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- 1 2 8 de petits commerçants et de petits propriétaires fonciers. Marx dit que l'endettement aboutit à la prolétarisation d'un nombre croissant de petits capitalistes: ainsi arrive-t'il à faire.la synthèse entre la classe débitoriale et le prolétariat. Section III La monnaie et l'impôt En apparence, ces deux institutions sont hétérogènes; cependant, on aperçoit des liaisons entre les deux. A la racine des deux, il y a des prérogatives étatiques: l'Etat bat monnaie et. prélève l'impôt. Ces deux institutions relèvent donc du droit public, sous certaines réserves: à l'origine, la monnaie a pu apparaître dans des rapports inter-individuels; aujourd'hui encore, il y a des monnaies privées: les économistes insistent sur la création privée de monnaies: les grandes banques, par le jeu du crédit, sont créatrices de monnaies. Dans le volume de monnaie, on fait entrer non seulement la monnaie scripturale, mais aussi le crédit accordé par les grandes banques. De même, on pourrait découvrir des phénomènes sociologiques d'impôts privés: exemples: des phénomènes de rackett, de maffia, ou encore de collectes. Mais, en général, impôt comme monnaie sont des phénomènes d'origine étatique. Et leurs effets peuvent être analogues. A partir du moment où la monnaie a été utilisée par le prince pour se procurer des moyens de paiement, elle est devenue une insti tution comparable à l'impôt dans ses effets. Pour ce qui est des Etats modernes, c'est topique: l'Etat se procure de l'argent par l'im pôt et par la dépréciation monétaire. Celle-ci fonctionne comme un impôt sur le capital d'expression monétaire. Cet impôt ne frappe que les capitaux ayant une expression monétaire. Cette dépréciation ne joue pas seulement au profit de l'Etat mais aussi au profit des débi teurs privés. Il y a ainsi une alliance tacite entre le prince et la classe débitoriale Tout notre droit des obligations doit être conçu en fonction de ce dernier phénomène. - § I La monnaie C'est une institution juridique et un phénomène économique. Les études économiques l'ont considérée plutôt sous son aspect économique. Néanmoins, il y a certains éléments qui peuvent être retenus pour une sociologie du droit monétaire. Voyez l'ouvrage de Simmel, Philosophie - 129 des Geldes, 1900. Philosophie, nais aussi ethnologie et psychologie. On va d'abord rechercher quelle est l'origine ethnologique de la mon naie; puis, on essaiera de déceler des phénomènes de pluralisme moné taire à mettre en rapport avec les phénomènes de pluralisme juridique. Le XXème.siècle finissant est assez désagrégateur vis à vis du monisme que l'époque de la codification napoléonienne avait mis en relief. - A Origine de la monnaie Il s'agit d'une origine qui se situe dans les sociétés ar chaïques, les sociétés très anciennes (passé mort ou passé vivant, ce qui est les ethnies vivants actuellement mais qui représentent parmi nous des époques disparues). Dans cette recherche, les esprits se di visent entre deux grandes hypothèses. Dans une première doctrine, on prête à la monnaie une origine utilitaire, rationalisante; dans une deuxième doctrine, une origine mystique, irrationnelle. Cette dualité se rencontre quant à l'origine de beaucoup d'institutions juridiques. L'hypothèse que la monnaie procède d'une invention utilitaire est avancée par Paul dans la lex origo (Digeste, 18, I, I, principium: "Origo emendi vendendique", c'est-à-dire, l'origine du contrat de vente) où il formule une hypothèse sur l'origine de la monnaie. "L'acte d'acheter et de vendre (plutôt que l'acte d'achat et de vente) tire son origine des échanges. Jadis, en effet, il n'y avait pas de monnaie et l'on ne qualifiait point l'une des marchandises de presta tion et l'autre de prix....Chacun se débarrassait de ce qu'il avait en trop....Mais....une matière fut choisie (electa materia est) dont l'évaluation publique et constante remédierait aux difficultés des échanges par l'égalité quantitative (numérique: et ceci atterrira dans l'article 1895 du Code Civil); et cette matière frappée d'une forme donnée par l'autorité publique tire son usage et son appropria tion moins de sa valeur que de sa quantité." Ce texte romain est à la fois uns très ancienne approche ethnologique de la monnaie, et sur le terrain dogmatique, ce fut un appui textuel de la théorie dite nomina liste de la monnaie. Dans ce texte, Paul invoque l'origine de la vente et par là-même, l'origine de la monnaie, aux fins d'en tirer argument pour la solution d'un cas précis: peut-il y avoir encore vente quand le prix n'est pas exprimé en argent ? Les Sabiniens tenaient que le contrat pouvait demeurer une vente, et ils tiraient argument de l'ori gine de la vente (la vente n'est