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Copyright © Cahiers de recherche sociologique, 1990 Ce document est protégé par la loi sur le droit d’auteur. L’utilisation des services d’Érudit (y compris la reproduction) est assujettie à sa politique d’utilisation que vous pouvez consulter en ligne. https://apropos.erudit.org/fr/usagers/politique-dutilisation/ Cet article est diffusé et préservé par Érudit. Érudit est un consortium interuniversitaire sans but lucratif composé de l’Université de Montréal, l’Université Laval et l’Université du Québec à Montréal. Il a pour mission la promotion et la valorisation de la recherche. https://www.erudit.org/fr/ Document généré le 1 juin 2021 08:25 Cahiers de recherche sociologique Les entreprises publiques : éléments d’analyse et de réflexion Carolle Simard Les États-Unis en question Numéro 15, automne 1990 URI : https://id.erudit.org/iderudit/1002116ar DOI : https://doi.org/10.7202/1002116ar Aller au sommaire du numéro Éditeur(s) Département de sociologie - Université du Québec à Montréal ISSN 0831-1048 (imprimé) 1923-5771 (numérique) Découvrir la revue Citer cet article Simard, C. (1990). Les entreprises publiques : éléments d’analyse et de réflexion. Cahiers de recherche sociologique,(15), 107–126. https://doi.org/10.7202/1002116ar Résumé de l'article Dans un système politique pluraliste basé sur la propriété privée et le libre-échange, comment rendre compte des entreprises publiques, organismes dont les fonctions sont certes économiques mais aussi sociales et politiques? De quels types d’outil disposons-nous? Ce texte veut répondre à ces deux questions. Dans une première partie, le point est fait sur l’histoire des entreprises publiques, sur leurs raisons d’être. Dans une seconde partie, les changements intervenus dans le secteur public et au sein de l’État, à la suite de la création et du développement des entreprises publiques, sont revus. Les cas français et canadien illustrent cette réflexion. Cahiers de recherche sociologique, no 15, automne 1990 Les entreprises publiques: éléments dfanalyse et de réflexion Carolle SMARD Les raisons d'existence des entreprises publiques sont multiples1. Aux motifs d'ordre économique et industriel généralement admis se juxtaposent des facteurs idéologiques, politiques, historiques. Selon le pays^ et selon le moment d'implantation de ces enclaves économiques dans l'État, les explications, généralement ponctuelles, varient. Souvent limitées à quelques cas particuliers, elles ne permettent guère une compréhension globale du rôle de ces entreprises. En réalité, c'est l'intervention grandissante de l'État dans le secteur économique, commercial et industriel qui est en cause. Cette intervention a pris différentes formes, au gré des circonstances selon les États. Dans certains pays, on a privilégié les entreprises publiques, ailleurs on a préféré la réglementation. En deçà des différences sur l'importance des entreprises publiques, la notion même d'entreprise publique demeure problématique. Le recours aux entreprises publiques est une réponse juridique et institutionnelle à des problèmes particuliers. Ces problèmes sont multidimen- sionnels. En Europe, par exemple, et notamment en France, la place des entreprises publiques est très différente d'un secteur d'activité à un autre. Dans le cas de l'industrie charbonnière, de la production et de la distribution d'électricité et de gaz de même que dans le domaine des télécommunications, les entreprises publiques ont le quasi-monopole. Elles occupent une place déjà moins importante dans la construction aéronautique, dans la fabrication d'armement, dans les transports et dans la construction immobilière. Enfin, leur importance est secondaire dans le secteur pétrolier, la construction automobile, la chimie et les services2. Au Canada, l'hétérogénéité est plus grande encore. Certaines entreprises existent au plan national, d'autres sont exclusivement de juridiction provinciale. 1 La bibliographie présente les multiples perspectives à partir desquelles les auteurs ont traité du problème des entreprises publiques. 2 En ce qui concerne la France, nos données proviennent principalement de M.-F. L'Hériteau, Pourquoi des entreprises publiques?', Paris, PUF, Dossiers Thémis, 1972 et de B. Chenot, Les entreprises nationalisées, Paris, PUF, 1963. 108 Les États-Unis en question De surcroît, c'est le secteur de l'économie canadienne qui a progressé le plus rapidement depuis le milieu des années 1960, alors que la quasi-totalité des entreprises publiques ne sont pas monopolistiques. Plus de 50% de ces entreprises se retrouvent dans les services publics, le secteur industriel, l'exploration et le développement. Elles occupent, en outre, une portion significative des activités liées au logement, à la vente des boissons alcoolisées, à la finance et au développement industriel. Leur importance relative varie d'un secteur à l'autre, mais elle est plus considérable dans le domaine des transports, de l'énergie et des communications. Soumises à un régime juridique variable, les entreprises publiques canadiennes ne sont pas administrées selon un modèle unique. En dépit des contrôles, l'administration de ces entreprises est extrêmement variée, et il devient de plus en plus difficile d'en connaître le nombre exact. En un sens, cette hétérogénéité confère aux entreprises publiques un caractère insaisissable. En