A.D.E.A. Cours d’Art Contemporain 2er semestre 2007 / 2008 ARTE POVERA Très rap

A.D.E.A. Cours d’Art Contemporain 2er semestre 2007 / 2008 ARTE POVERA Très rapidement adoptée par le monde de l'art, la terminologie Arte povera a été inventée par l'historien et critique Germano Celant à l'occasion d'une exposition organisée à Gênes en septembre 1967, pour désigner l'émergence, en Italie, d'un ensemble de nouvelles pratiques artistiques. « Ceci, écrit Celant en évoquant l'émergence de l'Arte povera, signifie disponibilité et anti-iconographie, introduction d'éléments incomposables et d'images perdues venues du quotidien et de la nature. La matière est agitée d'un séisme et les barrières s'écroulent. » L'Arte povera est une aventure intellectuelle et artistique d'une extrême radicalité, qui s'oppose aux propositions formalistes des grands courants américains de l'époque : pop'art, op'art... Refusant les maniérismes d'une société vouée à la consommation, l'Arte povera privilégie l'instinct, le naturel et l'éphémère. « Vaste champ de convergence » où se retrouvent aussi bien l'ensemble des textes critiques rédigés au cours des années que les œuvres, le groupe de l'Arte povera a évolué au fil du temps, mais il sera historiquement fixé par Celant à douze artistes : Alighiero e Boetti, Giovanni Anselmo, Paolo Calzolari, Luciano Fabro, Jannis Kounellis, Mario et Marisa Merz, Pino Pascali, Giulio Paolini, Giuseppe Penone, Michelangelo Pistoletto et Gilberto Zorio. Au moment où les artistes liés à l'Arte povera commencent à développer une vision plastique et post-industrielle, le fameux boom économique du miracle italien de l'après-guerre a vécu. Une période de dépression économique s'ouvre, annonçant les rébellions de 1968. Sur le plan artistique spécifique à l'Italie, dès les années 1950-1960, Alberto Burri avait remis en question la pratique traditionnelle de la peinture, tandis que Lucio Fontana et Piero Manzoni avaient déjà posé, chacun à leur manière, la question de l'élargissement possible du champ d'action artistique. Les jalons sont donc posés pour une « tabula rasa », à partir de laquelle les jeunes artistes de l'Arte povera vont pouvoir agir. Analysant la situation artistique de l'époque, Luciano Fabro écrit : « Il y avait l'art informel avec des matériaux très travaillés et une idéologie très précise... Puis est arrivé le pop'art... Nous étions très jeunes et nous voulions faire un art déshabillé de tout cela. » Rome et Turin : de nouvelles pratiques artistiques C'est à Turin et à Rome que vont se concrétiser, pour l'essentiel, les conditions esthétiques de l'émergence de l'Arte povera. À Turin, ville la plus industrialisée de toute l'Italie, la galerie Sperone réunit en l966, sous le titre Arte abitabile (vivre l’Art), les artistes Giovanni Anselmo (né en 1934), Alighiero e Boetti (1940-1994) et Michelangelo Pistoletto (né en 1933). À Rome, la galerie L'Attico programme Spazio degli elementi. Fuoco, Immagine, Acqua, Terra (Domaine des éléments. feu, image, eau, terres), où figurent Janis Kounellis (né en 1936), Pino Pascali (1935-1968) et Pistoletto. Dès les années 1965-1966, ces artistes font de l'œuvre le lien d'une action multidirectionnelle et mettent en place un système esthétique qui refuse toute entrave à un déploiement de moyens nouveaux. Mario Merz (1925-2003) intègre à ses œuvres des tubes de néon qui annulent la toile en tant qu'icône. Kounellis oppose une grande marguerite, dont le cœur est une flamme, à l'une de ses toiles. Pistoletto crée la série des Ogetti in meno, où chaque jour voit naître une nouvelle œuvre dont le matériau et la forme sont différents de la précédente. Pascali installe au sol des grands bacs remplis d'eau hors d'atteinte du visiteur. Aucune pratique, aucune formulation artistique ne semblent exclues, y compris celles de type conceptuelle comme c'est le cas pour les propositions de Giulio Paolini (né en 1940) et de Boetti, qui instaurent un jeu dialectique, entre conception et réalisation, avec Ping Pong. De la même manière, nul matériau ne saurait être banni, surtout lorsqu'il est susceptible d'intervenir comme élément libérateur dans un dialogue entre l'art et la vie. Paolo Calzolari (né en 1943) utilise des matériaux non stables comme des structures givrantes et la flamme d'une bougie, où se mêlent données phénoménologiques et philosophiques. Giuseppe Penone (né en 1947) mêle étroitement le geste de l'artiste, créateur de formes, et celui de la nature, créatrice de forces. Le statut d'immobilité que la tradition impose à l'œuvre d'art vole en éclats et va même jusqu'à inclure la participation de l'artiste et du spectateur. La Participation du regardeur, réalisée en 1966, et la sculpture pénétrable In Cubo de Luciano Fabro (né en 1936) posent la question de l'espace et du corps agissant au cœur même de la sculpture. On assiste enfin à la mise en