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المجلة اإللكترونية لألبحاث القانونية 2018 العدد2 RERJ –N°2 ردمـد2605 - 7476 ISSN: 167 La politique pénale en vertu du Livre V du code de commerce Mounia RHOMRI MOUNIR Enseignante - chercheur à La faculté de droit de Meknès : Introduction Nul ne peut nier le rôle de l’entreprise dans le développement économique et sociale du pays. Certes, elle constitue un agent de création, de circulation et de distribution des richesses au sein de la société en sus de son ampleur au niveau de l’emploi, ce qui lui a permis de constituer le noyau du droit commercial. En revanche, son activité peut être compromise par l’intervention du risque pénal provoqué par le comportement malveillant de l’entrepreneur individuel comme par celui du dirigeant social provoquant une difficulté financière de l’entreprise, une difficulté due à la cessation des paiements, origine de l’ouverture des procédures collectives et suscitant, en parallèle la responsabilité civile et pénale du commerçant. En fait, la cessation du paiement des dettes par l’entreprise ne constitue pas en soi un délit susceptible d’être sanctionné pénalement mais c’est l’accomplissement d’un certain nombre d’actes ayant aggravé la situation financière de l’entreprise et ayant menacé les droits de ses créanciers. Ces agissements constituent selon les dispositions du code de commerce l’infraction de banqueroute. Dans ce cadre, Mr Yves Guyon souligne que « l’expression banqueroute a son origine dans le droit des foires italiennes à la fin du moyen Age, lorsqu’un commerçant cessait ses paiements, son banc à l’assemblée des marchands était brisé (banca rotta) pour bien montrer qu’il n’appartenait plus à la communauté »1. Ainsi, la banqueroute constitue une infraction commise par les dirigeants de l’entreprise individuelle ou à forme sociale, qui après l’ouverture de la procédure collective ayant fait objet d’une procédure qu’ils soient de droit ou de fait rémunérés ou non, sont coupables d’avoir dans l’intention d’éviter ou de retarder l’ouverture de la procédure de traitement, soit fait des achats en vue d’une revente au-dessous du cours, soit employé des moyens ruineux pour se procurer des fonds ; ـــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــ 1- Yves Guyon, droit des affaires, tome2, entreprises en difficultés, redressement judiciaire- faillite, 6ème édition, Economica, Paris 1997 p455. المجلة اإللكترونية لألبحاث القانونية 2018 العدد2 RERJ –N°2 ردمـد2605 - 7476 ISSN: 168 -Avoir détourné ou dissimuler tout ou partie de l’actif du débiteur -Avoir frauduleusement augmenté le passif du débiteur ; -Avoir tenu une comptabilité fictive ou fait disparaitre des documents comptable de l’entreprise ou de la société ou s’être abstenu de tenir une comptabilité lorsque la loi en fait l’obligation1. Historiquement, la faillite et la banqueroute constituaient deux infractions provoquant de graves conséquences tant à la société qu’aux créanciers et touchaient le commerçant dans son corps, ses droits, son honnêteté et étaient en conséquence sanctionné par la peine de mort ; or la gravité de cette sanction se contrariait avec les contraintes du commerce et de l’industrie et menaçaient la vie des hommes et les font échapper à leur exercice. Le progrès de la société a conduit à la suppression de la peine de mort et le régime de la faillite entant que régime commercial usant de techniques et garanties juridiques protégeant les droits des créanciers, et le régime de la banqueroute entant que régime pénal se basant sur l’incrimination et la sanction. L’ancien système de faillite s’appuyait sur la notion de la sanction car il visait l’apurement du monde des affaires des commerçants malhonnêtes. Ainsi, l’ancien code de commerce marocain disposait que le jugement déclaratif de faillite peut ordonner son dépôt à la maison d’arrêt si le failli n’a pas fait la déclaration de la cessation de ses paiements au secrétariat du tribunal de première instance de son domicile dans les quinze jours (l’article 198 de l’ancien code de commerce), ou s’il n’a pas accompagné la déclaration du dépôt du bilan, ou n’ pas contenu l’indication des motifs qui empêcheraient le failli de le déposer conformément aux dispositions de l’article 199 de l’ancien code de commerce ou encore lorsque le failli cherche à entraver par ses agissements la gestion de la faillite selon les dispositions de l’article 214 de la même loi. La suppression de ces mesures privatives de liberté n’aura lieu qu’avec l’entrée en vigueur de la loi 15.95 formant code de commerce2 qui les a remplacés par le régime de la déchéance commerciale (l’article 714 du code de commerce). En outre, l’infraction de banqueroute, sous l’égide du régime de la faillite, se divisait en banqueroute simple et frauduleuse dont la répression était régie par les dispositions du code pénal général. En revanche, vu la défaillance du régime marocain en matière de la responsabilité des dirigeants sociaux la doctrine marocaine a opté pour une intervention du législateur afin de limiter les abus exercés par les dirigeants qui dilapidaient les biens de la société et les utilisaient pour leurs propres besoins.3 Actuellement, le législateur marocain a adopté à travers le livre V du code de commerce une politique de prévention et d’accompagnement de l’entreprise tout en gardant l’incrimination et la sanction des actes et agissements nuisant à son activité ـــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــ 1- Article 754 du code de commerce 2- Dahir n°1.96.83 du 1er aout 1996, B O n° 4418 datant du 3 octobre 1996. 