Les déterminants de la réticence des PME aux produits financiers islamiques Fac

Les déterminants de la réticence des PME aux produits financiers islamiques Factors of reluctance of SMEs to Islamic financial products Souleymanou Kadouamaï Université de Maroua, Maroua-Cameroun souleymanouk@yahoo.fr Hafiz Ma-Moun Boubakari Université de Maroua, Maroua, Cameroun hafizboubakari@gmail.com Résume L’objet de ce travail de recherche est de décrire les facteurs explicatifs de la réticence des PME au Cameroun vis-à-vis des produits de la finance islamique. La posture épistémologique de ce travail de recherche est la posture interprétativiste. Après avoir généré les résultats sur Sphinx IQ, nous avons procédé à leur interprétation. Ainsi, nous avons opté pour la démarche méthodologique qualitative, notamment l’étude de cas. Nous avons réalisé six (06) entretiens auprès des responsables des petites et moyennes entreprises. Ces entrevues ont fait l’objet de retranscription et ont été analysés à l’aide du logiciel Sphinx Quali par la méthode d’analyse du contenu. Ainsi, trois (03) facteurs de réticence des PME à l’égard des produits financiers islamiques ont été identifiés. Il s’agit d’abord, des arguments d’ordre religieux. Ensuite, le manque d’informations sur les services bancaires islamiques et enfin, le facteur culturel. Enfin, il ressort de cette que les conditions sine qua non au développement de la finance islamique au Cameroun sont entre autres, la sensibilisation de masse, le renforcement de la visibilité sur le terrain et la politique de proximité en vers le public en général et les PME en particulier. Mots-clés : Produits financiers islamiques, Réticence, Finance islamique, Souscription, PME. Abstract The purpose of this research is to determine the factors explaining the reluctance of SMEs in Cameroon vis-à-vis the products of Islamic finance. The epistemological stance of this research work is the interpretative stance. After generating the results on Sphinx IQ, we performed their interpretation. Thus, we opted for the qualitative methodological approach, especially the case study. We conducted six (06) interviews with managers of small and medium-sized enterprises. These interviews were transcribed and analyzed using the Sphinx Quali software using the content analysis method. Thus, three (03) factors of reluctance of SMEs with regard to Islamic financial products have been identified. First, religious arguments. Then, the lack of information on Islamic banking and finally, the cultural factor. Finally, it emerges from this that the conditions sine qua non to the development of Islamic finance in Cameroon are among others, mass awareness, the reinforcement of the visibility on the ground and the policy of proximity in towards the public in general and the SMEs in particular. Key words: Islamic financial products, Reticence, Islamic finance, Subscription, SMEs. 1 Introduction « Puisqu’on ne fait usage de l’argent qu’en le consommant et en le dissipant, il est injuste et illicite de recevoir quelque chose pour son usage » D’Aquin (1852, pp.78). Des propos de cet écrivain français, il se soulève là, un message fort relatif à l’interdiction de l’intérêt usuraire véhiculé par les principes fondamentaux de la finance islamique. Considéré comme source de financement classique, l’endettement bancaire est concurrencé par la finance islamique depuis un certain temps. Cette dernière pose la problématique de l’illicéité de l’usure sur la table. La pratique de l’intérêt (ou de l’usure) est prohibée par les grandes religions monothéistes, qu’il s’agisse de l’islam ou du christianisme. Cette interdiction fait l’objet d’un des principes fondamentaux de la finance islamique. C’est dans ce sillage que le Nobel d’économie en 2001 Joseph Stiglitz, a reconnu l’intérêt que porte la Commission à la finance islamique. « …Il semblerait que la finance islamique ait gardé à l’esprit que pour qu’un système financier puisse fonctionner, il lui faut, à sa base, des liquidités réelles, a plaisanté l’économiste américain ».1 Au Cameroun, Sur les quinze (15) banques commerciales, seules deux (02) se sont lancées sur ce créneau, soit un taux de 13,33%. Le taux de PME ayant souscrits aux services financiers islamiques est de 7,96%.2 Le seul point de lisibilité d’un indicateur d’éventuelle performance sur ce service est à ce jour la projection des 3 milliards de finance annoncé par Afriland First Bank depuis le lancement de son guichet dédié à la finance islamique en 2015. Cela pourrait donner l’impression d’une véritable difficulté du service à s’imposer. Ainsi, l’on constate qu’en dépit de la disponibilité d’une myriade de sources de financement, la situation financière des PME camerounaises demeure inchangée. Car, les entrepreneurs ne cessent de se plaindre du déficit de financement que subisse leur structure. La gravité du problème de financement dans lequel sont plongées les PME Camerounaises, est confirmée par le fait que celles-ci coexistent paradoxalement avec des banques sur liquides. Malgré les principaux instruments offerts par la finance islamique en direction des PME, celles-ci restent insensibles. C’est dans ce sillage qu’El Mezouari et al. (2013), ont mis la lumière sur les causes de la réticence de la demande des produits et services financiers islamiques malgré tout l’engouement des clients marocains pour ceux-ci. Au regard de tout ce qui ce qui précède, une étude sur les potentiels obstacles au développement de la finance islamique est indispensable. 