Que sont les principes républicains ? Une contribution du Conseil des sages de
Que sont les principes républicains ? Une contribution du Conseil des sages de la laïcité Juin 2021 QUE SONT LES PRINCIPES RÉPUBLICAINS ? 3 La République a d’abord signifié l’État : la res publica, par opposition aux affaires privées. Puis elle a signifié pouvoir non monarchique, « pouvoir non personnel, non viager, non héréditaire, non arbitrairement défini »1. Elle est aujourd’hui synthétisée par un ensemble de valeurs et de principes incarnés dans le « pacte républicain » dont le contenu s’est formé par sédimentation tout au long des cinq républiques. Elle est aussi, et avant tout, un état d’esprit, le sens du bien commun, de l’intérêt général. État de droit, gouvernement, modèle philosophique, la République est hors du temps, mais elle ne peut se couper de sa source : le processus révolutionnaire de la fin du XVIIIe siècle. La Constitution de 1958 en rappelle les fondements. L’article 1er de la Constitution, en qualifiant la République, énonce ses principes : « La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale ». L’article 2 de la Constitution présente les attributs de la République : « La langue de la République est le français. L’emblème national est le drapeau tricolore, bleu, blanc, rouge. L’hymne national est « La Marseillaise ». La devise de la République est « Liberté, Égalité, Fraternité ». Son principe est : gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple. » Les principes de la République Le premier des principes républicains est la souveraineté nationale. Son corollaire est la compétence exclusive du législateur pour exprimer la volonté générale. La Révolution française façonne l’État- Nation qui fusionne, en un tout indivisible, un État, un territoire et un peuple (au singulier). L’idée d’unité est fondamentale dans le modèle républicain, même si elle n’est pas nouvelle, la Révolution ne faisant qu’accélérer un processus séculaire d’unification. 1 Maurice Agulhon, La République (1880-1995), Hachette, 1997 4 QUE SONT LES PRINCIPES RÉPUBLICAINS ? Des quatre épithètes qui caractérisent la République, une remonte au 25 septembre 1792 (indivisible), une à la Constitution de 1848 (démocratique) et deux à celle de 1946 (laïque et sociale). Une République indivisible « On peut considérer que le principe d’indivisibilité de la République, en combinaison avec le principe d’égalité, commande l’unité (ou l’unicité) du peuple français et interdit par là même toute différenciation entre citoyens constituant un même peuple »2. En proclamant l’indivisibilité de la République, la Constitution de 1958 s’inscrit dans la tradition républicaine de 1792 : le décret de la Convention nationale du 22 septembre 1792 abolit la royauté lors de sa première séance et proclame, dès le 25 septembre 1792, à la fois l’unité et l’indivisibilité de la République française. L’indivisibilité de la République signifie l’unité du pouvoir normatif : il n’existe qu’une seule catégorie de lois adoptées par les représentants de la souveraineté ou par referendum ; elles s’appliquent sur l’ensemble du territoire. Cette unité du pouvoir politique repose sur l’unicité de la souveraineté : l’unité de la nation française est affirmée à l’article 3 de la Constitution, al. 1er : « La souveraineté nationale appartient au peuple qui l’exerce par ses représentants ou par la voie du référendum. Aucune section du peuple ni aucun individu ne peut s’en attribuer l’exercice... ». La révision constitutionnelle du 28 mars 2003 a consacré implicitement l’unité du peuple français à l’article 72-3 : « La République reconnaît, au sein du peuple français, les populations d’outre-mer, dans un idéal commun de liberté, d’égalité et de fraternité. » 2 André Roux, Droit constitutionnel local, Economica, 1995, p. 101 QUE SONT LES PRINCIPES RÉPUBLICAINS ? 5 Une République laïque Le principe de laïcité, c’est d’abord le respect de la liberté de conscience et de la liberté de culte et, « pourvu que leur manifestation ne trouble pas l’ordre public établi par la loi » (article XI de la Déclaration de 1789), la liberté d’exprimer publiquement ses convictions. C’est aussi, avec la séparation des Églises et de l’État, l’obligation de neutralité s’imposant aux organismes publics et à leurs agents. C’est enfin, réciproquement, le précepte selon lequel nul ne peut se prévaloir de ses croyances pour se soustraire à la règle régissant les relations entre particuliers et collectivités publiques (Conseil constitutionnel, Traité établissant une Constitution pour l’Europe, 19 novembre 2004). Une République démocratique Le pouvoir du peuple s’exerce dans le cadre et au bénéfice de la chose publique. République et démocratie sont deux notions complémentaires. La République repose sur la participation et la représentation des citoyens. Le suffrage est universel, libre et égal. La loi est l’expression de la volonté