La carte-modèle et les chorèmes Roger BRUNET Les organisations, configurations

La carte-modèle et les chorèmes Roger BRUNET Les organisations, configurations et dynamiques spatiales sont fondées sur la combinaison de structures élémentaires, les chorèmes. La carte-modèle permet de découvrir et de mettre en évidence leurs rôles et leurs arrangements. Elle traduit l'apparition d'un nouveau langage cartographique. " ORGANISATION DE L'ESPACE " POLOGNE Organizations, confi- gurations and spatial dynamics are founded on the arrangement of some elementary structures called choremes. The model map allows to find out and emphasize the ordering and the part they play. It shows the uprise of a new cartographic language. " SPATIAL ORGANIZATION Las organizaciones, configuraciones y dinámicas espaciales se fundan en la combinación de estructuras elementales, los coremas. El mapa-modelo permite descubrir y evidenciar sus funciones y orga- nizaciones. Traduce la aparición de un nuevo lenguage carto- gráfico. " ORGANIZACION DEL ESPACIO " PflTON!& Modèles et chorèmes L'emploi des modèles en science est une affaire sérieuse. Il a commencé à fertiliser la géographie. Curieusement, c'est moins par la représentation graphique que par la formalisation mathématique qu'il s'y est introduit. C'est, en tous cas, bien plus à des considérations de géographie générale qu'à des préoccupations de géographie régionale que se réfèrent leurs utilisateurs. Il est temps que d'autres rencontres et d'autres fécondations se fassent. Plus d'une organisation régionale particulière s'interprète correctement à l'aide des modèles de gravité et de gravitation, par exemple, qui ont à la fois une expression graphique (le modèle auréolaire et orbital) et une expression mathématique (du genre P = a.M.d-1/2, qui n'est qu'un avatar de e = mc2). Tout l'intérêt des modèles est bien de confronter « le cas » à « la loi », que l'on cherche surtout à comprendre le cas, ou que l'on cherche à fonder la loi. Rien, en géographie régionale, qui se comprenne sans lois. Pas de loi qui n'ait à s'affronter au réel pour se valider. La question difficile, et passionnante, est qu'il faut démêler des lois, et faire la part du hasard, de la contingence, qui peut-être n'est que loi non découverte, ou qui est dans la nature des choses. J'ai suggéré, naguère, une approche fondée sur les modèles graphiques, et proposé le concept de chorème, qui commence à se diffuser. Un chorème est une structure élémentaire de l'espace, qui se représente par un modèle graphique. Par un glissement attendu, il est souvent employé pour sa représentation même, le modèle. Il s'est enrichi des « chronochorèmes » suggérés par Hervé Théry, et d'un « atlas chorématique » du même ; ça et là on « chorémise » des territoires. Qu'il s'agisse d'une mode ou d'un nouveau paradigme, l'usage et le temps en décideront. Du moins les principes de base sont-ils mis à l'épreuve par des chercheurs très différents ; et à dure épreuve : celle des élèves, qui s'étend désormais, en la matière, du Primaire à l'Université. Avec quelques règles d'emploi. Les règles de l'art I. Modéliser un espace revient à rechercher ses structures et ses dynamiques fondamentales. Ce n'est ni résumer, ni généraliser, c'est-à-dire poncer peu à peu les « aspérités » jusqu'à produire une figure géométrique encore moins caricaturer. C'est d'abord se demander quels peuvent être les principes en jeu, donc faire des hypothèses. Et éprouver ces hypothèses. Soit, en l'occurrence, vérifier si les modèles de base correspondants s'ajustent plus ou moins à la configuration spatiale exactement comme on fait des ajustements par rapport à un modèle mathématique, une surface de tendance, une corrélation. En quelque sorte, on se donne quelques clés vraisemblables, que l'on essaie l'une après l'autre (1). Naturellement, le mouvement est dialectique, à la fois déductif et inductif. L'examen attentif d'une configuration spatiale met sur la piste d'hypothèses (mouvement ascendant, ou inductif) ; l'information générale dont on dispose sur la position géographique et sur la nature de l'espace considéré met aussi sur la piste d'hypothèses (mouvement descendant, ou déductif). La recherche expérimentale consiste en un certain nombre d'allers-retours et d'ajustements successifs dans les deux sens. 2. Toute configuration spatiale relève de la combinaison éventuellement très complexe de mécanismes simples. Ceux-ci correspondent aux solutions que trouvent les sociétés à des problèmes de maîtrise de l'espace appropriation, gestion, partition, drainage et irrigation (au sens large), conquête ; et aux forces physiques avec lesquelles les sociétés ont à composer : pentes, gradients, étagements, dissymétries, gravité et gravitation. La distance entre des lieux différenciés, et ses frictions en matière de circulation et d'information (qui vont du zéro de la fluidité parfaite à l'infini de la rupture absolue) sont la mesure même du phénomène. 