Droit social Section 1 : Evolution et champs d’application du droit du travail

Droit social Section 1 : Evolution et champs d’application du droit du travail I. Le domaine du droit du travail Le droit du travail est le droit du travail subordonné (d’où l’idée et l’importance de la notion de travail). Il ne s’applique pas : - Aux indépendants : artisans, commerçants, professions libérales - Aux fonctionnaires titulaires des 3 fonctions publiques (Etat, collectivités terri et hospitalières). Les fonctionnaires sont dans une double situation : certains fonctionnaires sont titulaires, d’autres sont contractuels (mais contrat de droit public, ils ne relèvent pas du champ d’application du droit du travail). Cependant certaines relations de travail relève d’une double logique : droit public et droit privé - Salariés sous statut (SCNF, Banque de France, IEG, RATP…) : 500 000 personnes - Contractuels de droit public (de + en + influencé par le droit privé) Mais une relation de travail peut être requalifiée à la demande de : - L’URSSAF (le Pôle sécurité sociale du tribunal judiciaire (ex-TASS) est alors compétent) : celui qui permet de faire rentrer cotisations de la sécurité sociale dans la sécurité sociale - Et/ou du travailleur (le conseil de prud’hommes est alors compétent) En France, on paye plus de cotisations sociales que d’impôts. Le champ d’application du droit du travail concerne presque 70% de la pop active française. Il convient donc de bien distinguer des notions voisines : contrat de travail / relations de travail, pop salariée / pop active II. Les caractères du droit du travail Le droit du travail est le droit du travail subordonné (d’où l’idée et l’importance de la notion de travail), contrairement au droit civil fondé sur l’égalité des co-contractants. Le salarié sera toujours considéré comme la partie la plus faible du contrat. Le droit du travail est un droit de tutelle. Il protège donc le salarié y compris contre lui-même. Par conséquent, le salarié ne peut renoncer au droit qu’il tient de la loi, des conventions collectives ou des usagers. Ex : un salarié victime d’un accident de travail ne peut renoncer par transaction à solliciter des d&i à titre de réparation Le droit du travail est un et multiple : son application dépend de la taille de l’entreprise (droit du licenciement ou IRP) Les effets de seuil (dès que l’effectif va dépasser un seuil, les contraintes vont être plus importantes, souvent de 50 personnes) sont dénoncés par certains comme constituant un blocage à l’embauche. L’ancienneté joue un rôle important. Ex : indemnité de licenciement, durée de préavis. Plus l’ancienneté dans l’entreprise est importante, plus les droits auxquels on peut prétendre sont élevés. III. L’évolution du droit du travail 1) Remarques générales On ne peut comprendre le droit du travail sans un aperçu historique de son évolution. Il est d’une manière générale inséparable de l’évolution économique et sociale. Il est en revanche fortement tributaire en France de l’intervention de l’Etat, à la différence de certains pays, comme le Royaume Uni par exemple. Conséquence : la loi et le législateur ont joué historiquement un rôle déterminant. L’évolution du droit du travail est inséparable de l’évolution de la sécurité sociale et de la protection sociale, par ex : la loi de 1898 sur les accidents de travail qui prévoit une présomption d’accident du travail en cas d’accident sur le lieu de travail. Le droit du travail s’est bâti sur une unité de temps de lieu et d’action. La question du télétravail pendant la pandémie : déconnexion unité de lieu et unité de temps. 2) Le régime corporatif sous l’ancien régime Dès le XIIe se mettent en place des corps de métiers structurés et hiérarchisés, comprenant des apprentis, des compagnons et des maîtres. La seconde moitié du XVIIe est marquée par une crise au sein des corporations due au blocage des carrières des apprentis et des compagnons. - La corporation ou la jurande constitue un marché du travail fermé - Ces structures déterminent leur propres règles (« autonormation ») Le régime corporatif est balayé par la Révolution française mais cette dimension « corporative » demeure implicite dans de nombreux secteurs économiques. Cette dimension corporative explique une des caractéristiques du droit du travail : la tendance à la création de règles par les acteurs du rapport de travail Exemples de corporatisme : - Le syndicat du livre : rassemble l’ensemble des ouvriers imprimeurs. Dans l’histoire du mouvement ouvrier français, les ouvriers ne savaient pas écrire sauf ceux du domaine du livre, qui étaient les plus instruits et les plus syndiqués. Ce sont eux qui structurent le recrutement. - Les ouvriers qui chargent et déchargent les bateaux dans les ports, appelés aussi dockers. C’était la CGT qui choisissait la personne qui allait être recrutée. Cette personne choisie devait obligatoirement adhérer au syndicat de la CGT. Sinon, le syndicat lui rompait sa période d’essai. 