Mise à jour le 27/05/2021 1/5 F I C H E T E C H N I Q U E Les marchés publics c

Mise à jour le 27/05/2021 1/5 F I C H E T E C H N I Q U E Les marchés publics confrontés à la flambée des prix et au risque de pénurie des matières premières Plusieurs secteurs économiques, notamment l’automobile, l’informatique, l’industrie agro- alimentaire, le bâtiment, les travaux publics, la métallurgie, la chimie et le mobilier sont particulièrement touchés par des pénuries d’approvisionnement qui engendrent un renchérissement importants des coûts et un allongement des délais de livraison. Dans ce contexte, pour les difficultés rencontrées dans le cadre des contrats en cours d’exécution (I), les acheteurs peuvent mettre en œuvre des mesures visant à adapter les modalités d’exécution des marchés pour ne pas pénaliser les entreprises ne pouvant respecter les délais contractuels (I.1). Si les conséquences de l’envolée du cours des matières premières ne peuvent être neutralisées par la clause de révision de prix prévue contractuellement, le caractère intangible du prix fait obstacle à toute modification ultérieure du prix du marché et seule une indemnisation des titulaires sur le fondement de la théorie de l’imprévision est envisageable sous conditions (I.2). S’agissant des projets de marchés à passer, l’attention des acheteurs est appelée sur la rédaction de ces futurs marchés, et notamment des clauses relatives aux modalités d’évolution des prix, aux délais d’exécution et aux modalités d’application des pénalités (II). 1. Modalités de prise en compte de ces difficultés dans les marchés en cours d’exécution 1.1. Les délais d’exécution et l’application des pénalités contractuelles peuvent être adaptés Les acheteurs ont toujours la faculté, en cours d’exécution du marché, d’aménager les délais d’exécution et de renoncer à l’application des pénalités de retard. A cet égard, le gouvernement a récemment demandé aux acheteurs de l’Etat, dans les contrats de la commande publique en cours d’exécution, de veiller à ne pas appliquer de pénalités lorsque les retards de livraison ou d’exécution sont la conséquence des difficultés actuelles d’approvisionnement, qu’elles soient ou non directement liées à la crise sanitaire. Lorsque cela est compatible avec le bon fonctionnement des services publics, le gouvernement a également demandé aux acheteurs d’accorder des reports de délais. Les autres acheteurs, notamment les collectivités locales et les établissements publics, ont été invités à faire de même1. 1 https://www.economie.gouv.fr/approvisionnement-matieres-premieres-mediation-batiment-travaux-publics# Direction des Affaires juridiques Mise à jour le 27/05/2021 2/5 1.1.1. L’aménagement des délais d’exécution Les acheteurs publics ont toujours la possibilité d’aménager les délais d’exécution lorsque des circonstances extérieures mettent le titulaire dans l’impossibilité de les respecter. En effet, les délais d’exécution peuvent être suspendus ou prolongés. Les clauses contractuelles peuvent par ailleurs anticiper de telles hypothèses, ainsi que le prévoient les différents cahiers des clauses administratives générales (CCAG). Ainsi, dès lors que le titulaire du contrat apporte la démonstration qu’il n’est pas en mesure de respecter certains délais d’exécution, ou que l’exécution des prestations encadrées par ces délais entraînerait pour lui un surcoût manifestement excessif, il lui est possible de solliciter l’autorité contractante afin d’obtenir la prolongation de ces délais spécifiques. 1.1.2. La renonciation aux pénalités de retard Les acheteurs sont toujours libres de ne pas appliquer les pénalités de retard (CE, 9 novembre 2018, SAS Savoie, n° 413533), sous réserve que cela ne constitue pas une libéralité (CE, 19 mars 1971, Mergui, n°79962). Les acheteurs peuvent même être tenus d’y renoncer en application des clauses du contrat. Le juge administratif invite d’ailleurs les acheteurs à faire une application raisonnée des pénalités de retard. Celui-ci peut moduler le montant des pénalités, « si ces pénalités atteignent un montant manifestement excessif ou dérisoire eu égard au montant du marché » (CE, 29 décembre 2008, OPHLM de Puteaux, n° 296930). 1.1.3. Les circonstances constitutives de cas de la force majeure La non-application des pénalités de retard et le report des délais d’exécution s’imposent à l’acheteur lorsque les circonstances peuvent être qualifiées de cas de force majeure, étant rappelé que la force majeure s’entend d’un événement extérieur, imprévisible et irrésistible et que ces conditions ne peuvent s’apprécier qu’au cas par cas, selon les aménagements prévus par les stipulations de chaque contrat. Le juge administratif considère notamment que l’imprévisibilité s’apprécie à l’aune de ce qu’un contractant normalement diligent peut prévoir, un événement en lui-même prévisible pouvant avoir des conséquences imprévisibles par leur ampleur. De même, l’appréciation du caractère irrésistible de l’événement tient compte des moyens dont dispose le cocontractant pour l’exécution de ses obligations. 