les écrivains-poètes ou romanciers ont une légitimité reconnue dans un domaine qui, après tout, n’est pas le leur. On peut travailler sur de nombreux exemples, en observant que la deuxième moitié du XIXe siècle est une période privilégiée pour les écrivains critiques d’art ; et en observant les rapports entre leur œuvre critique et leur œuvre poétique ou romanesque. • Critique d’art et objectivité : pour Baudelaire la critique a une fonction éducative. Elle apprend au public à ne pas confondre Meissonier et Delacroix, en un temps où le premier se vendait dix fois plus cher que le second (1859). Mais pour remplir cette fonction la critique doit être subjective : “Pour être juste, c’est-à-dire pour avoir sa raison d’être, la critique doit être partiale, passionnée, politique, c’est-à-dire faite à un point de vue qui ouvre le plus d’horizons.” (1846). Choix de l’effet produit contre le système. 2. Le rapport texte-image • Partir de l’évidence de ce rapport (exemple : le quatrain de Baudelaire écrit pour illustrer Lola de Valence, le tableau de Manet). • Montrer qu’il passe par une idée commune de l’art, et par des amitiés réelles (Fantin-Latour dans l’Hommage à Delacroix, ou Courbet dans l’Atelier représentent ensemble les peintres et les poètes, dont Baudelaire). • Il passe aussi par un fondement théorique qui est la théorie des correspondances, que Baudelaire met au point dans Les Fleurs du Mal. Au-delà de la perception, les cinq sens renvoient à une unité mystérieuse du monde : “Les parfums, les couleurs et les sons se répondent” (Correspondances). Voir aussi Les Phares, poème construit sur les analogies entre peinture, musique et poésie : “Delacroix, lac de sang hanté des mauvais anges, Ombragé par un bois de sapins toujours vert, Où sous un ciel chagrin, des fanfares étranges, Passent, comme un soupir étouffé de Weber...” • Arriver à l’idée qu’il s’agit de deux activités entièrement autonomes : la littérature “représente” la peinture comme un moyen pour arriver à ses fins, ses enjeux propres, et réciproquement. L’hommage à Delacroix est bien un hommage rendu par Fantin à la peinture. Quand Baudelaire écrit sur Delacroix, c’est de son idée du Beau qu’il s’agit, et il va la transformer ensuite en poésie. Au-delà se pose même la question de l’incommunicabilité de la peinture et de la littérature : les mots ne peuvent pas rendre compte des images. D’ailleurs la “description” critique traditionnelle des œuvres a disparu, aujourd’hui où les techniques de reproduction photographique l’ont rendue inutile. On peut revenir au quatrain de Baudelaire. Nous savons qu’il a vu le tableau, que le quatrain était destiné à figurer sur le cadre. Or nous avons l’impression que la danseuse qu’il décrit ne ressemble en rien à celle de Manet ; le texte n’illustre pas l’image. 3. L’histoire du goût • Montrer que si nous jugeons que Baudelaire est un grand critique d’art, c’est que les valeurs relatives qu’il accorde aux artistes sont à peu près les nôtres : Delacroix, Daumier, Courbet et Manet très au-dessus des académiques. • Montrer, corrélativement, que son système de valeurs est tributaire de sa place dans le siècle et de son âge. Il met au sommet ses amours de jeunesse (Delacroix ; plus tard Constantin Guys) ; il reste à distance du réalisme et de son ami Courbet pour des raisons au moins autant idéologiques qu’esthétiques (après 1848, Baudelaire se replie dans la solitude, exacerbe son dandysme et méprise sinon l’humanité souffrante, du moins la “canaille”) ; il méconnait enfin le génie de Manet, qu’il considère comme “le premier dans la décrépitude de (son) art”. Alors même que Manet accomplit