3) L’idéologie révolutionnaire Elle affirme la liberté naturelle de l’homme, notamment la liberté de contracter des engagements. Influence de l’idéal rousseauiste. Et consacre deux libertés essentielles : - La liberté du commerce et de l’industrie - La liberté du travail (loi des 2 et 17 mars 1791, dit « Décret D’Allarde ») La révolution libère le marché du travail : - Le servage est aboli : le paysan est, en théorie, libre de ses mouvements et de ses choix professionnels - L’esclavage est également brièvement aboli par les révolutionnaires avant d’être rétabli à la demande du lobby colonial Mars 1804 : Prohibition du travail perpétuel (CDI impossible) L’Etat pendant tout le XIXe voit la classe ouvrière comme dangereuse, perçue comme angoissante. La libération du marché du travail s’avère dangereuse pour les pouvoirs publics en place, puisque le paysan n’est plus attaché à sa terre (il peut bouger). On cherche alors à mettre des barrières (livret ouvrier : l’ouvrier qui voulait aller d’une ville à l’autre devait faire présenter son livret). Jusqu’en 1950, la France reste un état paysan. 4) La période libérale (jusqu’à Napoléon III) Au cours de la première partie du XIXe, prévaut le dogme d’un libéralisme absolu, défavorable au travailleur avec une baisse des salaires ouvriers et une paupérisation. Le pouvoir politique (notamment Napoléon), éprouve une méfiance viscérale à l’égard du monde du travail : - Mise en place d’un régime policier pour surveiller la classe ouvrière naissante - L’ancêtre du contrat de travail, le contrat de louage d’ouvrage est abandonné entièrement à la liberté des parties - Une très forte concurrence entre les patrons entraîne une baisse des salaires réels - Le travail des enfants dès 6 ans est fréquent, avec des journées de 14 à 15h - La classe ouvrière est toutefois encore peu développée en France, qui reste un pays majoritairement rural et paysan (ou existe aussi le travail des enfants) - Le patronat éprouvera d’ailleurs pendant longtemps de réelles difficultés à « sédentariser » la main d’œuvre nécessaire, ce qui explique le développement d’un paternalisme social (ex de l’Usine du Creusot) Aujourd’hui, certains employeurs offrent des services pour avoir des bons employés notamment la mise en place de crèches d’entreprise. Il existe peut-être encore une forme de néopaternalisme social de nos jours. 5) L’interventionnisme étatique Une conception hygiéniste du droit du travail L’Etat intervient pour réglementer les conditions de travail et mettre fin aux dérives patronales avec l’adoption de la première grande loi sociale, le 22 mars 1841. Cette loi faite suite au rapport du Docteur Villermé sur « L’état physique et moral des ouvriers » qui décrit les conditions de travail effroyable des ouvriers. Elle marque le point de démarrafe d’une conception hiéginiste du droit du travail. On cherche à protéger le corps du salarié et non son esprit. Dès lors est interdit : - Le travail des enfants de moins de 8 ans - Limitation du travail de 8 à 12 ans - Le travail dangereux ou de nuit L’émergence des acteurs A compter de cette époque, l’Etat va devenir en France un acteur incontournable en matière sociale, à la différence d’autres pays comme le Royaume-Uni : - En créant des organes publics sociaux : • L’inspection du travail en 1892 (créée en 1874) • L’office du travail qui sera un des noyaux durs et ancêtre du ministère du travail - En reconnaissant la liberté syndicale avec la loi Waldeck Rousseau en 1884 précédé de la suppression du délit de coalition (1864). On reconnait le syndicat comme l’expression d’une volonté collective. On passe d’une source individuelle du droit du travail à une source collective. Conséquences : • La dimension individuelle qui prévalait jusqu’alors s’estompe • La question ouvrière sous le second Empire (avec un engagement sincère de Napoléon III pour l’extinction du paupérisme) puis la question sociale sous la IIIe République vont conditionner l’évolution du droit social La liberté d’association est arrivée après la liberté syndicale en France, contrairement au reste du monde. Les syndicats en France ont historiquement existé en dehors des entreprises La possibilité pour les syndicats d’élaborer des normes collectives ne viendra que beaucoup plus tard. Le syndicat est le représentant naturel du monde du travail, il permet de faire remonter des informations. Napoléon III a uploads/S4/ droit-social.pdf

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  • Publié le Apv 16, 2021
  • Catégorie Law / Droit
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