1. Problématique de la réticence des PME aux produits bancaires islamiques Ce paragraphe vise à ressortir les obstacles à la souscription des produits financiers islamiques, après avoir accordé une attention particulière aux théories mobilisées dans le cadre de l’étude et à la pertinence des produits financiers islamiques. 1.1. Théories mobilisées dans la recherche Les premiers pas de la finance islamique au Cameroun remontent aux années 70. En effet, cette dernière par le truchement de la banque islamique de développement (BID) a montré sa volonté et son engagement à accompagner l’Etat camerounais dans son développement 1 Déclaration faite lors de la conférence de presse du Président de la Commission d’experts du Président de l’Assemblée sur les réformes du système monétaire et financier international le 10 septembre 2009. 2 D’après le récapitulatif des comptes de l’année 2018 de Savana finance. 2 économique. La BID dispose à son actif, le financement de plusieurs projets au Cameroun : le barrage de SONG LULU,3 la SODECOTON et Afriland First Bank. La finance islamique peut se définir comme « une finance qui se veut équitable, favorisant l’investissement, le développement et le partage des risques, et encourageant l’initiative tant privée que publique. » (Benzha ; 2008, pp. 1). Elle est aussi l’ensemble des mécanismes permettant la satisfaction des besoins financiers des agents économiques tout en se conformant à la religion musulmane (Ben Daoud, 2013). C’est-à-dire, l’ensemble des services financiers permettant de satisfaire les contraintes financières des agents économiques, tout en respectant les principes de la charia.4 Dans le cadre de ce travail de recherche, nous retenons que la finance islamique consiste à mobiliser les ressources financières et à allouer ces dernières aux différents projets d'investissement en conformité avec les principes édictés par la charia (Hernalsteen, 2012). La réticence quant à elle, s’entend comme la réserve, l’hésitation dans le comportement ou les propos, un certain degré de refus, de non désir.5 Pour bien cerner la réticence des PME Camerounaises envers les services financiers islamiques, nous mobilisons les théories de financement hiérarchique, de compromis et de comportement planifié. En effet, La théorie du financement hiérarchique a pour fondement, l’asymétrie informationnelle entre les acteurs internes6 et les acteurs externes7 à l’entreprise. D’après Majluf et Myers (1984), les dirigeants adoptent une politique financière visant à minimiser les coûts d’agence et ils préfèrent le financement interne au financement externe. Ainsi, le dirigeant hiérarchise ses préférences selon la séquence suivante : l’autofinancement, l’endettement et l’augmentation du capital. Le respect de cette hiérarchie a pour avantage d’éviter la réduction des prix des actions de l’entreprise, de limiter la distribution des dividendes pour augmenter l’autofinancement et de réduire le coût du capital en limitant le recours aux emprunts. Les entreprises rentables disposent ainsi d’un financement interne plus abondant. Les petites et moyennes entreprises souhaitant emprunter, font face à la sélection adverse et à des coûts d’information. Ces coûts peuvent être nuls pour l’autofinancement, relativement moyens pour la dette et élevés dans le cas de l’émission de nouvelles actions. Dans le but de maximiser leur propre fonction d’utilité8 et conserver leur indépendance vis-à- vis des acteurs externes, les dirigeants préfèrent le financement interne. En cas d’insuffisance des fonds, ils recourent à la dette plutôt qu’à l’augmentation du capital dans la mesure où la dette permet de réduire le degré de dépendance de l’entreprise à l’égard des autres apporteurs de capitaux. Donc, de garder le contrôle et le pouvoir de décision. La théorie de compromis quant à elle, contredit les travaux de Modigliani et Miller (1958), qui prônaient la neutralité de la structure financière sur la valeur de la firme. D’après cette théorie, le recours à l’endettement augmente la valeur de la firme9 jusqu’à un certain seuil (taux optimal d’endettement) au-dessus duquel, l’entreprise s’expose aux couts de faillite. Ce taux est la résultante de la confrontation entre les avantages fiscaux et les couts de faillite. Autrement dit, c’est le taux qui égalise les bénéfices fiscaux marginaux aux couts marginaux de faillite. Par ailleurs, la prise en compte des couts d’agence au sens de Jensen et Meckling (1976) permet de déterminer la structure financière optimale. La divergence d’intérêt et uploads/Finance/ les-determinants-de-la-reticence-des-pme-aux-produits-bancaires-islamiques.pdf

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  • Publié le Jul 05, 2022
  • Catégorie Business / Finance
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