http://lamyline.lamy.fr analyse Numéro 138 I Juin 2016 RLDC I 47 ÎRLDC 6216 L

http://lamyline.lamy.fr analyse Numéro 138 I Juin 2016 RLDC I 47 ÎRLDC 6216 L ’animal domestique : un statut juridique en construction La loi du 16 février 2015, connue du grand public pour avoir introduit la qualité d’être vivant et sensible des animaux dans le Code civil, a permis au législateur de poser les jalons d’une modification structurelle du Code afin d’y insérer les dispositions relatives à un statut juridique de l’animal domestique. La démarche législative souhaitée accompagnerait alors opportunément la jurisprudence et la doctrine dont les prises de position sur certaines questions peuvent être consacrées afin de constituer les premiers éléments de ce statut. D epuis plusieurs mois, il ne se passe pas une semaine sans que les animaux ne soient les sujets d’articles de presse ou de débats télévisuels ou radiophoniques. C’est le cas des scandales très médiatisés des abattoirs du Gard et du Pays basque, de l’interdiction des cirques animaliers par plusieurs communes françaises, ou encore d’une récente découverte médicale (le sel jouerait un rôle déterminant dans l’apparition du diabète) permise grâce à l’emploi de porcs nains ayant subi une chirurgie de l’obésité et à qui l’on a fait ingérer de grosses quantités de sel. Mais la condition animale est aussi illustrée à travers ces ex- périences menées sur des chimpanzés démontrant leurs capacités cognitives ou leur intelligence. Ces quelques éléments montrent que l’animal est placé par l’homme au cœur de son existence et la place que nous lui reconnaissons est devenue une question de société. Cette question présente différents aspects selon la catégorie d’animaux envisagée. Alors que nous prenons conscience que la biodiversité et l’animal sauvage sont l’avenir de l’homme et de la femme sur Terre, la proximité plus étroite que nous entrete- nons avec les animaux domestiques suscite d’autres problématiques. Il s’agit de la remise en cause des conditions d’élevage industriel, de la pérennité des expérimentations scientifiques sur les animaux, ou encore de la représentation d’animaux dans les cirques. L’animal de compagnie (C. rur. pêche mar., art. L. 214-6 : « Tout animal détenu ou destiné à être détenu par l’homme pour son agrément »), quant à lui, est une préoccupation des prétoires lorsqu’il convient de déterminer son lieu de vie lors de la séparation de ses maîtres ou de se prononcer sur le préjudice ressenti par son propriétaire du fait de sa disparition. Le législateur s’est saisi de la condition juridique de l’animal domestique récemment et de manière très remarquée. D’une part, la loi relative à la modernisa- tion et à la simplification du droit et des procédures dans les domaines de la justice et des affaires inté- rieures n° 2015-177 du 16 février 2015 (JO 17 févr.) a introduit dans le Code civil un nouvel article 515-14 aux termes duquel : « Les animaux sont des êtres vi- vants doués de sensibilité. Sous réserve des lois qui les protègent, les animaux sont soumis au régime des biens » (L. n° 2015-177, 16 févr. 2015, art. 2). Mais ce texte législatif a également modifié les articles 522, 524, 528, 533, 564 et 2501 du Code civil afin de supprimer les expressions légales affirmant que les animaux sont des meubles, des immeubles par des- tination ou des objets. D’autre part, l’ordonnance n° 2015-1243 du 7 octobre 2015 (JO 8 oct.) relative au commerce et à la protection des animaux de compagnie a fait évoluer différents articles du Code rural et de la pêche maritime, en vue notamment « d’assurer un meilleur encadrement du commerce des chiens et chats et ainsi contribuer à la lutte contre l’abandon » (Cons. min., 7 oct. 2015). L’intérêt du législateur pour la condition juridique de l’animal domestique apprivoisé ou tenu en capti- vité a ainsi été manifeste au cours des derniers mois. On est passé d’une législation visant à garantir la protection des animaux contre les agissements de l’homme à l’élaboration de règles ayant pour fina- lité de revaloriser la place de l’animal domestique dans notre société. Doit-on aller plus loin ? Les in- terventions légales de l’année 2015 marquent-elles l’aboutissement d’une évolution ou, au contraire, constituent-elles les prémices de la construction d’un véritable statut juridique de l’animal domes- tique ? La seconde proposition nous paraît tout à fait en- visageable. Les innovations introduites par les der- nières modifications légales (I) ainsi que certains courants jurisprudentiels ou positions doctrinales permettent légitimement de le penser (II). Par Sabrina DELRIEU Maître de conférences HDR Université de Corse Pascal Paoli uploads/S4/ revue-lamy-droit-civil-animal-domestique-et-statut-juridique 2 .pdf

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  • Publié le Jul 20, 2022
  • Catégorie Law / Droit
  • Langue French
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