1 Cours de droit de la famille – Licence 1 – Année 2016-2017 - Cergy-Pontoise –

1 Cours de droit de la famille – Licence 1 – Année 2016-2017 - Cergy-Pontoise – Cours de Mme Saulier Maïté SÉANCE 3. LES EFFETS DU MARIAGE Objectifs de la séance : comprendre les devoirs personnels et patrimoniaux entre époux et leur évolution dans le temps ; être capable d’expliquer la distinction entre devoir de contribution et devoir de solidarité entre époux. LES EFFETS PERSONNELS DU MARIAGE  Le devoir de communauté de vie Doc. 1. Req., 2 janvier 1877, Bastien c. Bastien, GAJC, n° 32. Doc. 2. Civ. 1ère, 12 février 2014, n°13-13.873  Le devoir de fidélité Doc. 3. Civ. 1ère, 4 novembre 2011, n°10-20114 Doc. 4. Civ. 1ère, 30 avril 2014, n° 13-16649  Le devoir conjugal Doc. 5. Civ. 2e, 5 novembre 1969 Doc. 6. Art. 222-22 Code pénal  Le devoir de respect Doc. 7. Civ. 1ère, 23 mai 2006, Bull. civ. I, 260. Doc. 8. Civ. 1ère, 27 février 2013, n° 12-17097 LES EFFETS PATRIMONIAUX DU MARIAGE  Premières vues sur les régimes matrimoniaux Cherchez les définitions suivantes : régime primaire, régime matrimonial, régime matrimonial légal. Quel est le régime matrimonial légal en droit français ? Résumez les grands principes de ce régime en une quinzaine de lignes.  Solidarité et contribution aux charges du mariage Doc. 9. Articles 214 et 220 du Code civil Doc. 10. Soc. 4 octobre 2001. Doc. 11. Civ. 1ère, 5 octobre 2016. Travail à réaliser : Différenciez le devoir de contribution aux charges du mariage et le devoir de solidarité entre époux quant à leur champ d’application, conditions d’application, personnes concernées et effets. Après avoir consulté les manuels d’usage en droit de la famille et les éventuels articles de doctrine sur ce thème, vous rédigerez la dissertation suivante : « le devoir de respect entre époux ». Vous vous aiderez également des documents 5, 6, 7 et 8. 2 Cours de droit de la famille – Licence 1 – Année 2016-2017 - Cergy-Pontoise – Cours de Mme Saulier Maïté LES EFFETS PERSONNELS DU MARIAGE  Le devoir de communauté de vie Doc. 1 : Req. 8 janvier 1877, Bastien c. Bastien, Les grands arrêts de la jurisprudence civile, Tome I, Dalloz, 2015. Faits. — M. Bastien avait introduit dans son ménage, comme domestiques, disait-il, deux personnes, qui étaient en réalité ses enfants naturels. Il marquait pour eux une grande préférence et leur avait laissé prendre une grande autorité sur sa femme et sur l'enfant né de son mariage. Mme Bastien, jugeant sa position intolérable, forma contre son mari une demande tendant à être autorisée, tant qu'il n'aurait pas renvoyé ces deux personnes, à se retirer chez ses parents avec son enfant et à recevoir une pension alimentaire. Le tribunal d'Arras, par jugement du 25 août 1875, la cour de Douai, par arrêt du 29 février 1876, firent droit à sa demande. Pourvoi du sieur Bastien, pour violation des articles 214, 231 et 306 du Code civil, ainsi que des articles 872 s. du Code de procédure civile. ARRÊT La Cour; — Sur le moyen unique… : — Attendu que si l'article 214 du Code civil impose à la femme l'obligation d'habiter avec son mari, cette obligation est subordonnée à la condition que celui-ci lui donnera la protection qui lui est due, qu'il lui fournira tout ce qui est nécessaire aux besoins de la vie, selon ses facultés et son état; — Attendu que par ces dernières expressions le législateur n'a pas borné sa sollicitude aux besoins matériels de la vie, mais qu'il a entendu protéger également la dignité et la sécurité de la femme; — Attendu que l'arrêt attaqué déclare en fait que la présence dans le domicile du sieur Bastien de personnes étrangères, la situation qu'il leur a faite dans son intérieur, l'espèce d'autorité qu'il leur attribue sur l'enfant né de son mariage et sur sa femme, sont de nature à blesser celle-ci dans sa dignité et à lui faire dans le domicile commun une position intolérable; — Attendu que, dans ces circonstances, la Cour de Douai a pu, sans violer aucun principe, autoriser la dame Bastien à se retirer dans sa famille jusqu'à ce que les personnes dont s'agit aient quitté le domicile conjugal, et contraindre le mari à lui payer jusqu'alors une pension mensuelle; — Attendu qu'une telle disposition n'établit point entre les époux une séparation de corps illicite, en les dispensant contrairement à la loi du devoir de la vie commune; qu'elle a pour objet d'assurer l'exécution réciproque de ce devoir dans les conditions d'assistance et de protection qui sont tracées aux époux par la loi; — Attendu, dès lors, que l'arrêt attaqué ne