générale, à laquelle tous les citoyens ont le droit de concourir, par eux-mêmes ou par l’intermédiaire de leurs représentants. Les citoyens sont égaux sans distinction d’origine, de race ni de religion et dans le respect de toutes les croyances. Aucune section du peuple ni aucun individu ne peut s’attribuer l’exercice de la souveraineté. La République proclame et garantit des libertés publiques inscrites dans le préambule : droits individuels, civils et politiques, proclamés dans la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789 (égalité devant la loi, liberté de conscience, liberté d’expression, droit de vote, sûreté, liberté d’aller et de venir, droit de propriété…), droits sociaux, économiques et culturels issus des grandes lois sociales de la IIIe République (libertés de réunion, d’association, liberté syndicale, liberté de la presse…), complétés en 1946 (égalité hommes-femmes dans tous les domaines, protection sociale, droit à la culture…), droits « de troisième génération » avec la 6 QUE SONT LES PRINCIPES RÉPUBLICAINS ? Charte de l’environnement intégrée au « bloc de constitutionnalité » par la révision constitutionnelle du 1er mars 2005. Une République sociale La République ajoute aux principes démocratiques un contenu social, un projet de société. Les droits civils et politiques que garantit la République démocratique sont prolongés, sur le terrain social, par des droits reconnus à chacun. Le préambule de 1946 énonce les « principes particulièrement nécessaires à notre temps » qui se traduiront dans les grandes lois adoptées par le droit du travail et de la protection sociale. La République sociale renvoie à deux notions importantes : Tout d’abord, la « fraternité », qui vise le lien unissant les membres du corps de la Nation formé d’une communauté de citoyens libres et égaux sans distinction d’origine, de race ou de religion, unis dans un idéal commun de liberté, d’égalité et de fraternité. Idéal politique, principe républicain, la fraternité est, pour chaque membre de la Nation, la reconnaissance de l’autre comme différent mais participant à la même communauté politique. Ensuite, la solidarité, consacrée comme une obligation de la Nation : le Préambule de 1946 pose : « la nation assure à l’individu et à la famille les conditions nécessaires à leur développement ». Ainsi, la solidarité nationale vient suppléer, si besoin, la carence ou l’insuffisance de la solidarité familiale. Elle devient active pour une plus grande égalité de tous les membres de la collectivité. Toutes les dispositions de la République sociale sont liées au principe d’égalité : les droits sont reconnus « à chacun » ou garantis « à tous ». Et l’égalité est liée à l’universalité des droits et des devoirs. QUE SONT LES PRINCIPES RÉPUBLICAINS ? 7 Les symboles de la République Les emblèmes et les symboles sont la représentation de valeurs et d’idées. Ils permettent de tisser « entre le passé et le présent des liens auxquels tous peuvent prétendre »3. La présence des symboles dans le texte constitutionnel rappelle les valeurs fondatrices de la République française. Du concept premier de Nation découlent des symboles attachés à la République. L’article 2 figure dans le Titre 1er intitulé « De la souveraineté ». Au drapeau tricolore, auquel se réfèrent les décrets du 18 juin 1790 et du 15 février 1794, et à l’hymne, « La Marseillaise » proclamée « hymne patriotique » par le décret du 26 messidor An III, la Ve République ajoutera la langue nationale par une révision constitutionnelle du 25 juin 1992. L’article 2 de la Constitution, qui consacre ces symboles, traduit la permanence de l’État républicain à travers sa devise, constante depuis 1848. La langue française L’un des liens permettant de cimenter le peuple est la langue. L’unité nationale est alors associée à l’unité linguistique. Inséparable de la conscience nationale, la langue constitue, pour la collectivité nationale, un moyen de communiquer, mais aussi d’exprimer une identité collective. Elle permet de transmettre la culture, l’histoire et les traditions du pays. Elle affirme sa singularité dans le concert des nations. La langue a toujours eu un poids symbolique. Elle a contribué à la construction de l’identité nationale en assurant, depuis la Révolution, l’intégration progressive des peuples d’origines diverses au sein de la nation. 3 Norbert Rouland, « Du bon usage du mythe de la Révolution française », in Cahiers Pierre-Baptiste/2, Actes Sud, 1992 8 QUE SONT LES PRINCIPES RÉPUBLICAINS ? La révision constitutionnelle du 25 juin 1992 ajoute à l’article 2 que « la langue de la République est le français uploads/S4/ que-sont-les-principes-r-publicains-une-contribution-du-conseil-des-sages-de-la-la-cit-juin-2021-90017 1 .pdf
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- Publié le Nov 19, 2021
- Catégorie Law / Droit
- Langue French
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