Annuaire français de droit international L'arrêt de la Cour Internationale de J
Annuaire français de droit international L'arrêt de la Cour Internationale de Justice dans l'affaire de la Barcelona. Traction, Light and Power Company, Limited (nouvelle requête) (Belgique c. Espagne). Exceptions préliminaires, arrêt du 24 juillet 1964 M. le Professeur Jean Charpentier Citer ce document / Cite this document : Charpentier Jean. L'arrêt de la Cour Internationale de Justice dans l'affaire de la Barcelona. Traction, Light and Power Company, Limited (nouvelle requête) (Belgique c. Espagne). Exceptions préliminaires, arrêt du 24 juillet 1964. In: Annuaire français de droit international, volume 10, 1964. pp. 327-352; doi : https://doi.org/10.3406/afdi.1964.1762 https://www.persee.fr/doc/afdi_0066-3085_1964_num_10_1_1762 Fichier pdf généré le 15/03/2019 AFFAIRE DU CAMEROUN SEPTENTRIONAL 327 controverse est, en l'espèce (elle aussi) sans objet parce que la Cour en invoquant la sauvegarde de sa fonction n'est pas parvenue à un résultat différent de celui qu'elle aurait atteint par une autre argumentation plus classique. Comme sir Gerald Fitzmaurice l'a montré, la Cour aurait pu rejeter la demande du Cameroun soit en adoptant une définition plus étroite de la notion de différend, soit (et pour s'en tenir sur ce point à sa jurisprudence antérieure) en déclarant cette demande irrecevable, parce que le différend soumis à la Cour était devenu sans objet. Selon sir Gerald, dont nous partageons sur ce point le sentiment, si la Cour n'a pas dit formellement que la demande camerounaise était irrecevable, elle l'a considérée « pratiquement » comme telle. (Recueil 1963, p. 101) . Quelle était alors l'utilité en l'espèce de la notion de sauvegarde de la fonction judiciaire ? Elle a permis à la Cour de donner au problème qui lui était soumis une solution élégante, au sens où cette expression est employée en mathématique, c'est-à-dire une solution obtenue par un raisonnement plus rapide, plus direct que celle identique (ou presque) à laquelle elle serait parvenue par des détours plus compliqués ou plus traditionnels. COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE Jean CHARPENTIER Exceptions préliminaires — Compétence de la Cour — Recevabilité de la demande. désistement d'une instance antérieure — son effet aux termes de l'article 69 paragraphe 2 du règlement — droit d'introduire une instance nouvelle a la suite d*un tel désistement — charge de la preuve quant au caractère définitif de cet acte pour ce qui est d*une action ultérieure (♦) Jean Charpentier, Professeur à la Faculté de Droit et des Sciences économiques de Grenoble. 328 COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE DEVANT LA CûUR — ENTENTE QUI SERAIT INTERVENUE ENTRE LES PARTIES, QUANT A CE CARACTÈRE DÉFINITIF — EXCEPTION FONDÉE SUR l'eSTOPPEL EMPÊCHANT TOUTE action ultérieure devant la cûur — intérêt que présente pour la question du désistement le traité sur lequel repose la compétence de la cour. Juridiction obligatoire de la Cour en vertu de l'article 37 du Statut — Question de l'intérêt que présente a cet égard l'affaire relative a l'incident aérien du 27 juillet 1955 (Israël c. Bulgarie) — Interprétation de l'article 37 — Effet de la dissolution de la Cour Permanente — Question DU CONSENTEMENT A L'EXERCICE DE LA JURIDICTION OBLIGATOIRE — INTERprétation des clauses juridictionnelles du traité sur lequel repose la compétence de la cour — effet a cet égard de la dissolution de la cour Permanente — Effet ratione temporis de l'applicabilité de l'article. 37 a des différends nés entre la date du traité et la date a laquelle l'article 37 est devenu applicable. Questions de recevabilité — Jus standi ou qualité du Gouvernement demandeur pour agir — règle de l'épuisement des recours internes — Principes régissant la jonction au fond d'exceptions préliminaires — Motifs de jonction a l'égard des questions de recevabilité. Cour internationale de Justice — Affaire de la Barcelona Traction, Light and Power Company, Limited (nouvelle requête : 1962) (Belgique c. Espagne) Exceptions préliminaires — Arrêt du 24 juillet 1964. C.U., Recueil 1964, p. 6. 1. — Après six ans de débats faisant suite à dix ans de négociations, la Cour Internationale de Justice, le 24 juillet 1964, s'est reconnue compétente pour poursuivre l'examen de la réclamation belge contre le gouvernement espagnol en l'affaire de la Barcelona Traction, Light and Power Company, Ltd (ci-après « la Barcelona Traction ») . Pour qui connaît la complexité de l'affaire, les péripéties qui ont marqué l'évolution du différend, et la gravité des exceptions soulevées par le défendeur, un tel résultat n'apparaît nullement disproportionné aux efforts dépensés pour y parvenir. 