Entretien avec M. Mehdi Tahiri, S.G. de l’AMIC La Nouvelle Tribune 15/1/2004 Ca
Entretien avec M. Mehdi Tahiri, S.G. de l’AMIC La Nouvelle Tribune 15/1/2004 Capital Investissement Le capital investissement ne peut démarrer en allant vers les segments les plus risqués Le capital-risque, d’introduction relativement récente au Maroc, n’en possède pas moins son association, l’AMIC (Association Marocaine des Investisseurs en Capital). Et ce secteur, en plein développement, devrait connaître de nouvelles avancées avec l’adoption future d’une Loi réglementant le capital-risque au Maroc. Quelques obstacles demeurent cependant, notamment du fait d’une différence d’appréciation entre les opérateurs et les autorités de tutelle qui voudraient que les "capital-risqueurs" s’impliquent davantage dans le financement des PME-PMI, au risque, estiment les premiers, de fragiliser une profession encore jeune. Car l’industrie du capital investissement a ses règles et contraintes, que la volonté politique ne saurait ignorer. Financer les PME-PMI à potentiel réel oui, risquer des capitaux à fonds perdus non. Telle est la philosophie des membres de l’AMIC, comme cela se dégage de l’entretien accordé par son Secrétaire général, M. Mehdi Tahiri, par ailleurs Directeur général de Capital Invest. La Nouvelle Tribune : M. Tahiri, l’Association Marocaine des Investisseurs en Capital, l’AMIC, travaille sur une loi pour réglementer le secteur du Capital Risque. Pouvez-vous nous parler de l’avancement de ce projet ? M. Tahiri : Effectivement, nous avons travaillé de concert avec les autorités marocaines sur l’élaboration d’un projet de loi sur le capital risque. Précisément, nous avons travaillé dans un premier temps sur le volet juridique et reporté celui relatif aux incitations fiscales à une seconde étape. Il fallait définir d’abord, les véhicules juridiques appropriés aux exigences de notre profession ainsi que les conditions d’exercice, les champs d’interventions de ces véhicules au sein de l’économie marocaine. C’est ainsi qu’ont été définis deux véhicules : la SCR (société à capital risque) et le FCPR (fonds commun de placement à risque). En fait, la préparation du texte s’est faite en pleine concertation avec les autorités, mais aussi après consultation d’avocats et de conseillers juridiques qui se sont basés sur les textes réglementaires en vigueur dans des pays avancés en la matière. Le projet de loi est prêt dans sa version finale pour être intégré dans les circuits d’adoption légaux. Tous les acteurs de la profession sont satisfaits des principes qui érigent ce projet de loi et de l’implication des autorités dans l’élaboration de ce texte. Ceci témoigne de leur forte volonté à apporter le soutien à cette "industrie" du capital investissement, qui joue un rôle déterminant dans le développement aux entreprises, en particulier face aux nouvelles donnes de l’économie mondiale. Pouvez-nous parler brièvement de l’esprit de ce projet de loi et où en est-on dans les circuits d’adoption ? Dans ses grandes lignes, le projet de loi précise que pour exercer, une SCR doit obtenir un agrément d’exercice du Ministère des Finances, qu’elle sera sous contrôle du CDVM, et qu’une fois constituée, une SCR devrait investir 50 % de ses fonds propres dans des PME, non cotées et non détenues à plus de 40 % par des entreprises n’ayant pas la qualité de PME. Il y a eu, toutefois, une divergence de 160943364.doc Page 1 sur 5 point de vue portant sur la définition de la PME que sont destinées à financer les sociétés de capital risque. En effet, les autorités souhaitent lier la définition de la PME à celle figurant dans la Charte, puisqu’elle vise à apporter un cadre global d’accompagnement et de financement aux PME telles que définies dans la Charte, ce qui est tout à fait compréhensible et louable. Alors que les professionnels du capital investissement, pour leur part, souhaitent une définition moins restrictive de la PME dans la loi cadre et en phase avec les objectifs de rendement et le niveau de risque acceptable pour la première génération de fonds d’investissement en place. Il est, en effet, fondamental, que les premiers Fonds constitués puissent investir dans des entreprises à risque modéré, afin de dégager de bonnes performances, condition nécessaire pour gagner la confiance des investisseurs. Et pour cause, le marché du capital investissement ne saurait être développé sans la levée par les SCR de fonds auprès d’institutionnels nationaux et internationaux. Afin que ces derniers affectent dans le cadre de leur stratégie d’allocation d’actifs une part de plus en plus importante aux SCR marocaines, il faut qu’ils soient convaincus des potentialités de rendement des SCR et des incitations fiscales afférentes à cette classe d’actifs eu égard au niveau de risque élevé. Autrement dit, l’élaboration de ce projet de loi est essentielle pour aller dans le bon sens, mais à condition qu’elle reste plus ouverte sur la définition de l’entreprise éligible. Cela permettra aux SCR de bâtir des stratégies d’investissement en termes de type d’entreprises, plus