viole aucun des articles invoqués; — Rejette… OBSERVATIONS 1 L'arrêt ci-dessus rapporté a marqué une étape importante dans la reconnaissance d'une dispense du devoir de cohabitation entre époux. Sa signification a d'ailleurs pu être remise en cause, compte tenu de l'évolution législative du droit des gens mariés (v. Marie-Christine Manigne, « La communauté de vie », JCP 1976. I. 2803). I. La consécration de la dispense de cohabitation par la jurisprudence 2 Le Code civil, à l'article 214 (rédaction de 1804), imposait à la femme l'obligation d'habiter avec son mari et de le suivre partout où il jugeait à propos de résider. Mais cette obligation, rattachée à la puissance maritale, ne pouvait être considérée comme absolue. D'ailleurs, l'article 214, dans sa deuxième phrase, obligeait le mari à recevoir sa femme et à lui fournir tout ce qui est nécessaire pour les besoins de la vie, selon ses facultés et son 3 Cours de droit de la famille – Licence 1 – Année 2016-2017 - Cergy-Pontoise – Cours de Mme Saulier Maïté état. Plus généralement, l'article 212 disposait que les époux se doivent mutuellement fidélité, secours, assistance, à quoi la loi du 4 avril 2006 a ajouté le « respect ». Dans l'arrêt commenté, la Cour de cassation a affirmé qu'il y a liaison entre l'obligation pour la femme d'habiter avec le mari et l'obligation pour celui-ci de la protéger, de l'assister et de l'entretenir. L'exécution de la première est « subordonnée à la condition que (le mari) lui donnera la protection qui lui est due, qu'il lui fournira tout ce qui est nécessaire aux besoins de la vie, selon ses facultés et son état ». Ce faisant, la chambre des requêtes a confirmé divers précédents (Civ. 9 janv. 1826, Dalloz JG, vo Mariage, no 749, 10° ; Req. 20 nov. 1860, DP 61. 1. 305), datant aussi d'une époque où le divorce n'avait pas encore été rétabli. La dispense de cohabitation, admise (dans le présent cas) parce que le mari prétendait imposer à sa femme la présence et l'autorité de personnes étrangères (rappr. Douai, 26 mars 1901, DP 1902. 2. 188) – ou celle de ses parents (Req. 20 nov. 1860, préc.) ou, a fortiori, celle d'une concubine (Paris, 21 mai 1897, S. 97. 2. 296) – l'a aussi été lorsque le mari avait proféré des injures graves et commis des sévices (Req. 27 janv. 1908, DP 1908. 1. 154; Bastia, 20 mai 1902, DP 1904. 2. 231) ou qu'il avait violé son obligation d'entretien (Req. 4 mars 1914, DP 1916. 1. 31). Tout naturellement, on a été conduit à observer qu'un certain lien existe entre l'obligation de cohabitation et les autres devoirs découlant du mariage. Si le refus d'habiter avec son conjoint a été considéré comme une injure grave, pouvant servir de fondement à une demande de divorce ou de séparation de corps, ce refus perd son caractère fautif lorsque la femme peut justifier que le mari ne remplit pas à son égard son obligation d'assistance et d'entretien (Req. 4 mars 1914, préc.). Inversement, si le refus de la femme n'est pas justifié, le mari est fondé à suspendre lui-même l'exécution de son devoir de secours et d'assistance, notamment à lui refuser toute pension alimentaire (Dijon, 4 févr. 1888, DP 89. 2. 249; v. aussi Colmar, 1er déc. 1952, D. 1953. 46). 3 Approfondissant l'analyse, certains auteurs se sont référés au caractère synallagmatique du mariage (Aubry et Rau, § 470, no 88), ce qui, par voie de conséquence, éveille l'idée d'une sorte d'exception non adimpleti contractus. Aussi bien, un recours préalable à la justice n'est pas indispensable (Req. 4 mars 1914, préc.; Dijon, 4 févr. 1888, préc.; Civ. 2e, 15 janv. 1969, D. 1970. 148, 1re esp., note Le Calonnec). À quoi l'on a objecté que la corrélation admise à propos de l'obligation de cohabitation est exclue au sujet d'autres effets du mariage (Planiol et Ripert, t. II, par Rouast, no 366); c'est ainsi que l'obligation mutuelle de fidélité n'est pas suspendue par l'adultère du conjoint 38 MARIAGE 271 (v. Y. Chartier, « Domicile conjugal et vie familiale », RTD civ. 1971, no 18, p. 527, no 54, p. 557). Encore faut-il observer que, si fruste soit-il, le mécanisme de l'exception non adimpleti contractus s'adapte aux diverses situations dans lesquelles on l'utilise, notamment lorsque celles-ci donnent naissance à une pluralité d'obligations entre deux personnes (Béguin, Rapport Trav. Ass. Capitant, uploads/S4/ droit-famille-saulier-03-l1a.pdf

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  • Publié le Sep 24, 2021
  • Catégorie Law / Droit
  • Langue French
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