1 LES DIFFICULTES DE COHABITATION ENTRE CONTRAINTES LEGALES ET ENTREPRENEURIAT

1 LES DIFFICULTES DE COHABITATION ENTRE CONTRAINTES LEGALES ET ENTREPRENEURIAT : L’EXPERIENCE DE LA BELGIQUE AVEC SA « LOI PINXTEN » COULIBALY Aly D. Université Catholique de Louvain Institut d’Administration et de Gestion (IAG) Centre Européen de la PME 1, Place des Doyens, B-1348 Louvain-La-Neuve BELGIQUE Tél: 0032/ (0) 10-47-84-27 e-mail: coulibaly@poge.ucl.ac.be ABSTRACT Le manque de connaissance de base en gestion est souvent repris dans la littérature comme première de faillite des PME. Ainsi, depuis 1998, une loi belge exige la preuve d’un minimum de connaissances en gestion avant tout acte de création d’entreprise. Après une revue de la littérature sur les facteurs d’échec, cet article fait le bilan sur cette loi et une analyse critique du concept d’erreurs de gestion. Mots clés : Faillite, PME, entrepreneuriat, connaissances en gestion, Loi Pinxten, lourdeurs administratives. 2 INTRODUCTION Après l’avoir considérée comme institution menacée, les économistes, depuis quelques années, ont mis en exergue les mérites, les vertus de la petite et moyenne entreprise (P.M.E.). Tantôt considérées comme facteur de renouveau et de (re)dynamisation du tissu économique ou instrument de création d’emplois, tantôt comme vecteur de proximité sociale et humaine, les PME sont présentes dans tous les discours. Malgré ces atouts, les P.M.E. restent très vulnérables 1, surtout lorsqu’elles sont jeunes (moins de 5 ans) et /ou évoluent dans certains secteurs comme ceux du bâtiment, de la construction, de l’horeca... La faillite dont elles sont souvent victimes devient un mot qui fait peur et tous les entrepreneurs la redoutent. Dans les sociétés de culture latine où les entrepreneurs sont souvent pris dans le piège des problèmes micro et macro-économiques, la faillite demeure la sanction finale qui porte en son sein la double dimension de l’échec personnel et de l’opprobre sociale. Ainsi, la faillite apparaît comme un jeu de quille où les boules du destin renversent les entreprises les plus fragiles, les moins bien gérées, les plus inadaptées au marché. Par conséquent, les phénomènes d’entrée et de sortie d’entreprises sur un marché font partie des éléments clés de toute étude sur la dynamique ou la démographie industrielle. De sorte que ce que nous appelons l’économie d’un pays, d’une région, n’est en fait rien d’autre que le résultat global, à un moment donné, de ce processus de création, d’agencement et d’usure réciproque des entreprises. Cependant, la faillite n’est pas le domaine exclusif des petites et moyennes entreprises jeunes et sous-capitalisées. Elle affecte aussi les entreprises commerciales, financières ou industrielles de plus grande taille, cotées ou non en bourse. Elle reste, selon certains auteurs, une donnée essentielle des économies de marché dans la mesure où dans les économies de commandement, l’interventionnisme de l’Etat contribue à atténuer considérablement l’ampleur du désastre économique, financier et social qu’elle génère. L’enthousiasme relatif des praticiens et des scientifiques et leur manque d’intérêt pour la thématique de la faillite est signalé par ALTMAN (1971), repris par MICHAUX (1978), en ces termes « les faillites ont reçu peu d’attention de la part des milieux d’affaires et des théoriciens. Leurs préoccupations ont été orientées essentiellement vers l’étude des conditions de succès des entreprises. Le processus de faillite est envisagé d’habitude par les hommes d’affaires comme une éventualité à n’envisager qu’après toute alternative et dès lors laissée aux bons soins des juristes, par les économistes comme un problème technique d’apport théorique limité, par les autorités comme un sujet concernant avant tout les créanciers et les propriétaires et par les sociologues comme un vice inévitable et nécessaire du système capitaliste » (p.1). 1-Papin R. (2001), Stratégie pour la création d'entreprise, Dunod, Paris. 3 En période de récession ou de ralentissement économique et face à l’augmentation constante du nombre de faillites des PME, les faillites (re)deviennent des champs de recherche privilégiés par les scientifiques et des thèmes de discours pour les acteurs politiques. Ces derniers, devenus créatifs, multiplient les initiatives publiques (création de services d’aides ou d’accompagnement des PME, simplification des procédures administratives, financement d’études sur les causes d’échec…), et parfois, par leurs décisions, accroissent les rigidités et les risques de dérapage. De plus, lorsqu’ils consultent la littérature scientifique sur les faillites, ils constatent que la mauvaise gestion et l’insuffi sance de connaissances en gestion sont souvent citées comme causes fréquentes des difficultés financières des entreprises. Par conséquent, la référence à de telles sources devient un élément de motivation et de légitimation des décisions politiques. C’est donc dans ce contexte qu’une loi -programme a vu le jour en Belgique en 1998 sous l’appellation courante de « Loi Pinxten » du nom du ministre belge en charge des l’agriculture et des PME. Les