LA JOURNÉE DES FLICS (...) Ah ! mes amis, quelle urgente campagne il est nécess

LA JOURNÉE DES FLICS (...) Ah ! mes amis, quelle urgente campagne il est nécessaire d’entreprendre avec acharnement contre la police et les policiers ! Que de crimes et de hontes nous supportons de ça ! Est-il possible qu’un ouvrier, de sang-froid, puisse regarder sans colère une de ces faces patibulaires, un de ces crânes d’abrutis, un de ces groins d’alcooliques malfaisants ? Est-il possible que la masse des locataires d’un faubourg puisse supporter le voisinage, supporter la promiscuité d’un aussi lâche produit de la vie de caserne ? Quelle pitié, quels égards peut-on avoir pour ce renégat de la classe ouvrière qui a demandé au guichet de la Préfecture ou du ministère de l’Intérieur sa gamelle et son collier de chien de garde ? Cet homme déchu dont le régiment a développé les pires instincts, au point d’en faire un mouchard, est toléré, parfois respecté, toujours craint. Il pullule partout sans danger pour lui- même. Il rit, il cause, il boit avec des gens du peuple quand son service ne lui commande pas de rudoyer, d’accuser, de brutaliser, de massacrer ceux auxquels, devant le comptoir d’un empoisonneur, il fait bonne figure ! Si seulement il n’y avait que ceux qui se soûlent avec lui pour recevoir ses coups, ce serait juste. Le mouchard, le flic, a parfois des manières hypocritement affables en temps de calme. Si vous êtes bien habillé, si vous avez de “l’extérieur”, ou si vous êtes nombreux et qu’il soit seul, il vous respecte. Car ce chien sue la peur et devient lâche quand il ne risque rien. Cet animal est ordinairement féroce quand il est en bande. Vous tous qui êtes des hommes fiers, dignes, francs [sic] ; vous tous, qui osez protester quelquefois et qui vous croyez libres, vous savez quels traitements vous attendent au poste, au Dépôt, à la gendarmerie, en prison ! Et vous, travailleurs, qui les avez vu à l’oeuvre les Premiers Mai précédents, les jours de réunion à votre Bourse du travail, les jours de manifestation et les jours de grève, vous savez quelle race est celle de ces mufles ignobles qui ont trahi leur cause et leur classe et cognent sur ceux dont le courage et la conscience leur font honte et les affolent ; vous connaissez bien ces bandits ! Et bien ! le Premier Mai est le jour de leurs grandes manoeuvres. Que dis-je ? c’est le jour de gloire pour eux ; car l’ennemi, c’est le peuple, c’est l’ouvrier 1. Quels que soient l’âge et le sexe, ils cognent sur ceux que leur chef leur fait voir en rouge... et, comme nous ne sommes pas des jaunes, nous les rendons furieux. Comme des taureaux, ils foncent, aveuglés de rage et d’alcool, sur ceux qui n’ont ni armes ni bâtons. Et ils mettent la loque en pièces. Et cela durera tant que le peuple aimera à se faire traiter comme une loque par ces brutes ; cela durera tant qu’il persistera à se mettre en cortège pour recevoir des coups en gueulant l’Internationale ou tout autre cantique révolutionnaire avec les mains dans les poches. Georges Yvetot (La Guerre Sociale, 29 avril 1908) 1 Note de Cette semaine à propos de “la classe” : à notre avis, l’ennemi n’est pas tant dans “le peuple” ou “l’ouvrier” en soi que dans ceux/celles qui se révoltent. Quant à la trahison de classe évoquée plus haut à propos des flics, ces derniers n’y appartiennent ni potentiellement ni originellement (excepté les mouchards), leur choix les place donc d’emblée en dehors et contre. CETTE SEMAINE Huitième a année – – T Trimestriel – – 2 2001 – – n n°83 – – P Prix l libre o ou a abonnement SEPTEMBRE/OCTOBRE illustration publiée dans Le Progrès n° 216 du 3 décembre 1895 DU FOND DES GEÔLES PORTUGAL Humanisme inquisitorial 2 Lettre ouverte aux “clones” du système 3 Communiqué de prisonniers de Linhó 4 Des pratiques de l’Etat portugais 5 Liberté pour Pedro 6 ESPAGNE Huye hombre huye 8 Lutte contre le FIES de Picassent 9 TURQUIE Lettre d’un anarchiste emprisonné 10 Mort aux vaches 10 ETATS-UNIS Liberté pour Free & Critter 11 AUSTRALIE Emeutes en centres de rétention 11 SOMMETS BIDONS QUÉBEC Le citoyennisme, stade suprême du réformisme 12 Compte-rendu de la journée du 20 avril 13 Marche citoyenne : les pieds dans le plat 15 LA GLOBALISATION DU ROQUEFORT 16 GÖTEBORG Un point sur la répression 19 FEU À VOLONTÉ 20 GÊNES Brûler et piller toutes les illusions ce soir 21 La police infiltrée par les Black Blocs... 