La seigneurie de Berck-sur-Mer au XIVe siècle et sa tour. Par Georges de LHOMEL
La seigneurie de Berck-sur-Mer au XIVe siècle et sa tour. Par Georges de LHOMEL Sur la côte de la Manche, entre les embouchures de la Canche et de l’Authie s’échelonnaient au XIVe siècle, plusieurs ports ou havres ; les deux principaux étaient Seyman(1) ou Seymon(2) et Waben. Entre ces deux ports s’étaient bâtis les villages de Cucq, Merlimont et Berck(3). Berck situé sur la rive droite d’une rivière connue plus tard sous le nom de l’Arche(4), à cause des courbes que son cours décrivait, fut d’abord peuplé de pêcheurs dont tout l’outillage consistait en de simples filets ; plus tard quand la pêche prit une plus grande extension, les abbayes et les seigneurs du lieu, dotèrent la population de bateaux et constituèrent la marine de ce village. Le nom de Berck se rencontre dès 1215 dans une charte mentionnant un certain Pierre de Berck qui au mois de juillet, fut témoin d’une donation en faveur de la maladrerie du Val de Montreuil(5). Quelques années après en 1225 dans le cartulaire de l’abbaye de Valoires, nous trouvons ce village cité pour la première fois. Mais est-ce à dire que son administration ecclésiastique date de cette époque ? C’est une question que les textes n’ont pas permis d’établir. Nous savons seulement qu’en 1123, la cure de Berck n’existait pas. Ceci résulte d’une charte d’Enguerrnand, évêque d’Amiens, énumérant toues les paroisses à la nomination de l’abbaye de Saint-Josse- sur-mer. Dans cette liste sont citées les paroisses de Verton et de Waben, mais il n’est fait mention ni de Berck ni de Groffliers, qui furent cependant plus tard à la nomination de l’abbé de Saint Josse. Une copie du Pouillé de Picardie, reproduit par Dom Grenier, mentionne ces deux paroisses à la date de 1303 ; à côté de Berck et de Groffliers nous y voyons encore Waben, Verton, Merlimont, Cucq et Seymon. Si l’organisation ecclésiastique existe dans ces localités, il n’en est pas de même de l’organisation administrative car dans une charte du mois d’avril 1319 la commune de Waben et les villages de Berck et de Verton se réunissent pour ester en justice(6). A côté de la paroisse se trouvait la seigneurie du village. Nous ne savons exactement à qui elle appartint jusqu’en 1350 ; mais à cette date, Raoul, comte d’Eu, connétable de France en possédait les revenus. Lorsqu’il fut condamné à être décapité pour crime de haute trahison, le Bailli de Calais, reçut le 19 novembre 1350, ordre de mettre tous les biens du criminel en la main du Roi. Le connétable était fils de Raoul de Brienne Comte d’Eu, et de Jeanne de Mello, qui conclut le 12 mars 1325 un accord avec Jeanne de Fiennes, veuve de Jean de Châtillon pour la succession de sa grand’mère, Béatrix de Châtillon, et spécialement pour la terre de Beaurain(7). Le 23 décembre 1350, le Roi Jean II donnas à son chambellan, Robert de Lorris, seigneur d’Ermenonville, le château et la maison-forte et l’hospice de Beaurain et tous les « Revenus avoueries, aveines, émolumens quelconques et quoiqu’ils puissent monter, comme aussi tout le droit domaine avec toute justice, haute, moyenne et basse possédée par le Roi dans les villes de Berck et de Verton, non seulement à cause de la confiscation, mais à cause de la séparation faites des villes de Berck, et de Verton d’avec celle de Waben, pour ce que ces dites villes étoient anciennement unies et conjointes avec la commune de Waben »(8). Ces revenus ne s’élevaient qu’à la somme de 500 livres (9) en raison de la mortalité causée par les guerres et par la peste (10). La terre de Berck dut être vendue par Robert de Lorris, car, en 1361, Barthélémy Macquerel en était le seigneur. Il est ainsi qualifié dans l’article 342 Des raisons du Procureur du Roi de France contre celui d’Angleterre(11). C’est à cette époque, c’est à dire sous la domination anglaise de 1361 à 1369, que Barthélémy Macquerel ayant perdu sa fortune et étant tombé « en petitesse » s’aboucha avec Nicolas de Louvain, gouverneur du Ponthieu pour le Roi d’Angleterre, au sujet de la vente de la terre de Berck. Il se mirent en accord sur une somme à payer en viager au vendeur et à sa femme, issue de race noble : mais ce dernier mourut pendant les pourparlers et aucun acte n’étant signé, la seigneurie passa aux héritiers du défunt(12). Cela ne faisait pas l’affaire de Nicolas de Louvain qui tenait à posséder Berck, et pour cela désirait en faire confirmer le transport. Ne pouvons-nous