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VOTRE DOCUMENT SUR LABASE-LEXTENSO.FR - 16/05/2020 11:23 | UNIVERSITE DE SAVOIE Au fondement du droit de l'Union européenne. Recherches doctrinales sur le concept de « commun (*) » Issu de Revue du droit public - n°5 - page 1291 Date de parution : 01/09/2007 Id : RDP2007-5-005 Réf : RDP 2007, p. 1291 Auteur : Par Pierre-Yves Monjal, Professeur de droit public à l'Université Paris 13, Conseiller à la Direction des affaires juridiques des ministères de l'Économie et du Budget (sous-direction du droit communautaire) SOMMAIRE I. _ LE COMMUN DANS SES MANIFESTATIONS : L'ÉMERGENCE DE LA NOTION A. _ Appréhension empirique du « commun » 1. L'emploi lexical du terme « commun » 2. L'emploi juridique du terme « commun » B. _ Compréhension juridique du « commun » 1. L'accession au rang de « notion juridique » 2. Les prérequis d'une notion de droit public II. _ LE COMMUN DANS SA CARACTÉRISATION : LA CONSISTANCE DE LA NOTION A. _ Construction théorique du « commun » 1. Une signification du terme « commun » 2. Une modélisation de la notion de commun B. _ Signification didactique du « commun » 1. Éléments de synthèse 2. Éléments de prospection L'impossible ratification du traité établissant une constitution pour l'Europe2 conduit assez naturellement l'observateur à se demander ce qu'il y a encore de commun dans cette Union. Plus rien, ou plus grand chose affirmeront sans doute les plus pessimistes, l'observant désarmés poursuivre ses irrésistibles élargissements3... La dilution des intérêts communs des États membres ne serait donc que les stigmates, prévisibles au demeurant, des effets destructeurs d'une politique d'élargissement incontrôlée. Le terme dilution à l'instant employé n'est pas totalement satisfaisant. Il révèle peut-être le parti pris à la fois idéologique et méthodologique4 des partisans d'une Europe charpentée, communautarisée, dans laquelle l'élan fédéraliste l'emporterait sur le mouvement libre échangiste... En clair, la Communauté structurerait, alors que l'Union disperserait. Dans cette visée, le premier pilier ne serait plus le moteur, la dynamique du tout, mais un simple élément parmi les autres piliers de l'Union ; preuve, si besoin en est, que ce processus de dilution est bien en marche. En cela, le Traité de Maastricht, contrairement aux pronostics, aurait affaibli, peut-être même cassé l'élan communautaire. Et ce ne sont pas les principes transversaux de l'Union, pourtant sensés assurer la cohérence des piliers entre eux5, ou leur protection6, qui pourront inverser la donne. Confronté à ce constat, dont l'objectivité reste certainement discutable, quel regard peut porter le juriste sur ce qui semble opposer, ou pour le moins éloigner le « commun » de l' « Union » ? Plus précisément, et en s'interrogeant sur ce terme dont l'usage nous est pourtant si familier7, que recouvre en droit le terme « commun » ? Que ce soit dans sa forme substantivée ou adjective, le « commun » est-il saisissable par le droit ? Conceptualisable juridiquement ? Porteur de sens et constitutif de régimes ? La démarche ici entreprise n'est guère originale. Elle consiste simplement à s'interroger sur la signification d'un mot employé par les textes communautaires notamment. Les résultats de cette prospection, pour ne pas dire de cette introspection disciplinaire, ne sont pas a priori prévisibles. L'alternative est en fait très simple : soit il y a un concept du droit attaché à ce terme ou véhiculé par lui, qui peut d'ailleurs faire l'objet d'une construction théorique à partir des éléments qui nous sont donnés à observer ; soit il n'y a pas de concept du droit, dans la mesure où ledit terme, en sa qualité d'adjectif notamment, n'a qu'une valeur indicative, ordinaire... Ce type de questionnement disciplinaire et essentialiste ne se cantonne évidemment pas au seul droit communautaire et à la seule problématique de l'élucidation du terme commun. Il est un questionnement en soi et objectif qui concerne toutes les catégories du droit public. Il suffit, pour s'en convaincre de manière illustrative, de se reporter à l'édifiante étude du Professeur Mazères portant sur la notion de puissance publique. Constatant qu'elle est au fondement du droit administratif et de l'État, il relève dans le même temps que l'on a oublié de s'interroger simplement sur ce qu'elle est8. Optons, par optimisme, en faveur de la première branche de l'alternative évoquée plus haut. Admettons, comme hypothèse de recherche ou heuristique, que le « commun » est une notion, sinon structurante du droit public9, du moins explicative de certaines constructions juridiques partielles au sein de ses branches10. Cette intuition initiale est en réalité déclenchée par le constat que l'on emploie beaucoup le terme commun et ses dérivés11, tant dans les