22 Un récit de l’intérieur d’un Black Bloc 25 Un communiqué d’El Paso 32 Pour la criminalisation du mouvement social 33 Destructions transgéniques 34 Une approche du primitivisme 36 PARE : les intérêts des décideurs ne sont pas les nôtres 40 Déjacque, notes à La question révolutionaire (1854) 42 LA CELLULE DISCIPLINAIRE N’EXISTE PLUS dans certains pays d’Europe depuis plusieurs dizaines d’années. La plus grande punition appliquée au prisonnier rebelle ou qui refuse le règlement est le transfert dans une autre prison. Ici, au pays des douces coutumes, on peut trouver des cellules disciplinaires – cages cruelles et expertes dans l’art de châtier, presque toujours remplies de chair humaine, pour une période qui va jusqu’à trente jours pour la satisfaction de l’humanisme inquisitorial. Parfois, il y a même des files de détenus qui se forment en attendant que les cellules disciplinaires se vident, pour accomplir les peines que l’arsenal de l’horreur de la pratique quotidienne de la pénalité a engendrées. La cellule disciplinaire, appelée “segredo” ou “manco” par les prisonniers, est une cage lugubre, insalubre, humide, glacée en hiver, dont le sol est en béton, sans mobilier, sans ventilation suffisante, sans la lumière nécessaire du jour et avec une lumière artificielle trop faible pour que les prisonniers puissent lire ou étudier. Le lit est composé d’une base en ciment avec un matelas en mousse dessus, saturé de toute la sueur qui s’accumule en quelques jours. L’unique endroit pour poser la nourriture et les vêtements est le sol. Le prisonnier est obligé de manger debout avec la casserole dans les mains, sur le lit ou par terre comme les animaux. Le seau de merde et d’urine est vidé toutes les vingt-quatre heures. Cellule disciplinaire, cage dans la cage, la technique pour infliger des supplices sans laisser de marque extérieure, l’art de conserver une vie de souffrances en la subdivisant en “mille petites morts”, avec un pouvoir punitif qui s’empare de l’individu jusque dans les recoins de son entendement. Le reclus est écrasé dans un espace/temps – vingt-trois heures par jour avec une heure de promenade à ciel ouvert et isolé du reste de la population pénale –, dans un procédé d’anéantissement sensoriel sans possibilité de discuter avec quiconque, à avoir pour seuls compagnons les puces et les mouches, ces dernières attirées par le seau de déjections et par la casserole de bouffe inconsistante et souvent immangeable ; à parler avec les murs ; emmuré vivant, hébété, en train de dépérir, dans un processus de végétalisation juste suffisant pour passer du purgatoire aux limbes. Quelle torture physique, psychique et morale doit-on souffrir ? De combien de troubles et de traumatismes sont-ils la cause ? Combien de violences institutionnelles ! Combien de terrorismes psychologiques et physiques ! C’est un système qui tente délibérément de détruire la personnalité et l’identité de l’individu. Combien de sentiments de haine ont été fomentés par ces peines cruelles ?! Combien de désirs de vengeances a-t-elle alimentés ? “ Il faut que quelqu’un paie pour ça... “ est une expression de vengeance qu’on entend constamment dans l’ambiance d’agonie dégradante et d’extermination des prisons. Ensuite, on voit les médias annoncer des actes de délinquance pour appuyer la politique d’alarmisme social, en exigeant des peines plus dures, et on voit la liturgie des supplices proférés par les charlatans politiciens qui sont à la pêche aux voix, mais qui ne regardent jamais la cause des actes en question, et bien entendu sans interroger ce qui fabrique ces délinquants capables de tels actes. Les prisons, les cellules disciplinaires, l’atrocité de l’expiation, les têtes et les corps manipulés par l’horrible arsenal des peines et du pouvoir carcéral – l’oppression à son pouvoir le plus élevé –, le monde carcéral sans sa brutalité et sa corruption. Souffrance, douleur, extermination ! Au final, pourquoi tant de cruautés et de malheurs ? Pour la discipline ? Pour la resocialisation ? Mais les statistiques en matière de récidive ne sont-elles pas assez claires ? Jamais le fouet de la vengeance ne sera suffisant contre les fièvres sociales dont les origines viennent de la structure inique d’une société basée sur les inégalités sociales (donc sur les privilèges !). S’il n’y avait pas de privilèges, il n’y aurait pas de délits ! “ Les prisons n’empêchent pas que se produisent des actes anti-sociaux. Elles en multiplient le nombre. Elles n’atteignent pas leur propre objectif. Elles dégradent (encore plus) la société. Elles doivent disparaître ”. A la prison, nous opposons la liberté, l’égalité sociale, la uploads/S4/cette-semaine-n083.pdf

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  • Publié le Jul 19, 2021
  • Catégorie Law / Droit
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