LA PLACE DES PEUPLES AUTOCHTONES DANS LES TERRITOIRES ULTRAMARINS FRANÇAIS : LA

LA PLACE DES PEUPLES AUTOCHTONES DANS LES TERRITOIRES ULTRAMARINS FRANÇAIS : LA SITUATION DES KANAK DE NOUVELLE-CALÉDONIE ET DES AMÉRINDIENS DE GUYANE 23 février 2017 AVIS CNCDH • Avis « La place des peuples autochtones dans les territoires ultramarins français » 2 CNCDH • Avis « La place des peuples autochtones dans les territoires ultramarins français » 3 L’avis « La place des peuples autochtones dans les territoires ultramarins français : la situation des Kanak de Nouvelle-Calédonie et des Amérindiens de Guyane » a été adopté à l’unanimité lors de l’Assemblée plénière du 23 février 2017. Cet avis s’inscrit dans le cadre d’une étude menée par la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) sur l’effectivité des droits de l’homme dans les Outre-mer, qui fera l’objet d’une publication en 2018. CNCDH • Avis « La place des peuples autochtones dans les territoires ultramarins français » 4 Table des matières Partie I Une reconnaissance difficile des peuples autochtones 26 A. La reconnaissance des peuples autochtones face aux dispositions et principes constitutionnels 26 1. L’incertitude terminologique 26 2. Le principe fondamental d’égalité et de non-discrimination : quelle protection des peuples autochtones ? 32 a. Les différences de traitement : des mesures nécessaires à l’effectivité des principes d’égalité et de non-discrimination 32 b) Le défaut de reconnaissance des droits collectifs : un frein au principe d’égalité et de non-discrimination 36 3. Les aménagements apportés au cadre unitaire 39 a. Le régime applicable en Guyane peu favorable aux Amérindiens 40 b. La prise en compte des particularismes autochtones par le biais de l’article 75 de la Constitution 41 c. Le cas particulier de la Nouvelle-Calédonie 43 B. La reconnaissance des peuples autochtones par la France à travers le prisme des textes internationaux 44 1. Le refus de ratification de la Convention n°169 relative aux peuples indigènes et tribaux de l’OIT 46 2. Une reconnaissance politique : le vote de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones 50 Partie II Analyse de la prise en compte de particularismes à l’égard des peuples autochtones en Nouvelle-Calédonie et en Guyane 52 A. Les Kanak de Nouvelle-Calédonie 53 1. La question de l’autochtonie en Nouvelle-Calédonie 53 2. Une protection de la terre kanak par le biais du droit foncier à améliorer 55 CNCDH • Avis « La place des peuples autochtones dans les territoires ultramarins français » 5 3. Un droit de participer à la prise de décisions partiellement assuré 60 a. Le rôle des institutions coutumières dans la prise de décisions 62 b. La question de l’enregistrement sur les listes électorales 64 B.Les Amérindiens de Guyane 67 1. Un état des lieux alarmant 67 2. Des aménagements territoriaux en décalage avec les demandes de propriété collective des Amérindiens 77 3. Une représentation insuffisante dans le pouvoir décisionnel 86 a. Le maintien des institutions coutumières 88 b. La création du Conseil consultatif des populations amérindiennes et bushinenge 91 c. Un interlocuteur privilégié : le sous-préfet des communes de l’intérieur 97 4. Le manque d’accès à l’état civil et les entraves à l’accès aux droits fondamentaux qui en découlent 99 a. Un état civil défaillant 99 b. Les résultats d’un état civil défaillant : de multiples entraves à l’accès aux droits 103 Synthèse des recommandations 107 Annexes Annexe 1 - Liste des personnes auditionnées 114 Annexe 2 - Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones 117 Annexe 3 - Convention 169 de l’Organisation internationale du Travail concernant les peuples indigènes et tribaux dans les pays indépendants 134 Annexe 4 - Carte de Guyane 154 Annexe 5 - Carte de Nouvelle-Calédonie 155 CNCDH • Avis « La place des peuples autochtones dans les territoires ultramarins français » 6 Aucune définition formelle de la notion d’« autochtone », pas plus que celle d’« indigenous » en anglais, n’a été arrêtée en droit international. En effet, les peuples autochtones eux-mêmes se sont opposés à l’adoption d’une définition officielle, en soulignant qu’il était nécessaire de faire preuve de souplesse et de respecter le désir et le droit de chaque peuple de se définir lui-même en tant que tel. Néanmoins, les conclusions de José Martinez Cobo, en tant que rapporteur de la Sous-commission des droits de l’homme des Nations unies, traduisent une sorte de consensus autour d’une « définition de travail » composée d’une pluralité de critères. « Par communautés, populations et nations autochtones, il faut entendre celles qui, liées par une continuité historique avec les sociétés antérieures à l’invasion et avec les sociétés précoloniales qui se sont développées sur leurs territoires, s’estiment distinctes des autres segments de la société qui dominent à présent sur leurs territoires ou parties de ces territoires. Elles constituent maintenant des segments non dominants de la