Présentation synthétique n°1 Lejeune, Guillaume. « Les chauffeurs de taxi face

Présentation synthétique n°1 Lejeune, Guillaume. « Les chauffeurs de taxi face à Uber. Une mise à l’épreuve économique et politique », Politix, vol. 122, no. 2, 2018, pp. 107-130. Raphaël Martin (22105009) • Les chauffeurs de taxi sont une profession relativement peu étudiée, inclus dans l’analyse de secteurs comme les “indépendants”, les professions “corporatistes”, traditionnelle- ment associé à la politique de “droite”/mobilisations “conservatrices” →les rapprochent des dominants en les associant aux intérêts du patronat. • C’est un positionnement problématique: 1. pas antinomique de considérer à la fois la défense d’un ordre établi ⫽une position subalterne/indépendante 2. empiriquement, rien ne permet de les assimiler à une élite sociale/pro ou à des “privilégiés” car “petitesse” du statut social/diversité interne ⇒il faut les considé- rer à travers les carrières/“petits déplacements sociaux” en montrant qu’ils sont tournés vers une amélioration de leurs niveaux de vie par le capital économique • Artisanat →licence professionnelle. • Une situation particulière de confrontation à une concurrence nouvelle ayant déstructuré les modalités classiques d’évolution professionnelle des drivers et leur positionnement social. • Les chauffeurs de taxi, inclus dans les indépendants, les renvoient aux idéologies conser- vatrices/“refus de la gauche”. Limites du rapprochement? • Rapport non-salariés/État: centralité du travail comme terreau de leur repré. pol. si- tuées à droite ⫽ambivalences quand leur métier est menacé par une vision néolibérale de mise en concurrence entre travailleurs de même secteur d’activité. • L’expansion de la concurrence remet en cause le “mandat” qu’ils avaient →veulent plus d’État pour arbitrer/réguler les relations pro ≠leur condition de non-salarié implique une demande de moins d’État en tant qu’agent de redistribution de richesses. • Position ambiguë d’adhésion au capitalisme ≠promotion du libéralisme économique → complexifie l’analyse du rapport des indépendants à l’État et à dépasser l’idée d’un rejet unilatéral des institutions. L’indépendance revendiquée se mêle à une étroite dépendance à l’État (=garant de la régulation pro.), à rebours des schémas opposant service public ≠services privés. • L’adhésion politique des chauffeurs n’est jamais donnée d’avance: volonté d’indépendance (droitisation par l’individualisme) ⫽caractère corporatif du métier donnant des formes de solidarité collective. • Objectif: Comment une profession de non-salariés diverse fait face à l’arrivée d’une concurrence organisée? Bousculement des aspirations sociales/pro par la remise en cause 1 des frontières de l’activité ; quelles représentations politisées associées? ; comment les chauffeurs composent avec la situation pro qui est devenue la leur? • Plan 1. morphologie du groupe pro, ses logiques économiques, pour déterminer les facteurs de leurs mobilisations contre Uber →union des chauffeurs derrière un ennemi commun malgré la segmentation du métier. 2. les traits saillants de leur politisation: polarisation autour de l’ubérisation entre rejet/composition avec le libéralisme économique. La question de leur adaptation aux normes de service nouvelle divise les chauffeurs. • Méthode: enquête ethnographique: 100ène d’entretiens semi-directifs ; observations sur un lieu d’attente près d’un aéroport entre 2013–2016 ; accompagnement de plusieurs chauffeurs à bord. Faire bloc face à la concurrence : l’exposition au marché comme terreau d’une réaction unifiée face à Uber • Activité de reconversion, segmenté en différentes positions statutaires. Soumis à des contraintes économiques fortes, qui alimentent leur peur du déclassement, s’exprimant par leurs rapports négatifs à l’État. une activité de reconversion qui porte l’espoir d’une stabilisation dans le monde du travail • Trajectoires pro des chauffeurs: principalement d’une reconversion, issue d’une grande diversité de profils. Attachés à une stabilité sur le marché du travail, le métier de chauffeur est vu comme un “refuge en temps de crise” ⇒l’arrivée d’Uber a été mal perçue par ces gens, “esquintés du salariat”, déjà exposés aux mécanismes du marché. • Entrée dans le métier à 2 stades de la vie pro: 40–50 ans, ayant perdu un emploi en CDI ≠-30 ans, enchaînement de “petits boulots” en CDD/intérim. • Yessine, ~ 30 ans, bac ES, intérim ≠Nicolas, 45 ans, sarkoziste, ancien gendarme, reste en retrait des luttes ⇒travail investie par des dispositions/opinions diverses, pas d’unité idéologique comme on le prête souvent aux indépendants (=surestimation de l’ancrage poujadiste). contraintes économiques et contexte professionnel de l’engagement face à Uber • Pluralité de trajectoire →positions différentes. • 4 statuts de chauffeurs: 1. artisans: titulaire de la licence pro. 2. non-titulaires de la licence professionnelle: – locataires →payent l’usage d’un taxi auprès d’une entreprise qui détient une flotte de véhicules. 