Procédure civile « Il y a toujours trop de formalités, si l’on consulte le plai
Procédure civile « Il y a toujours trop de formalités, si l’on consulte le plaideur de mauvaise foi qu’elles gênent ; il y en a toujours trop peu, si l’on consulte l’honnête homme qu’elles protègent ; leur multiplicité, leurs lenteurs, les frais qu’elles occasionnent, sont comme le prix que chacun donne pour la liberté de sa personne et pour la sûreté de ses biens. » - Montesquieu Avancée de la lecture du précis Dalloz : n° 1 à 236, à l’exception des n° 176 à 178 ; n° 332 à 397 ; n° 439 à 470 ; n° 508 à 563 ; n° 803 à 808 ; n° 840 à 851 ; n° 873 à 897 ; n° 1184 à 1228. Avancée de la lecture de l’hypercours Dalloz : n° 1 à 98, à l’exception des n° 90 à 92. Introduction La procédure civile comprend l’ensemble des règles gouvernant le déroulement d’un procès civil, de son début à sa fin. Le cours s’attachera à montrer les grands principes de la procédure civile, tout en évoquant aussi ponctuellement que possible les formalités rébarbatives. La procédure civile soulève en effet des questions de principe, telles que la loyauté et la place du juge au sein du procès. § La définition de la procédure civile A. La procédure La procédure (du latin procedere, « aller en avant ») est l’accomplissement de plusieurs formalités successives tendues vers un but. Au sens juridique, la procédure désigne l’accomplissement des formalités nécessaires au prononcé d’un jugement, l’ensemble des règles de droit qui régissent l’introduction, le déroulement et l’issue d’un procès. La procédure civile se distingue en cela des procédures civiles d’exécution, qui interviennent une fois le jugement rendu et exécutoire. B. La procédure civile La procédure civile désigne l’ensemble des règles de droit qui régissent le procès civil, c’est- à-dire celui qui est soumis à une juridiction étatique civile pour résoudre un litige de droit privé. Les juridictions civiles sont les juridictions appartenant à l’ordre judiciaire civil (un ordre juridictionnel est un ensemble cohérent et structuré de différentes catégories de juridictions placé sous le contrôle d’une cour suprême). L’ordre judiciaire traite des litiges entre particuliers et de la répression des infractions : la première mission est l’affaire des juridictions judiciaires civiles (même s’il n’y a pas de sous-ordre civil et de sous-ordre pénal : on parle d’unité de la justice civile et de la justice pénale, qui s’illustre par le mode de recrutement et le parcours des magistrats, ainsi que par l’unité de la cour suprême, la Cour de cassation). Les juridictions civiles regroupent le tribunal judiciaire, le tribunal de commerce, le tribunal paritaire des baux ruraux et le conseil des prud’hommes en première instance, la cour d’appel (hors chambre d’appel correctionnel) et la Cour de cassation (hors litiges pénaux). La procédure civile se distingue donc de la procédure pénale et du contentieux administratif, mais aussi du droit processuel, expression s’étant développée il y a une quinzaine d’années et qui désigne des principes de procédures qui sont communs à tous les contentieux. La procédure civile concerne la juridiction civile étatique : elle écarte donc la juridiction arbitrale. L’arbitrage est une justice privée dont la sentence s’impose aux parties comme un jugement d’une juridiction étatique, bien qu’elle ne puisse être rendue exécutoire que par le juge étatique en cas de réticence du perdant. Le procès arbitral est régi par le Code de procédure civile, sans que ce cours ne le traite. Enfin, la procédure civile concerne un litige de droit privé. Un litige est un différend qui peut être décidé par une règle de droit. Le litige doit être de droit privé, c’est-à-dire qu’il doit impliquer au moins une personne privée. On oppose la procédure au droit substantiel, qui contient des règles applicables par le juge pour trancher le litige. La procédure civile ne permet pas à elle seule de résoudre un conflit entre deux personnes : c’est un droit instrumental, au service du droit substantiel (dit également « droit portant sur le droit »), détaché de ce que doivent être les rapports entre sujets de droit. Le droit substantiel s’oppose, en plus de la procédure, à d’autres droits instrumentaux : le droit international privé (qui contient les règles déterminant la loi applicable et le juge compétent en cas de litige international), le droit transitoire, etc… Les droits instrumentaux revêtent un même intérêt : des raisonnements plus abstraits. Pendant longtemps, on considéra la procédure civile comme une discipline secondaire, affaire de praticiens, un droit procédurier au sens le plus vulgaire du terme, un droit auxiliaire du