société et elles sont déterminées à préserver, développer et transmettre aux futures générations leurs territoires ancestraux et leur identité ethnique, qui constituent la base de la continuité de leur existence en tant que peuples, conformément à leurs propres modèles culturels, à leurs institutions sociales et à leurs systèmes juridiques »1. Cette définition pratique comprend quatre critères cumulatifs2 : antériorité dans un territoire donné ; expérience de la conquête ou de la colonisation ; situation de non-dominance ; et revendication identitaire. Selon l’étude Martinez Cobo, l’autochtone est la personne qui appartient à une communauté autochtone par auto-identification (conscience de groupe) et qui est reconnue et acceptée par cette population en tant que l’un de ses membres (acceptation par le groupe). Ainsi, l’identification des autochtones ne relève pas de la compétence régalienne 1. J. Martinez Cobo, Etude du problème de la discrimination à l’encontre des populations autochtones, Conclusions, propositions et recommandations, Genève, Nations unies, 1986, E/CN.4/Sub.2/1986/7 Add.4. L’étude est couramment dénommée « étude Martinez Cobo » et comporte cinq volumes. 2 J. Martinez Cobo considérait que les critères ne pouvaient être envisagés que de manière conjointe afin d’éviter que l’autochtonie devienne un phénomène universel et que des groupes minoritaires ne remplissant pas les critères constitutifs de la définition tentent de se définir en tant que tels, isolant l’un ou l’autre des critères. CNCDH • Avis « La place des peuples autochtones dans les territoires ultramarins français » 7 des Etats mais bien des autochtones eux-mêmes3. Etymologiquement, le mot autochtone désigne un rapport direct à la terre (du grec autokhthônos signifiant de la terre même). Aujourd’hui, il désigne un rapport spécifique à la nature et au temps, comme cela est mentionné dans les travaux d’ethnologie et d’anthropologie juridique4. Plus généralement, la notion définit des sociétés traditionnelles, où l’appartenance collective au groupe prédomine, à la différence des sociétés modernes, où prévaut l’individualisme. En France, la grille de lecture proposée par l’étude de Martinez Cobo ne s’applique que dans le paysage ultra-marin. La CNCDH considère que, selon les quatre critères cumulatifs exposés ci-dessus, seuls les Kanaks de Nouvelle- Calédonie et les Amérindiens de Guyane sont des peuples autochtones de la République française5. La CNCDH tient à souligner qu’à ses yeux la reconnaissance de l’identité propre des peuples autochtones constitue une exception, fondée sur leur spécificité culturelle, et non un précédent qui remettrait en cause les principes d’indivisibilité de la République et d’universalité des droits de l’homme et risquerait d’entrainer de nouvelles discriminations. Il s’agit tout à la fois de pleinement respecter l’identité culturelle des peuples autochtones et de garantir la jouissance effective des droits de l’homme pour tous leurs membres. C’est dans le cadre du droit international des droits de l’homme, conformément aux engagements internationaux de la France et aux principes constitutionnels, que doit s’élaborer cette indispensable synthèse, en réconciliant les principes fondamentaux et les réalités du terrain. A cet égard, des précisions terminologiques sont nécessaires. Les concepts de « minorité » et de « peuple autochtone » n’ayant pas de contours définis en droit international, il est possible que l’un et l’autre se recoupent à divers niveaux, pouvant créer une confusion certaine sur le plan local. 3 Etude Martinez Cobo, op.cit. 4 Voir par exemple, le dialogue philosophique entre Claude Lévi-Strauss et Raymond Aron, lors d’une séance de l’Académie des sciences morales et politiques tenue le 15 octobre 1979, sous le titre « Culture et nature, La condition humaine à la lumière de l’anthropologie », in Commentaire, n°15 (1981), pp.365- 372. 5. Pour l’explication de cette position, voir infra. La CNCDH ne méconnait pas pour autant la situation des Bushinenge ni celle des Mahorais, des Polynésiens et Wallisiens, même si les quatre critères de la définition de Martinez Cobo ne sont pas réunis. Pour l’exposition de cette position, voir infra. CNCDH • Avis « La place des peuples autochtones dans les territoires ultramarins français » 8 Néanmoins, une distinction stricte doit être opérée entre les peuples autochtones et les minorités. Cultivant leurs différences, les peuples autochtones refusent de se voir appliquer le droit des « minorités nationales ou ethniques, religieuses et linguistiques » au sens de la Déclaration des droits des personnes appartenant à des minorités nationales ou ethniques, religieuses ou linguistiques de 19926 qui ne vise que « les personnes appartenant à ces minorités », et non les uploads/S4/ france-nhri-annex.pdf

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  • Publié le Oct 11, 2022
  • Catégorie Law / Droit
  • Langue French
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