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Déjeuner dans un restaurant d'insertion Que faire ? : articles - Citoyennetés Un écrin raffiné pour retrouver le plaisir de travailler : à Montpellier, depuis un an, La table de Cana donne un coup de pouce à des personnes éloignées de l’emploi… tout en ravissant nos papilles. « Restaurant d’insertion » : on pourrait s’attendre à un snack-bar amélioré, à une ambiance formica dépouillée et à un personnel mal réveillé qu’on rudoie pour travailler. On pourrait, mais on risque d’être déçus. Non, ce n’est pas par bonne conscience solidaire qu’on va s’installer à La table de Cana, dans la ZAC de Tournezy à l’entrée de Montpellier. C’est par pur plaisir. De prendre le soleil en plein mois de janvier sur les chaises en rotin de la terrasse-véranda, contournant au passage des tonneaux, supplantés de courges aux formes ubuesques ou de bons crus languedociens. De découper le copieux gratin de seiche et de fruits de mer, ou le fondant chocolat- orange sauce gingembre, avec des couverts aux ondulations design. Le tout dans une ambiance rouge et bois sombre qui mêle art contemporain et clins d’oeils orientaux. Venus sur les conseils d’amis, Daniel et Marie-Noëlle sont ravis du raffinement comme du rapport qualité-prix (plat-dessert à 12€). Mais évidemment, l’essentiel est ailleurs. Il est sans doute dans la fraîcheur. Celle des aliments du marché, certes, mais surtout celle qui brille dans les yeux des serveurs et des cuisiniers. Impulsion hôtelière Maître d’hôtel en chemisette violette, Alain Fakih évolue dans la salle aux 72 couverts comme un poisson dans l’eau, distribuant le speed aux serveurs et les boutades aux clients interloqués : « Le plat est garanti 2 ans », « Vous voulez manger, encore ! » « ah, le déca, c’était pour aujourd’hui ? ». Sans emploi pendant 6 ans, « j’envoyais des CV en quantité, mais j’avais plus de 50 ans et j’étais surqualifié : personne ne voulait me prendre » raconte Alain. Grand et noir, Guillaume, lui, était victime de racisme : il jongle aujourd’hui entre le bar et la logistique des plateaux-repas. Sandrine, après avoir élevé ses deux enfants, s’est retrouvée au RMI. Elle avait bien commencé une formation hôtelière à l’INFA, l’école attenante au restaurant, mais trop peu rémunérée, elle voulait arrêter. Elle a fini par entrer au restaurant comme serveuse, tout en passant son CAP service. Geneviève, en revanche, était déjà qualifiée, mais sans expérience pendant ses 2 ans de maternité : alors qu’on ne lui proposait que des postes de plonge, la Table de Cana l’a embauchée comme cuisinière. Tous sont en CDD, renouvelables sur 2 ans maximum (sauf Alain, qui restera en poste d’encadrant), une façon de leur donner l’impulsion nécessaire pour retrouver du travail. Sortir des « quartiers » « Nous avons l’agrément pour 6 temps pleins destinés à un public qui risque l’exclusion : RMIste, chômeur de plus d’un an, ou bénéficiaire de l’allocation de parent isolé. Les premiers choisis sont qVers des « plus » écolo Non content de former des personnes exclues du marché de l’emploi, Gilles Solis, le gérant de la Table de Cana à Montpellier, tient au strict « fait maison » de sa cuisine traditionnelle : « j’achète tout au marché le matin même, nous faisons nos desserts nous-mêmes, nous fumons le saumon et le magret, nous faisons les rillettes, et nous n’ouvrons pas des sachets de salade… ». Le bio ? « Difficile à mettre en place alors qu’il n’y a pas de marché bio tous les jours... mais en traiteur, je réfléchis à une gamme issue du commerce équitable. » Le truc qui l’énerve ? « L’emballage des plateaux-repas, tout en plastique jetable, grrr ! Je veux tout en biodégradable, j’ai déjà trouvé des assiettes et des couverts en bois, mais je réfléchis à un mode de récupération ou de recyclage via La feuille d’érable, une entreprise solidaire qui recycle les déchets d’emballages. »uand même assez proches de l’emploi », tempère Gilles Solis, le gérant. Au départ, à 33 ans, l’émotive Sandrine pouvait tomber en larmes en affrontant le client. Aujourd’hui, « elle est prête » assure Gilles. « J’ai retrouvé confiance en moi, ça donne de la force » confirme l’intéressée. Les clefs de ce plaisir - visible - de retravailler, c’est Gilles Solis qui les a façonnées « par un concours de circonstances ». Replic, un organisme de structures solidaires, recherchait un chef de projet pour monter un tel restaurant du réseau « Table de Cana » à « la Mosson », un quartier difficile de Montpellier. Gilles se rend à l’entretien mais refuse d’y participer : « d’une part, je me suis aperçu qu’il s’agissait du projet sur lequel Replic m’avait déjà demandé conseil, et surtout, pour moi, un projet d’insertion ne doit pas se faire dans un quartier défavorisé ! Il faut les sortir, leur donner un milieu de travail avec du cachet… » Gilles propose alors de récupérer le bail du restaurant d’application de l’INFA, l’école hôtelière où il travaille, en contrepartie de la possibilité d’y faire des cours de cuisine l’après-midi. Situé à proximité de nombreuses entreprises, d’accès facile, le lieu est idéal. En août 2006, Gilles constitue une Société coopérative d’intérêt collectif (SCIC), démissionne et convainc sept financeurs en 5 mois. « On a reçu les chaises le jour-même où on a ouvert ! » s’amuse-t-il. C’était - hasard ?- il y a tout juste un an, le 22 janvier 2007. « Depuis, c’est toujours complet ». Sans compter les plateaux-repas du midi qui prennent de l’ampleur, et l’activité traiteur qui prend même le pas sur le restaurant. « Les entreprises jouent le jeu ». Fatima Bellaredj, la déléguée régionale des Sociétés coopérative (SCOP) qui a accompagné la création, s’enthousiasme : « Pour nos événements, nous passons toujours par eux. Les repas et la qualité de service sont excellents, ils allient le professionnalisme à de très bonnes conditions de travail des salariés. On ne peut qu’être avec eux à 100 % ». Raquel Hadida 23.01.2008 Copyright photos: La table de Cana La Table de Cana 515, Rue Industrie 34070 Montpellier 04 67 60 45 81 Ouvert en semaine le midi et le soir Mais aussi, depuis 25 ans, les restaurants du réseau « la Table de Cana » se sont installés à Paris Gennevilliers, à Paris Antony et à Marseille, ou encore Presta à Lyon, Cuisines du Monde à Angoulême et TCRP à Fontenay. http://www.tabledecana.com uploads/Finance/ de-jeuner-dans-un-restaurant-d-x27-insertion-pdf.pdf

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  • Publié le Dec 24, 2022
  • Catégorie Business / Finance
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