Explication de documents historique : La grande charte (1215) DE ALMEIDA Anthon
Explication de documents historique : La grande charte (1215) DE ALMEIDA Anthony – TD001 - N°étudiant 2202744 Le document que nous allons étudier est une charte, un traité de paix civile rédigé notamment par l’intellectuel anglais Etienne Langton (1150-1228) et signé par Jean sans Terre (1166-1216.) Ce dernier, fils d’Henri II d’Angleterre, est duc d’Aquitaine, seigneur d’Irlande et roi d’Angleterre de 1199 jusqu’à sa mort. Le 15 juillet 1215, il accepte de signer la Grande charte, également appelée en latin la Magna carta. La ratification de ce texte, qui s’adresse au peuple anglais et plus particulièrement à la noblesse et au clergé, s’inscrit dans un contexte historique particulier. En effet, Jean sans Terre, qui succède au très puissant souverain Richard Cœur de Lion, connait des échecs cuisants au début de son règne. Piètre chef militaire, il perd l’essentiel des terres de l’Empire angevin situées en France (à l’exception de la Guyenne.) En outre, il est excommunié par l’Eglise catholique en 1209 après un conflit autour de l’élection de l’archevêque de Cantorbéry. Ces échecs engendrent d’importantes pertes économiques, que Jean sans Terre tente de compenser en renforçant la taxation des Seigneurs. Cette décision entérine la rébellion des barrons, qui s’emparent de Londres le 17 mai 1915 puis contraignent le roi à la signature de la Grande charte. Celle-ci énumère dans un premier temps les différentes personnes qui ont pris part à la rédaction du texte : une dizaine de membres du clergé anglais sont cités (des archevêques, des évêques, des cardinaux, des maitres…) puis 17 membres de la noblesse. 4 d’entre eux sont appelés par le titre nobiliaire Earl, qui désigne les gouverneurs de comtés. La Magna carta instaure ensuite plusieurs libertés. Elle rappelle la totale autonomie de l’Eglise d’Angleterre, notamment en matière d’élections. Elle accorde des droits supplémentaires à tous les hommes libres du Royaume, notamment en termes d’héritages (dont elle fixe les montants et les modalités) et confirme les libertés de coutume de la cité de Londres et de toutes les autres cités, bourgs et villes. En outre, la charte modifie le fonctionnement des institutions politiques en déterminant que l’octroiement d’une aide ou d’un écuage ne peut se faire qu’après l’accord du Commun conseil du Royaume, composé de représentants du baronnage. De nouvelles règles judiciaires sont également édictées : les droits des personnes accusées et des marchants circulant sur le territoire royal sont renforcés. Enfin, la charte institue l’élection de 25 barons par leurs pairs, chargés de veiller à la paix et au respect des libertés. L’analyse de ce document nous amène à nous poser la question suivante : En quoi la Grande Charte de 1215 pose-t-elle les jalons de l’Etat de droit contemporain et plus particulièrement du parlementarisme anglais ? Nous commencerons par voir que la Charte attribue de nouveaux droits à certaines composantes de la société anglaise comme le clergé et la noblesse. Puis nous verrons qu’elle institue des libertés fondamentales, notamment en matière de justice. Enfin, nous observerons que la Magna Carta dessine l’épure d’un nouveau partage du pouvoir et d’une limitation de l’autorité du Roi. I/ De nouveaux droits fondamentaux accordés au clergé et à la noblesse A/ Une réaffirmation de l’autonomie de l’Eglise anglaise La Magna Carta commence par réaffirmer l’autonomie de l’Eglise anglaise : « Nous avons accordé à Dieu et nous l’avons confirmé par cette présente charte, en notre nom et celui de nos héritiers à perpétuité, que l’Eglise d’Angleterre sera libre et qu’elle gardera ses droits et ses libertés intactes » (L17 à 19.) Cette liberté s’observe notamment dans la libre organisation des élections canoniques et est rendue légitime par l’accord du pape Innocent III (le Vatican changera toutefois de position quelques mois plus tard.) Le principe énoncé ici interdit au Roi de se servir de son pouvoir colossal au détriment des autres corps qui constituent la société anglaise, comme le clergé. Il invite l’« Exécutif » (le pouvoir royal ici) à ne pas imposer sa volonté par la force mais plutôt à toujours chercher un compromis avec les autres branches de la société. Par ailleurs, en renforçant les privilèges du clergé, elle en rappelle le rôle central au sein du Royaume. B/ Un renforcement des droits pour la noblesse, notamment en termes d’héritage La Grande Charte apporte également de nouveaux droits à la noblesse, et en particulier au baronnage : « Nous avons aussi concédé à tous les hommes libres de notre royaume, en notre nom et en celui de nos héritiers, toutes les libertés écrites ci-dessous, à posséder et