pas supposer sans témérité que dans cette vente Nicolas de Louvain(13) était le mandataire du Roi d’Angleterre Edouard III, heureux qu’un de ces sujets possédât sur la côte une terre où était bâti un phare ? Dans notre étude sur la tour de Berck, nous insisterons sur le désir que devait avoir ce monarque de possédait ce « foïer ». Le Roi de France par contre s’opposait à cette cession disant que le « Foïer » de Berck était « des fiefs d’appartenances et seigneuries de Berck qui alloit jusqu’au banc de la mer et tout ce qui appartenait à Macquerel étoit tenu a pur et sans moyen du château de Beaurain et en souverainete et ressort du Roi à cause de son château de Montreuil, donc ni l’Angleterre ni les échevins de Waben n’y avoient aucun droit ». D’ailleurs « Lesdits de Ponthieu n’avoient aucun droit dans la ville de Berck si ce n’estoit pour certaines rentes d’aveinages, qui estoit un produit superficiel, que les Rois d’Angleterre n’y avoient aucun droit de justice et que s’ils en avoient, ils ne pouvoient porter que sur ceux de l’aveinage et d’avouerie non payés ». Colart Macquerel, fils de Barthélémy, refusa de souscrire aux prétentions de Nicolas de Louvain qui le força à s’expatrier. Ce départ permit au Gouverneur du Ponthieu de « gagner » Jean Macquerel oncle de Colart qui n’avait aucun droit sur la terre de Berck et d’obtenir de lui qu’il en confirmât le transport devant le bailli de Waben, quand il l’aurait du faire devant celui de Beaurain. Malheureusement pour Nicolas de Louvain, l’occupation anglaise ne devait pas durer et le comté de Ponthieu étant rentré en 1369 sous l’obéissance du Roi de France, Berck fut de nouveau confisqué. Par plusieurs donations royales cette terre passa par lettres de Mai 1369 à Jean de Dainville, Chevalier et Maître d’Hôtel du Roi, à Oudart de Renty(14) à d’autres propriétaires qui nous sont inconnus(15) et enfin à Désré Disque après la mort duquel ladite seigneurie fut encore une fois réunie au domaine Royal. Tassart Macquerel avait bien essayé d’en procurer la restitution à son neveu, mais par ordre d’Oudard de Renty il avait été assassiné(16). Colart Macquerel ne se tint pas pour battu et le 2 mars 1390 revendiqua devant le Roi la terre de Berck. Le 14 février 1391 une enqête fut ordonnée sur la véracité des faits énoncés et Berck repassa dans les mains de Colart Macquerel par lettres patentes du 20 juillet 1392. Dans sa supplique, le demandeur se disait(17) « povre homme, aveugle, chargé de feme et d’enfants ». Cette terre échut par héritage quelques années après à un autre membre de la famille Macquerel et le 10 février 1399 Fremin Macquerel, fils de Robert, seigneur de Berck, en servait aveu au Roi(18). Le 15 février 1427((19) et le 10 février 1438(20), David Le Fée, neveu et héritier par bénéfice d’inventaire de Fremin Macquerel, écuyer, et le possesseur de cette seigneurie, puis en 1475 c’est Robert Le Fée qui avait dû être héritier d’un membre de la famille(21). Quelques années plus tard cette seigneurie fut vendue à l’illustre maison de Croy qui la possédait en entier lors de la rédaction de coutumes de Beaurain en 1507(22). Charles VI avait bien donné à son chambellan, Jean, seigneur de Croy et de Renty, le 28 janvier 1412, la terre de Beaurain mais à cette date Jean de Croy n’avait que la haute justice à Berck. Avant de faite l’étude de la tour de Berck, nous avons cru nécessaire de passer en revu des seigneurs de cette commune au XIVe siècle, époque pendant laquelle ce phare occupa une place important dans le système de défense de la côte Picarde. Cette tour, XIVe siècle et presque semblable à celle de Verton. C’est une construction carrée mesurant 6,50 m dans son œuvre et faite avec des grès provenant des carrières de Marquises ; M. Enlart directeur du musée du Trocadéro est formel à cet égard. Mais à quelle date précise a- t-elle été construite ? L’a-t-elle été par les rois de France ou par les seigneurs de Berck ? Ces problèmes sont difficiles à résoudre. Un premier point est acquis, c’est que le « foïer » de Berck existait en 1361. Pendant le XIVe siècle la Marine française était florissante, bien armée, et des phares étaient nécessaires sur la côte pour préserver les navires des écueils et de la surprises des ennemis. Un premier « foïer uploads/Geographie/ 1910-seigneurie.pdf
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- Publié le Apv 26, 2022
- Catégorie Geography / Geogra...
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