textes que dans la doctrine publiciste et politiste, comme s'il s'agissait d'un substantif ou d'un adjectif parfaitement compris et admis de tous, comme si le sens qu'il contenait relevait de ces évidences s'imposant d'elles-mêmes à l'esprit. Or, à la question « qu'est-ce que le commun ? », à notre connaissance, aucune réponse juridique à proprement parler n'a été apportée. Pourtant, sous l'impulsion de la construction européenne il est vrai, le substantif « commun » a progressivement fait son intrusion dans le droit public. Plus précisément, le recours à des expressions telles que « exercice en commun des compétences », en droit constitutionnel, ou encore « intérêt communautaire », en droit des collectivités territoriales12, peut mettre le juriste en alerte sur la portée du terme qui nous retient. 1/14 Méthodologiquement, la démarche n'est pas aisée. La découverte d'un concept juridique, la détermination de ses critériums, relèvent d'une analyse très spécifique à laquelle le positiviste n'est pas habitué ou pour laquelle il n'est pas nécessairement outillé. Toutefois, d'un point de vue rationnel, et pour tout dire épistémologique13, il semble que l'on peut procéder en deux temps pour tenter de saisir en droit la notion de commun. Dans le premier, il conviendra d'apprécier les manifestations du « commun » dans l'environnement juridique. Cette identification préconceptuelle est indispensable en termes de justification à la démarche entreprise. C'est parce qu'il y a un mot dans l'environnement juridique, que ce mot semble produire des effets, qu'il convient préalablement de le circonscrire, de le (re)placer dans cet environnement (I). Une fois ce repérage et ce balisage réalisés, la (re)construction du concept de commun que l'on croit pressentir conduira alors à formuler ses critères identificateurs dans le but de le caractériser (II). I. _ LE COMMUN DANS SES MANIFESTATIONS : L'ÉMERGENCE DE LA NOTION Si le substantif ou l'adjectif « commun » est repérable dans un certain contexte normatif, institutionnel, matériel ou encore jurisprudentiel..., l'hypothèse empirique selon laquelle nous serions en présence d'une notion du droit pourra alors être retenue (A). Toutefois, l'accession du terme « commun » au rang de concept du droit, ou de notion juridique, suppose préalablement que l'on tienne pour acquise ce que recouvre cette notion de « notion juridique ». Or, les exigences du juriste sont suffisamment spécifiques pour que l'on s'interroge ici sur ce que l'on peut ou doit attendre précisément d'une notion en droit public (B). A. _ Appréhension empirique du « commun » La source de notre réflexion se situe évidemment dans le droit communautaire. Alors que les 50 ans des traités de Rome ont été célébrés, il semble presque irrévérencieux de se demander aujourd'hui ce que peut recouvrir en droit la notion de commun. Pourtant, sans prétendre répondre au questionnement fondamental sur l'être du commun, sa nature intrinsèque et véritable, il appert toutefois que les analyses anciennes et actuelles ont délaissé le mot (1), tant son usage est important, pour ne retenir que certaines de ses manifestations juridiques (2). 1. L'emploi lexical du terme « commun » Le recensement du terme commun, sa quantification (a), permettra de mettre en lumière ce que l'on peut appeler ici l'effet profusion ou dilution. En effet, l'emploi répétitif de ce terme ou de ses dérivés (à partir du radical « commun14 ») a contribué étonnement d'un point de vue rétrospectif à laisser de côté toute recherche sur sa signification précise (b). a. Quantification du terme « commun » D'un point de vue quantitatif, même si aucune conclusion juridique ne doit être tirée des données chiffrées qui vont suivre, le décompte du mot commun _ et de ses dérivés _ des principaux textes européens nous semble instructif. Dans la déclaration Schuman du 9 mai 195015, on dénombre à 12 reprises l'emploi du terme commun et de ses dérivés sur un total de 844 mots 16. Le terme « commun » y est référencé 4 fois17, et celui de « communauté » 2 fois18. S'agissant du traité de Paris instituant la CECA, on dénombre, sur les 100 articles qu'il contenait à la date de son expiration le 23 juillet 2002, 31 fois l'emploi du terme « commun19 » sur un total de 15 355 mots20. Le mot « communautaire » n'est pas employé une seule fois. Le Traité de Rome instituant la CEEA, fort de ses 225 articles et 21 121 mots employés, ne mentionne pas une seule fois lui non plus le terme « communautaire ». Quant au terme « commun », il est uploads/S4/ au-fondement-du-droit-de-lunion-europeenne-recherches-doctrinales-sur-le-concept-de-commun-16-05-2020-11-23-37.pdf
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- Publié le Jan 21, 2021
- Catégorie Law / Droit
- Langue French
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