2018 ÉPREUVES D'ADMISSIBILITÉ ENM •  CULTURE GÉNÉRALE (dissertation) •  DROIT

2018 ÉPREUVES D'ADMISSIBILITÉ ENM •  CULTURE GÉNÉRALE (dissertation) •  DROIT CIVIL ET PROCÉDURE CIVILE (dissertation et cas pratique) •  DROIT PÉNAL ET PROCÉDURE PÉNALE (dissertation et cas pratique) •  DROIT PUBLIC (QRC) DROIT CIVIL ET PROCÉDURE CIVILE Selon H. Motulsky, le principe de loyauté de la preuve provient du « droit naturel jurisprudentiel ». Ce principe, renforcé par la jurisprudence ces dernières années, trouve particulièrement à s’appliquer en matière probatoire. Même si le procès civil constitue un substitut de la vengeance privée, la fin ne justifie pas tous les moyens. La déloyauté du maniement de certaines armes est susceptible d’en ruiner l’efficacité, faisant ainsi obstacle à l’objectif pourtant premier de manifestation de la vérité. La loyauté est le principe selon lequel le juge et les parties doivent, dans leurs comportements procéduraux, faire preuve de bonne foi et de probité. En d’autres termes, elle vise la droiture dans le cadre de la procédure suivie en matière civile, commerciale, prud’homale, rurale et sociale devant les juridictions de l’ordre judiciaire. S’exprimant essentiellement, dans le cadre de la preuve, qui est la démonstration d’un fait ou d’un acte, dans les formes admises ou requises par la loi, la loyauté n’est pas expressément consacrée, mais elle s’infère de diverses dispositions du Code de procédure civile. Pendant longtemps, le principe de la contradiction (ou du contradictoire) ne figura ni dans la loi ni dans les tables alphabétiques des ouvrages de doctrine. Quelques rares décisions de jurisprudence le rappelaient occasionnellement comme une règle de droit naturel (H. Motulsky, « Le droit naturel dans la pratique jurisprudentielle : le respect des droits de la défense en procédure civile », in Mélanges Roubier, t. 2, p. 175). Ces principes directeurs du procès civil figurent désormais au chapitre Ier des dispositions liminaires du titre Ier du Code de procédure civile, ouvrant le livre Ier consacré aux dispositions communes à toutes les juridictions. Véritable charte de la répartition des rôles entre juge et parties, les principes directeurs du procès apparaissent ainsi tout à la fois comme des principes d’inspiration et des règles de droit concourant au respect des garanties fondamentales d’une bonne justice. À côté des principes consacrés, il faut relever l’essor de nouveaux principes directeurs, comme la célérité ou la loyauté. H. Motulsky avait déjà noté que le principe de loyauté constituait à la fois, pour les parties, une composante importante du droit de la défense et, pour le juge, une obligation de stricte neutralité de motivation des jugements ; s’agissant du législateur, il ajoutait que la loyauté exigeait de sa part qu’il organise un système rationnel de voie de recours. La loyauté de la preuve dans le procès civil constitue l’un de ces nouveaux mécanismes prétoriens de régulation du procès civil. De l’obscurité, le principe de loyauté est passé à la lumière sous l’impulsion du juge civil en matière de preuve. Érigé par nécessité, employé au titre d’une bonne administration de la justice, le principe de loyauté constitue une norme comportementale pour les acteurs du procès civil, source d’équité. Toutefois, si le principe de la contradiction ou du contradictoire est incontestablement un principe consacré par le Code de procédure civile, la loyauté n’est pas explicitement visée au titre des principes directeurs. Aussi, dès lors que la recherche de la vérité absolue reste l’objectif majeur du procès civil, l’application du principe de loyauté est d’autant plus importante, car elle permet d’assurer la dignité du procès. Aussi convient-il d’envisager, d’une part, l’érection du principe de loyauté de la preuve (I) et, d’autre part, la résistance d’une application générale du principe de loyauté de la preuve (II). Dissertation 1 1 Sujet DISSERTATION : LA LOYAUTÉ DE LA PREUVE DANS LE PROCÈS CIVIL (ANNALES CONCOURS ENM 2017) 53 DROIT CIVIL ET PROCÉDURE CIVILE I - L ’érection du principe de loyauté en matière de preuve Si le principe de loyauté procédurale est implicitement mentionné par le Code de procédure civile au titre des principes directeurs du procès (A), du moins de lege lata, la jurisprudence contemporaine l’a consacré explicitement en plusieurs occurrences en tant qu’aspect des droits de la défense (B). A - UNE EXIGENCE TEXTUELLE IMPLICITE 1. Une conduite s’imposant aux parties Le principe de loyauté dans le procès civil n’est pas expressément visé par la Code de procédure civile ou le Code civil. Néanmoins, la loyauté est consacrée par le dispositif législatif et la pratique processuelle. Il est d’abord possible d’en déceler les traces dans les termes de l’article 24 du Code de procédure civile. En