ARNAUT DE MARUELH (ca. 1195) Originaire de l’évêché de Périgord, sans doute de

ARNAUT DE MARUELH (ca. 1195) Originaire de l’évêché de Périgord, sans doute de Mareuil-sur-Belle, près de Nontron, clerc de pauvre condition, Arnaut invente chansons et salutz d’amor, exprimant très classiquement son amour presque inaccessible envers les dames illustres de la haute noblesse. Son inspiratrice principale sera Azalaïs de Burlats, qu’il célèbre avec humilité, compte tenu de la distance sociale : elle est fille de Raimon VI, le comte de Toulouse, et femme de Roger II, vicomte de Béziers et Carcassonne. Alphonse II d’Aragon, le roi troubadour, courtisait aussi Azalaïs et par jalousie selon la vida (BS 32), il fait congédier Arnaut de la cour de Guillaume de Montpellier. Le troubadour Pistoleta aurait été aussi son cantaire. Il faut mentionner, outre cinq épîtres amoureuses à coloration érotique transfigurée par le rêve dont Arnaut est un maître élégant, un long ensenhamen de 365 vers, poème didactique sur les manières du parfait amant. Arnaut de Maruelh apparaît en fin de compte tel un docteur de la fin’amor ; il souligne les valeurs de perfectionnement de la courtoisie : conoissensa, sabers, sens, largueza, poder. Parmi les vingt-cinq cansos dont le texte nous est parvenu, six sont pour- vues de mélodies, deux provenant de G et les quatre autres du chansonnier R. Ses chansons tournent autour de la question de la bonne éducation courtoise : « Las grans beutatz e·ls fis ensenhamens » (PC 30, 16). Son contemporain cata- lan, Raimon Vidal de Besalú, dans la courte nouvelle « Abril issi’e mays intrava », le cite (avec Guiraut de Bornelh et Raimon de Miraval) comme un témoin pri- vilégié du trobar. Vida, Ms. R 2d (BS, 32) Arnaut de Maruelh fon de l’avescat de Peyragorc, d’un castel que a nom Maruelh e fon clergue de paura generaissio. E car no podia Arnaut de Maruelh était de l’évêché de Périgord, d’un château qui a nom Mareuil et il était clerc de pauvre nais- sance. Et parce qu’il ne pouvait vivre de AnthTroub_BON:Minerve 20/07/20 11:46 Page1 ANTHOLOGIE 2 vieure de las soas letras, anet per lo mon e sabia trobar. Et astre aduys lo a la cort de la comtessa de Burlas que era filha del pros comte Raimon, molher del vescomte Talhafer. Aquel Arnaut legia be et era bels de per- sona e la comtessa li fazia gran be. Et el s’enanouret d’ela e d’ela fazia sas chansos, mas non las li auzava dire, ans dizia que autre las avia faytas . Mays amors lo forset tan que dis en .I. canso : La franca captensa qu’ieu non puesc oblidar… Et en aquesta canso el li descobri l’amor ; e la comtessa non l’esquivet, ans entendet sos precs e·l mes en arnes e det li baudezia de trobar ; e fon onratz de cort, don fe motas bonas chansos. ses œuvres, il s’en alla par le monde et il savait bien trouver. Et le destin l’a mené à la cour de la comtesse de Burlatz, qui était la fille du noble comte Raimon et femme du vicomte Taillefer. Cet Arnaut lisait bien ; il était beau de sa personne et la comtesse lui faisait grand bien. Et il s’énamoura d’elle et faisait à son propos ses chansons, mais sans oser le lui avouer, au contraire, il disait qu’un autre les avait faites. Mais Amour s’empara si fort de lui qu’il dit dans une chanson : Les franches manières que je ne puis oublier… [cf. p. … ] Et dans cette chanson, il lui découvrit son amour ; et la comtesse ne le refusa pas, mais comprit ses prières ; elle lui procura des équipements ; elle l’encou- ragea à trouver ; et il fut honoré à la cour, si bien qu’il fit maintes bonnes chansons. « La franca captenensa » (PC 30, 15 ; R 79c) AnthTroub_BON:Minerve 20/07/20 11:46 Page2 ARNAUT DE MARUELH 3 AnthTroub_BON:Minerve 20/07/20 11:46 Page3 ANTHOLOGIE 4 I. La franca captenensa qu’ieu non puesc oblidar, e·l dos rir’ e l’esgart e·l semblan q’ie·us vi far mi fay, dona valens, 5 melhor q’ieu no·us say dir, dins del cor sospirar; e si per mi no·us vens Amors e Chausimens, tem que·m n’er a murir. 10 II. Ses jenh e ses falhensa vos am, e ses cor var, al mielh c’om pot pessar ; d’aitan vos puesc forsar part vostres mandamens ; 15 e ! Dona qu’ieu dezir, si conoissetz ni·eus par que·us sia falhimens car vos soi bevolens, sufretz m’aqest falhir. 