1 Notes de Cours du Professeur Sophie Delbrel L2 DROIT & SCIENCE POLITIQUE HIST
1 Notes de Cours du Professeur Sophie Delbrel L2 DROIT & SCIENCE POLITIQUE HISTOIRE DES INSTITUTIONS JURIDICTIONNELLES Université Montesquieu Bordeaux IV Année Universitaire : 2013-2014 2 INTRODUCTION : LA SUPERPOSITION DES JURIDICTIONS AVANT 1789 Les débuts de la dynastie capétienne se révèlent difficiles ; l’autorité du roi ne s’exerçant que sur un domaine aux dimensions réduites. Cela explique la prolifération de justices sur le territoire ; phénomène qui peut apparaitre comme la manifestation du morcellement coutumier. Dans le temps, il y a un empilement de ces juridictions. Section 1 : L’héritage médiéval Dans un monde où l’autorité royale reste limitée, l’Eglise joue un grand rôle ; elle a développé ses institutions pour remplir ses tâches premières d’ordre spirituel mais elle a aussi développé son propre droit (le droit canon), que ses juridictions appliquent. C’est pourquoi, après avoir envisagé une justice laïque, il s’agira de traiter de la justice ecclésiastique. PARAGRAPHE 1 : Les justices laïques L’effacement de l’Etat durant le Haut Moyen-Age se traduit notamment par un morcellement de la justice. Aussi bien coexistent des justices seigneuriales et une justice royale d’importance réduite. A) Des justices seigneuriales multiples La justice est la manifestation essentielle du pouvoir dans la mesure où rendre la justice c’est apaiser les conflits, assurer la paix sur un territoire donné. En ce sens, le justicier a un rôle de prévention tout comme il a un droit de règlement et de répression. Celui qui rend la justice a certes pour fonction de punir les coupables mais il a aussi le droit, le pouvoir d’organiser la justice sur un territoire donné. 1. Féodalité et justice L’existence des justices seigneuriales est liée à l’origine même du pouvoir seigneurial ; pouvoir qui apparait tout à la fois comme une extension des droits du grand propriétaire et une usurpation du pouvoir royal. Quoi qu’il en soit, tous les seigneurs ne sont pas nécessairement justiciers ou du moins pas au même niveau. Ainsi, certaines coutumes lient le droit de rendre la justice à la possession d’un fief : « fief et justice sont tout un ». A l’inverse, d’autres coutumes affirment que fief et justice n’ont rien de commun. Dans les faits, trois situations se présentent : - Dans les principautés territoriales où les seigneurs sont les héritiers directs des comtes carolingiens, sont exercés tous les droits de souveraineté ; c’est-à-dire notamment le droit de justice. - Dans les fiefs de moindre importance, les seigneurs peuvent exercer la justice sans qu’il faille y voir une règle. - Enfin, il existe des seigneurs féodaux qui ne sont pas seigneurs justiciers. Quel que soit l’origine du pouvoir détenu par le seigneur, il faudra envisager si l’on se place dans le cadre féodal ou si l’on se place dans le cadre de la justice au sens habituel du terme, liée à la domination de la terre. 3 Dans tous les cas, la diversité juridictionnelle se trouve accrue par le fait que des établissements religieux par exemple peuvent exercer des droits de justice en tant que seigneurs. De même, à partir du 12ème siècle, les bourgeois des communes peuvent eux aussi exercer des droits de justice en tant que seigneurs. 2. La distinction entre Haute et Basse justice La distinction entre les deux n’a de sens qu’au sujet des seigneuries foncières. En effet, le seigneur est justicier en raison de la domination qu’il exerce sur la terre et sur ses habitants. Il faut chercher dans l’héritage Franc la division entre Haute et Basse justice ; c’est-à-dire la distinction entre les causes qui relèvent du comte et celles qui relèvent de ses adjoints. Ainsi, la Haute justice emporte plénitude de juridictions ; c’est-à-dire la connaissance de toutes les causes et notamment celles qui sont les plus importantes. En matière criminelle, la Haute justice est également appelée « la justice de sang », elle concerne les causes au sujet desquelles la peine de mort peut être prononcée (homicide, rapt, incendie). Quant à la basse justice, elle s’applique pour causes de moindre importance ; par exemple celles qui touchaient l’encrage des terres. B) Une justice royale embryonnaire Le roi de France n’est pas un seigneur comme les autres car sa position au sommet de la pyramide féodale lui confère un rôle particulier. De plus, l’accroissement de son domaine lui permet de mettre en place une véritable administration judiciaire qui constituera le noyau de la justice de l’Etat royal sous l’Ancien Régime. 