3- SQUALLI Abdelaziz ”Droit et pratique en matière de faillite et de liquidation judiciaire des entreprises », édition SOFAPRESS, première édition 1995, p 209. المجلة اإللكترونية لألبحاث القانونية 2018 العدد2 RERJ –N°2 ردمـد2605 - 7476 ISSN: 169 et visant à compromettre les intérêts des créanciers au niveau des articles 721 jusqu’à l’article 727 de la loi 15.95 du 1 er aout 1996. A ce niveau , le livre V du code de commerce a subi une réforme en vertu de la loi 73.17 vu les carences constatées dans les différents dossiers déférés devant les tribunaux de commerce. D’ailleurs, cette loi a conservé le même régime de répression du délit de la banqueroute et des autres infractions liées aux difficultés d’entreprise adopté par le livre V du code de commerce régi par la loi 15.95. Certes, l’incrimination et la sanction du délit de banqueroute et d’autres infractions liées aux difficultés d’entreprise vise à dissuader tout agissement suscitant des difficultés financières des entreprises, en l’occurrence, portant atteintes à l’activité de l’entreprise et aux intérêts des créanciers. A ce niveau le nouveau droit des difficultés d’entreprise s’inscrit dans le cadre d’une série de réformes entreprises par le Maroc afin de s’adapter aux grands changements socio-économique connus tant au plan national qu’au plan international , de tel changements imposés par la libéralisation des marchés et la révolution technologique nécessitant, par conséquent, la mise en place d’un régime juridique en plus d’institutions judiciaires permettant aux entreprises de mieux affronter les défis de la concurrence internationale. Certes, de telles réformes ne peuvent intervenir que par la contribution de plusieurs études constituant une réflexion sérieuse sur la législation adoptée en la matière, ce qui a fait de cette matière, y compris celle relative aux délits liés aux difficultés d’entreprises, le centre d’intérêt de plusieurs réflexions. Dans ce cadre, l’établissement d’une réflexion sur la politique pénale adoptée à l’encontre des infractions liées aux difficultés d’entreprises nécessite de répondre à la problématique suivante : Dans quelle mesure le législateur marocain a-t-il réussi à établir sa politique pénale vouée à dissuader et à réprimer tout agissement ou acte suscitant des difficultés financières menaçant la vie de l’entreprise entant qu’entité économique indispensable et source d’emploi ? A l’instar de toute infraction, l’incrimination et la sanction des infractions liées aux difficultés d’entreprise (la banqueroute et les autres infractions déterminées par le livre V du code de commerce) se trouve régies par des règles de fond mais aussi des règles de procédure relatives aux actes de l’action judiciaire. Partant, porter une réflexion sur la problématique liée au sujet suivant nécessite de traiter deux volets essentiels, à savoir : D’une part, la politique pénale du législateur adoptée au niveau de l’incrimination et la sanction des infractions liées aux difficultés de l’entreprise. Et d’autre part, la politique pénale du législateur adoptée au niveau des règles régissant l’exercice de l’action judiciaire liée aux infractions suscitant des difficultés d’entreprise. I- La politique pénale adoptée au niveau de l’incrimination et la sanction des infractions liées aux difficultés d’entreprises Derrière la cessation des paiements se trouvent plusieurs raisons qui peuvent découler soit des circonstances économiques soit de la faute du commerçant. المجلة اإللكترونية لألبحاث القانونية 2018 العدد2 RERJ –N°2 ردمـد2605 - 7476 ISSN: 170 A cet égard, le législateur marocain a établi, à travers les dispositions du livre V du code de commerce une politique souple qui prend en considération les circonstances de l’entreprise et de l’entrepreneur. Elle protège, d’une part les entrepreneurs endommagés par la concurrence et par les transformations technologiques et les crises économiques, ceci afin de permettre aux entreprises de subsister et de jouer leur rôle dans le développement économique, mais en parallèle, elle a mis en place un régime pénitentiaire sévère voué à dissuader tout acte et agissement découlant de la faute de gestion ou des manœuvres frauduleuses des dirigeants engendrant des difficultés uploads/Finance/ 1-pb 16 .pdf
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- Publié le Fev 16, 2022
- Catégorie Business / Finance
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