Partie I : Notion de la cessation des paiements au Maroc La notion de cessation

Partie I : Notion de la cessation des paiements au Maroc La notion de cessation de paiements joue un rôle fondamental et décisif dans les procédures collectives, puisque l’ouverture de ces procédures est subordonnée à la constatation d’un état de cessation de paiements et à la fixation de cette date de cessation de paiements, elle est également le point de départ de la période dite « suspecte » au cours de laquelle et sous certaines conditions certains actes effectués en fraude des droits des créanciers peuvent être annulés de plein droit. D’où la nécessité, donc de bien appréhender cette notion. Pour cette fin, nous allons mettre l’accent, en premier lieu, sur la conception juridique de la cessation de paiement (Chapitre I), et en deuxième lieu, essayer de faire une distinction entre cette notion et certaines d’autres notions voisines qui peuvent faire l’objet de confusions (Chapitre II). Chapitre I : Conception juridique de la cessation des paiements Par le biais de la nouvelle définition légale apportée par la loi 73-17, et d’après la vision de la jurisprudence marocaine et même française, on va essayer d’appréhender la notion de cessation de paiement, sa définition légale et jurisprudentielle (Section 1), et de déterminer les éléments constitutifs de cette dernière afin de mieux saisir cette notion autant complexe que fondamentale (Section 2). Section 1 : Définition légale et jurisprudentielle de la notion A la lumière de la loi 73-17 modifiant et complétant les dispositions régissant les difficultés de l’entreprise contenues dans la loi n°15-95 formant le code de commerce, le législateur marocain a finalement adopté une définition légale de la notion de cessation de paiement , et ce à travers l’article 575 al°2, de ladite loi, qui dispose que : " عن الدفع متى تحقق عجز المقاولة عن تسديد ديونها المستحقة المطالب بأدائهاQتبثث حالة التوقف المتوفرة، بما في ذلك الديون الناتجة عن االلتزامات المبرمة في إطار االتفاقQبسبب عدم كفاية أصولها الودي المنصوص عليه في المادة556 أعاله " Ce qui constitue l’un des principaux apports de la nouvelle réforme du droit des entreprises en difficultés. Or, auparavant, la cessation de paiements a été reconnue à travers les anciennes dispositions de l’article 560 qui énonce que : « les procédure de traitement des difficultés de l’entreprise sont applicables à tout commerçant, à tout artisan, et à toute société commerciale, qui n’est pas en mesure de payer à l’échéance ses dettes exigibles , y compris celles qui sont nées de ses engagements conclus dans le cadre de l’accord amiable prévu à l’article 556 ci-dessus». Cependant, il ne s’agissait que d’une reconnaissance timide de la notion, mais sans définition précise, ce qui constituait une source de controverses doctrinales et jurisprudentielles vue les conséquences qui découlent de sa reconnaissance1. En effet, en absence d’une définition légale à l’époque, c’était à la doctrine et à la jurisprudence de combler cette lacune législative. C’est ainsi que la première définition qui a été rendue par notre jurisprudence qualifie la cessation de paiements comme étant l’arrêt matériel des paiements, c'est-à-dire le non paiement des dettes échues, donc il s’agit d’un critère purement matériel : est ce que le commerçant paie ou ne paie pas ? qui déclenche l’ouverture des procédures collectives. Cependant depuis 1996, la pratique jurisprudentielle marocaine a fait preuve d’une évolution dans la mesure où elle ne se contente plus d’un critère strictement matériel, mais elle se réfère en outre à un critère comptable afin de se conformer à l’esprit général de la loi, (le sauvetage de l’entreprise), à savoir l’existence d’un passif exigible supérieur à l’actif disponible. En effet, dans un jugement daté du 27/03/2000, jugement n° 116/2000, dossier n° 88/2000/102, il a été décidé que le fait que le 1 Mémoire D.E.S.A Droit des affaires, présentée par Khaldi Lamiaa, sous le thème « la notion de difficulté en droit des entreprises : procédures et traitement », 2003-2004, p.47. 2 Tribunal de commerce de Casablanca. passif d’une entreprise commerciale dépasse son actif, justifie qu’elle soit soumise au redressement judiciaire du moment que sa situation n’est pas irrémédiablement compromise. Cette décision judiciaire, qui n’est qu’une illustration de la position du tribunal de commerce de Casablanca, en matière de définition de la notion de cessation de paiement permet de retenir que la cessation de paiement selon cette jurisprudence est constituée par le fait que le débiteur n’est pas en mesure de régler les dettes échues à l’aide de son actif en général et non seulement disponible. Cette définition est différente de celle adoptée par l’article 3 de la loi française du 25 janvier 1985 relative aux procédures de règlement collectif3 : « la procédure de redressement judiciaire est ouverte à toute entreprise …qui est dans l’impossibilité de faire face au passif exigible avec son actif disponible ». Il considère qu’il y a cessation de paiement dès lors que le débiteur se trouve dans l’impossibilité de faire face à son passif exigible à l’aide de son seul actif disponible ; c’est à dire à l’aide de la partie de son actif constituée de la trésorerie et de toutes les sommes que le débiteur peut rendre disponibles ou avoir sans délai. De son tour, La jurisprudence française a défini l’entreprise en cessation de paiements, dans un premier temps comme, étant celle dont la situation financière est irrémédiablement compromise, puis dans un second temps comme étant celle dont l’actif disponible ne suffit pas à faire face au passif exigible. A l ‘analyse, il ressort que le Droit marocain est moins sévère que le droit français quant à la définition de la condition de cessation des paiements qui justifie le recours au redressement judiciaire ou à la liquidation judiciaire, car en droit français il suffit que le débiteur n’ait pas les moyens immédiats de faire face aux dettes exigibles pour qu’il soit mis sous redressement ou liquidations judiciaires, alors qu’en droit marocain de telles mesures ne doivent être prononcées que lorsque le débiteur ne dispose pas de moyens immédiats et médiats pour éteindre des dettes exigibles Il semble que cette souplesse, se justifie par la volonté consciente ou inconsciente de chercher à ménager les intérêts de nos entreprises; 3 Yves Guyon, droit des affaires, Tome 2, entreprises en difficultés Redressement judiciaire- Faillite sinon notre jurisprudence aurait pu s’inspirer de la jurisprudence de la Cour de Cassation française4 qui, avant même que la loi française de 1985 soit en vigueur en France, avait choisi de retenir une définition comptable de la cessation des paiements composée de deux éléments : le passif exigible et l’actif disponible au sens d’actif réalisable immédiatement ou à très brève échéance5. Section 2 : Eléments constitutifs de la cessation des paiements La cessation de paiement est articulée sur deux concepts principaux de nature comptable : Une incapacité de payer le passif exigible (A) avec l’actif disponible (B), en revanche on ne peut manquer d’invoquer la notion de l’impossibilité de faire face invoquée par la législation française, vue les nuances qui en découlent par rapport à notre législation et à notre jurisprudence (C). A- LA NOTION DE « L’ACTIF DISPONIBLE » a- La notion de l’actif : élément comptable En comptabilité générale, l'actif sert à désigner la totalité du patrimoine de l'entreprise, c'est-à-dire tout ce qu'elle possède. Les actifs forment la partie gauche du bilan. On parle aussi d'emplois des ressources qui, elles, forment le passif (partie droite du bilan). Un actif est un élément identifiable du patrimoine d'une entité ou agent économique ayant une valeur économique positive, c'est-à-dire générant une ressource que l'entité contrôle du fait d'événements passés et dont cette entité attend un avantage économique futur6. L'actif est décomposé en deux catégories principales : - Actifs non courants/ immobilisé a un délai de recouvrement qui excède 12 mois (il peut être dit durable). Ce sont les immobilisations et les créances de longue durée, (immobilisations 4 Cass. Com., 14 février 1978; Bull . civ . IV, n.66 5 http://droitmaroc.wordpress.com (consulté le 17/05/2018) 6 Art. 211.1 du Plan comptable Général français. incorporelles, immobilisations corporelles et immobilisations financières). - Actif courants/Circulant est conçu pour être utilisé ou vendu dans le cadre du cycle d'exploitation de l'entreprise et la trésorerie est librement négociable par l'entreprise (valeurs mobilières de placement, banque, caisse, les stocks, les créances, la trésorerie). b- La notion de l’actif disponible : L’actif disponible ne correspond pas à une notion comptable précise, c’est plus ou moins l’actif circulant (créances + stocks + disponibilités), l’ensemble étant retraité en fonction de leur liquidité. En principe donc, l’actif immobilisé, qui soit corporel ou incorporel, ne doit pas être pris en compte, car par nature, il exige un délai important pour être liquidé. Toutefois, certains cas d’espèces relèves des divergences. C’est ainsi qu’un actif incorporel immobilisé, tel que brevet, marque, autorisations diverses telle qu’une autorisation de mise sur le marché en matière pharmaceutique, qui peut trouver acquéreur très rapidement. Ainsi que les créances non échues mais arrivant à échéance à très cours terme doivent être incluses dans l’actif disponible après contrôle de la solvabilité du créancier et du caractère certain de la créance. Par ailleurs, les stocks posent uploads/Finance/ la-cessation-de-paiment-au-maroc-cribd.pdf

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  • Publié le Mai 28, 2021
  • Catégorie Business / Finance
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