que une variété de l'échange, disait-i - 1 3 0 A l'appui, Sabinus invoquait le témoignage de l'Iliade où les Grecs acquéraient du vin contre du bronze (les Romains avaient là le senti ment que c'était du droit archaïque: mais parce que tel, c'était un droit ayant une valeur particulière, parce que il pouvait être étayé par le mythe). Dans cette conception, la monnaie est une chose substan tiellement quelconque mais qui a été choisie par l'autorité publique pour jouer le rôle d'un instrument dans les échanges. Cette concep tion est devenue classique (notamment chez les économistes du XIXème. siècle). Deux orientations nouvelles de l'ethnologie ont fait surgir une autre explication. C'est le moment où les ethnologues développent la théorie de la mentalité archaïque. Suivant Lucien Lévi-Bruhl, celle- ci est prérationnelle, mystique. L'origine de la vente et de la monnaie ne peut échapper à cette nouvelle explication. La monnaie ne peut pas être une invention rationnelle, utilitaire. Son rôle sera mystique. Elle est là non comme une marchandise à substituer à d'autres; elle est un symbole lié à des représentations mythiques. Il y a irréduc tible originalité de la vente et de la monnaie. Cette dernière inclut un élément mystique: "Nummus numen": il y a une sorte de divin qui entoure la monnaie. C'est un élément équilibrant que la monnaie. C'est quelque chose qui vient des Dieux. A l'appui de cette analyse, on invo que le fait que dans la monnaie primitive, l'effigie des Dieux est souvent représentée. Rien de commun avec l'idée d'une marchandise dont les pouvoirs publics attesteraient la valeur. Quand on pousse plus avant cette analyse, on distingue des va riantes chez les auteurs. Certains voient le besoin irrationnel sous les espèces d'un besoin de parure. Ce besoin est constant dans les sociétés primitives. C'est la parure de la femme qui parait la plus essentielle: la "parure de publicité"; mais si c'est la femme qui inven ta la parure, c'est l'homme qui la transforma en monnaie. C'est le bijou qui a inventé la monnaie et non l'inverse. Ce qui explique que les premières monnaies, dans les sociétés primitives, étaient consti tuées par des coquillages. Ce sont les parures du chasseur. Voyez en ce sens, Metais, Une monnaie archaïque : la cordelette de coquillages, l'Année Sociologique, 1949-1950, pages 33 et suivantes. Mais, a-t'on objecté., n'y a-t'il pas ici une contradiction ? La monnaie serait fon dée sur le besoin de se différencier; tandis que un objet doit être partout reçu pour constituer une monnaie. On répond à cela que la première circulation de la monnaie n'a pas été une circulation d'échan ge mais une circulation de don entre amis, entre compagnons d'armes: donc une sorte de participation au prestige. On ajoute que pour les - 131 sociétés primitives, la thésaurisation de la monnaie est plus impor tante que sa circulation. Plus différemment, on présente le besoin irrationnel à la racine de la monnaie comme un besoin mystique. La monnaie est un objet sacré. C'est un objet de culte destiné à être offert en sacrifice: tel est son rôle premier. De cette origine mystique, on relève des traces à l'époque historique. Exemple: en droit romain, la répression du faux monnayage, même à l'époque impériale, parait fondée, beaucoup plus que sur le préjudice pécuniaire, sur l'offense faite aux effigies sacrées des empereurs et des dieux. Voyez le Codex, livre 1 1 , titre 1 1 , Constitution 3 ("aeternales vultus"). On trouve de ces traces jusque dans la Bible. Avant la guerre de Judée (voyez Exode, chapitre 30), les Juifs devaient verser la capitation au Temple au moyen d'une mon naie spécialement fabriquée à cette fin (représentant peut-être la verge d'Aaron). Lorsque les Romains conquirent la Judée, ils firent circuler des deniers à l'effigie de César; et ces deniers étaient destinés à payer l'impôt romain. La parole sur le denier de César peut s'expliquer ainsi. Ceci nous met en présence d'un phénomène de pluralisme monétaire. - B Les phénomènes de pluralisme monétaire On a déjà rencontré le pluralisme normatif; cela consiste en ce que, sur un même territoire sujet à des normes, il peut y avoir plusieurs systèmes de normes concurrents. Or, la monnaie n'est-elle pas par elle-même une norme ? La norme, ce n'est pas seulement un commandement; plus primitivement, la norme, c'est une mesure (nomos). Voyez la relation : numisma-nomos: la monnaie est la norme. La mon naie fait partie du système des poids et mesures; et ce système est une pièce du système juridique dans son uploads/S4/ jean-carbonnier-sur-la-monnaie.pdf
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- Publié le Oct 22, 2022
- Catégorie Law / Droit
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