le programme tracé par Baudelaire, celui-ci, vieilli et malade, ne voit pas l’Olympia dont on dit qu’il a inspiré le chat, la servante, et peut-être le sujet lui-même. Méconnaissance aussi de la photographie, qu’il juge incomparablement inférieure à la peinture. Nous jugeons autrement des portraits de Baudelaire par Carjat et Nadar... Mode d’emploi de la visite • Niveau : pour classes de lycée. les objectifs 1 et 3 peuvent être adaptés pour des classes de collège. • Utilisation : recherche préliminaire Objectif 1) articles de presse contemporaine + textes choisis de critique d’art. Objectif 2) étude de Manette Salomon et de L’Œuvre. Objectif 3) panorama de la peinture, depuis le milieu du siècle jusqu’à l’Olympia (niveau 0 du musée, à l’aide du guide du Musée d’Orsay). Définition de termes comme classique, néo- classique, académique, etc... • Ensuite, visite guidée par le professeur devant les œuvres. • Prolongement en littérature par l’étude des Fleurs du Mal. Ou utilisation de la fiche-visite analogue sur Zola. 1. Amaury-Duval : Annonciation, 1860 2. Gérôme : Un combat de coqs, 1846 3. Rousseau : Une avenue, forêt de l’Isle-Adam, 1849 la visite : les œuvres 1. Les peintres que Baudelaire n’aime pas • Les peintres ingristes et académiques S’il reconnaît, à son corps défendant, le talent d’Ingres, il trouve son école catastrophique. Eugène-Emmanuel Amaury-Duval (1808-1885) : Annonciation, 1860 - Localisation : rez-de-chaussée, salle 1 - Amaury-Duval, un des élèves d’Ingres ; peinture religieuse néo-classique, italianisante - Baudelaire et les ingristes : “Le parti des ennemis du soleil”, Salon de 1846. Il a horreur des “affèteries” de cette peinture qu’il juge trop distinguée, trop “finie”, dont l’héroine est toujours “diaphane et bégueule comme une élégie, et amaigrie par le thé et le beurre esthétique” (Salon de 1846). Au lieu d’imiter servilement les anciens, il faut des sujets modernes. Gérôme Jean-Léon (1824-1904) : Un combat de coqs, 1846 - Localisation : rez-de-chaussée, salle 1 - Gérôme peintre néo-grec, également admirateur d’Ingres - Baudelaire considère Gérôme comme le chef de “l’école des pointus” (Salon de 1859). Il “réchauffe les sujets par de petits ingrédients et par des expédients puérils”. De ce tableau il écrit : “l’idée d’un combat de coqs appelle naturellement le souvenir de Manille ou de l’Angleterre. M. Gérôme essayera de surprendre notre curiosité en transposant ce jeu dans une espèce de pastorale antique”. Bref, il juge que ce genre de peinture n’est que de la “cuisine”, et qu’en général ce n’est pas avec des “Cupidons de confiseurs” qu’on peut représenter l’amour. • Les peintres de la campagne Rousseau Théodore (1812-1867) : Une avenue, forêt de l’Isle-Adam, 1849 - Localisation : rez-de-chaussée, salle 5 - Tableau représentatif du naturalisme romantique des peintres de Barbizon : goût exclusif du paysage, surtout de la forêt et des jeux de lumières, peinture sur le motif. - Baudelaire reconnaît des qualités à Théodore Rousseau mais trouve sa peinture en général trop agitée : “la silhouette générale des formes est souvent difficile à saisir (...) M.Rousseau m’a toujours ébloui ; mais il m’a quelquefois fatigué.” (Salon de 1859). La vérité est que le sujet ne l’intéresse pas. Si l’art ne se réduit pas, on l’a vu, à une virtuosité technique vide, il ne doit pas non plus se soumettre docilement à son sujet. Surtout quand ce sujet est la nature : elle ne vaut que transformée par l’homme. Un visage maquillé est plus beau qu’un visage nu ; Baudelaire aurait aimé repeindre uploads/s3/ baudelaire-pdf1.pdf

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