place d'une nouvelle poétique de l'espace en tant que lieu d'activation de toutes les énergies, comme c'est le cas pour les œuvres réalisées à l'époque par Marisa Merz (née en 1931), Giovanni Anselmo (né en 1934) ou Gilberto Zorio (né en 1944). La Galerie Sperone Dès 1963, Gian Enzo Sperone dirige la galerie turinoise Il Punto où il expose Lichtenstein et Schifano. En 1964, il ouvre sa propre galerie dans la capitale piémontaise et lui donne rapidement une envergure internationale. Sa collaboration avec les Sonnabend favorise la pénétration du Pop Art en Italie. Parallèlement, il présente l'œuvre de Pistoletto et, en 1965-1966, la galerie inaugure un cycle d'expositions d'artistes italiens : Pascali expose ses canons, Gilardi ses Tapis-Nature, etc. En juin 1966, Sperone organise une exposition collective, "Environmental Art" (avec Pistoletto, Anselmo, Boetti, Zorio), "première manifestation dans laquelle l'espace de la vie se fond avec l'espace de l'art, au point de rendre l'art habitable" (Celant). La galerie Sperone devient un point de rencontre pour les artistes qui formeront ensuite l'arte povera, auxquels viennent s'ajouter, notamment, Mario Merz, Fabro, Kounellis, Pascali, Penone. En 1974, Sperone ouvre une deuxième galerie à Rome, puis une troisième, à New York, où il organise des expositions tournantes de ses artistes préférés. Privilégiant les galeries de Rome et de New York où il s'est associé avec Fischer pour créer la Sperone Westwater Fischer Inc., la galerie de Turin est fermée après avoir cependant exposé, en 1979, Clemente. À partir de 1980, Sperone prend en main les artistes de la future Trans-avant-garde italienne et présente les œuvres de Chia, Cucchi et N. De Maria. L'artiste guérillero La préface à l'exposition de septembre l967, organisée à la galerie La Bertesca à Gênes, est considérée comme l'acte de naissance officiel du mouvement. Si le discours théorique concernant l'Arte povera s'est élaboré au fil des expositions, les propos de Celant évitent tout ce qui tendrait à enfermer les artistes dans un cadre trop rigide. Le critique y fait référence au cinéma de Warhol et à celui de Pasolini, ainsi qu'au théâtre de Grotowski, auquel il emprunte l'adjectif « pauvre ». Avec Arte povera. Appunti per una guerilla (note pour une guerilla), il donne une dimension politique, voire révolutionnaire aux nouvelles pratiques. « L'artiste devient un guérillero, il veut choisir le lieu du combat et pouvoir se déplacer pour surprendre et frapper. » Un an plus tard, Celant titre lors d'une manifestation à Amalfi, Arte povera + Azioni povere (art pauvre et actions pauvres) et démontre qu'il convient désormais de sortir de l'objet « pour débloquer toutes les expérimentations évènementielles ». Malgré des débats parfois houleux au sein de la critique, la terminologie fonctionne et le label est désormais identifié. Sur le plan international, le groupe de l'Arte povera participe à l'exposition phare du moment : Quand les attitudes deviennent formes, organisée par Harald Szeeman à Berne en 1969. Les Italiens y côtoient les artistes représentatifs des grands courants du moment, land art, art conceptuel, minimal art. Parmi ceux-ci : Carl André, Robert Kosuth, Robert Morris, Walter de Maria, Richard Long, Robert Ryman ou encore Joseph Beuys. Ces quelques années où les manifestations et les rencontres se multiplient sont pour les artistes l'occasion d'une intense productivité créatrice. Mario Merz invente son premier igloo (L'Igloo de Giap). Pascali met en espace sa redoutable Vedova blu. Pistoletto crée La Venere degli stracci qui renvoie à la sculpture antique confrontée à la modernité. Kounellis, dans un geste iconoclaste, installe douze chevaux vivants dans une galerie. Paolini questionne sans cesse le champ clos des éléments constitutifs du tableau. Calzolari met en scène, avec Malina, un chien albinos, figure de l'artiste, qui est aveuglé par les blocs de glace qui l'entourent. Boetti entame son premier dossier postal qui impose la double figure de l'artiste (Gemelli). La production d'Anselmo s'intensifie avec ses blocs de granit où il explore les effets de la pesanteur. Luciano Fabro entame la série des Italia et des Piedi dont la sophistication s'inspire du baroque. Marisa Merz, bien qu'en retrait, travaille avec des fils de cuivre, et installe dans son atelier une grande balançoire aux formes minimalistes. Zorio, dans le jeu des tensions qu'il privilégie, investit l'espace de soufre et de ciment. Quant à Penone, il franchit le pas qui le mène de la forêt à son atelier en dégageant le cœur d'une poutre pour mettre en évidence la mémoire de l'arbre qu'il fut. Au-delà de l'Arte povera En 1971, on peut considérer que la phase historique de l'Arte povera en tant que groupe mené par l'énergie mobilisatrice uploads/s3/ povera-art 1 .pdf

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