1.2. Les conditions de prise en compte de l’augmentation des prix des matières premières dans les contrats en cours 1.2.1. Rappel liminaire sur le caractère intangible des prix Le prix contractualisé est intangible, ainsi que les conditions de son évolution prévues à la signature du contrat. Le prix et ses conditions d’évolution sont des éléments essentiels du marché qui ne peuvent évoluer en cours d’exécution, sauf clause de révision ou clause de réexamen. Ils sont aussi un élément essentiel de la détermination des offres remises par les candidats au stade de la passation du marché. Ainsi, en l’absence de clause de révision de prix ou de réexamen, une modification du prix porterait atteinte aux conditions de la mise en concurrence initiale (CE, 15 février 1957, Mise à jour le 27/05/2021 3/5 Etablissement Dickson). La clause de révision de prix ne peut donc être ni modifiée, ni introduite en cours d’exécution du marché même si celle-ci était obligatoire2. 1.2.2. Le droit à indemnisation ou à résiliation lorsque la théorie de l’imprévision peut être mise en œuvre Dans l’hypothèse où l’augmentation du prix des matières premières ou des composants indispensables à l’exécution des prestations entraînerait un bouleversement temporaire de l’économie du contrat (CE 30 mars 1916, Compagnie générale d'éclairage de Bordeaux, n° 59928), le titulaire du marché concerné pourrait solliciter une indemnité sur le fondement de la théorie de l’imprévision, à condition de démontrer que cette augmentation était imprévisible, soit dans sa survenance, soit dans son ampleur. Dans la mesure où les prix des matières premières sont par nature soumis à des fluctuations cycliques, une indemnisation sur le fondement de la théorie de l’imprévision ne sera possible que s’il est démontré que la hausse actuelle des matières premières concernées était imprévisible dans son ampleur et qu’elle a provoqué un déficit d’exploitation. A cet égard, le titulaire ne peut invoquer un simple manque à gagner CE 25 novembre 1921, Compagnie générale des automobiles postales, Rec. p. 980) ou même une disparition totale de son bénéfice (CE 4 octobre 1961, Entreprise Charlet, Rec. p. 539). Dans le cadre d’une demande d’indemnisation, il appartient au titulaire d’apporter tous les justificatifs nécessaires, et notamment la preuve que l’achat des matériaux concernés était bien postérieur à la période durant laquelle le prix de ces derniers a augmenté de façon imprévisible. Par ailleurs, l’indemnité accordée ne peut couvrir qu'une partie du déficit subi par le cocontractant de l'administration. Ce dernier doit en effet prendre à sa charge le coût de l'aléa économique « normal » inhérent à tout contrat (CE, 30 mars 1916, Compagnie générale d’éclairage de Bordeaux, n° 59928 ; CE, 21 octobre 2019, Société Alliance, n° 419155). Le juge administratif met généralement à la charge de la personne publique 90% du montant de cette charge extra-contractuelle. La mise en œuvre de la théorie de l’imprévision ne peut être que temporaire. Si les circonstances bouleversent définitivement le contrat, les parties se trouvent alors en présence d’un cas de force majeure administrative permettant au titulaire de solliciter la résiliation du contrat devenu manifestement inéquitable (CE, 9 décembre 1932, Compagnie des tramways de Cherbourg, Rec. p. 1050). 1.3. La modification du contrat Enfin, les retards provoqués par les pénuries ou même les bouleversements de l’équilibre économique du contrat peuvent justifier la signature d’un avenant sur le fondement de l’article R.2194-5 du code de la commande publique afin de modifier le périmètre des prestations ou adapter les conditions d’exécution du marché. Ces modifications ne sont possibles que si elles sont indispensables pour faire face aux circonstances imprévues et permettre la poursuite de l’exécution du contrat. 2 Dans une décision du 20 décembre 2017, Société Area Impianti, n° 408562, le Conseil d’Etat a admis une modification des règles de détermination du prix initial, mais cette solution était justifiée par des circonstances particulières : la modification est intervenue en fin d’exécution du marché (l’essentiel des prestations avaient donc déjà été payées), et dans un sens favorable à l’acheteur. Mise à jour le 27/05/2021 4/5 2. Points d’attention sur la rédaction des futurs marchés 2.1. Obligations en matière d’actualisation et de révision des prix L’article R. 2112-13 du code de la commande publique prévoit que les marchés publics doivent être conclus à prix révisables lorsque les prestations sur lesquelles ils portent sont exposées à des aléas majeurs du fait de l’évolution raisonnablement prévisible des conditions économiques pendant la période d’exécution des contrats. La méconnaissance de cette obligation constitue un manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence susceptible d’entraîner l’annulation de la procédure de passation (CE, 9 décembre 2009, Département de l’Eure, n° 328803). La clause de révision doit obligatoirement fixer la date d’établissement du prix initial, les modalités de calcul uploads/Finance/ marches-publics-et-flambee-des-prix.pdf

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  • Publié le Jan 17, 2022
  • Catégorie Business / Finance
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