tenir, pour eux eux et leurs héritiers, de nous et de nos hérités » (L25 à 27.) Le texte fixe les modalités de l’héritage (l’hérité auquel il revient doit être majeur, le cas échéant il peut être confié provisoirement à un sherrif) ainsi que son montant (environ 100 livres sterling.) Ces règles confortent le droit de propriété des membres de la noblesse. Elle renforce par ailleurs la féodalité du Royaume d’Angleterre de l’époque, avec une domination prépondérante des comtes et des barrons, qui gouvernent des fiefs et asservissement des serfs à leur pouvoir. Ces nouveaux droits accordés aux dignitaires ecclésiastiques et au noble ne sont pas tout à fait nouveaux : ils étaient déjà rappelés dans la Charte de libertés publiée en 1100 lors de l’ascension au trône du roi Henri Beaulerc (bien que peu appliqués dans les faits par les rois.) La Grande Charte vient donc les conforter. II/ Une Charte qui institue des libertés fondamentales A/ De nouvelles libertés relatives à la justice Le texte de 1215 comporte également des aspects relatifs à la liberté face à la justice : « Nul homme libre ne sera capturé et emprisonné, ou privé de ses biens […] sinon par jugement légal de ses pairs ou selon le droit du pays » (L76 à 78.) Cet article, qui constitue la clause 39 de la Charte, est l’un des plus connus du document. Il prévoit en effet qu’un Homme ayant commis un délit doit recevoir une sanction proportionnelle à la gravité de ce délit. L’interdiction des arrestations arbitraires, l’adoucissement des sanctions et l’introduction du caractère proportionnel de la peine était devenu un rééquilibrage nécessaire après les nombreux abus constatés sous le règne des rois antérieurs à Jeans sans Terre. La Charte indique également que tous les hommes libres ont le droit à jugement légal, tel que prévu par le droit du pays. C’est la notion de habes corpus qui est introduite ici : l’affirmation du droit à disposer d’un jugement avant d’être condamné est à souligner. B/ De nouveaux droits pour les marchands Les nouveaux droits affirmés par la Charte concernent également d’autres domaines de la vie publique. « Que tous les marchands puissent sortir d’Angleterre et y entrer saufs et en sécurité, ainsi qu’y demeurer et y voyager », peut-on lire aux lignes 80 et 81. Les auteurs du texte précisent que tout marchand étranger peut pénétrer sur les territoires royaux (terrestres et maritimes) pour y faire du commerce, sauf s’il vient d’un pays en guerre contre l’Angleterre. Dans ce cas, il peut être détenu temporairement. Le principe qui est énoncé ici est intéressant car il pose les fondements de la liberté d’aller et venir, que l’on considère aujourd’hui comme l’une des libertés individuelles les plus importantes. Elle dessine également les prémisses du libéralisme économique, dans la mesure où elle prône la libre circulation des personnes et des marchandises entre les pays et une certaine étanchéité des frontières. III/ La Magna Carta dessine l’épure d’un nouveau partage du pouvoir A/ L’émergence de contrepouvoirs : Commun Conseil, bourgs, cités… La Charte acte par ailleurs la création d’une nouvelle institution, à laquelle elle confie plusieurs missions : « Nul écuage ou aide ne doit être levé dans notre royaume autrement que par le commun conseil de notre royaume » (L50 à 52.) Ce conseil a notamment pour mission le contrôle de l’impôt (et notamment de l’écuage) ainsi que l’attribution d’aides par le Royaume. Il doit favoriser la paix civile en garantissant le respect des droits énoncés dans la Charte. Il est prévu que le Roi doive prêter serment devant ce Conseil, qui dispose d’ailleurs des moyens contraignants sur lui. En effet, la possibilité de saisie des biens et châteaux en cas de manquement s’applique également au monarque. Or, si la saisie était une pratique assez répandue au Moyen-Age, elle ne concernait que très rarement le Roi. La Grande Charte vient donc introduire un semblant d’égalité face à la loi, avec le principe que tout le monde doit rendre des comptes. Philip Buckler, doyen de la cathédrale de Lincoln, dira plus tard que la Magna Carta a « redéfini la relation entre les nations et leurs gouvernants. » C’est effectivement un début de partage du pouvoir entre l’exécutif (le Roi), le législatif (Commun Conseil) et le judicaire. Même si les pouvoirs du roi demeurent omnipotents, la Charte introduit en effet des contrepouvoirs disposant de missions importantes, pouvant impacter directement la Royauté. Ce nouveau partage du pouvoir et cette relation d’interdépendance entre le Conseil et uploads/S4/ commentaire-carta-magna 1 .pdf
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- Publié le Sep 22, 2022
- Catégorie Law / Droit
- Langue French
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