fait, la plupart des théories qui essaient d'en rendre compte ne voient que l'aspect économique de la question et en négligent les aspects historiques, sociaux et politiques3. Comme si l'entreprise publique était donnée une fois pour toutes et que sa place dans le fonctionnement de l'économie ne pouvait être changée. Pourtant, l'histoire des pays à forte nationalisation montre bien qu'il existe une gamme étendue de possibilités et que le recours à l'entreprise publique relève parfois, et même souvent, de considérations extra-économiques. Or, à la question: pourquoi des entreprises publiques?, on ne retient en général que des explications fondées sur l'économie. Mais n'est-il pas contradictoire de vouloir saisir les entreprises publiques d'abord et avant tout à partir de facteurs économiques alors qu'on admet en général que ce sont des considérations sociales et politiques qui sous-tendent très souvent l'histoire et le fonctionnement d'entreprises d'État pourtant orientées vers des activités commerciales et industrielles?. Dans un système politique pluraliste, basé sur la propriété privée et le libre-échange, comment rendre compte des entreprises publiques, organes dont les fonctions sont certes économiques, mais aussi sociales et politiques? De quels types d'outils disposons-nous pour ce faire? Nous tenterons ici de répondre à ces deux questions. Après avoir fait le point sur l'histoire des entreprises publiques et sur leurs raisons d'être, nous essaierons de mieux saisir les différents changements qui se sont produits dans le secteur public d'abord, au sein de l'État ensuite, une fois créées les entreprises publiques. Les cas français et canadien serviront d'illustration. Fort limités et très différents, ces exemples permettront de montrer que, au- delà des données économiques, une multitude de facteurs interviennent dans le développement des entreprises publiques. En elles, il y a interpénétration du politique et de l'économique, inséparabilité du public et du privé. Tout en affectant la vie économique d'un pays, les entreprises publiques, quelle que soit leur 3 II y a bien sûr, quelques exceptions. Pour le Canada, voir notamment: J. Niosi, La bourgeoisie canadienne, Montréal, Boréal, 1980 et P. Faucher, L'entreprise publique comme instrument de politique économique^ note de recherche no 2, Département de science politique, Université de Montréal, 1981. Les entreprises publiques: éléments d'analyse et de réflexion 109 importance qualitative et quantitative, occupent une place non négligeable dans la vie politique et sociale. 1 Les entreprises publiques dans l'histoire Les administrations sont structurées par l'histoire. Chaque administration nationale a sa spécificité, l'anglaise ne ressemble pas à la française qui n'a guère de points communs avec la canadienne. Cette spécificité tient à un ensemble de déterminations beaucoup plus précises, plus concrètes que celles du mode de production. Ce qui est vrai pour l'administration prise globalement l'est encore plus pour les entreprises publiques. Formes d'intervention de l'État dans l'économie, elles sont moins marquées par la nature du mode de production que par les conditions dans lesquelles celui-ci s'est développé. Leur physionomie dépend bien évidemment des rapports économiques: par exemple, la création des entreprises publiques est une conséquence de la dévalorisation du capital. Mais cette explication ne suffit pas. Dans un pays donné, le choix de créer des entreprises publiques dépend de nombreux facteurs dont les plus importants tiennent moins aux contradictions économiques qu'à des options idéologiques et surtout à la place de l'État dans la société. Au-delà de leur grande différence, les cas français et canadiens le montrent tous deux. Les nationalisations de la Libération en France en sont sans doute une des meilleures illustrations. L'ambiance idéologique de l'époque leur est favorable. Même les catholiques, s'appuyant sur l'encyclique Quadragesima anno de 1931, les réclament. Au-delà de prises de positions partisanes, la nationalisation vise à limiter les effets jugés préjudiciables du droit de propriété. Pourtant, parmi les idéologies sur lesquelles s'appuient les nationalisations, celle qui domine est de type anarchiste. Proudhon a été un des premiers à préconiser ce type de solution pour mettre fin au règne de la propriété privée. Le syndicalisme révolutionnaire, hégémonique au sein de la classe ouvrière française, fera des nationalisations une de ses revendications. Dès 1920, lors de son congrès de Lyon, la CGT réclame une "nationalisation industrialisée": "Constatant l'impuissance des organisations politiques et le caractère même du pouvoir, nous ne songeons pas à augmenter les attributions de l'État, à les renforcer, ni surtout au système qui soumettrait les industries essentielles à un fonctionnarisme périmé avec son irresponsabilité et ses tares constitutives et réduirait les forces productives au sort d'un monopole fiscal. Par la nationalisation, nous entendons confier la propriété nationale aux intéressés eux-mêmes, producteurs et consommateurs associés4". C'est clair, la nationalisation ne doit pas être assimilée à l'étatisation. Si elle uploads/Finance/ delion-la-notion-d-x27-entreprise-publique.pdf

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  • Publié le Nov 16, 2021
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