1 Ohadata D-21-14 LE DROIT POSITIF IVOIRIEN DE L’EXEQUATUR Par Leba Blaise AMES
1 Ohadata D-21-14 LE DROIT POSITIF IVOIRIEN DE L’EXEQUATUR Par Leba Blaise AMESSAN Doctorant à l’UFR SJAG Université Alassane Ouattara de Bouaké Email : alebablaise@gmail.com 2 Résumé L’importance contemporaine de la circulation des actes publics étrangers renouvelle l’intérêt de l’étude de la question centrale de leur efficacité dans les ordres juridiques nationaux laquelle n’est, généralement, pas envisagée en-dehors de la formalité de l’exequatur. L’ordre juridique ivoirien traite de la matière dans le code de procédure civile, commerciale et administrative auquel s’ajoute des conventions bilatérales et multilatérales de coopération judiciaire. Mais, le droit positif ivoirien de l’exequatur est désuet, inadapté. Quant à la jurisprudence, elle n’est pas aisément accessible et intelligible. En somme, le droit positif ivoirien de l’exequatur se présente comme un droit statique et rigide dont les quelques solutions jurisprudentielles ne constituent pas un corpus de règles homogènes favorables à une réception libérale des actes publics étrangers. Mots-Clés: Droit international privé ivoirien – Conflit de juridiction – Exequatur. Abstract The contemporary importance of the circulation of foreign public documents renews the interest of the study of the central question of their effectiveness in the national legal orders which is, generally, not considered outside the formality of the exequatur. The Ivorian legal system deals with the matter in the code of civil, commercial and administrative procedure to which are added bilateral and multilateral conventions of judicial cooperation. But, the Ivorian positive law of the exequatur is obsolete, unsuitable. As for the jurisprudence, it is not easily accessible and intelligible. In short, the positive Ivorian law of exequatur is static and rigid, and the few case law solutions do not constitute a body of homogeneous rules favorable to a liberal reception of foreign public acts. Keywords: Ivorian private international law - Conflict of jurisdiction - Exequatur. 3 Introduction I- L’esquisse des traits contemporains du droit positif ivoirien A. La relative désuétude du droit ivoirien 1-Le relatif anachronisme des conditions de régularité 2-L’archaïsme des solutions jurisprudentielles B. La faiblesse du droit conventionnel 1-L’inadaptation du droit conventionnel 2-L’inutilité du droit conventionnel II- L’appréhension incertaine du droit positif ivoirien A. La quasi-méconnaissance de la jurisprudence 1-La faiblesse de l’activité jurisprudentielle 2-La faible publication de la jurisprudence B. La difficile interprétation de la jurisprudence 1-La défaillance de la motivation des décisions d’exequatur 2-L’impossible recours systématique à la jurisprudence française Conclusion 4 1. Si « (…) la Côte d’Ivoire était un terrain particulièrement propice à la naissance d’un contentieux important aussi bien en droit des affaires qu’en droit de la famille, [singulièrement en matière d’efficacité des actes publics étrangers]1, l’on peut légitimement en déduire l’existence de données législatives et jurisprudentielles relatives à la reconnaissance2 et à l’exécution des actes publics étrangers lato sensu3 adapté aux conditions historiques et économiques de la Côte d’Ivoire4. Il s’agit, en effet, d’un éminent acte de souveraineté car la contrainte et l’exécution forcée sont des compétences exclusives du souverain territorial, le monopole de l’Etat5. Certes, l’exequatur6, instance en « déclaration de la force exécutoire »7, a été introduit dans la législation ivoirienne8 sans distinguer la reconnaissance de l’exécution forcée. Dès lors, ne sont reconnus et exécutés sur le territoire 1 L. Idot : « Eléments d'un droit international privé africain: l'exemple de la Côte d'Ivoire », RJA., n°1/1990.7, p. 9. 2 Le droit international privé contemporain distingue la reconnaissance qui englobe à la fois l’efficacité substantielle et l’autorité de chose jugée et son exécution, c’est-à-dire la question de la force exécutoire. Ce sont les deux procédés de réception ou principales voies de l’efficacité des actes publics étrangers, V. Y. Loussouarn, P. Bourel et P. De Vareilles-Sommières : Droit international privé, Dalloz, 10è éd., Paris, 2013, n° 895, p. 896 ; H. Gaudemet-Tallon : « La reconnaissance des jugements étrangers portant sur une somme d'argent, en matière civile et commerciale », RIDC, Vol. 38, n°2/1986. 487. Études de droit contemporain, contributions françaises au 12è Congrès international de droit comparé (Sydney-Melbourne, 18-26 août 1986), pp. 488-489 sur http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ridc_0035-3337_1986_num_38_2_2428,16 févr. 2021. 