2 – actionnaires-coopérateurs →organisés en coop’, détiennent une part de l’entreprise titulaire. – salariés proches d’un “salariat libéral” →payés 25–30% du C.A quotidien, souvent à l’essai dans une compagnie. • Artisans comme locataires, ils sont soumis à des contraintes économiques lourdes, ils voient le paiement de leur crédit comme une “redevance quotidienne”, ils démarrent leur journée avec un montant mini à atteindre avant se toucher de l’argent “pour eux”. De plus en plus difficiles de remplir cet objectif quotidien depuis l’arrivée des VTC. “Une part non négligeable de chauffeurs Uber, impossible à déterminer préci- sément, a eu une expérience de taxi, le plus souvent en location”. • Le corporatisme des chauffeurs de taxis à l’arrivée d’Uber ne tient pas à une défense rigide d’acquis, mais fonctionne comme “contrepoint à des concessions/sujétions accep- tées”. • Certains effets de position ont contribué à redoubler l’intensité de l’engagement en quit- tant la logique de négociation/syndicats pour une manière “directe” (Taxis Information) →2 profils: jeunes artisans endettés ; vieux locataires n’ayant pas réussi à accéder à la licence après plusieurs années (Christophe, quitte l’univers du taxi par crainte, se reconvertit dans l’immobilier). • Plus que la perte de revenu, il se mobilise dû à l’entretien d’une crainte. La licence perd de sa valeur et, plus qu’une diminution de revenu (compensable par plus d’heures de travail), c’est la diminution de valeur du “patrimoine” professionnel qui est en jeu. des «charges» qui renforcent le sentiment d’être «en bas» • La logique économique qui anime ces chauffeurs n’est pas qu’un rapport aux contraintes, c’est aussi l’espérance d’une mobilité professionnelle pour l’artisanat. L’accumulation patrimoniale ⫽“petit déplacement social”. Ils deviennent alors des “petits-moyens”, achète un bien immobilier (pavillon). • Leitmotiv qui leur permet d’enquiller 11h/jour →l’accès au statut d’artisan comme aboutissement d’une “carrière” par l’ascension sociale ainsi induite (pôles économiques des classes moyennes). • Mais l’arrivée des VTC a déstabilisé la valeur de la licence →désinvestissement de la logique patrimoniale vers des formes d’ascensions professionnelles symboliques (véhicule de luxe, proximité avec les PCS clientes…) • Contraintes/Aspirations des chauffeurs →Logiques économiques →Activation de schèmes d’interprétation du monde social. Ils vont estimer les gains positifs/négatifs de leur travail en se comparant à partir de catégorisations issues de leur propre situation. L’avantage de l’autonomie ≠le désavantage des “charges” professionnelles leur fait envier les salariés. Quand “travailler plus pour gagner plus” ne fonctionne pas, certains comparent leur taux horaire au SMIC. • Les 60-70h/semaine qu’ils doivent enquiller pour se dégager un revenu, contrairement aux salariés, les rapprochent des indépendants →construction de leur “image de tra- vailleurs” sur le modèle de la dépense physique au travail. Le sarkoziste Nicolas s’énerve d’être dans le “dernier pays communiste au monde” avec un système qui “plafonne les 3 revenus” en comparaison des “allocations si face à avoir”. Bien qu’opposé politiquement, l’anarchiste de gauche Loïc artisan de 50 ans, considère aussi être une “vache à lait pour remplir les caisses qui servent à l’État” ⇒bien qu’opposé de par leurs positions poli- tiques, leurs expérience pro des versements de frais fait converger leurs points de vue dans leurs rapports à l’État. • Cela révèle de la représentation clivante “travail dépendant” ≠“travail indépendant”: se positionnent à distance des “gens de métier” protégés par l’État comme les fonction- naires/démunis “assistés” →“aristocratie salariale” (profs), pour mieux se tourner vers l’émancipation via les possibilités individuelles, focalisant leurs critiques sur le poids des “charges”/leur déclassement relatif. • La construction de leur légitimité à lutter trouve son origine dans leurs difficultés au quotidien, aux représentations associés à leur travail, mais aussi sur une expérience com- mune de l’État ⇒le métier de taxi produit plutôt une morale économique qu’une idéologie stabilisée: en on marre de leur niveau de cotisation mais c’est aussi le ressentiment de “payer pour les autres”, symbole d’une forme de respectabilité →Ils demandent “de faire valoir leur propre application des règles communes” (=revendica- tions de régulations professionnelles adressées aux autorités). Les effets de la concurrence : l’«ubérisation» et la divi- sion des chauffeurs entre corporatisme et libéralisme • Leur menace de disparition démontre bien leur nature de “communauté d’intérêts” in- carnés par des thématiques politiques. L’exemple de l’“ubérisation” illustre des dyna- miques de transformation du travail, et les stratégies des chauffeurs pour composer avec cette concurrence imposée →fait apparaître des divisons pro révélant leurs rapports au libéralisme économique. la politisation du mouvement • 20081: création du statut d’auto-entrepreneur et élaboration du statut de VTC → libéralisation indirecte dans une “zone grise” entre indépendance/salariat. • Cette expression d’un “libéralisme économique sauvage” les conduit à demander une régulation, “simple application de la loi” (ironie) →rapport d’attachement à l’État comme arbitre/garant des formes de travail existantes dans leur bataille juridique/lé- gislative. • La politisation de cette lutte monte en généralité par le thème de l’ubérisation, fai- sant entrer des acteurs uploads/Finance/ fiche-de-lecture-synthese-quot-les-chauffeurs-de-taxi-face-a-uber-quot-lejeune-2018.pdf

  • 18
  • 0
  • 0
Afficher les détails des licences
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise
Partager
  • Détails
  • Publié le Mai 24, 2022
  • Catégorie Business / Finance
  • Langue French
  • Taille du fichier 0.0630MB