Cours d’été en Droit international & Relations internationales Édition 2020 Ins

Cours d’été en Droit international & Relations internationales Édition 2020 Institut de Formation des Ambassadeurs de la Jeunesse (I.F.A.J) Cours de droit de la responsabilité internationale des États et des Organisations internationales Par M. Alexandre Negrus Ambassadeurs de la Jeunesse - 31 Rue de Poissy, 75005 Paris - 03.85.51.27.78 www.ambassadeurs-jeunesse.org - contact@ambassadeurs-jeunesse.org N°RNA : W712004835 / N°SIRET : 849 769 906 La responsabilité internationale de l’État : exonération et réparation Pour engager la responsabilité internationale des États, nous l’avons vu, il convient d’analyser une violation d’une obligation internationale ainsi que l’attribution du fait internationalement illicite à l’État. Ces deux premières conditions sont essentielles et s’il manque l’une d’elles, alors il ne sera pas possible d’engager la responsabilité internationale d’un État pour fait internationalement illicite. Toutefois, un État peut, sous certaines conditions, échapper à l’engagement de sa responsabilité internationale. Ces conditions ont toutes été codifiées par la CDI dans les Articles de 2001. Là encore, des règles bien précises ont été posées et les États, pour échapper à la mise en oeuvre de leur responsabilité, doivent prouver un certain nombre de critères. Si l’on admet tout de même qu’un État est responsable, et qu’il n’y a aucune exonération possible, il faudra alors réfléchir aux conditions de réparation du dommage causé. Cette règle de la réparation est essentielle car c’est un attribut de la responsabilité : un État ne va réparer que parce qu’il est responsable et parce qu’il a la personnalité juridique. Inversement, un État est responsable parce qu’il va devoir réparer le dommage causé. L’enjeu de la réparation est primordial. La justice privée se développe de plus en plus et il est courant de voir les différends entre États jugés par la justice arbitrale, sous forme de négociation, voire de compromis. Si l’enjeu est grand, c’est parce que bien souvent, des questions essentielles sont abordées telles que les droits fondamentaux mais aussi, les enjeux économiques sont considérables. Bien souvent, les réparations sont d’ordre économique, mais nous verrons que l’aspect moral est également important. Les enjeux diplomatiques sont tels que l’État qui est désigné responsable est atteint dans sa réputation. Pour des raisons évidentes de sécurité juridique, les circonstances excluant l’illicéité d’un fait ou d’un acte sont bien évidemment limitées à quelques cas, dont il conviendra d’étudier la jurisprudence relative : - le consentement de la victime ; - la force majeure ; - l’état de nécessité ; - la détresse ; - la légitime-défense ; - les contre-mesures (elles feront l’objet d’un cours ultérieurement) ; - le recours à la force sur autorisation du Conseil de sécurité des Nations Unies. !2 Si aucune de ces circonstances n’est soulevée dans une affaire, l’État n’échappera pas à l’engagement de sa responsabilité internationale. Dès lors, l’obligation de réparer, quelles que soient les modalités de réparation, est un principe général du droit international. I. L’exonération : l’importante questions de circonstances excluant l’illicéité Les circonstances excluant l’illicéité sont codifiées au Chapitre V des Articles de 2001. A. Le consentement de la victime Article 20 des Articles de 2001 : « Le consentement valide de l’État à la commission par un autre État d’un fait donné exclut l’illicéité de ce fait à l’égard du premier État pour autant que le fait reste dans les limites de ce consentement ». Dans l’affaire « Savarkar » du tribunal arbitral en 1911, le consentement de la France est déduit du comportement d’un gendarme français, organe de l’État qui avait aidé les policiers britanniques à procéder à l’arrestation du suspect. S’était posée la question de la violation de la souveraineté de la France par la Grande-Bretagne, mais le tribunal arbitral n’a pas soulevé de violation de la souveraineté car le comportement de la France venait excuser le fait illicite. Dans l’affaire « Activités armées sur le territoire du Congo » de la CIJ en 2005, le consentement peut être déduit du silence. Le consentement a été considéré comme une absence d’objection. B. La légitime défense Ce droit à la légitime défense fait l’objet d’un encadrement rigoureux, fort logiquement, afin de ne pas créer des situations trop dangereuses sous prétexte de maintien de la paix et de la sécurité internationales. Ainsi, la Charte des Nations Unies contient une disposition essentielle s’agissant de la légitime défense, codifiée à l’article 51 : « Aucune disposition de la présente Charte ne porte atteinte au droit naturel de légitime défense, individuelle ou collective, dans le cas où un