effet, selon ce dernier « les parties sont tenues de garder en tout le respect dû à la justice ». Cette affirmation est une manifestation du principe de loyauté. Concrètement, les plaideurs doivent avoir une attitude dans leurs écritures et postures pour que la justice fonctionne avec dignité. En d’autres termes, les parties doivent recourir à la justice de manière loyale. Ensuite, l’article 9 du Code de procédure civile dispose qu’« il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention ». Il s’agit d’une référence implicite à la loyauté, conçue comme le respect de la légalité. En effet, si une preuve est obtenue contrairement à une disposition légale, elle est considérée comme déloyale. Cette obligation de loyauté n’est pas restreinte au seul domaine processuel. Elle est aussi connue du droit substantiel et trouve son fondement à l’article 1104 nouveau du Code civil (C. civ., art. 1134, al. 3 anc.), qui dispose que « les contrats doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi ». En droit de l’arbitrage, l’estoppel a trouvé une consécration textuelle puisque, désormais, le nouvel article 1466 du Code de procédure civile issue du décret n° 2011-48 du 13 janvier 2011 dispose que « la partie qui, en connaissance de cause et sans motif légitime, s’abstient d’invoquer en temps utile une irrégularité devant le tribunal arbitral est réputée avoir renoncé à s’en prévaloir ». Cet article consacre le principe de l’estoppel, déjà reconnu par la jurisprudence. La jurisprudence définit l’estoppel comme un comportement procédural « constitutif d’un changement de position, en droit, de nature à induire [l’adversaire] en erreur sur ses intentions » (Cass. 1re civ., 3 févr. 2010) et veille à la juste application de ce principe (Cass. 1re civ., 24 sept. 2014). L ’objectif est de mettre en place un instrument de police processuelle permettant de s’assurer de la loyauté des débats. La Cour de cassation a ainsi considéré qu’une partie ne saurait, après avoir expressément sollicité que l’affaire soit jugée au vu des écritures postérieures à l’ordonnance de clôture et après que celle-ci a été rapportée, critiquer la révocation de l’ordonnance de clôture (Cass. 2e civ., 20 oct. 2005). Toutefois, la Cour limite la portée de l’estoppel en contrôlant les conditions de sa mise en œuvre : « la seule circonstance qu’une partie se contredise au détriment d’autrui n’emporte pas nécessairement une fin de non-recevoir » (Cass. ass. plén., 27 févr. 2009). Enfin, récemment la Cour de cassation a précisé l’étendue de l’estoppel en considérant que cette dernière n’a pas vocation à s’appliquer aux moyens, mais seulement aux prétentions (Cass. com., 10 févr. 2015). 2. Une conduite s’imposant au juge La loyauté n’est pas inconnue du Code de procédure civile. Au-delà de l’arbitrage (CPC, art. 1464), l’article 763 du Code de procédure civile définit clairement la mission première du juge de la mise en état : « L ’affaire est instruite sous le contrôle d’un magistrat de la chambre à laquelle elle a été distribuée. Celui-ci a mission de veiller au déroulement loyal de la procédure, spécialement à la ponctualité de l’échange des conclusions et de la communication des pièces ». Le juge devra ainsi rechercher pourquoi un rapport Dissertation 1 54 DROIT CIVIL ET PROCÉDURE CIVILE d’expertise déposé au greffe du tribunal ne se retrouve pas en appel, dans le dossier transmis à la Cour et interroger les parties à cet égard (Cass. 2e civ., 11 janv. 2006). Cette référence à la loyauté entre les parties ne se retrouve exprimée devant aucune autre juridiction, mais elle semble se rattacher assez naturellement au principe de la contradiction que « le juge doit, en toutes circonstances, faire observer » (CPC, art. 16, al. 1er). Ainsi, pendant la phase d’instruction de l’affaire, ce qui est attendu du juge de la mise en état, c’est d’abord qu’il fasse respecter ce principe par les parties en veillant à ce qu’elles échangent leurs conclusions et se communiquent leurs pièces. Le juge doit plus généralement veiller au bon déroulement de l’instance (CPC, art. 3), ce qui l’autorise à impartir les délais et ordonner les mesures nécessaires au respect par les parties de l’obligation qui leur est faite d’accomplir les actes de procédure qui leur incombent dans les formes et délais requis (CPC, art. 2). Dans cette perspective, il exerce « tous les pouvoirs nécessaires à la communication, à l’obtention et à la production des pièces » (CPC, art. 770) et dispose ainsi d’un large éventail d’interventions possibles : adresser des uploads/S4/ partiels-2018-lextenso-etudiant-jour-2-l3-procedure-civile-gualino-epreuves-d-x27-admissibilite-2018 1 .pdf

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  • Publié le Jul 28, 2021
  • Catégorie Law / Droit
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