droit substantiel, sans intérêt théorique et doctrinal. Cette vision était causée par une définition restrictive de la matière, qui n’y voyait qu’une suite de procédures rébarbatives et de pièges tendus par les conseils afin de retarder l’issue d’un procès, mais aussi par un « légalisme procédural » (S. Guinchard) se concentrant sur le commentaire descriptif des textes, eux-mêmes uniquement conçus afin de servir le droit substantiel. Cette vision évolua par la suite grâce au renouveau des sources et de la discipline. Proposition de définition : la procédure civile est « l’étude de l’ensemble des principes et règles juridiques qui gouvernent la résolution des conflits entre personnes privées, étant entendu que ces principes s’imposent à la fois à ces dernières et à ceux qui tranchent le conflit ou contribuent à lui trouver une solution. »1 §§ L’utilité de la procédure civile L’échange des arguments des parties au sein du procès s’organise selon une mise en scène précise, définie par les règles de la procédure civile, qui a pour objectif de garantir les droits de chaque plaideur à un procès loyal et d’assurer la « réalisation des droits subjectifs des individus » (Henri Motulsky). C’est donc grâce à la procédure civile que les règles de droit substantiels privés sont effectivement sanctionnées : le droit substantiel est un droit déterminateur et la procédure civile est un droit sanctionnateur. La procédure civile a pu sortir d’une vision réductrice en mettant l’accent sur les principes supérieurs qu’elles protègent. Elle a pour objet d’assurer la sécurité juridique aux parties et de les protéger contre les manœuvres malhonnêtes de leur adversaire et contre l’arbitraire du juge. Elle garantit l’égalité, et Benjamin Constant écrivait : « il y a dans les formes quelque chose d’imposant et de précis qui force les juges à se respecter eux-mêmes et à suivre une marche équitable et régulière »2. La procédure protège également contre les erreurs du juge. La psychologie a démontré que l’acceptation des décisions de justice tient moins à leur contenu ou à leur sévérité qu’à la procédure suivie pour les prendre3. Il faut donc garantir une « justice procédurale » fondée sur trois grands axes : les parties doivent avoir le sentiment d’avoir été impliquées et entendues dans la décision ; elles doivent avoir le sentiment que leur juge était impartial et que les grands principes de l’équité ont été respectés ; elles doivent avoir le sentiment d’avoir été bien considérées, avec politesse et compréhension. §§§ Les caractères de la procédure civile A. Le caractère formaliste 1 Précis Dalloz, p. 77. 2 Écrits politiques, p. 499. 3 Tom R. Tyler, « Procedural Justice, Legitimacy, and the effective Rule of Law », Crime and Justice, 2003, p. 283. Par essence, une procédure est formaliste. On trouve dans la procédure civile de nombreux délais et formalités. Jhering écrivait ainsi : « Ennemi juré de l’arbitraire, la forme est la sœur jumelle de la liberté » ; cela signifie que toutes les règles de procédure garantissent en principe les droits des plaideurs. Cependant, selon le principe « pas de nullité sans grief », l’omission d’une règle, comme une mention obligatoire, n’entraînera pas la nullité de l’acte si elle n’a pas fait grief à la partie concernée. Le nouveau Code de procédure civile a voulu ainsi s’assurer que le formalisme ne devienne pas une fin en soi, mais qu’il ne soit que absolument nécessaire et toujours causé par la garantie d’une bonne justice. Il est par ailleurs impossible de résumer la procédure civile à un caractère strictement formaliste : il y a des règles procédurales de fond comme de forme. Ainsi, Cornu et Foyer écrivent lors de la réforme du Code en 1975 que « la procédure est une suite de formalités mais elle ne se résout pas en formalités, parce que toutes les règles de procédure sont loin d’être des règles de forme ». Une conception doctrinale dite réaliste a mis l’accent sur le fait que le procès n’était pas la seule chose des parties, mais également un bien social qu’il était nécessaire d’organiser dans son ensemble. Dans tous les cas, le formalisme doit toujours être strictement nécessaire dans le cadre de son objectif de protection à l’égard de l’arbitraire du juge et de la déloyauté des parties, et ne doit jamais dégénérer en excès de formalisme. B. Le caractère impératif Les règles de procédure sont des règles auxquelles les parties ne peuvent déroger, rendant impuissante l’autonomie de la volonté en raison de l’ordre uploads/S4/ procedure-civ-an-passe.pdf
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- Publié le Oct 08, 2022
- Catégorie Law / Droit
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