Membre des Nations Unies est l'objet d'une agression armée, jusqu'à ce que le Conseil de sécurité ait pris les mesures nécessaires pour maintenir la paix et la sécurité internationales. Les mesures prises par des Membres dans l'exercice de ce droit de légitime défense sont immédiatement portées à la connaissance du Conseil de sécurité et n'affectent en rien le pouvoir et le devoir qu'a le Conseil, en vertu de la présente Charte, d'agir à tout moment de la manière qu'il juge nécessaire pour maintenir ou rétablir la paix et la sécurité internationales. » Dans cet article, on mesure la portée de ce droit. C’est un droit qui ne souffre d’aucune contestation puisque dès les premières dispositions de l’article, il est indiqué que les États ont un « droit naturel de légitime défense ». Ce droit naturel n’est que la conséquence de la souveraineté des États qui ont le droit, lorsqu’ils sont victimes d’une agression armée, de se défendre. Mais, immédiatement, les États Membres des Nations Unies, en écrivant la Charte, ont voulu « tempérer » ce droit afin de ne pas le rendre trop facilement applicable. Si cette légitime défense peut être !3 individuelle ou collective, il faut qu’il y ait une agression armée qui soit identifiée. C’est le premier critère, qui constitue le fondement même de la légitime défense. Le Conseil de sécurité des Nations Unies est également au coeur de cette notion de légitime défense car sans son action, il n’est pas possible de trouver un fondement juridique à la légitime défense. Il est certain que le Conseil de sécurité a un rôle politique majeur, si ce n’est fondamental dans la légitimation et la justification de la légitime défense. Mais l’article 51 rappelle sans limite que le Conseil de sécurité joue également un rôle de légitimation juridique : « [...] Les mesures prises par des Membres dans l'exercice de ce droit de légitime défense sont immédiatement portées à la connaissance du Conseil de sécurité et n'affectent en rien le pou- voir et le devoir qu'a le Conseil, en vertu de la présente Charte, d'agir à tout moment de la manière qu'il juge nécessaire pour maintenir ou rétablir la paix et la sécurité internationales. » La Charte n’est cependant pas le seul fondement juridique à la légitime défense. La pratique a également donné lieu à un développement jurisprudentiel en la matière et cet article 51 a trouvé une consécration jurisprudentielle dans l’arrêt « Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci » de la CIJ en 1986, où la Cour fait mention de l’article 51 de la Charte des Nations Unies qui dispose bien que l’État a le droit d’agir en légitime défense. Focus sur le droit à la légitime défense et la dissuasion nucléaire : Dans son mémento de la jurisprudence de droit international public , Blaise Tchikaya 1 développe une explication sur ce qu’il appelle « le droit de l’État à la survie ». Dans ce que l’on appelle habituellement la dissuasion nucléaire, un lien direct doit être établi avec le droit de tout État à la survie, qui est un droit fondamental reconnu par la CIJ. Pour mettre en avant ce droit, et pour rendre effectif ce droit à la survie, la CIJ a admis l’usage de la dissuasion nucléaire et, par là même, le droit de recourir à la légitime défense conformément à l’article 51 de la Charte. Bien évidemment, les États ne sont pas limités uniquement par l’unique Conseil de sécurité dans l’usage de la légitime défense. Ils doivent également respecter le droit international humanitaire, composé de règles applicables dans les conflits armés pour la protection et le respect de la personne humaine. Tous les États ont l’obligation de respecter ces règles fondamentales, qu’ils aient ou non ratifié les conventions internationales en la matière. C. La force majeure Les États peuvent invoquer la force majeure afin d’échapper à l’engagement de leur responsabilité internationale. Cette force majeure est codifiée à l’article 23 des Articles de 2001 sous la formulation suivante : « L’illicéité du fait d’un État non conforme à une obligation internationale de cet État est exclue si ce fait est dû à la force majeure, consistant en la survenance d’une force irrésistible ou d’un éventent extérieur imprévu qui échappe au contrôle de l’État et fait qu’il est matérielle- ment impossible, étant donné les circonstances, d’exécuter l’obligation ». Memento de la jurisprudence de droit international public, Blaise Tcjikaya, Hachette supérieur, 5ème édition, p.130. 1 !4 Il n’est pas aisé pour les États d’invoquer la force majeure. En effet, des conditions strictes et cumulatives doivent être mises en avant afin de justifier uploads/S4/ cours-etats-oi-20-06-2020.pdf

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  • Publié le Jui 07, 2021
  • Catégorie Law / Droit
  • Langue French
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