3 On entend par « acte public » autant les actes des instances juridictionnelles stricto sensu que ceux de toute autre autorité publique ou personne ou organe investi de prérogatives publiques tels les officiers publics ministériels, le Conseil de l’Ordre des Avocats, les fédérations sportives, V. A. Ouattara : « De nouvelles tendances pour l’ordre public en droit international privé ? », Rec. Penant n°876/2011.323. Quant à la notion d’« étrangers », elle renvoie à l’idée d’origine et désigne les actes publics élaborés dans des Etats étrangers, V. D. Bureau et H. Muir Watt: Droit international privé, Dalloz, 10è éd., Paris, 2013, n° 233, p. 265, n° 583 s, p. 717 s; B. Audit et L. d’Avout : Droit international privé, Dalloz, 10è éd., Paris, 2013, n° 539, p. 455, n° 544, p. 457; Th. Vignal: Droit international privé, Dalloz, 10è éd., Paris, 2013, n° 651, p. 399; P. Mayer, V. Heuzé et B. Remy: Droit international privé, Dalloz, 10è éd., Paris, 2013, no 372, p. 265. 4 L. Idot : Op. cit., RJA., n°1/1990.7, p.9. 5 Y. Loussouarn, P. Bourel et P. De Vareilles-Sommières: Op. cit., n° 896, p. 897. 6 C’est un latinisme subjonctif du verbe exsequi : exécuter. Littéralement, il signifie qu’on exécute, et se dit d’un jugement, d’un acte public ou d’une sentence arbitrale. L’exequatur est connu aussi bien du droit international privé que du droit international public. En droit international privé, l’exequatur est relatif à l’efficacité internationale des actes publics étrangers et désigne à la fois une action, une instance, une procédure, une décision judiciaire. En droit international public, « l’exequatur désigne le décret pris par le gouvernement d’un pays reconnaissant à un ambassadeur, à un agent commercial, à un consul étranger ou à tout autre personnel diplomatique sa qualité officielle et l’autorisant à exercer ses fonctions ou son activité particulière sur le territoire de l’État accréditaire » sur https://www.btb.termiumplus.gc.ca/tpv2guides/guides/juridi/index- fra.html?lang=fra&lettr=indx_catlog_e&page=9b1hzIEphU3c.html, 14 janv. 2020. 7 O. Cachard et P. Klötgen : Droit international privé, Bruylant, 8è éd., coll. Paradigme, Bruxelles, 2019, n° 687, p. 377, 701s, p. 383. 8 Loi n° 72-833 du 21 déc. 1972 portant code de procédure civile, commerciale et administrative modifiée et/ ou complétée par les lois n° 78-663 du 05 août 1978, n° 93-670 du 09 août 1993, n° 96-674 du 29 août 1996, n° 97- 516 du 04 sept. 1997, n° 97-517 du 04 sept. 1997, les ord. n° 2012-158 du 9 févr. 2012, n° 2015-180 du 24 mars 2015, n° 2015-364 du 20 mai 2015, n° 2017-728 du 09 nov. 2017, n° 2018-435 du 03 mai 2018 et n° 2020-381 du 15 avr. 2020. 5 ivoirien que les actes publics étrangers conformes aux conditions des articles 345 à 350 CPCCA ou des accords bilatéraux9 et multilatéraux10 conclus à cet effet. 2. Ainsi, la déclaration de force exécutoire imprègne tout le cadre législatif. Il ne reflète, cependant, pas le droit positif ivoirien. Il faut, en effet, y ajouter les solutions des tribunaux11. On le sait, l’étude des solutions dégagées par les juridictions inférieures et fixées par la juridiction suprême ou jurisprudence12 - qualifiée de droit vivant13- permet de mieux appréhender l’état du droit. En somme, traiter du droit positif ivoirien de l’exequatur c’est s’intéresser à l’ensemble des textes législatifs et réglementaires14 régissant l’exécution des actes publics étrangers, d’une part, et à la jurisprudence y afférente, d’autre part. Mais, l’étude du droit positif suppose qu’il soit connu sinon son appréhension est problématique. 3. En effet, il ne suffit pas que le droit positif ivoirien de l’exequatur existe encore faut-il qu’il soit matériellement et intellectuellement accessible15. L’accessibilité du droit positif est 9 Accord ivoiro-burkinabé du 30 juill. 2014; accord franco-ivoiro du 24 avr. 1961 modifié par échanges de lettres du 11 avril 1986 (interprétation des art. 36 à 41) et du 13 juill. 1989 (interprétation de l'art. 36-a) ; accord ivoiro- malien du 11 nov. 1964; accord ivoiro-marocain du 1er juin 1999 ; accord ivoiro-tunisien du 1er déc. 1965 et l’accord ivoiro-libérien du 24 août 1972 auquel nous n’avons pu accéder, V. L. Idot : Op. cit., RJA., n° 1/1990.10, n° 57, p. 30. 10 Le traité OCAM du 12 sept. 1961; la convention ANAD du 21 avr. 1987 non encore en vigueur ; la convention du Conseil de l’Entente du 20 févr. 1997 et la convention de New York du 10 juin 1958 en vigueur depuis le 7 juin 1959 à laquelle la Côte d’Ivoire n’a adhéré que le 1er févr. 1991 et applicable depuis le 2 mai 1991. Le traité OCAM est en vigueur contrairement à l’opinion de certains auteurs dont Mme L. Idot, V. L. Idot : Op. cit., RJA, n° 1/1990, n° 57, p. 30 ; L. Idot : Note sous C. Suprême de Côte d’Ivoire, 29 avr. 1986, CA Bouaké, 25 nov. 1987, C. suprême de Côte d’Ivoire, 4 avr. 1989, JDI.1989.530 citée par P. Meyer : « La circulation des jugements en Afrique de l’Ouest francophone», RBD, n°40/2001.107, n° 11, p. 112. Elle est encore appliquée, V. CJCS, 11 mai 2006, arrêt, n° 252/06, AJ., n° 56/2008.84, RJCS, uploads/S4/ le-droit-positif-ivoirien-de-l-x27-exequatur-doctorant-a-l-x27-ufr-sjag-universite-alassane-ouattara-de-bouake 1 .pdf
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- Publié le Apv 28, 2022
- Catégorie Law / Droit
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