20 III. (V) Non ai tant de plevensa, ni puesc razon trobar don m’aus asegurar que ia·m denhes amar ; ans dic mos ferms talens 25 que poiri’avenir ; ? no·m dey desesperar, que tals es pauc manens qu’el fai astres e sens en gran ricor venir. 30 IV. Dona, per gran temensa, tant vos am e·us tenc car, no·us aus estiers prejar ; mays pus fay ad onrar us paubres avinens, 35 c’anc sap honor grazir I. Les franches manières que je ne puis oublier, le doux sourire et le regard et la mine que je vous vis faire me font, noble Dame, meilleure que je ne sais vous dire, soupirer du fond de mon cœur; et si, pour moi, ne vous vainquent amour et clémence, je crains qu’il ne me reste qu’à mourir. II. Sans fausseté et sans manque je vous aime, et sans inconstance, le plus qu’on peut imaginer ; alors en cela je puis vous forcer au-delà de vos commandements ; Eh ! Dame que je désire, si vous appreniez ou qu’il vous semble que ce serait une faute le fait d’être votre amant, souffrez que je commette cette faute. III. (V) Je n’ai plus de confiance, et je ne puis de raison trouver pour oser m’assurer que vous daigniez m’aimer un jour ; mais la constance de mon désir dit que cela pourrait bien arriver et je ne dois pas m’en désespérer, car tel n’a que peu de fortune que néanmoins le sort et l’habileté feront arriver à grande puissance. IV. Dame, par grande crainte tant je vous aime et vous chéris que je n’ose vous adresser de nouvelles prières ; mais il faut honorer bien davantage un pauvre soupirant, qui sait remercier d’une faveur Texte Traduction AnthTroub_BON:Minerve 20/07/20 11:46 Page4 ARNAUT DE MARUELH 5 e·ls bes d’amor selar, c’us ricx desconoissens, cui par que totas gens lo deyan obezir. 40 V. (III) Tant es de gran valensa qu’ie·us am mais ab cor clar, ses pro merce clamar, c’ab autra guazanhar ; e·l vostr’ensenhamens, 45 pus no m’en puesc partir, fassa·us humiliar si qe·l vostre cors gens amoros e plazens, si no·m val, no·m’azir. 50 VI. D’onratz faitz avinens del rey e d’autra jens vos faitz a totz grazir. et cacher les bienfaits de l’amour, qu’un puissant discourtois à qui il semble que tout le monde doive obéir. V. (III) Vous êtes d’une si grande valeur que je vous aime d’un cœur pur, au point de préférer implorer votre merci sans espoir que de gagner l’amour d’une autre ; et que votre bonne éducation, puisque je ne puis m’en détacher, vous rende indulgente au point que votre noble personne aimable et charmante, si elle ne me veut pas, du moins ne me haïsse pas. VI. Au sujet d’honorables et belles actions du roi et d’autres gens, vous vous faites aimer de tous. AnthTroub_BON:Minerve 20/07/20 11:46 Page5 ANTHOLOGIE 6 BERENGUER DE PALOU (PALOL, PALAZOL) (fl. 1164) Considéré comme l’un des tout premiers troubadours catalans, sans doute contemporain du comte Jaufre III de Roussillon décédé en 1164 ou 1175, il serait originaire de Palou, dans l’ancien diocèse d’Elne, au sud de Perpignan. Son chansonnier est assez riche en musique puisque pas moins de huit mélodies de belle facture, toutes dans le manuscrit R, ont été préservées pour douze poèmes recensés (PC 47), dont neuf d’attribution certaine (Riquer, 300). Il est possible que la dame célébrée dans ses chansons (ainsi « Ab la fresca clardat » ; PC 47, 1) ne soit pas Ermesen d’Avignon (près de Figueras en Catalogne), comme le raconte la vida (BS, 523), mais sa belle-mère, elle aussi de l’Ampordan : Maria de Peirelada (Adroher, 57). « Am la fresca clardat » (PC 47, 1 ; R 37b) AnthTroub_BON:Minerve 20/07/20 11:46 Page6 BERENGUER DE PALOU 7 I. Am la fresca clartat, que mou del tems sere, dona, e ab l’estat que renovel’ e ve, ay tot mon cor pauzat 5 en la vostra merce, e car tant ay estat que vezer no·us volia, si la colpa es mia et yeu m’o ay comprat. 10 II. Mays tant ay sofertat gran dezir e say be que, si m’avetz desgrat, al meu tort s’esdeve, dona, per ma foldat ; 15 car d’amic no·us cove qu·el trop si dons irat per lunha fellonia ; e fols hom no·s castia ans a trop menscabat. 20 III. Be m’avi’acordat c’al cor vires lo fre, mas can vei la beutat e·l bel cors blanc e le, grayle, gras e delgat, 25 e·l pus azaut qu’om ve e·l miels afaisonat, I. Avec la fraîche uploads/Geographie/ 113-anthtroub-minerve.pdf

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