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Sigmund Freud Le tabou de la virginité - Collection Sciences humaines - Retrouvez cette oeuvre et beaucoup d'autres sur http://www.inlibroveritas.net Table des matières Le tabou de la virginité..............................................................................1 (1) .........................................................................................................2 (2) .........................................................................................................7 (3) .......................................................................................................13 i Le tabou de la virginité Auteur : Sigmund Freud Catégorie : Sciences humaines Licence : Domaine public 1 (1) Peu de particularités de la vie sexuelle des peuples primitifs nous paraissent aussi étranges que la façon dont ils apprécient la virginité, le fait que la femme est intacte. Le prix que le prétendant attache à la virginité nous parait établi et comme allant de soi si bien que nous sommes presque embarrassés lorsque nous devons fonder ce jugement. En exigeant que la jeune fille lorsqu'elle se marie avec un homme n'apporte pas de souvenirs de relations sexuelles qu'elle aurait eues avec un autre, on ne fait rien d'autre que de prolonger logiquement le droit de possession exclusive d'une femme qui constitue l'essence de la monogamie et d'étendre ce monopole au passé. Il ne nous est pas difficile alors de justifier, de par nos opinions sur la vie amoureuse de la femme, ce qui paraissait au premier abord un préjugé. Celui qui a apaisé le premier le désir amoureux de la jeune fille longtemps et péniblement retenu et a vaincu, de ce fait, les résistances qu'avaient érigées en elle les influences de son milieu et de son éducation celui-là établit avec elle une liaison durable qui ne pourra plus s'établir avec aucun autre homme. Sur la base de cette expérience la femme entre dans un état de sujétion qui garantit sa possession permanente et tranquille et la rend capable de résister aux impressions nouvelles et aux tentations étrangères. C'est à Krafft-Ebing que l'on doit l'expression " sujétion sexuelle " ; il l'a choisie en 1892 pour décrire le fait qu'une personne peut acquérir un taux particulièrement élevé d'assujettissement et de dépendance vis-à-vis d'une autre personne avec laquelle elle entretient un commerce sexuel. (1) 2 Cette sujétion peut incidemment mener très loin, jusqu'à ce qu'on perde toute indépendance de la volonté et jusqu'à ce qu'on tolère de sacrifier le plus sévèrement son propre intérêt ; pourtant l'auteur n'a pas manqué de le souligner, pour qu'une liaison dure un certain temps il faut qu'il y ait absolument un certain degré d'assujettissement. En fait ce degré de sujétion sexuelle est indispensable pour que se maintienne le mariage civilisé et que soient contenues les tendances polygames qui le menacent ; dans notre communauté sociale, ce facteur rentre régulièrement en ligne de compte. Krafft-Ebing fait remonter l'origine de la sujétion sexuelle à la rencontre entre " amour et faiblesse de caractère d'une intensité exceptionnelle " d'une part et égoïsme sans limites d'autre part. Mais l'expérience analytique ne permet pas de se contenter de cette simple tentative d'explication. On peut reconnaître plutôt comme facteur décisif la grandeur de la résistance sexuelle qui a été surmontée à laquelle s'ajoutent la concentration et le caractère d'unicité du processus qui a permis de la surmonter. Aussi la sujétion est incomparablement plus fréquente et plus intense chez la femme que chez l'homme et chez celui-ci, d'autre part, elle est plus fréquente de nos jours qu'elle ne le fut dans l'Antiquité. Dans les cas où nous avons pu étudier cette sujétion sexuelle chez l'homme elle nous est apparue comme le résultat du fait qu'une certaine femme avait surmonté l'impuissance psychique de cet homme qui lui était alors resté attaché. Ceci semble expliquer beaucoup de mariages insolites et plus d'un grave destin tragique. Ce n'est pas décrire comme il faut le comportement des peuples primitifs, dont nous parlerons maintenant, que de dire qu'ils n'accordent aucune valeur à la virginité, et d'en voir pour preuve le fait qu'ils font déflorer les jeunes filles en dehors du mariage et avant tout rapport sexuel. Il semble bien plutôt que pour Ces peuples aussi la défloration est un acte très important, mais qu'elle est devenue chez eux l'objet d'un tabou, d'un Le tabou de la virginité (1) 3 interdit qu'il faut qualifier de religieux. Au lieu de réserver au fiancé le futur époux de la jeune fille, l'accomplissement de cet acte l'usage veut qu'il lui soi évité. Il n'est pas dans mon dessein de rassembler exhaustivement les témoignages littéraires de l'existence de cet interdit, d'en suivre l'extension géographique et de dénombrer toutes les formes sous lesquelles il se manifeste. Je