en phase avec leurs critères d’investissement et de rendement tels qu’exigés par les souscripteurs de leurs Fonds sous gestion, en particulier lors de cette phase de réel développement du métier. Pouvez-nous préciser l’objectif d’une SCR pour mieux comprendre les objectifs recherchés par la profession au travers de ce projet de loi ? Le rôle des SCR n’est pas de soutenir des entreprises, mais de les financer dans une optique de rentabilité de leurs investissements. Autrement dit, avant d’être attiré par des incitations fiscales présentes dans un projet de loi, une SCR recherche avant tout des entreprises présentant un bon couple risque rentabilité. C’est pourquoi, il est important d’avoir une vision plus large sur le périmètre d’intervention des SCR et de laisser le marché décider des stratégies d’investissement. L’analyse des portefeuilles des SCR montre clairement un positionnement des différents acteurs sur des tickets d’investissement unitaires de Mad 15 à 20 Millions, privilégiant des entreprises de taille moyenne, présentant une situation financière assez solide plutôt que celles de petite taille comme le seraient les PME visées dans la Charte. Le capital investissement, en tant que nouveau métier, doit se développer par étapes et ne peut démarrer en allant vers les segments les plus risqués sous peine de manquer de fonds levés auprès des institutionnels privés qui s’en détourneraient. En revanche, le soutien aux entreprises de petite taille présentant des couples risque rentabilité plus élevés, peut venir soit par le biais d’aides publiques ou de fonds d’investissements publics gérés par des SCR privées ou publiques. Justement, pouvez-vous nous parler de l’évolution du Capital Investissement ces dernières années ? Il y a eu deux phases dans le développement de notre métier. La première, de 1993 à 1999, a été caractérisée par le démarrage du capital risque au Maroc avec l’arrivée notamment de Moussahama, Asmaa Invest et quelques autres acteurs. Elle a été assez timide en termes d’activité, compte tenu du fait que dans une économie 160943364.doc Page 2 sur 5 jusqu’alors protégée, le développement et le renforcement de la compétitivité qui sont catalyseurs d’investissements, ne faisaient pas partie des priorités des entreprises. De plus, le réflexe pour un chef d’entreprise d’ouvrir le capital pour se développer n’était pas naturel, sans oublier le manque de visibilité sur les schémas de sortie pour les investisseurs. De ce fait, les conditions de développement des métiers de fonds propres n’étaient pas encore réunies. Les capital-risqueurs n’avaient en conséquence pas beaucoup d’entreprises éligibles à leurs investissements. Les seuls investissements réalisées ont concerné plutôt des opérations de capital risque (création) ou de capital retournement (visant le redressement d’entreprises en difficultés). Les entreprises solides, saines et présentant de bons potentiels, avaient plutôt recours à l’endettement quitte, au passage, à utiliser des leviers importants. Durant cette phase (1993-1999), les volumes investis ont atteint en cumul un montant relativement modeste de MAD 200Millions. En revanche, lors de la deuxième phase de développement de notre activité, l’économie marocaine a évolué d’une économie protégée favorisant l’endettement vers une économie ouverte renforçant le poids des fonds propres dans la stratégie financière des entreprises. Lors de cette phase de développement, les SCR se sont surtout attachées à sensibiliser les entreprises aux enjeux et apports du capital investissement, à positionner davantage notre intervention dans le cadre d’opérations de capital développement et transmission que de capital risque ou de retournement. Les volumes investis lors de la période 1999-2003 s’élèvent à MAD 700 Millions avec une tendance fortement haussière durant les années 2002 et 2003. Quels sont les facteurs de cette dynamique ? Les métiers de fonds propres sont de plus en plus intégrés parmi les moyens de financement à long terme dans la stratégie financière de l’entreprise qui évolue dans une économie en phase d’ouverture et qui se trouve dans l’obligation de disposer des fonds propres nécessaires pour investir en outils de production, en ressources humaines, en politique marketing et commerciale ; autant de préalables requis pour améliorer sa compétitivité par rapport aux concurrents devenus internationaux. D’autant qu’en parallèle, le recours à l’endettement bancaire est de plus en plus réglementé, se basant sur des ratios prudentiels et de mesure du risque. D’autre part, au-delà de l’apport des fonds propres, un capital investisseur confère également un caractère institutionnel à l’entreprise et un appui réel à son développement. Les entrepreneurs sont plus sensibles aujourd’hui à l’intérêt d’institutionnaliser leur tour de table, pouvant leur uploads/Finance/ capital-risque-tahiri 1 .pdf
Documents similaires
-
22
-
0
-
0
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise- Détails
- Publié le Apv 28, 2021
- Catégorie Business / Finance
- Langue French
- Taille du fichier 0.1098MB