2. — La Barcelona Traction est une société de droit canadien, dont les actions appartiennent toutefois, à concurrence de 75 %, à des ressortissants belges. C'est un holding, dont l'activité consiste uniquement à financer des sociétés filiales. L'une d'elles, la Ebro Irrigation and Power Cy Ltd, société de droit canadien et filiale à 100 % de la Barcelona Traction était concessionnaire en Espagne d'un important réseau de production et de distribution de l'énergie électrique. A la suite de démêlés avec le fisc et avec l'office des changes espagnols, qu'il n'est pas nécessaire de préciser à ce stade de la procédure, la faillite de la Barcelona Traction considérée comme propriétaire de l'actif de Ebro Irrigation fut prononcée le 12 février 1948 par le juge espagnol du tribunal de Reus. C'est à partir de là que s'établit une longue correspondance diplomatique entre la - Belgique et l'Espagne: elle s'achève AFFAIRE DE LA BARCELONA TRACTION 329 par le dépôt, le 23 septembre 1958, d'une requête par laquelle la Belgique demandait à la Cour réparation du préjudice causé à ses ressortissants par le comportement, prétendu contraire au droit des gens, de divers organes de l'Etat espagnol à leur encontre. Pour fonder la compétence de la Cour, la Belgique conjuguait les effets de l'art. 17, 4* alinéa, du traité hispano-belge de conciliation, de règlement judiciaire et d'arbitrage signé en 1927 et toujours en vigueur (1) et ceux de l'article 37 du statut de la Cour (2). L'Espagne devait alors soulever trois exceptions préliminaires. La première, tirant parti de l'arrêt rendu par la Cour le 26 mai 1959 dans l'affaire de l'Incident aérien du 27 juillet 1955, demandait à la Cour de se déclarer incompétente, l'article 17 du traité hispano-belge ayant cessé d'être en vigueur du moment où l'Espagne, admise aux Nations Unies (le 14 décembre 1955) venait à être liée par les dispositions du statut de la Cour. La deuxième dénonçait l'irrecevabilité de la demande belge à raison de la nationalité canadienne de la société victime du préjudice allégué. La troisième ajoutait au défaut de nationalité de la victime un défaut prétendu d'épuisement des voies de recours internes. Alors que la procédure suivait son cours, le gouvernement belge déposa au greffe de la Cour, le 23 mars 1961, une déclaration de désistement conforme à l'article 69 du Règlement de la Cour, auquel le gouvernement défendeur déclara, aux termes du même article, ne pas faire opposition. Par ordonnance du 10 avril 1961, la Cour prescrivit la radiation de l'affaire de son rôle. Cet événement inopiné devait permettre un dédommagement à l'amiable des actionnaires de la Barcelona Traction par le groupe espagnol cession- naire de ses avoirs et avait été exigé par ce dernier comme condition de l'ouverture des négociations privées. Le gouvernement belge y avait consenti à la demande de ses ressortissants. Mais les pourparlers devaient échouer et la Belgique décida alors de reprendre la voie intergouvernementale en saisissant à nouveau la Cour par une deuxième requête, le 19 juin 1962. C'est la requête actuelle. Le gouvernement espagnol y a repris ses trois exceptions préliminaires de 1960, en les faisant précéder d'une quatrième en vertu de laquelle le désistement de 1961 empêcherait la Cour de connaître à nouveau de la même affaire. 3. — La Cour, composée de seize juges dont deux juges ad hoc, a, par douze voix contre quatre, rejeté la première exception préliminaire; par (1) art. 17, § 4 : c ... chaque Partie pourra, après préavis d'un mois, porter directement, par voie de requête, la contestation devant la Cour Permanente de Justice Internationale. » (2) art. 37 : c Lorsqu'un traité ou une convention en vigueur prévoit le renvoi à une juridiction que devait instituer la Société des Nations ou à la Cour Permanente de Justice Internationale, la Cour Internationale de Justice constituera cette juridiction entre les parties au présent Statut. » 330 COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE dix voix contre six, rejeté la deuxième, et joint au fond la troisième exception préliminaire par neuf voix contre sept et la quatrième par dix voix contre six. L'arrêt est suivi de déclarations de Sir Percy Spender, des juges Koretsky et Jessup, et d'une déclaration du juge Spiropoulos qui énonce en fait une opinion dissidente, des opinions individuelles des juges Wellington Koo, Tanaka et Bustamante y Rivero, et des opinions dissidentes des juges Morelli et Armand-Ugon. 4. — L'arrêt répond ainsi à trois questions de procédure. Sur la possibilité de réintroduire une instance après désistement, il affirme que le désistement est un acte neutre qui a pour seul effet de mettre un terme à l'instance en cours et qui ne saurait empêcher qu'elle soit réintroduite à moins que l'intention contraire n'en soit prouvée. Sur le jeu de l'article 37 du uploads/S4/ afdi-0066-3085-1964-num-10-1-1762.pdf
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- Publié le Jul 15, 2022
- Catégorie Law / Droit
- Langue French
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