3. Ces configurations se comprennent par le jeu (la combinatoire) dc quelques structures élémentaires. Les formes de représentation de celles-ci sont les formes de base de toute représentation cartographique : point, ligne, aire (ou « polygone »), réseau. Il me semble qu'on peut les classer en sept rubriques générales, ce qui donne le tableau ci-joint, en 28 chorèmes (2). C'est à peu près le nombre des lettres de l'alphabet ; et ce sont ces chorèmes qui font l'écriture du Monde. Chacun signifie : il est signe, avec une forme, et un signifié. Le signifié est le mécanisme en jeu. De la sorte, l'emploi de tel ou tel chorème pour représenter une configuration géographique n'est nullement dépourvu dc sens au contraire, il révèle un processus, un arrangement. C'est par là que la modélisation est un puissant instrument de recherche et de communication en même temps : on découvre un principe d'organisation de l'espace hérité ou vivant, c'est à voir. On découvre, dans les deux sens la trouvaille pour le chercheur, la mise en évidence pour son interlocuteur. 4. L'acte n'est donc ni gratuit ni arbitraire : on ne fait pas ce que l'on veut avec la modélisation graphique, on ne « démontre » pas n'importe quoi. On découvre qu'une clé fonctionne, ou plutôt que certaines clés fonctionnent ensemble ; avec cette complication qu'il ne s'agit pas de simples serrures, mais de réalités sociales (3), et que les « clés » se déforment mutuellement, ce qui demande quelque discernement dans la reconnaissance des formes Le tableau des structures élémentaires de l'espace ou le socle de la chorématique Quatre colonnes pour les figures de base, sept lignes pour les stratégies et les dynamiques essen- tielles, c'est-à-dire pour les finalités et les actions des systèmes spatiaux : 28 chorèmes. Une cons- truction provisoire, à éprouver et enrichir, qui s'est nourrie de la collaboration d'un petit groupe de la Maison de la Géographie (F. Auriac, V. Cabos, C. Carrié, J.P. Cheylan, R. Ferras, J.P. Gamier, 1h. Panouillères, M. Vigouroux, J.P. Volle). réciproquement bousculées. Reste, l'expérience le montre, que plusieurs chercheurs, différents mais correctement informés, aboutissent assez vite à des représentations voisines, au choix des mêmes clés. Encore ne faut-il pas sous-estimer l'ascèse : si certaines cartes-modèles paraissent maintenant « évidentes », elles ne le furent nullement au début du travail. 5. La modélisation graphique s'applique à toutes les échelles : du terroir villageois (ou même du plan de table des maîtresses de maison et des maîtres de cérémonies !) aux zones climatiques du globe. Elle s'applique aussi bien à l'analyse d'une distribution spatiale (celle d'un phénomène ou d'un champ) qu'à celle d'une organisation particulière (une ville, une région, un Etat), ou à la comparaison d'organisations de même nature (les médinas, les deltas, les mégapoles). La procédure Concrètement, la modélisation d'une configuration ou d'un espace particuliers implique une série d'étapes. 1. On se donne une surface de travail, la plus neutre possible. La meilleure est en général le cercle, qui est en quelque sorte isotrope, bien qu'il mette en valeur le centre, et évacue trop bien les voisins. L'hexagone, à cet égard, convient bien parce qu'il s'emboîte avec les voisins. Le carré est utile quand on veut souligner la situation propre de façades distinctes, et d'angles accusés. Les autres formes sont à redouter dans un premier temps le rectangle introduit une dissymétrie initiale, qui peut masquer certains phénomènes - mais qui peut aussi être constitutive du territoire considéré. Le triangle implique des hypothèses préalables sur les saillants ; le trapèze ou le polygone quelconque n'aident pas à comprendre, et leur forme peut masquer l'efficacité de certaines clés. C'est dans un deuxième temps qu'on peut compliquer le modèle pour le rapprocher de la réalité (voire en changer), en observant les effets d'un rentrant, d'un saillant, d'un étirement. On peut, pour la Pologne, choisir un cercle aussi bien qu'un carré ; le rôle du littoral au nord, des Carpates au sud, me fait préférer le carré le résultat de la représentation ne serait pas fondamentalement changé. En revanche, pour la Guadeloupe, on ne comprendrait rien avec une figure unique ; mais on pourrait prendre deux carrés en diagonale, communiquant par un angle, avec Pointe-à-Pitre au contact ; cela accuserait les « bouts du monde », et isolerait un peu Capesterre. 2. On cherche ensuite quels principes de base peuvent bien être en jeu. Dans l'arsenal des chorèmes, il en est qui reviennent souvent - mais différemment selon les sujets - : gradients ou dissymétries en latitude (d'ordre climatique notamment), ou uploads/Geographie/ brunet-les-carte-modele-et-les-coremes.pdf

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