me contenterai donc de constater qu'il est très fréquent chez les peuples primitifs d'aujourd'hui de rencontrer cette suppression de l'hymen en dehors du mariage qui aura lieu par la suite. Pour expliquer ce tabou de la virginité, on peut envisager divers facteurs que je vais exposer rapidement. En règle générale, lors de la défloration de la jeune fille il y a perte de sang ; la première tentative d'explication repose sur la crainte des primitifs qui tiennent le sang pour le siège de la vie. De multiples prescriptions qui n'ont rien à voir avec la sexualité, témoignent de ce tabou du sang. Il est manifestement lié à l'interdiction du meurtre et forme une protection contre la soif du sang originelle, le désir de meurtre de l'homme des origines. Dans cette conception, on réunit le tabou de la virginité au tabou de la menstruation qui ne fait presque jamais défaut. Le primitif ne peut séparer le phénomène énigmatique de l'écoulement menstruel de représentations sadiques. Il interprète la menstruation tout du moins la première menstruation, comme la morsure d'un animal surnaturel et peut-être comme le signe d'un rapport sexuel avec cet esprit. Il est très souvent possible de reconnaître dans cet esprit celui d'un ancêtre : nous comprenons alors, en nous référant à d'autres connaissances, Le tabou de la virginité (1) 4 que la jeune fille est tabou en tant qu'elle est la propriété de l'esprit de cet ancêtre. Mais, d'un autre point de vue nous sommes avertis de ne pas surestimer l'importance d'un facteur tel que la crainte du sang. Ce facteur n'a pas permis, en effet, de réprimer des coutumes telles que la circoncision du garçon et celle encore plus cruelle de la fille (excision du clitoris et des petites lèvres) qui sont parfois pratiquées par ces mêmes peuples ; il n'a pas permis non plus de supprimer la valorisation qui est faite d'autres cérémonies où l'on verse du sang. Il ne faudrait donc pas s'étonner que cette crainte soit surmontée au profit de l'époux lors de la première cohabitation. Une deuxième explication se détourne également du domaine sexuel, mais elle a une grande portée dans le domaine général. Elle allègue que le primitif est la proie d'une disposition anxieuse persistante et toujours à l'affût, tout à fait semblable à celle dont nous soutenons l'existence pour les personnes atteintes de névrose d'angoisse dans notre théorie psychanalytique des névroses. Cette disposition anxieuse se révélera plus violemment dans des circonstances qui s'écartent d'une façon ou d'une autre de l'habituel en apportant quelque chose de nouveau, d'inattendu d'incompris d'inquiétant. C'est de là que provient le cérémonial, qui s'étendra largement dans les religions ultérieures, cérémonial lié au début de tout nouvel exercice au commencement de toute période temporelle, au premier rejeton de l'homme de l'animal ou de la plante. Les dangers dont se croit menacé l'anxieux ne répondent jamais si fort à son attente qu'au début de la situation dangereuse et c'est alors seulement qu'il convient de s'en protéger. Le premier rapport sexuel dans le mariage étant donné son importance, revendique sûrement d'être amorcé par ces mesures de précaution. Ces deux tentatives d'explication celle qui se base sur la crainte du sang et celle qui se base sur l'angoisse des prémices ne se contredisent pas l'une l'autre mais, au contraire elles se renforcent réciproquement. Le premier rapport Le tabou de la virginité (1) 5 sexuel est certes un acte lourd de conséquences, il l'est d'autant plus si le sang doit y couler. Une troisième explication, celle que Crawley préfère nous fait remarquer que le tabou de la virginité fait partie d'un contexte qui embrasse la vie sexuelle tout entière. Ce n'est pas seulement le premier coït avec la femme qui est tabou : tous les rapports sexuels le sont. On pourrait presque dire que la femme dans son entier est tabou. La femme n'est pas seulement tabou dans les situations particulières qui découlent de sa vie sexuelle : menstruation, grossesse, délivrance et couches; même en dehors de cela, les rapports avec la femme sont soumis à des restrictions si sérieuses et si nombreuses que nous avons toutes les raisons de mettre en doute la prétendue liberté sexuelle des sauvages. Le tabou de la virginité (1) 6 (2) Il est vrai que dans certains cas la sexualité des primitifs ne connaît aucune inhibition ; elle apparaît pourtant d'habitude comme enserrée dans des interdits plus forts que ceux des stades plus civilisés. Dès que l'homme entreprend quelque chose de particulier : une expédition une chasse, une guerre il doit se tenir à l'écart de la femme et surtout des rapports sexuels avec elle ; s'il ne le faisait uploads/Geographie/ 28906-sigmund-freud-le-tabou-de-la-virginite-inlibroveritas-net.pdf
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- Publié le Nov 12, 2022
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