UNE NOTE SUR L’ICONOGRAPHIE DE SAINT-JUST : L’HISTOIRE DU PASTEL LE BAS Louise
UNE NOTE SUR L’ICONOGRAPHIE DE SAINT-JUST : L’HISTOIRE DU PASTEL LE BAS Louise Ampilova-Tuil, Catherine Gosselin Armand Colin | « Annales historiques de la Révolution française » 2017/4 n° 390 | pages 203 à 214 ISSN 0003-4436 ISBN 9782200930981 Article disponible en ligne à l'adresse : -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- https://www.cairn.info/revue-annales-historiques-de-la-revolution- francaise-2017-4-page-203.htm -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Distribution électronique Cairn.info pour Armand Colin. © Armand Colin. Tous droits réservés pour tous pays. La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites des conditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votre établissement. 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Crédit photographique : Musée Carnavalet / Roger-Viollet ANNALES HISTORIQUES DE LA RÉVOLUTION FRANÇAISE - 2017 - N° 4 [203-214] © Armand Colin | Téléchargé le 30/06/2021 sur www.cairn.info (IP: 201.55.31.217) © Armand Colin | Téléchargé le 30/06/2021 sur www.cairn.info (IP: 201.55.31.217) 204 LOUISE AMPILOVA-TUIL, CATHERINE GOSSELIN Un portrait très connu de Saint-Just, dit pastel Le Bas, est conservé au musée Carnavalet sous le numéro d’inventaire D. 4366. Il aurait été peint pendant le séjour de Saint Just à l’hôtel des États-Unis par son hôtesse, puis racheté après le 9 Thermidor par Élisabeth Le Bas, épouse du conventionnel Philippe Le Bas, ami de Saint-Just. L’importance de ce portrait pour l’iconographie de Saint-Just ne saurait être mésestimée : c’est l’un des rares qui aurait été peint de son vivant et d’après nature. Pourtant, aucune attribution satisfaisante de ce pastel n’a été jusque- là trouvée, la main d’aucun maître n’ayant pu lui être associée avec preuve et assurance. L’hôtesse quasi-anonyme de Saint-Just est en fait loin d’être considérée comme son auteur... Les supposées attributions sont nombreuses – de la famille Ducreux père ou fille à l’atelier deLabille-Guiard1, – et parfois fantaisistes2. Ceci posait problème à tel point que certains conservateurs ont douté de l’authenticité même de l’œuvre avançant – sans nullement l’argumenter – que le pastel n’aurait été qu’« une médiocre copie » moderne d’un original de Joseph Ducreux, resté « conservé, paraît-il, dans la famille des descendants de Le Bas »3. Cette position ne semble plus être soutenue par Carnavalet, le portrait de Saint-Just en question ayant été présenté lors de l’exposition « La Révolution française, trésors cachés du musée Carnavalet » (2009-2010) comme un pastel anonyme du XVIIIe siècle. Parler de l’authenticité ou de l’attribution d’une œuvre d’art n’est pas une chose aisée. Nous allons pourtant tenter de percer le mystère du pastel Le Bas, parlant non pas en historiens de l’art, mais en simples historiens. (1) Albert SALTIEL, Les portraits de Saint-Just, dans Colloque « Grandes figures de la Révolution française en Picardie », Blérancourt, Bernard Vinot, Association pour la sauvegarde de la Maison de Saint-Just, 1990, p. 20. (2) Ainsi, M.-A. Charmelot l’attribuait-elle au peintre François, car il habitait, selon elle, dans le même hôtel que Saint-Just, au n° 11, rue Gaillon (Saint-Just, ou Le chevalier Organt, Paris, éditions Sésame, 1956). C’est en effet l’adresse de son atelier indiquée dans les livrets des Salons de la peinture des années 1790. Mais cette attribution n’est pas soutenable car l’immeuble de l’hôtel des États-Unis portait au XVIIIe siècle le numéro 7. Il n’est devenu le numéro 11 qu’après la numérotation napoléonienne de 1805 ; il ne s’agit donc pas du même immeuble. (3) Prosper DORBEC, Joseph Ducreux, dans Gazette des Beaux-Arts, Paris, 1906, t. II, p. 209 ; doutes repris par Dominique Morel, conservateur à Carnavalet, dans Pastels du musée Carnavalet, Paris, Bulletin du musée Carnavalet, n° 1 et 2, 1982, p. 42-44. Notons que l’attribution de l’œuvre à Ducreux est d’une part bien tardive, et d’autre part assez hasardeuse puisque, pour la rendre plausible, Dorbec dût déclarer le pastel être une copie d’un original introuvable et, comme on le verra infra, inexistant. © Armand Colin | Téléchargé le 30/06/2021 sur www.cairn.info (IP: 201.55.31.217) © Armand Colin | Téléchargé le 30/06/2021 sur www.cairn.info (IP: 201.55.31.217) UNE NOTE SUR L’ICONOGRAPHIE DE SAINT-JUST : L’HISTOIRE DU PASTEL LE BAS 205 Le pastel Le Bas : itinéraire d’une œuvre L’histoire de ce portrait