nobles objectifs assignés à cette loi, étaient, entre autres, la simplification des procédures administratives, l’instauration de tests de contrôle des connaissances de base en gestion comme préalable à tout acte de création d’entreprise afin de réduire le taux de faillite. L’objectif de ce travail est d’apporter un témoignage et de voir concrètement si, quatre ans après la mise en œuvre de cette loi, si le taux de faillite a diminué ou pas et si les jeunes entrepreneurs bénéficient dans les faits de procédures administratives simplifiées. Pour atteindre cet objectif, nous nous appuierons sur la double méthodologie d’études de cas et d’analyse statistique sommaire. Dès lors, nous structurerons notre présentation de la façon suivante. La première section fera la synthèse de la littérature sur les causes de faillite des entreprises. L’essentiel de la « Loi Pinxten » sera présenté dans la deuxième section. Dans la troisième section, nous ferons le point sur l’état du nombre de faillites en Belgique et sur l’expérience de trois entrepreneurs qui viennent de vivre, selon eux, les paradoxes et les aberrations » de cette loi. A la lumière de tous ces éléments, la dernière section se focalisera sur l’analyse critique du concept d’erreurs de gestion à l’origine de l’inspiration politique. 1. LES FONDEMENTS THEORIQUES DE LA « LOI PINXTEN » : LES ERREURS DE GESTION COMME CAUSES PRINCIPALES DE FAILLITE DES PME De tout temps, les problèmes de défaillance ont suscité, avec des intensités variables, l’intérêt tant des économistes que des juristes car ils constituent un enjeu fondamental de société. Mais ce n’est qu’avec la crise des années 1930 et les premiers travaux d’auteurs comme FITZPATRICK (1932) que la problématique de la faillite est devenue un champ d’investigation, de recherche à part entière. Nous ne referons pas l’histoire de toutes ces recherches, mais nous nous limiterons à leur synthèse par champ disciplinaire. Cette + Statistiques sur les faillites établies en 2003 par l'Institut National de la Statistique. Sur l’ensemble des 7222 faillites belges enregistrées en 2002, 99,6% étaient des PME. Parmi celles-ci, 74,15% avaient moins de 10 ans. 4 approche sera préférée à la démarche plus traditionnelle d’étude par taille, par secteur, par âge car elle se prête mieux à certaines présentations théoriques (GUILHOT, 2000). Cela ne signifie pas pour autant que les facteurs précités soient sans importance pour la compréhension du phénomène. Il est évident que les problèmes ne se posent pas de la même manière dans une PME que dans une grande entreprise. C’e st ainsi que nous examinerons successivement, en complétant les travaux de GUILHOT (2000) notamment par l’ajout de références plus récentes, les approches économiques (rôle de la conjoncture, structure des marchés, de la régulation, de la politique monétai re…), financières (poids de l’endettement, de la rentabilité…), stratégiques (analyse du positionnement concurrentiel et de la chaîne de valeur…), organisationnelles (inadaptation des structures, environnement socioculturel…) et managériales (personnalité du dirigeant, qualité du management…) de la défaillance. Les auteurs ayant contribué à faire avancer ces différents champs de recherche et les principaux résultats auxquels ils sont arrivés sont résumés dans les tableaux 1 et 2. 5 Tableau 1 : Synthèse des approches économiques et financières de la défaillance (adaptée de GUILHOT, 2000) APPROCHES Economiques Financières Problématique Quels sont les facteurs qui affectent Quels sont les facteurs relatifs à la disparition des entreprises l'existence des entreprises? grandes ou petites? Modèles de référence * Théorie des cycles, des crises et de l'équilibre général * Modèles théoriques de l'équilibre financier (cadre théorique) * Modèle économique classique de l'entreprise marginale * Modèles empiriques à partir des * Nouvelles théories de la firme données comptables et financières * Les faillites sont liées à l'évolution de l'activité économique et au phénomène des crises. * Les causes de la fa illite sont multi- * Un contexte économique de croissance devrait dimensionnelles mais ont leur traduction dans les favoriser la création et le développement des entreprises documents financiers Hypothèses * La faillite permet de réguler le nombre d'entreprises sur le marché * Il importe plus de prévoir les faillites * La concentration s'effectue au détriment des que d'en rechercher les causes entreprises marginales qui ne peuvent couvrir leurs coûts ou réaliser les investissements * Il existe un lien entre taux d'endettement, rentabilité et défaillance souhaitables. * Etablissement de monographies Méthodologie * Modèles théoriques * Modèles théoriques (support d’analyse) * Tests économétriques * Traitement des données compta- bles et financières soumises à des analyses univariées ou multivariées Modigliani et Miller (1958, 1963), Jensen et Meckling (1976), Beaver (1966), uploads/Finance/ coulibaly-blazy-def-ail-lances-causes-d.pdf

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  • Publié le Mar 19, 2021
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