1. La Cour du roi et le jugement des pairs La noblesse croit profondément au principe du jugement par les pairs ce qui n’est pas sans poser problème pour les grands princes territoriaux. En ce qui les concerne, seule la Cour du roi est regardée d’une dignité suffisante pour juger les différents d’ordre féodal. De cette manière, la Cour du roi « curia regis » est compétente pour juger les grands du royaume ; c’est-à-dire ceux qui seront appelés « pairs de France ». Cette Cour se compose de grands seigneurs laïcs et religieux, de familiers du roi et de légistes. La Cour des pairs connait une certaine activité tout au long du 13ème siècle mais elle disparait au siècle suivant au profit du Parlement suffisamment garni de pairs. 2. La justice déléguée Au quotidien, la justice royale est exercée par les officiers du roi dont les compétences sont universelles ; c’est-à-dire tout à la fois administratives, fiscales, judiciaires et politiques. Les prévôts sont les premiers agents habilités à agir sur le domaine royal. Ils apparaissent au début du 11ème siècle à Orléans et Tempe- Malin. Ils sont nommés et révoqués par le roi qui progressivement les fait surveiller par des baillis. A l’origine, ceux-ci sont itinérants mais au milieu du 13ème siècle, ils se fixent dans la circonscription qu’ils doivent inspecter. Au Sud de la Loire, on les appelle « sénéchaux ». Les baillis et sénéchaux exercent une juridiction correspondant tout à la fois au tribunal de grande instance et à la Cour d’assises, à partir du 14ème siècle. Au-dessus de ces juges de base se trouve le Parlement. La curia regis quant à elle, connait une spécialisation croissante dont la curia in Parlamento constitue une illustration. A l’origine, cette Cour de Parlement tient des sessions irrégulières ; c’est-à-dire au gré des besoins. Mais, assez rapidement, existe une session fixe par an de la toussaint à l’été. De cette manière, nait l’année judiciaire. La Cour de Parlement se compose d’un 4 personnel variable selon les questions à traiter ; mais elle aussi obéit à un mouvement de professionnalisation. Et, à partir du règne de Philippe le Bel, le Parlement se compose dans les faits, surtout de techniciens. PARAGRAPHE 2 : Une justice ecclésiastique structurée L’Eglise, gangrénée par les pratiques féodales, subit une crise profonde au début du Moyen-Age. Elle va remédier aux abus constatés grâce à la réforme grégorienne de la seconde moitié du 11ème siècle. L’objectif poursuivi est de redresser les mœurs de l’Eglise, de lui faire retrouver toute sa spiritualité et de libérer sa hiérarchie de l’emprise des laïcs. De cette manière, aux 11ème – 12ème siècles, l’Eglise revêt une forme monarchique assez accusée. Le phénomène de centralisation qui se produit alors apparait d’autant plus remarquable qu’il survient environ deux siècles avant la centralisation des principaux royaumes occidentaux. Dans l’organisation ecclésiastique, le diocèse reste le cadre essentiel de vie avec à sa tête un évêque aux compétences administratives, spirituelles et judiciaires importantes. L’évêque, responsable spirituel et temporel du diocèse, s’entoure d’auxiliaires au premier rang desquels il faut placer l’official ; c’est-à-dire le juge ecclésiastique. A) L’importance des officialités Les officialités ont bien entendu une juridiction spirituelle très étendue. A cet égard, les ecclésiastiques distinguent deux aspects depuis les premiers siècles de l’Eglise : - La juridiction au fort interne, qui a pour matière le péché qui conduit le chrétien coupable devant un prêtre afin de recevoir le sacrement de pénitence. - La juridiction dite au fort externe, seule concernée ici, elle déborde le cadre du pêché car elle ne s’en occupe que s’il se manifeste extérieurement dans une attitude publique. Dans cet esprit, la juridiction au fort externe englobe toutes les matières contentieuses laissées à la compétence des justices ecclésiastiques. L’Eglise, au Moyen-Age, jouie d’une autorité d’autant plus grande que le pouvoir politique est émietté. A cette considération, il faut ajouter que le droit canonique « calqué » sur le droit romain jouit d’un immense prestige ; et sur le fond, le droit de l’Eglise apparait à bien des égards plus indulgent que le droit laïc puisqu’il vise essentiellement à réformer les cœurs. Ces différents éléments expliquent le succès de la juridiction ecclésiastique. Dans les faits, l’évêque désigne comme il l’entend un official qu’il représente pleinement. Ce dernier s’entoure d’autres juges, d’un promoteur qui joue le rôle de ministère public ainsi que d’auxiliaires de justices tels que greffiers et notaires. Enfin, il est admis que l’appel est toujours possible devant l’officialité métropolitaine ainsi qu’au Pape. B) La compétence des officialités Celle-ci est naturellement très large. Il faut préciser les personnes susceptibles d’être concernée par l’officialité. uploads/S4/ histoire-des-institutions-juridictionnelles-1.pdf
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- Publié le Oct 14, 2022
- Catégorie Law / Droit
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