est liée à la famille Le Bas, dont il fut la propriété. Les personnalités du XIXe siècle ayant fréquenté Philippe Le Bas fils et sa mère, en attestèrent l’existence lorsque le climat politique le permit. Lamartine révéla les circonstances de son acquisition dans son Histoire des Girondins parue en 1847 ; nous y reviendrons. David d’Angers relata dans ses notes qu’Élisabeth Le Bas lui avait prêté « un portrait fait au pastel d’après Saint-Just »4 pour son travail sur le buste du jeune conventionnel (1848). Enfin, une gravure de ce portrait, par Léopold Flamenc, ornait le frontispice de la biographie de Saint-Just par Ernest Hamel parue en 1859, avec cette précision : « d’après le pastel appartenant à M. Philippe Le Bas, membre de l’Institut »5. Aucun doute n’est permis sur cette appartenance : ce portrait fut compris dans l’inventaire des biens de Le Bas, dressé après son décès survenu le 16 mai 1860 : « un tableau au pastel ovale dans son cadre doré présentant Saint-Just », prisé 20 francs6. La succession de Philippe Le Bas fut une source de conflits pour ses héritiers. Il se maria en 1817 avec Edmée Duplay sa cousine, mais n’eut pas d’enfants avec elle. Par ailleurs, son épouse quitta le foyer conjugal dès 1828. Aussi, dans son testament7, Le Bas légua la moitié de son patrimoine à ses deux enfants naturels non reconnus, Léon et Clémence Grujon8, et l’autre moitié, à Marie-Victorine Ghibels, son économe et secrétaire9. Ainsi déshéritée, l’épouse légitime saisit la justice ; un administrateur des biens ad hoc fut nommé, et pour permettre le partage de cette succession disputée, elle fut vendue aux enchères. Le mobilier d’abord, vendu le 30 août 1860 ; (4) Souvenirs de David d’Angers sur ses contemporains, extraits de ses carnets de notes autographes, par le Docteur Léon CERF, Paris, Renaissance du livre, 1928, p. 143. (5) Ernest HAMEL, Histoire de Saint-Just député à la Convention nationale, Paris, Poulet- Malassis et de Brosse, 1859. Réédition en 2 volumes à Bruxelles en 1860. (6) AN, MC/ET/CXXII/2089, inventaire après le décès de Philippe Le Bas, 18 juin 1860. (7) Deux testaments olographes de Le Bas, de 1843 et de 1857, ont été déposés après son décès chez Me Desprez, notaire à Paris (AN, MC/ET/I/1171). (8) Léon Grujon a obtenu en juin 1860 la permission de rajouter à son nom celui de Le Bas ; sa fille avait épousé en 1888 l’avocat Paul Coutant, qui, sous le pseudonyme Stéphane-Pol, a publié en 1901 les souvenirs de la famille Le Bas cités infra. (9) Et mère également de deux enfants naturels, Éléonore née en 1839 et Philippe né en 1841. Dans son testament, Le Bas légua aux frères et sœurs Grujon et Ghibels de vivre toujours dans la meilleure harmonie : Éléonore se maria le 21 mai 1859 sous le nom de Ghibels Le Bas (AD Paris, état-civil reconstitué). Cette seconde lignée des descendants de Philippe Le Bas s’éteignit sans postérité ; après le décès de Mme Ghibels en 1887, sa succession tomba en déshérence. © Armand Colin | Téléchargé le 30/06/2021 sur www.cairn.info (IP: 201.55.31.217) © Armand Colin | Téléchargé le 30/06/2021 sur www.cairn.info (IP: 201.55.31.217) 206 LOUISE AMPILOVA-TUIL, CATHERINE GOSSELIN puis la bibliothèque et les antiquités du défunt, dont la vente s’étala sur trois semaines de décembre de la même année. Le 13 décembre 1860, à l’Hôtel Drouot, fut mis en vente sous le numéro 50, un pastel représentant de Saint-Just, lequel fut adjugé pour 205 francs à M. Ernest Hamel comme au plus offrant10. Ces documents démontrent qu’il n’y avait qu’un seul pastel repré- sentant Saint-Just parmi les biens de Philippe Le Bas, et qu’aucun original ne pouvait rester chez ses descendants11, l’intégralité de sa succession étant dispersée par le marteau du commissaire-priseur. L’œuvre demeura dans les collections d’Ernest Hamel jusqu’à sa mort. Hyppolite Buffenoir, auteur d’une étude sur les portraits de Robespierre, qui a beaucoup connu Hamel et dit éprouver pour lui de la piété quasi filiale, se rappelle avoir contemplé bien des fois ce portrait de Saint-Just dans le salon de l’historien12. Début avril 1898, le pastel fit son entrée au musée Carnavalet ; l’inventaire du musée mentionne : « don de M. E. Hamel »13. On en avait souvent déduit qu’il s’agissait de l’historien en personne, mais ceci est impossible, car uploads/s3/ une-note-sur-l-x27-iconographie-de-saint-just-l-x27-histoire-du.pdf
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- Publié le Mai 18, 2021
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